Nouvelles:

Notre mission est de former les citoyens de référence de l'avenir, les aider à coévoluer et créer.

Main Menu
Welcome to Pratiquer les vertus citoyennes. Please login or sign up.

17 Novembre 2024, 05:25:58 PM

Login with username, password and session length

Crier !

jacquesloyal

2007-11-12, 17:03:07
Etre loyal et ne pas mentir

Récents

Membres
Stats
  • Total des messages: 6,821
  • Total des sujets: 4,020
  • En ligne aujourd'hui: 6
  • Record de connexion total: 448
  • (18 Mai 2024, 04:24:13 AM)
Membres en ligne
Membres: 0
Invités: 10
Total: 10

Sahel, Mali, deux voix en discordance du choeur :

Démarré par JacquesL, 26 Janvier 2013, 03:39:26 PM

« précédent - suivant »

JacquesL

Jean-François Bayart, directeur de recherche au CNRS :
http://www.lemonde.fr/idees/article/2013/01/22/chronique-d-une-faillite-programmee-au-mali_1820681_3232.html
CiterChronique d'une faillite programmée au Mali
LE MONDE | 22.01.2013 à 16h02
Par Jean-François Bayart, directeur de recherche au CNRS


La France a une part de responsabilité directe dans l'effondrement de l'Etat malien. Elle a soutenu dès les années 1980 des programmes d'ajustement structurel d'inspiration néolibérale qui ont détruit l'école et la santé publiques et ont ainsi ouvert une voie royale aux institutions islamiques de substitution.

Elle a endossé la libéralisation de la filière coton voulue par la Banque mondiale, qui a accéléré l'exode rural et l'émigration, tout en bloquant cette dernière, alors même que les remises des expatriés sont plus élevées que l'aide publique au développement.

AQMI, ÉRIGÉ EN ENNEMI PRINCIPAL DE LA FRANCE

De toute manière, Nicolas Sarkozy a de facto coupé celle-ci. Il a également contribué à l'affaiblissement de l'autorité du président Amadou Toumani Touré en exigeant de lui la signature d'un accord de réadmission des migrants clandestins, politiquement inacceptable aux yeux de son opinion publique, et en guerroyant sur le territoire malien de pair avec l'armée mauritanienne à partir de 2010, sans même toujours l'en avertir.

Cette militarisation de la question du nord du Mali a conféré à Al-Qaida au Maghreb islamique (AQMI), érigé en ennemi principal de la France à l'extrémité d'un "arc de crise" supposé s'étendre du Pakistan à la Mauritanie, des lettres de noblesse anti-impérialistes qui ont facilité son recrutement de combattants. Elle a aussi gonflé le flot des déplacés et des réfugiés en aggravant la pauvreté des populations sahariennes.

MAUVAISE POLITIQUE-FICTION ?

Le coup de grâce est venu en 2011 : la guerre de Libye a conduit les Touareg maliens enrôlés dans les rangs du colonel Kadhafi à rentrer au pays avec plus d'armes que de bagages. On connaît la suite : la proclamation de l'indépendance de l'Azawad une fois que fut consommée la déroute de l'armée malienne - supposée être un fleuron de la coopération militaire française, soit dit en passant - et l'OPA hostile des djihadistes sur le nord du Mali.

En outre, la guerre de Libye a désorganisé les intérêts économiques des réseaux d'affaires du colonel Kadhafi dont les investissements conséquents contribuaient à la stabilisation du Sahel.

Enfin, la prohibition des narcotiques et l'endiguement coercitif de l'émigration que mettent en oeuvre les autorités françaises en dépit de l'inanité de ces politiques publiques procurent aux trafiquants deux formidables rentes de situation et risquent fort d'avoir les mêmes effets au Sahel qu'en Amérique centrale : le déchaînement d'une violence paramilitaire à laquelle seront parties prenantes les grandes organisations criminelles latino-américaines, italiennes et espagnoles, de pair avec différents mouvements armés locaux.

Mauvaise politique-fiction ? Le scénario se déroule déjà sous nos yeux avec la criminalisation de la Guinée-Bissau, l'implication croissante des autres Etats de la région dans ces trafics et le financement que le Mouvement pour l'unicité et le jihad en Afrique de l'Ouest (Mujao) en tire au Mali.

La France, les pays occidentaux se sont trompés sur le Sahel depuis trente ans et récoltent ce qu'ils ont semé.

Jean-François Bayart, directeur de recherche au CNRS

Bertrand Badie, professeur des universités à Sciences Po Paris :
http://www.lemonde.fr/idees/article/2013/01/24/l-operation-au-mali-marque-un-perilleux-retour-aux-conflits-d-antan_1822122_3232.html
CiterL'opération au Mali marque un périlleux retour aux conflits d'antan
LE MONDE | 24.01.2013 à 16h43
Par Bertrand Badie, professeur des universités à Sciences Po Paris


Il était un temps où l'entreprise était simple et facilement identifiable : la guerre opposait deux ou plusieurs Etats qui étaient en compétition de puissance. Cet affrontement paroxystique entre Etats, dotés de diplomates et de soldats, d'institutions et de frontières, et d'une propension à négocier à un moment donné, est au centre de notre histoire européenne. Elle en est même fondatrice, c'est bien ainsi que se sont constituées la carte et même les règles de notre Europe moderne.

Depuis quelques jours, on nous parle d'une "guerre au Mali" : en est-ce bien une si l'on fait preuve de rigueur ? L'affrontement met en scène un vieil Etat européen, un Etat failli africain et des bandes armées sur lesquelles croulent des appellations diverses et mêlées dans une synonymie des plus approximatives.

PAS DE TERRITOIRE FIXE, NI INSTITUTIONS, NI DIPLOMATES

Une chose est sûre : ces bandes ne constituent pas des Etats, n'ont pas de frontières, pas de territoire fixe, ni institutions, ni diplomates, ni soldats au sens classique ; elles n'ont même pas d'intérêt à négocier, tant leur survie est intimement liée à la pérennité des conflits. Ne nous égarons pas dans des comparaisons trop faciles et illusoires.

Il serait temps d'en tenir compte : cette forme nouvelle de conflictualité met en scène une violence surgie de la profondeur de sociétés fortement meurtries, mal intégrées ou pas intégrées du tout dans des Etats qui sont en décomposition ou en faillite depuis plus d'un demi-siècle.

Aux sources de l'affrontement, nulle rivalité de puissance, mais des échecs, des frustrations, des exclusions, des humiliations que sont venus gérer des entrepreneurs de violence qui y trouvent la clientèle idéale.

Le radicalisme religieux y sonne naturellement comme une réponse attendue à une démission complète, totale, du politique national et surtout international. A défaut d'être construit en société politique, le Sahel s'est constitué, au fil des décennies, sous le regard indifférent ou complice des uns et des autres, en société guerrière, comme l'Afghanistan, comme la Corne de l'Afrique, comme le Congo et d'autres encore...

On prétend trop vite que les entrepreneurs de violence sont des acteurs isolés qu'un usage judicieux de la force doit permettre de "détruire". Imprudence dangereuse : une société guerrière ne se combat pas comme un Etat rival.

N'oublions pas que l'essentiel de sa rationalité se trouve, contrairement aux Etats, dans la banalisation de la violence ; la guerre qu'on lui porte la renforce et l'installe dans son jeu plus qu'elle ne l'éteint : on l'a déjà cruellement expérimenté sur d'autres terrains desquels de grandes puissances ont dû se retirer sans avoir vaincu.

CES SOCIÉTÉS LAISSÉES POUR COMPTE PAR LES TRANSFORMATIONS POSTCOLONIALES

Les Etats modernes ont appris, au fil des siècles qui nous séparent de la Renaissance, à combattre leurs semblables qui recevaient l'appellation claire d'"ennemis". Ils n'ont jamais su s'opposer avec succès à des acteurs surgis des méandres d'une société en crise, quelle que soit l'orientation de ces derniers, généreuse ou criminelle, parfois les deux à la fois...

Depuis longtemps, il devenait urgent de prendre en compte cette autre donnée de la mondialisation que constitue l'irruption des sociétés dans le jeu international, en particulier de ces sociétés laissées pour compte par les transformations postcoloniales.

Qui pourtant s'est intéressé au Sahel ? Qui s'est inquiété des échecs de la construction du politique en Afrique ? Qui, au contraire, n'a pas flatté et encouragé ses faiblesses pour continuer à dominer ?

Ces manquements coupables ressortent aujourd'hui sous les apparences d'un enchaînement fatal et diabolique qu'on croit naïvement pouvoir traiter par une guerre inadaptée, alimentant en fait des cercles vicieux de violence que seule la politique pourrait guérir, là où l'usage de la force risque de les enrichir.

Deux paramètres doivent être présents à l'esprit. D'une part, l'entrepreneur de violence n'est pas chevillé à un territoire, mais mobile sur des espaces sociaux vastes et dont il sait qu'ils lui sont favorables : telle est bien la nature du Sahel, dont l'écologie et la misère sociale et politique sont assez affirmées pour favoriser ceux qui s'inscrivent hors du jeu étatique.

LA DÉSESPÉRANCE Y EST TRAGIQUEMENT COMPENSÉE PAR L'ENRÔLEMENT

D'autre part, cet entrepreneur sait mobiliser en sa faveur un jeu social d'une étonnante densité, fait de réseaux de toute nature, mafieux ou non, d'une économie de guerre très au point, de populations que l'état d'abandon rapproche de ces pratiques de violence sous de multiples formes : la désespérance y est tragiquement compensée par l'enrôlement, y compris d'enfants, dans des bandes qui offrent vêtements, nourritures et comme un dérisoire semblant d'existence...

L'Afghanistan, la Somalie et d'autres cas de même nature auraient dû nous apprendre que la prétendue "communauté internationale" n'a trouvé à ces drames que de mauvaises solutions, souvent pires que le mal, dans la mesure où elles en ont amplifié les effets.

D'abord, parce qu'il n'y a pas de "communauté internationale", que tout a été fait depuis 1945 pour que les Nations unies n'interviennent pas en leur nom, mais laissent faire les autres, les puissants, ceux-là mêmes qui sont regardés avec le plus de suspicion, et que les entrepreneurs de violence attendent au tournant...

EST-IL CERTAIN QUE L'ALGÉRIE AIT ENVIE DE DEVENIR LE PAKISTAN DU MALI

Ensuite, parce que la régionalisation des solutions, prônée un temps et encore maintenant, suscite d'évidentes contradictions : dans un conflit qui, par définition, n'a pas de frontières, la première victime de toute internationalisation est d'abord le voisin.

Est-il certain que l'Algérie ait envie de devenir le Pakistan du Mali ? Aussi, parce que les Etats, les Etats-Unis en tête et l'Allemagne avant eux, comprennent de mieux en mieux les risques encourus dans ce genre d'aventure.

Enfin, parce que la guerre tue un peu plus l'imagination et la générosité politiques dont nous avons besoin pour avancer, qu'un gouvernement de gauche se devrait d'expliciter et de promouvoir à la face du monde. Il était un temps où le général Faidherbe (1818-1889) poursuivait des bandes armées qui s'attaquaient aux forts du Sahel et qui professaient déjà un islam radical. Qu'avons-nous fait depuis ?

Bertrand Badie, professeur des universités à Sciences Po Paris, auteur de "Quand l'Histoire commence" (CNRS éd., 64 p., 4 €)

Bertrand Badie, professeur des universités à Sciences Po Paris

A défaut d'études sociologiques du Sahel, qui seraient inséparables d'une étude ethnique, on se contentera de cela.
Au cas où on n'aurait pas trop d'idées sur l'état de la végétation là bas, quelques photos :
http://www.lemonde.fr/afrique/portfolio/2013/01/26/en-route-pour-konna_1822965_3212.html
Et par la même occasion une idée du brigandage.

JacquesL

#1
Etude du conflit entre politique et religieux, entre islam malékite de tradition locale, et wahhabite d'importation saoudite.
http://www.lemonde.fr/idees/article/2013/01/28/au-mali-la-guerre-des-islamismes_1823540_3232.html

CiterDémocratie exemplaire hier, le Mali est considéré par les Occidentaux comme un Etat failli. Comment expliquez-vous pareille descente aux enfers ?


Le Mali a la particularité d'être une ex-colonie française sans faire partie de la "Françafrique" : les intérêts économiques français y sont peu présents et le pays s'était rapproché de l'URSS lors de son indépendance en 1960.
Mais en 1991, lorsque le pays a connu sa "révolution démocratique" – fin du parti unique, élections transparentes –, il a incarné le discours de La Baule de François Mitterrand qui prétendait privilégier les régimes vertueux. Le Mali est devenu le faire-valoir d'une politique française différente en Afrique.


A l'époque, on magnifiait le rôle actif de la société civile malienne. C'était une illusion ?

La démocratie, c'est un grand mot qui masquait le libéralisme économique et l'affaiblissement de l'Etat. Sous prétexte de le désendetter, on a déchargé l'Etat qui a dû alléger ses politiques sociales. La santé, l'école, le développement ont été confiés à une "société civile" artificielle, travaillant pour des ONG financées de l'extérieur. Ce fonctionnement a nourri une nouvelle bourgeoisie déconnectée de la réalité. L'idée républicaine, avec son volontarisme national, a alors vacillé.


Les religieux semblent avoir prospéré du fait de la démocratisation...

Oui, la sphère religieuse a été la grande bénéficiaire de ce processus. Elle a pu s'autonomiser dans l'espace public à travers la création de mosquées et l'émergence de personnalités charismatiques.


Les chefs de l'islam n'ont cessé d'empiéter sur le champ politique. Quel poids représentent-ils face à l'Etat ?

L'Etat malien redistribue peu. Il gouverne par une élite composée de gens qui "savent" et dont l'action est perçue comme prédation. La société malienne vit en équilibre entre ce pouvoir de prédation de l'Etat, et un pouvoir de pondération que l'Etat organise en partie : le religieux.

Le processus démocratique a créé un espace de compétition pour les religieux car il a verrouillé le débat politique avec une idéologie consensuelle. Un "espace d'interpellation démocratique" entre la société civile et l'Etat avait été formalisé par le régime, mais il fonctionnait à huis clos. De ce fait, les débats sociétaux ont glissé vers la sphère religieuse.

Les seuls espaces d'interpellations démocratiques sont les grandes manifestations religieuses, comme le Maouloud où les prêcheurs adressent les remontrances à l'Etat devant des dizaines de milliers de fidèles. Un rassemblement organisé en janvier 2012 au grand stade de Bamako, a réuni 120 000 personnes, soit 1 % de la population du pays ! En déplaçant des foules pareilles, les religieux musulmans ont acquis un pouvoir autonome. On a abouti à une polarisation entre l'Etat et l'islam...


Alors que la Constitution malienne protège explicitement "la laïcité". Comment expliquez-vous ce paradoxe ?

La démocratisation, en introduisant de la compétition dans la sphère islamique, a entraîné le transfert de la chose politique vers le religieux. C'est là que l'on discute du statut de la femme, de l'excision, de la polygamie, de la peine de mort, du chômage, de l'absence de justice. Il n'y a pas d'autre lieu où le peuple peut débattre, dans les langues nationales. N'oublions pas que 75 % des Maliens sont analphabètes et 92 % ne maîtrisent pas le français.

En 2009, le président Amadou Toumani Touré avait dû retirer sa réforme du code de la famille qui allait dans le sens de l'égalité hommes-femmes. Pourquoi cette réforme modérée a-t-elle rencontré une telle opposition ?

Parce que la norme islamique en vigueur au Mali, c'est la charia. Certes, il existe une loi civile, mais dans la réalité, on se marie, on est inhumé, on hérite selon la charia. La loi n'intervient qu'en cas de conflit. Il n'est pas question de couper des mains ou de flageller, mais la charia régule la vie sociale. Les droits nouveaux pour les femmes que prévoyait la réforme contredisent ces règles de l'islam, d'autant qu'elles sont imposées sous pression des bailleurs de fonds étrangers.


Quelles sont les composantes de l'islam malien au moment du coup d'Etat de mars 2012 ?

L'islam sunnite historique au Mali, celui auquel se réfère 80 % de la population, est malékite. Il propose une doctrine à visée universelle apte à s'adapter aux cultures locales. A partir de 1945, un réformisme sunnite, le wahhabisme, venu d'Arabie saoudite a attaqué cette tradition, en prêchant une réforme de l'éducation islamique qui vise une ré-arabisation de l'islam et, en ce sens, instaure ce que l'on appelle aujourd'hui le salafisme.

A l'indépendance, en 1960, le régime socialiste de Modibo Keita (1915-1977) a muselé les wahhabites et imposé la laïcité. Mais la dictature conservatrice de Moussa Traoré qui lui succède en 1968 a inversé la tendance en favorisant les wahhabites qui avaient soutenu son coup d'Etat. Avec l'instauration de la démocratie en 1991, la création de partis religieux est refusée et les malékites sont remis en selle.


Pourtant, le Haut Conseil islamique du Mali (HCIM) est dominé par un wahhabite, Mahmoud Dicko...

Oui, cet imam a conquis la présidence de cette instance en 2008 et a acquis une popularité en obtenant le retrait du nouveau code de la famille déjà voté ! En 2011, il a réussi à faire nommer un membre du HCIM à la présidence de la commission chargée d'organiser les élections. Après le coup d'Etat de 2012, son immixtion dans la sphère politique s'est accentuée avec la création d'un "ministère des affaires religieuses et du culte" confié aussi à un membre du HCIM. Ainsi, un "parti wahhabite" défendant l'idée d'une République islamique s'est constitué au Mali, avant même l'offensive des islamistes du nord.


Quelle position a adopté l'autre obédience de l'islam malien ?

L'ennemi historique des wahhabites maliens, c'est Chérif Ousmane Madani Haïdara et son mouvement Ansar Eddine qui, fin 2011, a créé sa propre organisation rassemblant les responsables malékites. Lorsqu'un mouvement rebelle combattant au nord a adopté le même nom, sans aucun lien, l'image de Chérif Haïdara a failli être brouillée.

Mais en juillet 2012, alors que Mahmoud Dicko hésitait à condamner la destruction des mausolées de Tombouctou, Chérif Haïdara l'a dénoncé fermement. Alors que Mahmoud Dicko disait vouloir discuter les modalités raisonnables d'application de la charia exigée par les rebelles, Chérif Haïdara a toujours affirmé son refus de voir la charia politique au Mali. Défendant la laïcité, il souligne que des non-musulmans vivent au Mali et qu'il faut garantir leurs droits.


Comment ces deux principaux courants de l'islam se sont-ils positionnés depuis l'intervention de la France ?

Chérif Haïdara considère qu'il faut lutter par tous les moyens contre cette charia politique ; quiconque aide à restaurer la souveraineté est bienvenu. Sa démarche est identitaire, il défend un islam afro-centré, sans complexe à l'égard des Arabes et autonome vis-à-vis de l'Etat. Mais cela ne l'empêche pas d'accueillir favorablement l'intervention française pour autant qu'elle vise à aider à rétablir l'unité du pays.


Et Mahmoud Dicko ?


Il n'a eu de cesse de vouloir négocier "entre musulmans" avec les rebelles d'Ansar Eddine, conformément à son idéal de République islamique. Mais depuis que la rébellion est passée à l'offensive, il a affirmé son soutien à l'armée malienne, avant de rallier le sentiment populaire en affirmant "soutenir sans réserve l'intervention française". Maintenant, il fustige les déclarations du président égyptien Mohamed Morsi et souligne que l'intervention française n'est pas une "guerre contre l'islam", s'inscrivant là dans le conflit occulte que se livrent l'Arabie saoudite et le Qatar sur le front des islamismes.


Existe-t-il un soutien populaire aux islamistes du nord ?

A l'égard des rebelles et de leur tentative d'envahissement du pays, non. Mais à l'égard de la refondation de l'Etat sous l'égide d'une norme islamique, peut-être. A Bamako, une grosse minorité de la population ne cache pas cette aspiration.


La guerre va-t-elle trancher une rivalité entre islam africain et islam arabe ?

Non, la question ne peut pas être posée en ces termes. Le nord comme le sud du Mali sont de tradition malékite, tandis que les deux principales entrées du wahhabisme sont Bamako, au sud, et Gao, au nord. L'enjeu est le choix entre un islam qui se vit comme ouvert sur la diversité des cultures et un autre qui le vit de façon arabisée en idéalisant "l'Age du Bonheur" des premiers temps de l'islam.

Quelles sont les issues institutionnelles possibles ? Une restauration du régime antérieur discrédité est peu probable et celle de la création d'une République islamique n'est plus en phase avec les événements. Reste une troisième voie : la reprise du projet de décentralisation qui passerait cette fois par une certaine autonomie des régions. Ce serait le plus souhaitable. Mais la guerre risque de désigner un vainqueur : l'armée malienne va capitaliser la victoire et, avec elle, la classe politique qui la soutient. Un risque de restauration existe. On ne va pas inventer en quelques mois une élite sociale.


Quel impact la guerre aura-t-elle sur les religieux ? Certains ne risquent-ils pas de choisir le chaos ?

Vu de Bamako, la guerre vise la reconquête du pays et sa libération. L'idée d'un retour à la distinction entre politique et religieux domine. Mais l'activisme wahhabite ne va pas disparaître du jour au lendemain. Il reste à savoir si la guerre aura sur lui un effet destructeur ou mobilisateur.

Quand les djihadistes sont entrés dans les grandes villes du nord, ils ont débarrassé les populations des exactions des Touareg du Mouvement national de libération de l'Azawad (MNLA). Ils ont rétabli une forme de droit, d'ordre et de justice. Mais ils ont aussi forcé les femmes à se voiler et interdit de fumer. Aujourd'hui, ces Maliens du nord vivent les événements avec un sentiment de libération. Le problème, c'est l'après. Ces populations, qui sont passées du Mali opaque d'Amadou Toumani Touré à la charia, n'accepteront peut-être pas que les choses redeviennent comme avant.


L'histoire donne-t-elle une légitimité particulière aux Français pour intervenir au Mali ?

L'accueil des soldats français a été spectaculaire, alors qu'il existait des crispations, dont celles liées à l'immigration ou au procès colonial. Des drapeaux français ont été fabriqués sur place en toute hâte. C'est un business, mais aussi une réponse à une forte demande. La réaction populaire s'explique par le sentiment des Maliens d'avoir frôlé la catastrophe. La France a réveillé des liens historiques que les deux pays s'attachaient à ne pas manifester. L'histoire s'est renouée. Quelle que soit la manière dont ce sentiment va évoluer, ce rapprochement laissera des traces.


La crise n'est-elle pas liée aux frontières tracées au XIXe siècle par les colonisateurs français ?

Non, les frontières n'expliquent pas le conflit. De nombreux pays ont des frontières artificielles, à commencer par la France. Au Mali, leur tracé a été plutôt bien fait : il correspond aux réalités sociologiques, aux alliances tribales. Le problème est ce qui se passe à l'intérieur. Il faut donner au nord la capacité économique d'exister, valoriser les cultures locales en échappant au rouleau compresseur qu'est le roman national de l'Empire du Mali.


L'Etat est pourtant multiséculaire !

Oui, l'Empire du Mali date du XIIIe siècle, et les élites considèrent qu'il aurait inventé une diplomatie internationale spécifique et des droits de l'homme bien avant l'Occident. Mais c'est une référence plus mythique qu'historique et il n'a jamais été le creuset culturel du Nord.

L'enjeu intellectuel majeur de la reconstruction du Mali est là : redéfinir un autre roman qui mêle plusieurs épopées dont les uns et les autres pourraient être fiers. Ce ne sera pas facile car le Mali s'est culturellement rétracté depuis ces dernières années et les gens ouverts sur l'extérieur sont souvent traités d'" apatrides" par des "patriotes " autoproclamés. Les jeunes, sans perspectives d'emploi, résistent à cet enfermement. Ils portent des jeans "taille basse", font du rap, naviguent sur Internet, tout en étant fiers d'être Maliens. Il faudra les écouter, les aider à émerger.


Comment la France peut-elle aider à reconstruire un Etat ?

L'intervention nous donne des responsabilités énormes et coûteuses car le Mali n'a pas les ressources pour se reconstruire. Il doit être pensé par ceux qui y ont intérêt. C'est triste mais c'est ainsi. Ce pays devra être accompagné financièrement. Pourquoi la France, qui n'y a guère d'intérêt économique, ne serait-elle pas légitime à le faire ? Au lieu d'invoquer l'histoire commune passée, imaginons le futur !

Propos recueillis par Philippe Bernard

Repères biographiques


Gilles Holder, chargé de recherche au CNRS, membre du Centre d'études des mondes africains et du Centre d'études africaines (EHESS), Gilles Holder est anthropologue. Il travaille depuis plus de vingt ans au Mali, dans les régions de Mopti et de Bamako. Il a coordonné un programme sur les espaces publics religieux (2009-2012) et a organisé le colloque "L'Afrique des laïcités" à Bamako en 2010. Il a publié Poussière, ô poussière ! : la Cité-Etat sama du pays dogon (éd. Société d'ethnologie, 2002) et L'Islam, nouvel espace public en Afrique (Karthala, 2009).

JacquesL

Par Olivier Roy, directeur d'études à l'EHESS

http://www.lemonde.fr/idees/article/2013/02/04/vaine-strategie-francaise-au-mali_1826781_3232.html
CiterVaine stratégie française au Mali


Les buts de guerre officiels de la France au Mali sont de combattre le "terrorisme islamique" et rétablir l'intégrité territoriale du Mali. Le problème est de savoir quel est le rapport entre les deux : l'intégrité du Mali est-elle menacée par le "terrorisme islamique" ?
Cela dépend bien sûr de ce que l'on appelle "terrorisme islamique", et l'on voit ici que l'on n'est pas sorti de la confusion sémantique et politique introduite par l'administration Bush lorsqu'elle a lancé le slogan de la "guerre contre le terrorisme" après le 11-Septembre.

Sous le vocable de terrorisme islamique on met à peu près n'importe quoi : Al-Qaida bien sûr, mais aussi des partis qui sont avant tout nationalistes, comme le Hamas palestinien, des mouvements locaux voulant établir la charia, comme les talibans afghans ou l'Ansar Eddine malien, voire n'importe quelle communauté religieuse parlant de charia islamique.

L'INTÉGRITÉ TERRITORIALE DU MALI EST MISE EN CAUSE

Or cette confusion interdit de définir une stratégie claire et de long terme, car elle ne permet pas de distinguer entre des acteurs légitimes, avec qui on peut et doit négocier, même s'ils s'opposent à l'Occident, et des terroristes dont le seul objectif est la confrontation, et qui n'ont aucune base sociale.

L'intégrité territoriale du Mali est mise en cause d'abord et avant tout par les mouvements touareg du nord du pays, qui considèrent, à tort ou à raison, ne pas être assez pris en compte par les gouvernements maliens, avant tout tenus par les Africains noirs du sud.

Il s'agit ici d'une vieille revendication de plus de trente ans, conséquence du partage colonial entre l'Afrique du Nord, tenue par des Etats avant tout arabes, et l'Afrique centrale, tenue par des Africains noirs.

Les Touareg, peu nombreux mais présents sur un territoire immense aux confins de ces deux ensembles, ont été les perdants de ce partage et se manifestent au Tchad, au Mali, au Niger, voire en Algérie et en Libye depuis des décennies.

Exclus du pouvoir, ils ont trouvé dans la contrebande transfrontalière de nouvelles ressources économiques ; de tradition guerrière, ils ont profité des conflits régionaux (dont la révolution libyenne) pour trouver les moyens de s'armer ; enfin, la référence récente à l'islam permet à certains d'apparaître comme porteurs d'un message universel, au-delà de leur identité tribale, et de trouver des alliés dans les populations africaines.

Mais la question touareg relève de tensions ethno-nationales, et pas de l'islamisme. Ce problème ne peut être résolu que par une négociation politique visant à un partage plus équitable du pouvoir.

De plus, pour rétablir l'intégralité territoriale du Mali, il faudrait qu'il y ait un Etat malien central stable, solide et reconnu, ce qui n'est pas (ou plus) le cas. Le risque est qu'au lieu de rétablir un Etat pour tous, l'intervention française redonne le pouvoir à une faction, peu soucieuse de le partager, et aggrave donc les tensions ethniques.

Un second problème, qui va bien au-delà du Mali, est la radicalisation religieuse de mouvements qui sont avant tout ethnonationalistes. Les mouvements touareg étaient représentés par des groupes plutôt séculiers – comme l'est le Mouvement national de libération de l'Azawad (MNLA), à l'origine de la révolte –, mais ils se font doubler par des mouvements salafistes, qui sont aussi touareg, comme Ansar Eddine, qui mettent en avant la mise en œuvre de la charia et la construction d'un émirat islamique, qui comme par hasard occupe de fait les zones revendiquées par les mouvements nationalistes.

ISLAMISATION D'UNE REVENDICATION NATIONALISTE OU RÉGIONALISTE

C'est un phénomène récurrent dans le monde musulman depuis les années 1980 : les moudjahidine afghans, suivis par les talibans, le Hamas palestinien, le Hezbollah libanais, par exemple, incarnent cette islamisation d'une revendication nationaliste ou régionaliste.

Curieusement, c'est dans les zones tribales - Afghanistan, Pakistan, Yémen, Mali - que la mutation de mouvements régionalistes en mouvements religieux salafistes est la plus forte. La revendication autonomiste ou ethnique se double d'une volonté de créer des "émirats islamiques" ; le sud de l'Afghanistan est un bon exemple d'une société tribale (les Pachtouns) qui se donne comme expression de son identité ethnique un mouvement religieux, les talibans.

Sans doute est-ce parce que seule la référence à la charia permet de dépasser les clivages tribaux, sans pour autant abolir le système tribal. C'est un phénomène ancien dans la mobilisation des tribus - que l'on pense au Mahdi soudanais des années 1880 ou à la guerre du Rif de 1920 à 1925. Mettre ces mouvements dans la case "terrorisme islamique" est absurde et dangereux.

La récente scission d'Ansar Eddine au Mali entre la tendance salafiste et celle qui se revendique d'abord de l'identité touareg (Mouvement islamique de l'Azawad), scission annoncée le 24 janvier 2013, est une claire indication que ce triple niveau (charia, coalition tribale, revendication ethnico-nationale) peut se recomposer de manière variable autour d'un des trois éléments.

RIEN DE NOUVEAU DANS LES VA-ET-VIENT D'AQMI, DU MUJAO

Que vient faire Al-Qaida là-dedans ? Il n'y a rien de nouveau dans les va-et-vient d'Al-Qaida au Maghreb islamique (AQMI), du Mujao ou de n'importe quel petit groupe de djihadistes internationalistes qui évoluent à leur guise dans le Sahel. Les groupes liés à Al-Qaida sont par excellence des nomades, mais qui nomadisent d'abord dans l'espace global : ils ne sont pas réellement ancrés dans les sociétés où ils opèrent et rassemblent plutôt des "déracinés" souvent d'origine étrangère et par définition très mobiles, d'autant plus qu'ils sont peu nombreux.

Le schéma est le même depuis une vingtaine d'années : Al-Qaida est composée de djihadistes internationaux et n'exprime jamais un mouvement social ou politique local. C'est ce qu'illustre la composition du groupe ayant attaqué le complexe gazier d'In Amenas en Algérie : des gens de toutes origines, de toutes races et incluant des convertis.

AQMI n'a pas d'ancrage sociologique dans le Sahel, mais s'implante grâce à son alliance avec des forces locales, en général salafistes, mais aussi avec des éléments délinquants.

Ce fut le cas en Afghanistan et au Pakistan. Al-Qaida agit essentiellement dans les périphéries du monde musulman - Bosnie, Tchétchénie, Afghanistan, Yémen, Sahel - et rarement au coeur du Moyen-Orient (à part l'épisode bref d'Abou Moussab Al-Zarkaoui en Irak).

AL-QAIDA PARASITE DES CONFLITS LOCAUX

Al-Qaida n'est pas un mouvement politique qui cherche à établir de vrais émirats islamiques locaux : son objectif, c'est avant tout l'Occident, comme le montre l'attaque contre le complexe gazier algérien, où seuls les expatriés non musulmans furent ciblés.

La stratégie d'Al-Qaida est globale et déterritorialisée : il s'agit de multiplier les confrontations, mais toujours en visant l'Occident.

En un mot, Al-Qaida parasite des conflits locaux, qui ont leur logique propre, pour les radicaliser dans un sens anti-occidental et pour attirer l'Occident dans le piège de l'intervention.

L'administration Bush n'avait pas compris cette dimension déterritorialisée d'Al-Qaida et a cherché à réduire les sanctuaires potentiels en contrôlant du territoire par le déploiement de troupes au sol (intervention en Afghanistan en 2001, sans parler de l'Irak en 2003).

Or cette stratégie est vaine : pour occuper du territoire, il faut des centaines de milliers de soldats, et, quand ils sont en place, Al-Qaida est déjà partie (comme en 2001 en Afghanistan, et ce sera le cas au Mali). En ce sens, la stratégie antiterroriste d'Obama - ne pas engager l'armée, mais utiliser les drones, le renseignement et les forces spéciales -, quelles que soient les réticences qu'on peut avoir par rapport à sa légalité ou plus encore à sa moralité, est plus efficace et moins coûteuse, car elle est adaptée à la nature d'Al-Qaida.

Si la France espère mettre fin à la sanctuarisation d'Al-Qaida au Maghreb par une occupation d'un territoire, c'est absurde : le groupe ira se reconstituer un peu plus loin.

Et si le but est la destruction de ces groupes, c'est tout aussi absurde : vu le faible nombre de combattants qu'ils comprennent (quelques centaines), vu leur recrutement international, rien de plus facile pour eux que de bouger, passer les frontières, ou revenir en jean et sans barbe à Toronto ou à Londres.

Al-Qaida est une nuisance, mais pas une menace stratégique. Pour lui ôter une grande part de sa puissance, il suffit de faire en sorte que les forces locales que le mouvement veut parasiter n'aient plus aucune bonne raison de les protéger.

C'est ce qui n'est pas arrivé en Afghanistan en 2001, quand le mollah Omar, contre l'avis de ses conseillers, a refusé d'extrader Ben Laden ; c'est ce qui est arrivé en Bosnie et en Irak, où les combattants locaux ont eux-mêmes fini par chasser les djihadistes étrangers ; c'est ce qui peut arriver au Yémen et en Syrie, c'est ce qui devrait arriver au Mali si on négocie avec les forces locales.

Mais pour cela, il ne faut pas leur coller l'étiquette "terroristes avec qui on ne discute pas". Or rien n'a été dit à leur adresse ; on peut seulement espérer qu'en coulisses, les canaux de communication fonctionnent.

Derrière la rhétorique de la guerre contre le terrorisme, ce qu'il faut, c'est une approche politique de la situation.

Olivier Roy, directeur d'études à l'EHESS

Olivier Roy, professeur agrégé de philosophie et diplômé de l'Institut national des langues et civilisations orientales (Inalco) ; directeur d'études à l'Ecole des hautes études en sciences sociales (EHESS) et de recherche au CNRS ; spécialiste de l'islam politique. Depuis 2009, il dirige le Programme méditerranéen à l'Institut universitaire européen de Florence (Italie). Auteur de nombreux ouvrages, dont "L'Asie centrale contemporaine" (PUF, 2010), "La Laïcité face à l'islam" (Stock, 2005).

http://www.lemonde.fr/idees/article/2013/02/04/les-raisons-de-l-engagement-de-la-france-au-mali_1826782_3232.html
CiterLes raisons de l'engagement de la France au Mali

D'abord l'urgence. les islamistes menaçaient Bamako et mettaient en danger l'existence du Mali. Les populations du sud du pays leur sont défavorables ; le gouvernement en place a demandé l'intervention de la France ; la chute de Bamako aurait mis à mal la crédibilité de Paris et ouvert une boîte de Pandore.

Il existe deux autres éléments d'explication : d'abord, le besoin de François Hollande d'apparaître comme un "chef", pour que cesse la comparaison avec un Nicolas Sarkozy activiste qui a eu "sa" guerre en Libye.

Puis la pression de l'armée de terre. Elle a mal vécu l'Afghanistan, car les Américains traitent leurs alliés en auxiliaires exclus des décisions.

"GUERRE JUSTE", SOIT DE "GUERRE NÉCESSAIRE"

En Libye, elle a eu l'impression de jouer les mercenaires sur un coup de tête du président Sarkozy. Le corps des officiers a souvent une vision "civilisationnelle" des conflits et se sent plus serbe que bosniaque : il se méfie de tous les "printemps arabes", qui voient les islamistes arriver au pouvoir. Enfin, la guerre de Libye a mis de côté l'armée de terre, qui veut réaffirmer sa prééminence. Une dimension "corporatiste" à ne pas négliger.

Après le retrait d'Afghanistan, l'armée de terre montre au Mali qu'elle est indispensable. Une absence prolongée d'opérations extérieures (OPEX) pourrait conduire l'opinion à s'interroger sur l'utilité des dépenses militaires. Ensuite, elle retrouve une cause : on protège la société malienne du terrorisme islamique. Enfin, elle retrouve un champ de bataille qu'elle connaît bien.

Cette intervention a aussi trouvé un relatif consensus en France dans les médias et parmi les intellectuels, où l'on parle soit de "guerre juste", soit de "guerre nécessaire". Il est de bon ton de se gausser de la guerre en Libye, qualifiée d'aventuriste au prétexte qu'elle l'aurait laissée dans l'anarchie tribale.

Cette intervention est désignée comme la cause du soulèvement du nord du Mali, qui serait dû au retour des mercenaires touareg embauchés par Kadhafi. Et, pourtant, ce qui se passe en Libye n'a rien de catastrophique, car les Libyens gèrent plutôt bien leur "printemps arabe". Enfin, la question touareg n'est pas une conséquence de la chute du régime de Kadhafi, considéré comme une nuisance pour ses voisins.

TERRORISTES PARTISANS DE LA CHARIA

Néanmoins, la guerre du Mali est perçue comme l'antithèse de celle de Libye, car elle remettrait les choses à l'endroit : on lutte pour défendre la laïcité, l'intégrité territoriale contre des terroristes partisans de la charia.

Cette guerre conforte le paradigme du choc des civilisations et de la menace islamique, un paradigme brouillé par le "printemps arabe". Gauche laïque comme droite identitaire ont de bonnes raisons de soutenir la guerre. C'est parce que cette guerre apparaît "lisible" qu'elle est vendable à l'opinion. Mais, sur le terrain, c'est plus compliqué : il faudra autre chose que des clichés pour sortir du conflit.

Derrière la géostratégie de pacotille qui domine l'"expertise" depuis dix ans, démentie par les faits, mais seule grille de lecture de politiciens, journalistes et militaires, les vrais problèmes vont revenir : comment gérer l'incurie de certains Etats face à des demandes politiques qui sont légitimes. Bref, il manque une vraie vision stratégique, remplacée par des clichés venus de la politique intérieure française.

Olivier Roy, directeur d'études à l'EHESS
Quand bien même on identifie des objectifs corporatistes à l'armée de terre, ils n'en sont pas moins largement légitimes et respectables. Et le débat à leur sujet n'a pas à être clos.

Et les deux articles n'abordent rien du problème économique de cette zone saharienne, qui vit largement de trafics illégaux, notamment de l'acheminement de la drogue d'Amérique du Sud à travers l'Afrique vers l'Europe et la Russie. Et du rançonnage...

JacquesL

#3
http://www.lemonde.fr/idees/article/2013/02/05/et-si-l-intervention-au-mali-ouvrait-la-porte-des-reformateurs-en-islam_1826903_3232.html
Citer"Et si l'intervention au Mali ouvrait la porte des réformateurs en islam"

Malgré la prise importante et spectaculaire de Tombouctou, l'événement essentiel de ces derniers jours au Mali n'est pas de nature militaire. Il est fait de deux déclarations. L'une est de Chérif Ousmane Haïdara, prédicateur célèbre et chef charismatique des "Partisans de la Religion" alias Ansar Eddine, légalisée en 1992, forte de près d'un million de membres au Sahel, dont la plupart au Mali, et totalement étrangère à son homonyme du même nom qui, liée à Al-Qaida au maghreb islamique (AQMI), occupe le nord du Mali.

Dans cette déclaration on peut lire "AQMI, Ansar Eddine, Mujao : c'est pareil. Ce sont des bandits et des trafiquants de drogue qui utilisent la religion comme couverture "... et un peu plus loin : " Il va falloir mener une guerre idéologique et dénoncer ceux qui se disent musulmans et qui sèment la mort".

DÉNONCENT L'INTERVENTION FRANÇAISE

L'autre, encore plus explicite, est de l'imam Mahmoud Dicko, Président du Haut Conseil Islamique du Mali. Il s'en prend à quelques autorités musulmanes, dont une du Qatar,qui dénoncent l'intervention française, et déclare tout bonnement :

"Nous ne sommes pas d'accord avec cette interprétation, nous pensons que c'est le contraire. C'est la France qui a volé au secours d'un peuple en détresse, qui avait été abandonné pour tous ces pays musulmans à son propre sort. Nous parler de croisade anti islam, c'est quelque chose que nous ne pouvons pas accepter en tant que responsables musulmans du Mali".

A ma connaissance ce sont les toutes premières déclarations d'autorités religieuses musulmanes sur ce sujet. C'est en quoi elles sont essentielles.

Et comme elles viennent du Mali, il est fort probable qu'elles inspireront les autorités religieuses des pays – Niger, Nigeria, Sénégal, tous musulmans à plus de 90% - voisins qui ont décidé de soutenir l'intervention française, lorsque celles-ci finiront par être conduites à commenter les décisions de leurs autorités politiques.

Il est décisif en effet, pour que l'intervention française au Mali soit efficace qu'elle reste bien accueillie dans le monde et sur place, et qu'elle reste quasi unanimement soutenue en France. Cela n'est souhaitable et possible que si d'abord elle est bien comprise et bien située parmi les enjeux multiples, complexes et imbriqués qui interfèrent en Afrique. Que s'est-il donc passé ?

RETOUR SUR L'HISTOIRE D'UNE CRISE

En janvier 2013, du fond de son pays en pleine désagrégation, le président par intérim, musulman, d'une population musulmane à 90% appelle la France à l'aide. De quoi s'agit-il ? Depuis bien des mois des activistes appartenant à des populations extérieures, Libye, Tchad, Algérie, Mauritanie peut-être, nomades, touaregs du désert, à l'enracinement national inconnu sans doute aussi, sont arrivés à se grouper, à s'approprier ensemble une part significative des puissants moyens militaires hérités de Khadafi, véhicules et armes, à proclamer ensemble que quiconque n'est pas disciple du prophète doit être abattu et que pour ce faire la conquête d'un État pour en faire une base territoriale d'assaut contre les non-croyants est la première priorité.

Ainsi s'explique et commence la conquête par ces meurtriers de la moitié nord du Mali. Ainsi se découvre aussi la visibilité d'une offensive préparée contre la capitale Bamako, de ce grand pays à la faible population. De là vient l'appel.

Très vite, du Niger voisin, du Sénégal à peine plus éloigné et presque aussi vite de l'immense Nigéria, cent millions d'habitants, à peine plus lointain - tous majoritairement musulmans - vient le soutien à l'appel à l'aide.

L'armée du Mali en décomposition comme le pays lui-même ne saurait résister à l'assaut d'un demi millier de guerriers montés sur une centaine de véhicules et puissamment équipés, notamment d'armes lourdes. Il y faut une vraie armée.

LE COLONISATEUR RESPECTAIT LA RELIGION, ET QUE LA FRANCE A UNE ARMÉE

On se souvient de la France. Naturellement ce dont on se souvient là n'est pas l'ensemble des outrages de l'autorité coloniale aux pouvoirs et aux intérêts économiques locaux... Ce dont on se souvient, c'est que le colonisateur respectait la religion, et que la France a une armée.

La France à ce moment est gouvernée par un nouveau président, que de mémoire historique personne n'a jamais vu aux prises avec des problèmes de cette nature. La France est seule appelée. François Hollande décide seul.

L'approbation internationale est immédiate, générale, et vient notamment de beaucoup de pays d'islam. Même notre opposition, surprise peut-être mais convaincue, approuve. Il faut féliciter ici vigoureusement, notre président et aussi nos forces armées, dont les hommes et les chefs furent capables d'un déploiement incroyablement rapide.

Car le premier succès est là. Bamako est sauf, les colonnes motorisées rebelles ne sont pas passées et ne passeront pas. Gao et Tombouctou sont reprises. L'affaire n'en est pas terminée pour autant.

S'ils ne peuvent probablement plus se motoriser puissamment par groupes nombreux ni déplacer massivement des armes lourdes, des centaines, peut être des milliers d'islamistes radicaux demeurent disséminés en Afrique avec l'intention et, même réduits, des moyens de tuer.

Il y faudra d'autres méthodes, d'autres moyens, d'autres hommes à la foi et à la langue différente, mais la seule chose certaine est qu'il y faudra bien des mois, sans doute des années.

Que défendons-nous dans cette histoire ? Assurément pas des États: celui du Mali a déjà disparu ; celui de la Côte d'Ivoire ne vaut guère mieux, les autres voisins sont embryonnaires... guère d'avantage des dirigeants en place, ceux du Mali ont déjà disparu, leurs remplaçants sont des intérimaires...

Nous défendons certes quelques centaines de nos concitoyens, et de maigres reliefs d'intérêts économiques qui furent autrefois coloniaux. Nous défendons surtout, des peuples désireux de vivre en paix et de vérifier que leur religion leur permet parfaitement de respecter et de cohabiter avec ceux qui ne prient pas comme eux.

RÉFORMER L'ISLAM

L'islam fut grand, créateur de culture, de science et de droit, rayonnant. Voilà cinq siècle qu'il ne l'est plus. Il fut aussi humilié par la colonisation que par l'absence d'usines. Or le développement économique c'est une révolution des comportements. Ce n'est jamais ni spontané ni facile. Au Japon l'ère Meiji fut "musclée".

En chrétienté il est visible qu'il a fallu les succès politiques et militaires de la réforme pour permettre le capitalisme et la démocratie. En islam les États ont à peu près toujours réussi à éliminer ou tuer leurs réformateurs. Il survit depuis dans la crispation et surtout la rigidité. Sur un milliard et demi de croyants quelques petits milliers de ses fils, contrairement à leur prophète qui ne prêche ni la guerre ni l'extermination des non croyants, en sont venus dans la colère au projet fou de détruire les infidèles.

Tous les alliés sont bons pour cela : certains de ces intégristes islamiques ont trouvé dans le désordre sahélien des touaregs indépendantistes et trafiquants, pas du tout arabes et assez peu musulmans.

Cela ne change guère le problème. Tant au Moyen-Orient qu'en Afrique, les peuples musulmans, leurs gouvernants et leurs dirigeants qui dans leur quasi totalité veulent vivre en paix, mais sont depuis longtemps perturbés par les ondes de choc de la guerre froide, du pétrole, de l'intégrisme et de quelques autres, sont impuissants à traiter le problème. Le silence assourdissant des autorités religieuses n'arrange rien.

LES TUEURS USURPANT FAUSSEMENT LE NOM DU PROPHÈTE

Il se comprend, devant la profondeur des crises de l'islam d'aujourd'hui, mais il est coupable. Finalement les polices et les armées musulmanes ne seront légitimes à traquer les tueurs usurpant faussement le nom du prophète que si cette fausseté est religieusement établie.

Le Prophète n'a jamais édicté l'ordre de tuer des non croyants, bien au contraire. En urgence et en anticipation de nécessaires décisions religieuses ce sont les pouvoirs civils qui sont en charge. Et faute de pouvoir faire autrement devant un problème devenu militaire ils demandent à la France son aide militaire pour une mission qui consiste, au Sahel d'abord à rendre de nouveau possible la cohabitation des chrétiens et des musulmans.

Bien au delà du Sahel, cela concerne toute l'Afrique et notre propre territoire. C'est un problème de civilisation.

Dans pareille affaire il n'y a de résultat positif possible que si pendant une longue continuité l'Islam pacifique confirme sa demande et en assume la justification religieuse, et si du côté français la compréhension de cette mission confirme la volonté de l'accomplir jusqu'au bout.

L'OPPOSITION N'EST PAS À LA HAUTEUR

L'opposition politique française avait commencé par approuver. C'était magnifique, c'était montrer qu'elle aussi a le sens de l'état, et qu'elle savait remplir là une des conditions du succès de la mission. Tout cela n'a pas encore duré huit jours, que déjà la mise en cause insidieuse apparaît. Une phrase indigne de Giscard d'Estaing, surprenante chez lui, nie l'évidence : "c'est une guerre post coloniale"... Un autre incrimine l'impréparation... Comme si l'attaque avait été prévisible.

Il faut saluer au contraire la rapidité de riposte dont furent capables les autorités politiques et nos forces armées. Un autre incrimine le coût.
Il est encore modeste, surtout comparé à l'enjeu de civilisation auquel il répond. Tout cela laisse deviner l'incapacité de certains membres de l'opposition à soutenir des actions qu'ils approuvent lorsqu'elle sont conduites par un gouvernement qu'ils n'approuvent pas. Le contraire s'appelle le sens de l'État.

C'est dommage, grave et dangereux. Dans peu de semaines, les opérations "lourdes" seront terminées et victorieuses. Mais il restera à reconstruire des États, à reformer des forces armées, à entraîner et appuyer des polices.

Il y faudra une autre forme de présence, moins coûteuse heureusement. Il y faudra surtout le maintien d'une vraie confiance mutuelle. C'est là que la cohésion de la très grande majorité des français est nécessaire. C'est là que l'islam pacifique doit entendre et confirmer l'appel qui lui vient du Mali. C'est à la France seule qu'il fut fait appel. C'est bien, pourtant, pour des raisons de civilisation, qu'en l'absence de toute défense européenne la Grande-Bretagne, sourcilleuse sur sa souveraineté et en train de quitter l'Europe, décida comme nation de soutenir la France.

Comment certains autres osent-ils faire grief à l'Allemagne de garder de son histoire récente une extrême réticence à procéder à des actions armées ?

Comment certains osent-ils faire grief à l'Europe de ne s'être pas mobilisée alors que personne n'a jamais voulu la saisir de compétences dans ce domaine ? La vérité est que le devoir de civilisation n'a pas encore sa place dans le droit international.

Mais il faudra bien la lui faire. Les pays d'islam ne sortiront de leur longue crispation qu'au prix de choix et de réformes douloureuses. Il leur y faut une aide extérieure. Pour la première fois certains la demandent.

L'action ne pourra être continue que s'ils confirment cette demande. L'enjeu est immense : oublier les croisades pour se battre ensemble pour les droits de l'homme.
Bien d'autres nations musulmanes et européennes devraient pouvoir s'y joindre.

Elles ne le feront que si elles en comprennent et assument le sens.

Michel Rocard , ancien premier ministre, président du conseil d'orientation scientifique de Terra Nova

Michel Rocard oublie un peu vite les assassinats de Asma Bint Marwan, de Abu Afak, et les 200 juifs égorgés à Yathrib, sur ordre de Muhammad. Muhammad a toujours façonné son système pour la guerre, pour sa domination politique et guerrière de l'Arabie. "Une religion de corps de garde", précisait Claude Lévy-Strauss.


Mahmoud Dicko, Journal TV ORTM du 02 Février 2013  : à 7 minutes 30 s.
http://www.youtube.com/watch?v=ntav3Wt-Gxc

JacquesL

#4
http://maliactu.net/larmee-de-lair-malienne-un-mirage/

CiterL'armée de l'Air malienne : un mirage

Quel est l'état actuel de la composante Air des forces armées du Mali ? Les forces terrestres maliennes et la CEDEAO peuvent-elles compter sur elle pour de futures, mais probables, opérations ? Rien n'est moins sûr alors que son état matériel, humain et opérationnel illustre finalement bien des maux rencontrés par l'ensemble des forces armées du Mali.


Dans son panorama annuel (téléchargeable ici), le site de référence Flight Global dressait un état des lieux (un peu optimiste) des ressources matériels en 2011. Qu'en est-il vraiment de l'état de cette armée de l'Air composée d'environ 400 personnes, si nous nous en référons à la «Military Balance 2011 » de l'IISS (International Institute for Strategic Studies) ?

Hélicoptères d'attaque et de transport Mi-24
Les deux hélicoptères (immatriculés TZ 404 et TZ 405) de transport et d'attaque Mi-24 (ou Hind selon la classification OTAN) ont été acquis début 2007 dans les stocks de l'armée de l'Air bulgare. Ils ont une capacité de transport de 8 personnes et peuvent, en plus de la tourelle avant, recevoir de l'armement sur les points d'emport externes. Après avoir subi une révision technique et reçu un camouflage couleur sable, ils ont rejoint le Mali fin 2007.
Par manque de pilotes maliens formés (une faiblesse structurelle locale), des pilotes ukrainiens, habituels sur le continent, sont aux commandes. Or, quelques jours après le coup d'État contre le président Amadou Toumani Touré le 22 mars, ils ont quitté le Mali, clouant au sol de facto ces hélicoptères (jusqu'à un prochain contrat avec des prestataires similaires ?).
Cette situation n'est pas inédite. Selon un document diplomatique américain, en avril 2008, ces deux hélicoptères avaient attaqué au Sud-Ouest de Kidal une colonne de véhicules du chef rebelle touareg Bahanga. Au cours de l'opération, un des pilotes est tué, un autre est blessé. Le personnel ukrainien, après avoir ramené à bon port les hélicoptères, regagne aussi l'Ukraine quelques jours après.
Néanmoins, ces hélicoptères ont été régulièrement signalés par l'AFP et d'autres agences de presse lors d'opérations dans le Nord du Mali. Après avoir été vus à Tessalit ou Kidal, ils opéraient encore au 30 mars 2012 depuis la ville de Gao. Il faut néanmoins noter qu'avec un rayon d'action de 450 km, ces hélicoptères ne peuvent opérer à plus de 200 km de leur base (en comptant le temps sur place). Or, du fait de l'élongation des distances entre les villes (et par manque de capacités de ravitaillement en plein désert), les possibilités sont limitées : Tombouctou est à plus de 300 km de Gao, Kidal est à 290 km de Gao, etc.
Pour rappel, 4 hélicoptères étaient encore en état de vol en janvier 2011 (cf. vidéo à 07 min 08 secondes). Deux serviraient actuellement de réserves en pièces détachées. Enfin, aucune information n'est disponible sur l'état d'un hélicoptère Mi-8 Hip-C (capacité : 20 personnes environ), dont il est parfois fait mention.

Hélicoptères de transport Z-9 et AS350

L'armée de l'Air malienne disposerait de deux hélicoptères Harbin Z-9B, modèle construit sous licence à partir des années 1990 par l'entreprise chinoise Harbin Aircraft Manufacturing Corporation. Le modèle de base est l'hélicoptère d'Eurocopter AS365 Dauphin. Il est en mesure de transporter une petite dizaine de personnes avec un rayon d'action de 1000 kilomètres. Des points d'emport externes sont prévus mais les modèles maliens ont toujours été vus sans charge externe.
Ces hélicoptères (immatriculés TZ-393 et TZ-394) auraient été donnés par Taiwan en décembre 2000 (selon l'édition 2004 du panorama de Flight Global). Les appareils n'ont pas été signalés en vol en 2012. Servent-ils au transport de personnalités ?
De plus, un hélicoptère AS350 B Ecureuil a bien été livré à l'armée de l'Air à la fin des années 80. Hélicoptère monomoteur léger, il est sans doute utilisé pour l'entraînement, la formation ou la reconnaissance (bien que non blindé). Il est visible sur une photographie datant au moins de 2009 sous des bâches. Aucun signe d'activité depuis.

Avions de combat Mig-21 MF / UM / Bis

La petite dizaine d'appareils Mig-21 n'a pas été signalée en vol depuis au moins une année : ni en opérations dans le Nord du Mali ni même lors des grands défilés annuels pour la fête de l'armée au Mali (20 janvier 2012) ou pour la fête de l'indépendance (22 septembre 2011). Et pourtant, ces deux événements sont l'occasion généralement d'exhiber les nouvelles acquisitions militaires ou les matériels les plus modernes. En septembre 2010, deux Mig-21 (en plus de 3 appareils de transport et 4 hélicoptères Mi-24) avaient participé aux festivités.
Trois exemplaires avaient été acquis en septembre 2005 auprès de la République Tchèque suite à leur décommission : 2 en version MF dite de 3ème génération (modernisé en 1970 et destinée à l'exportation) et 1 en version UM (biplace d'entraînement). En 1974, douze Mig-21 Bis (dite de dernière génération et produit à partir de 1975) et deux Mig-21 UM (en 1976) avaient été acquis d'origine auprès de l'URSS.
Avec un canon bitube et 1.500 kg de charges externes sur 4 polygones, ces appareils apportent une indéniable capacité d'appui-feu (même si les relations avec le sol se font de manière empirique). Avion relativement rustique et doté du strict minimum en termes d'appareils d'aide au pilotage, ses performances dépendent grandement des capacités des pilotes.
Quelques exemplaires de Mig-21 servent de pots de fleurs sur des bases aériennes maliennes et d'autres reposeraient encore dans les hangars de la base aérienne de Bamako. La situation du parc révèle sans doute un manque criant de ressources humaines en pilotes correctement formés. Il n'est pas à exclure non plus que le manque de pièces détachées et des ressources limitées en carburant spécifique limitent grandement leur utilisation. Cela devrait être encore le cas à moyen terme.
Le MNLA (Mouvement national de libération de l'Azawad) avait affirmé en janvier 2012 avoir abattu un appareil de type Mig-21, action qui confirmait pour certains les craintes de dissémination de missiles portables anti-aériennes (MANPADS) récupérés dans les stocks à ciel ouvert des forces du colonel Khaddafi. Le quotidien Le Monde, photo à l'appui, reprenait ce fait. Or, il semble bien que la photographie soit un « trucage » à partir d'une photographie remontant à 2008 (cf. ici pour l'original). Il n'y a donc pas, pour le moment, de preuves visuelles d'un appareil malien abattu (d'autant plus, qu'il n'est pas certain que ces Mig-21 aient décollé depuis plusieurs mois...).
Quant aux Mig-15 ou Mig-17, ou même les Yak-11 ou Yak-18, livrés à la fin des années 60, ils sont obsolètes et ne sont plus en état de vol depuis quelques années : ils sont stockés en plein air (cf. Google Earth, au Sud de la piste principale) ou exposés pour certains à l'entrée de bases aériennes.

Avions de combat SF.260

Dons gracieux de la Libye lors du cinquantenaire de l'indépendance du Mali en 2010 (information relevée par l'AFP en octobre 2010), le Mali dispose de deux appareils Aermacchi SF.260W Warrior. À l'origine avion-école, d'autres versions ont été développées dont la version d'appui-feu au sol Warrior avec deux points d'emport sous les ailes. Ces deux appareils sont issus d'un contrat passé par l'État libyen dans les années 70 pour 240 exemplaires.
Ces appareils ne seraient pas en état de vol et nécessiteraient à la fois une révision technique ainsi que de nouvelles ressources en carburant spécifique. Aucune information n'est disponible sur leur utilisation. Notons néanmoins que Jeune Afrique indique que des appareils similaires, mais Mauritaniens, ont servi à attaquer un convoi en septembre 2010 aux alentours de Tombouctou (en territoire malien).
Plus globalement, ces appareils légers sont dépassés par des modèles du type Tucano ou Super Tucano d'Embraer, AT-6 d'Hawker-Beechcraft (ou même des modèles du fabriquant suisse Pilatus). Pour rappel, des voisins du Mali, la Mauritanie et le Burkina Faso ont commandés des appareils Super-Tucano au mois de mars.

Appareils de transport

Un vénérable Basler BT-67 (TZ 391) serait encore en état de vol (en particulier suite à une révision technique menée à partir de fin 2006 aux États-Unis). Bâti sur la structure du Douglas DC-3 renforcée et remotorisée avec des moteurs Pratt & Whitney Canada, cet appareil peut transporter (selon les variations de température) une quarantaine de passagers ou environ 6 tonnes de matériels. Avec son important rayon d'action (plus de 3000 kilomètres), il est capable de ravitailler toutes les villes du Mali équipées de pistes. Livré dans les années 90 par les États-Unis, un autre appareil (immatriculé TZ 390) est dans un état de vol incertain (visible sur Google Earth à l'aéroport de Bamako).
En mai 2009, des membres du 6th SOS (Special Operations Squadron) ont assuré des formations auprès de pilotes maliens (le communiqué emploie le terme de C-47T, autre nom du BT-67). Le 6th SOS est une unité atypique dédiée à la formation, l'entraînement et l'assistance de forces aériennes étrangères. Créée en 1944 pour le théâtre Chine-Birmanie-Inde, dissoute après la guerre du Vietnam et réactivée en 1994, cette unité entretient des savoir-faire particuliers. Ses membres doivent justifier des compétences linguistiques particulières ainsi que des qualifications au pilotage et à l'entretien sur des appareils qui ne sont pas en dotation dans les unités conventionnelles ou américaines, mais encore dans différentes forces aériennes dans le monde : hélicoptère UH-1NHuey, Mi-8 ou Mi-17, avions Beech King Air 350 ou Twin Otter, différentes versions de C-130, etc.
En février 2012, l'appareil a participé à un exercice organisé par le 19th SFG pour le ravitaillement par voie aérienne à Mopti. Le 19th SFG (Special forces Group) est une des deux entités de l'United States Army Special Forces issues de la Garde nationale. Une de ses spécialités est d'apporter aux autorités civiles et militaires des compétences en cas de catastrophes naturelles ou humanitaires.

Deux Antonov An-26, Curl selon la dénomination OTAN, et immatriculés TZ-359 et TZ-399, ont été photographiés en 2008. Quid depuis ? Ils pourraient avoir été récupérés par des sociétés civiles (en particulier, minières) ou seraient hors d'usage. Capables de transporter 40 passagers ou 5,5 tonnes de fret et dotés d'une rampe de chargement, ces appareils pouvaient apporter une réelle plus-value logistique.
L'armée de l'Air malienne disposerait aussi de deux BN-2 (ou Britten-Norman Islander), avion de transport bimoteur (9 passagers ou 3 tonnes) pouvant utiliser des pistes non préparées. Un appareil utile dans les vastes étendues maliennes où les villes de Gao, Mopti, Tessalit, Yelimané et Tombouctou disposent de pistes plus ou moins aménagées. Avec 1.4000 km de rayon d'action, il est en mesure de brouetter son chargement à plus de 600 km de la capitale. Néanmoins, aucun renseignement n'est disponible sur la récente utilisation de ces appareils datant, tout de même, des années 70.
Face à la faiblesse des capacités logistiques maliennes, (au moins) un appareil militaire américain avait assuré le ravitaillement de la garnison de Tessalit, à quelques kilomètres de la frontière avec l'Algérie en février 2012. Des opérations qui pourraient se renouveler.
À noter qu'un des pilotes en mesure de piloter le BT-67, le colonel-major Souleymane Bamba, a été nommé le 16 mai 2012 chef d'état-major de l'armée de l'Air par le conseil des ministres. Cette nomination contraint sans doute la possibilité qu'il vole à nouveau aux commandes de l'appareil. Quoique...
Enfin, lors du salon du Bourget en juin 2011, une LOI (Letter of Interest) a été signé entre GECI Aviation et le chef d'état-major de l'armée de l'Air malienne pour 3 exemplaires du F-406, turbopropulseur léger utilisé pour la surveillance ou le transport de fret (1,5 tonnes) et de personnes (12). Ce type d'appareil équipe, par exemple, les Douanes française.

Appareils d'observation

La Direction de la Coopération Militaire et de Défense (aujourd'hui, DCSD ou Direction de la Coopération de Sécurité et de Défense) mène un programme au Mali pour l'utilisation d'avions ultra-légers d'observation de type Tétras. Ces appareils sont produits par l'entreprise française Humbert-Aviation et ont un rayon d'action de plus de 500 km. Le Mali disposerait de 6 exemplaires (huit avaient été livrés d'origine en 2003). Certains pourraient s'être crashés en 2007 (si nous croyons cet article, mais l'auteur parle de « hélicoptère Tétras » et non d'avion de type Tétras). Ils ont apparemment été utilisé quelques jours après l'opération conjointe entre le Mali et la Mauritanie lors de l'attaque sur la forêt de Wagadou à l'été 2011 (cf. Jeune Afrique).
Appareil léger, le Tétras ne peut emporter de charge utile (à part de faibles charges, cf. image prise lors de l'exercice en février 2012) et n'est pas protégé. Il est néanmoins utile pour éclairer la progression de troupes au sol, guider des appuis ou assurer des liaisons. Le 17 mars 2011 est sortie la première promotion de 11 pilotes formés au Mali au Brevet élémentaire de pilote ULM. Ils étaient jusqu'à présent formés au sein du PANVR (pôle aéronautique national à vocation régionale) de Garoua au Cameroun, centre de formation qui dispense aussi des enseignements pour les pilotes, les moniteurs, les observateurs, les techniciens, etc. En 2008, 39 stagiaires maliens avaient été accueillis depuis la création de l'école. Certains stagiaires pouvant rejoindre Salon de Provence pour des formations.
Lors du précédent salon du Bourget (et selon le quotidien Le Parisien), un contrat aurait été passé pour l'acquistion de plusieurs exemplaires du LH-10 Ellipse, appareil biplace léger construit par LH Aviation. Deux exemplaires équipent déjà les forces armées du Bénin. Doté d'une autonomie de 1.500 km, cet appareil, une fois livré, aidera à la surveillance des vastes étendues maliennes.

Avions-école L-29

6 appareils L-29 Delfin (dénommé Maya par l'OTAN) ont été livrés entre 1982 et 1984 à l'Ecole de Pilotage de Bamako. Ce biplace tandem de conception tchécoslovaque était l'appareil école standard des forces du Pacte de Varsovie (hors la Pologne). Via des points d'emport, il peut recevoir des réservoirs supplémentaires, des pods de roquettes ou des mitrailleuses. Aucun appareil ne semble être en état de vol. Ils étaient des appareils pratiques pour la transition des pilotes entre des appareils légers de formation initiale et des appareils combats plus rapides et plus complexes. Aucune photographie n'est disponible.

Conclusion 
Sous perfusion soviétique à l'indépendance puis bénéficiant de l'aide d'autres pays (dont la France et les États-Unis), l'armée de l'Air malienne n'a jamais acquis une totale autonomie pour être pleinement opérationnelle. Sans parler l'aide pilotes étrangers pour des appareils spécifiques, en particulier les hélicoptères.
Relevons que la tâche est complexe du fait des conditions géographiques (manque d'infrastructures à part les bases 101 de Bamako, 102 de Sévaré près de Mopti ou celle secondaire de Gao, étirement entre les villes) ou climatiques (chaleur réduisant les capacités d'emport des appareils, vents de sable). Des difficultés structurelles viennent de plus s'y ajouter : manque de personnels formés (en particulier, pilotes et mécaniciens, ce qui ne se fait pas en quelques mois), vétusté des matériels (les appareils Tétras sont les plus récents), poids des habitudes (recrutement par cooptation comme cela se fait généralement dans l'armée malienne, négligences dans l'entretien), etc.
Autant d'observations qui conduisent à douter des capacités réelles de l'armée de l'Air malienne en cas d'opérations futures dans le Nord-Mali. Ainsi, il ne devrait pas être possible de compter sur elle à court terme, ni même à moyen terme, à part ponctuellement pour certaines capacités. En conséquence, que cela soit pour l'observation, le transport ou l'appui, d'autres armées de l'Air devront prêter main-forte aux forces armées du Mali.

PS : je n'ai pas inclus dans ce panorama les avions de ligne (sans doute de type Boeing, moins sûrement Airbus) que le gouvernement malien posséderait. Peu d'informations sont disponibles, beaucoup de suppositions et clairement, des relations complexes entre les compagnies aériennes locales (voir même libyennes) et le gouvernement. Il pourrait s'agir en quelque sorte d'une flotte présidentielle qui pourrait être d'une grande utilité pour transporter des forces armées.
source : http://mars-attaque.blogspot.fr/2012/05/larmee-de-lair-malienne-un-mirage-12.html
http://mars-attaque.blogspot.fr/2012/05/larmee-de-lair-malienne-un-mirage-22.html

Aux Tétras près, ce sont tous des appareils décommissionnés dans leur pays d'oriine, pour qui le Mali n'est qu'un cimetière à ciel ouvert.

JacquesL

#5
Selon ce site algérien :
http://www.letempsdz.com/content/view/84930/
Citer05-02-2013
Deux avions qataris à la rescousse des djihadistes au Mali

Des informations font état de l'atterrissage de deux avions du Qatar au nord du Mali «pour transporter des djihadistes et empêcher leur arrestation ou leur élimination par les armées française et malienne». L'opération qui commence à faire le tour du monde du renseignement, expliquerait, en partie, le fait que des chefs d'Al Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) et du Mouvement pour l'unicité et le jihad en Afrique de l'Ouest (Mujao) ne soient pas arrêtés, jusqu'à présent, plusieurs semaines après le début de l'offensive militaire française et la récupération de plusieurs villes du Mali, dont Kidal, Tombouctou, Monti et Gao. «Cette information circule depuis récemment», nous a déclaré Eric Denécé, directeur du Centre français de recherche sur le renseignement (CF2R).

Le Qatar, qu n'a, jusqu'à présent, pas démenti cette information, avait, rappelle-t-on, exprimé son désaccord vis-à-vis de l'intervention militaire française, au Mali, après avoir proposé d'assurer la médiation avec les djihadistes armés se trouvant au nord de ce pays.

Pour rappel, quatre humanistes qataris avaient été signalés au nord du Mali. Ce qui nous a été confirmé par Mickael Sibdiga, chef d'antenne de la Croix-Rouge à Kidal.

Les quatre «humanitaires» qataris étaient, ajoute-t-on de source malienne locale, arrivés de façon non officielle, c'est-à-dire sans informer le comité international de la Croix-Rouge. «Ils ont dit qu'ils sont venus pour faire l'appréciation des besoins des populations», a ajouté Mickael Sibdiga.

Le Qatar est soupçonné de soutenir et financer les djihadistes qui sévissaient au nord du Mali et dans d'autres régions du monde.

M. Abi


Confirmation :
http://www.malijet.com/en-direct-du-front/64334-le-qatar-envoie-des-avions-pour-exfiltrer-les-terroristes-du-nor.html
CiterLe Qatar envoie des avions pour exfiltrer les terroristes du Nord Mali
Selon une source citant les renseignements allemands, 2 avions militaires de transport de type  C-130 Hercules-16 appartenant au Qatar auraient exfiltré des dizaines de terroristes d'Aqmi du Nord Mali.

Depuis quelques jours, plusieurs sources font état d'une opération aérienne qatarie pour exfiltrer des dizaines de terroristes du Sahel face à l'intervention française, a reconnu l'expert français Eric Dénécé.

Malijet

Source: Malijet

Au courrier des lecteurs, on remarquera la signature probablement authentique de "ATT", précédent président du Mali.

JacquesL

http://www.malijet.com/en-direct-du-front/64355-mali-combats-dans-le-centre-de-gao-entre-soldats-maliens-et-isla.html
CiterMali: combats dans le centre de Gao entre soldats maliens et islamistes

GAO (Mali) - Des combats opposant soldats maliens et islamistes ont éclaté dimanche après-midi dans le centre de Gao, la plus grande ville du Nord du Mali, récemment reprise par les militaires français et maliens aux groupes islamistes armés, frappée par deux attentats suicides en deux jours.

Les échanges de tirs entre soldats et islamistes se déroulaient dans le centre de la ville, près du commissariat central, qui était le siège de la police islamique quand les jihadistes occupaient Gao, a constaté un journaliste de l'AFP.

Les rues de Gao sont désertes et les habitants se terrent dans leurs maisons.

Des éléments du Mujao se sont infiltrés en ville et nous sommes en train de les déloger, a déclaré à l'AFP une source malienne de sécurité, en référence au Mouvement pour l'unicité et le jihad en Afrique de l'Ouest (Mujao), l'un des groupes armés qui occupait depuis des mois le nord du Mali, y multipliant les exactions.

Ces affrontements surviennent après un attentat suicide visant dans la nuit de samedi à dimanche un poste de contrôle à l'entrée nord de Gao, le deuxième en deux jours.

Aucun militaire malien n'a été atteint dans l'explosion, selon les soldats sur place. Mais la route menant vers le nord et les villes de Bourem et Kidal a été fermée et aucun véhicule n'était autorisé à l'emprunter.

Trois mines antipersonnel ont aussi été découvertes dans la zone, selon un militaire français, qui a précisé que l'armée allait les faire sauter dans une explosion contrôlée.

L'attentat de vendredi avait été revendiqué par le Mujao.

Nous nous engageons à augmenter les attaques contre la France et ses alliés. Nous demandons à la population de se tenir loin des zones militaires pour éviter les explosions, a de nouveau mis en garde samedi le porte-parole du Mujao, Abou Walid Sahraoui.

Gao, la plus grande ville du Nord malien, située à 1.200 km de Bamako, avait été reprise le 26 janvier par les armées française et malienne aux groupes islamistes armés liés à Al-Qaïda, dont le Mujao.


(©AFP / 10 février 2013 16h19)

Source: AFP

http://www.malijet.com/en-direct-du-front/64362-mali-un-commando-islamiste-attaque-la-ville-de-gao.html
CiterMali: le Mujao revendique l'attaque lancée à Gao par un commando islamiste

GAO (Mali) - Un groupe islamiste, le Mouvement pour l'unicité et le jihad en Afrique de l'Ouest (Mujao), a revendiqué auprès de l'AFP l'attaque lancée dimanche par un commando dans la ville de Gao, dans le Nord du Mali, promettant de continuer le combat jusqu'à la victoire.

Les fidèles de Dieu ont attaqué avec succès aujourd'hui l'armée malienne, qui a laissé venir les ennemis de l'islam à Gao. Les moujahidines sont dans la ville de Gao et y resteront, a déclaré Abou Walid Sahraoui, porte-parole du Mujao.


(©AFP / 10 février 2013 19h55)

Source: AFP

Et du 4 février, il y a donc six jours, mais pas vu dans la presse française :
http://www.malijet.com/en-direct-du-front/63742-guerre-au-mali-premieres-tensions-sur-le-terrain-entre-l-armee-m.html
CiterGuerre au Mali : Premières tensions sur le terrain entre l'armée malienne et les soldats africains
Bamako - Alors que le Mouvement National de Libération de l'Azawad (Mnla) annoncent l'arrestation à la frontière algérienne de Mohamed Moussa Ag Mouhamed, considéré comme le numéro trois d'Ansar Dine et que le président du Niger Mahamadou Issoufou, qui considère les jihadistes non comme des musulmans, mais des trafiquants, annonçait que le MNLA n'était pas représentatif du peuple touareg et que ce dernier, selon lui, une des causes de la crise au nord du Mali, devrait être désarmé, KOACI apprend que des tensions sur le terrain entre l'armée malienne et les contingents africains seraient survenues depuis près d'une semaine.

En effet à en croire nos témoignages concordants recueillis, un incident survenu à Sévaré entre militaires maliens et apparemment burkinabés, ce week end aurait révélée un climat explosif entre les hommes en armes locaux et les nouvellement arrivés de pays voisins dans le cadre de la Misma, plan issu d'une résolution de l'Onu.

Une bagarre générale voire plus aurait été évitée de peu avec l'intervention de soldats français venus pour calmer les militaires, apparemment échaudés pour une simple affaire qui trouverait son origine sur des suspicions de délations auprès des militaires français et de journalistes occidentaux présents sur place.

Ce lundi matin, Bamako tente de tout faire pour ne pas ébruiter cette affaire et ce "climat" d'armées qui se regarderaient en chien de faïence sur le terrain d'un pays qui aura recouvré son intégrité territoriale lorsque les soldats de l'opération Serval auront terminé le nettoyage de la région montagneuse de Kidal à l'extrême nord du Mali, lancé depuis plus de cinq jours.

Notons aussi que l'annonce de l'arrestation par le Mnla est diversement apprécié au niveau de Bamako qui considère majoritairement ces touaregs comme de simple résidus d'Ansar Dine et du Mujao, mués en Mnla ou Mia pour sauver leur peaux et tromper la France.

Rappelons que le pays de François Hollande recherche actuellement activement l'islamiste Mokhtar Ben Mokhtar et ses sept otages qu'elle pense, au même titre que le président du Niger, toujours retenus au nord du Mali

IB de Koaci.com

Source: koaci.com


JacquesL

Cet article envoyé par un lecteur :
http://www.malijet.com/actualite-politique-au-mali/tribune-de-kassin/65753-le-mali-se-dechire-la-france-cafouille-et-le-tchad-subit.html

CiterLe Mali se déchire, la France cafouille et le Tchad subit

Un mois et demi que l'opération "Serval" est lancée au Mali, par les forces spéciales de l'armée française suite à un appel de détresse lancé par Dioncounda Traoré à François Hollande après le naufrage de l'armée malienne à Konna face à la hargne des combattants islamistes déterminés à prendre Sevaré et Mopti.
Très vite, les succès militaires du Général Hollande face à l'Aqmi et ses bébés tigres de la Charia,  surprennent la terre entière dans les villes maliennes poussiéreuses du delta central du Niger et du septentrion malien, à telle enseigne que la France reçoit des félicitations des États Unis, fait rare.
Qui dit succès militaires dit parade,  "le sauveur" Hollande aura la sienne dans les rues de Tombouctou et de Bamako.
Mais la libération  éclaire des grandes villes du nord du Mali par les forces spéciales françaises cache mal la stratégie des groupes islamistes à éviter le choc frontal avec l'armada français fort de ses 5000 hommes, de ses avions et hélicoptères de combats et de son renseignement satellitaire.
L'armée malienne qui suivait les soldats français dans sa conquête du nord du Mali comme un bébé suit sa maman dans une foire animée de Djenné, fut sommée de ne pas rentrer à Kidal pour dit-on éviter des affrontements avec les touareg du Mnla, et les éventuelles exactions contre les civiles à la peau claire, parce qu'elle n'a pas réussi son examen de passage à Gao et à Tombouctou libérées.
Trop agitée, trop brouillon, trop désorganisée, trop amateur, l'armée malienne n'a eu aucune stratégie viable de l'après libération à Gao et à Tombouctou qui aurait permis d'éviter au maximum les exactions, les pillages et autres débordements à l'encontre de certaines franges de la population  malienne soupçonnées de coalition et de complicité avec les barbus pendant l'occupation.
Comme à Diabali et à Konna ce sont donc les mêmes accusations d'excès et d'exactions que l'armée malienne n'a pas pu éviter de se faire accuser à tort ou à raison.
Compte tenu du contexte ethnique très tendu et des difficiles relations entre les communautés, le sens de l'anticipation aurait fallu que nos stratèges militaires misent sur le concept "zéro débordement" pour gagner le respect et l'estime du monde entier et des organisations de défense des droits de l'homme.
Mais hélas les pillages à ciel ouvert de Gao et Tombouctou ont donné du crédit à ceux qui accusent le Mali de mener une guerre ethnique, alors qu'en réalité nous sommes un pays attaqué qui cherche juste à recouvrer son intégrité territoriale, à vivre dans la quiétude, bref un pays qui se cherche.
Le manque de stratégie militaire adaptée au contexte coûte à l'armée malienne de ne pas être présente aujourd'hui à Kidal, mais cela n'est pas le seul souci de nos militaires.
L'autre souci c'est de ne pas visiblement être assez préparés pour tenir une ville libérée.
Infiltrations trop faciles des Djihadistes dans les zones sous contrôle de l'armée malienne,  combats laborieux face à des poignées d'islamistes, communication approximative, poursuite des affrontements interarmes à Bamako, toute chose qui en dit long sur l'état réel d'une armée malienne délaissée depuis trop longtemps, qui manque de tout et qui a besoin de tout.
Dans ce contexte la déchirure n'est pas seulement entre les bérets verts et rouges, elle existe également au sein de la police, de la classe politique et entre les communautés ethniques dont la plus remarquable est celle qui se passe en ce moment entre les arabes du MAA et les touareg du Mnla à Halil.
Face à ces déchirures qui rongent le Mali dans ses entrailles, l'incroyable impuissance des autorités de la transition est plus qu'inquiétante.
Tout porte à croire que les défis réels du pays sont largement sousestimés
par Dioncounda et l'équipe gouvernementale de Diango Cissoko car aucune action d'envergure n'est menée dans le pays pour panser sérieusement les blessures du tissu social du pays.
Par la grâce de Dieu, la coopération économique et financière du Mali avec les institutions de Breton Woods a repris et celle des états européens emboîte le pas au FMI et à la banque mondiale.
Les élections sont annoncées pour juillet 2013, mais la nation malienne a actuellement plus qu'un état et un président de la république, besoin de cohésion et d'entente entre les communautés surtout au nord du pays et les autorités de la transition ne peuvent pas s'assoir et attendre le président élu pour cela car les déchirures sont trop profondes et le Mnla en profite pour reprendre le poil de la bête.
En opportuniste vedette de la traîtrise, le Mnla mouvement néo terroriste et raciste, annonce qu'il occupe les villes du nord abandonnées par les barbus dans leur "repli tactique" et multiplie les communiqués pour induire les français dans l'erreur de collaborer avec deux armées antagonistes sur le même territoire d'un état souverain.
Comme par hasard à chaque fois que les islamistes se retirent d'une ville, le Mnla est toute de suite présent sans pourtant combattre les islamistes même dans leur retrait.
Mais on se moque de qui?
Perdue entre le désir de récupération de ses otages, les mensonges du Mnla et le manque de professionnalisme de l'armée malienne, la France cafouille au nord du Mali.
Elle met les soldats tchadiens en première ligne dans la région de Kidal, quand bien même que le terrain ne leur est pas trop familier et que leur cohabitation voire collaboration avec le Mnla est plus que douteuse voire dangereuse pour leur sécurité et le succès de leurs opérations militaires.
C'est donc logiquement que nos amis tchadiens, malgré le courage et la bravoure de leurs soldats d'exception essuient des pertes énormes en vies humaines dans les montagnes du Tagharghar.

Note: cet article est une contribution volontaire d'un lecteur indépendant. Son contenu n'engage aucunement la redaction de Malijet.

JacquesL

Une diplomate raconte vingt ans de gaspillages :
http://www.malijet.com/actualite-politique-au-mali/66649-au-mali%2C-la-france-a-favoris%C3%A9-une-fiction-de-d%C3%A9mocratie-depuis%E2%80%A6-.html

CiterAu Mali, la France a favorisé une fiction de démocratie depuis... 1991

Par Danièle ROUSSELIER Ecrivaine.



J'ai occupé le poste d'attachée culturelle à Bamako de 2007 à 2009 et je voudrais, au moment où la guerre s'installe durablement au Mali, montrer à travers quelques exemples l'aveuglement de la France. Et donc sa responsabilité partielle dans l'engrenage qui a mené à cette guerre.



Le Quai d'Orsay, comme notre représentation diplomatique sur le terrain, a soutenu et a favorisé une fiction de démocratie au Mali, pays supposé paisible et consensuel. Nous avons fermé les yeux sur le clientélisme, la corruption, l'absence de tout débat véritable. Avec, en parallèle et en lien de cause à effet, le glissement du débat vers la sphère religieuse et la montée de l'islamisme, non seulement dans le Nord mais à Bamako même.



Depuis 1991 et la conférence de La Baule sous François Mitterrand, le Mali était devenu le faire-valoir d'une politique française différente en Afrique de l'Ouest. Il ne fallait pas ternir l'image du Mali «bon élève» – où un militaire, le futur président Amadou Toumani Touré (ATT), avait rendu le pouvoir aux civils – au mépris de la réalité quotidienne sur le terrain.



Je me contenterai de rapporter certains faits ayant jalonné mon séjour.



Dès septembre 2007, j'ai participé à un déjeuner avec un officier des renseignements responsable de la lutte antidrogue. Au milieu du repas il nous a expliqué que Bamako était devenu la plaque tournante mondiale de la drogue en provenance de la Colombie. La cocaïne remontait ensuite vers la Méditerranée en traversant le Sahara. Information sidérante qui ne me sembla pas considérée par l'ambassade comme un élément essentiel d'analyse de la situation politique du Mali.



En novembre 2009, les autorités maliennes ont tenté de camoufler l'incendie en plein désert, près de Gao, d'un Boeing 727 transportant six tonnes de cocaïne «évaporée» dans les sables. L'affaire du Boeing «Air Cocaïne» a révélé ouvertement à la fois que le paisible Mali était bien devenu le carrefour du trafic de drogue en Afrique et, plus grave, que les trafiquants avaient bénéficié de complicités dans l'administration et dans l'armée au plus haut niveau. En a-t-on pour autant tiré toutes les conséquences sur la nature profondément corrompue du régime d'Amadou Toumani Touré, faisant le lit des trafiquants de drogue et favorisant par là le narcosalafisme avec les conséquences que l'on sait sur le fragile équilibre avec le Nord et les Touaregs ?



J'ai assisté à des élections législatives et municipales à Bamako. Certes, les campagnes et les scrutins se déroulaient dans le calme et le respect des règles. Mais tout se jouait en amont : clientélisme et pots-de-vin.



Je m'étonnai un jour auprès d'une amie teinturière de «bazins» (tissus traditionnels) qu'elle vote pour un candidat à la mairie notoirement corrompu alors qu'elle ne cessait de dénoncer avec virulence la corruption de la classe politique. Elle me répondit que ce candidat lui avait promis de ne pas faire appliquer dans sa rue le règlement antipollution. Car Aïwa la teinturière et ses co-épouses déversaient chaque jour dans les rigoles de Bamako des seaux de teintures chimiques très toxiques. Quand je relatais divers faits de cette nature à mes collègues de l'ambassade, on me répondait que cela n'entachait en rien le processus démocratique au Mali. Le mythe de la «bonne gouvernance» avait la peau dure.



Dans le même temps, le débat démocratique n'existant pas en raison de l'analphabétisme, de la misère et de l'autocensure des médias, les seuls lieux de parole avaient pour cadre la mosquée, et les seules manifestations de rues possibles étaient organisées par les imams. L'exemple le plus frappant en fut l'immense manifestation d'août 2009 à Bamako, déclenchée par l'imam wahhabite Mahmoud Dicko, président du Haut Conseil islamique, en réponse au code de la famille promulgué par Amadou Toumani Touré et qui offrait des droits nouveaux aux femmes, en contradiction avec la charia. La manifestation fut si vaste que le gouvernement, laïque, choisit de reculer.



Fermer les yeux sur la faiblesse du régime, couvrir la corruption, voire la favoriser... j'en fus non seulement témoin mais aussi actrice involontaire.



J'eus la chance, à mon arrivée, de disposer d'une grosse enveloppe financière (FSP) pour soutenir certains projets culturels d'envergure devant être portés par les Maliens eux-mêmes. Ces sommes ne pouvaient être allouées que sous des conditions très strictes, contrôlées par Paris, de manière à limiter abus, gabegie et passe-droits divers. Fraîchement nommé, le ministre de la Culture me présenta un projet à prétention «archéologique» de protection d'une mosquée à Gao, région dont le nouveau ministre était l'élu.



J'expliquai à mes supérieurs que je refusais d'allouer les 60 000 euros demandés qui serviraient à «arroser» l'électorat du ministre. Etant donné les conditions très strictes d'attribution des fonds, il était aisé de lui expliquer, sans blesser sa dignité ni risquer un incident diplomatique, que sa mosquée ne pouvait bénéficier de l'aide française. Mais l'intéressé ne voulant rien entendre, je décidai d'organiser un déjeuner en petit comité à la Résidence pour que l'ambassadeur lui-même lui explique que sa demande ne pouvait en aucun cas «entrer dans le cadre» de notre aide culturelle.



Alors que, pendant tout le déjeuner, j'expliquai pour la énième fois au ministre que sa demande de subvention était «techniquement»irrecevable, quelle ne fut pas ma surprise, au dessert, d'entendre mes supérieurs lui accorder la somme exigée ! Demandant des explications une fois le ministre parti, on m'expliqua que je n'avais «pas le choix» !Ce qui, je le maintiens, était faux.



Je décidais, de mon propre chef, de ne donner que 30 000 euros pour la mosquée. Le ministre ne s'en offusqua pas et m'appela désormais sa«petite étoile».



Un an plus tard je chargeais une personne allant à Gao de prendre des photos des «travaux de préservation» de la mosquée. Rien n'avait bougé, évidemment.



La France n'était, certes, pas la seule à fermer les yeux. L'aveuglement fut international : on avait trouvé un pays à qui dispenser l'aide, et les bailleurs de fonds comme les ONG se précipitaient sur ce pays modèle dont la façade démocratique a volé en éclats lors du putsch du 22 mars 2012.



Etant aussi chargée de suivre l'enseignement secondaire et supérieur, j'ai pu constater que, malgré notre aide et celle de l'Union européenne, la situation, déjà catastrophique, ne faisait qu'empirer. Le niveau du français (langue officielle) baissait et l'analphabétisme, du fait de la croissance démographique, progressait. La voie était ouverte au salafisme qui développait ses écoles coraniques.



Dans le même temps, le «poste» se félicitait du dynamisme culturel du pays. Cultures-France, émanation du ministère des Affaires étrangères, organisait de brillants et coûteux festivals (festival Etonnants Voyageurs, Biennale de la photographie) dans le but officiel de promouvoir cette créativité malienne alors que ces manifestations servaient principalement à faire venir au soleil – pendant le long hiver parisien – divers apparatchiks du monde français de la culture.



Surtout, plus grave pour le pays, une grosse partie de l'argent partait dans les poches de certains «opérateurs culturels» locaux. Et nous le savions.



Ainsi, au nom de la «bonne gouvernance», nous avons été complices d'un Etat malien prédateur, appuyé sur une «société civile» artificielle profitant de la faiblesse et de la corruption du régime pour s'enrichir à vive allure sur le dos du pays.



Des chercheurs remarquables travaillent pourtant sur le Mali. Bien avant 2012, ils analysaient avec pertinence la situation sociale et politique du pays, les risques de basculement dans la violence, la montée de l'islamisme. Mais ces analyses n'étaient pas prises en compte, ou si peu, par le Quai d'Orsay et l'Elysée. Elles se perdaient en route dans les sables de l'administration.



Le travail diplomatique privilégie la procédure et l'administratif au détriment de la recherche de terrain. Cette déperdition considérable est aggravée par l'insuffisance croissante des investissements dans la recherche sociale sur les mondes musulmans, ce qui nous place derrière les Etats-Unis et nos partenaires européens.



Laurent Fabius, le ministre des Affaires étrangères, semble conscient des faiblesses de notre prospective puisqu'il a décidé de renforcer l'ancienne direction, rebaptisée Centre d'analyse, de prévision et de stratégie (Caps) qui devra fournir toute une série d'avis sur le monde de demain.



On ne peut qu'espérer que le savoir considérable accumulé par les chercheurs français sur l'Afrique soit enfin pris en compte et utilisé pour l'action. Mais on peut en douter quand on sait que le 27 février, à l'Assemblée nationale, le même Laurent Fabius a appelé à des élections au Mali «le plus rapidement possible», montrant par là une parfaite méconnaissance du terrain, malgré les notes fournies par certains experts.



Dernier ouvrage paru : «Seule, journal de deuil», éditions Léo Scheer, octobre 2012.



Source: Libération

JacquesL

Vue de Guinée : Le Mali, une province française comme les autres.


http://www.courrierinternational.com/article/2013/04/02/le-mali-une-province-francaise-comme-les-autres

CiterC'est sur France 2 que le sort du Mali a été décidé par François Hollande. Une attitude qui a tout de la Françafrique.

Boubacar Sanso Barry

Lors de son grand oral sur France 2, François Hollande a émis deux signaux contradictoires à propos de la crise malienne et, plus largement, de l'approche de la France vis-à-vis de l'Afrique. D'un côté, le président français a voulu se démarquer de la Françafrique, en niant l'implication de son pays dans le choix du futur président du Mali. De l'autre, le même François Hollande se dit "intraitable" en ce qui concerne le respect du chronogramme électoral qui doit, selon lui, impérativement déboucher sur la tenue d'une élection présidentielle d'ici à la fin du mois de juillet 2013.

C'est à n'y rien comprendre. Car on peut bien se demander où est passée la souveraineté du Mali, quand c'est le président français qui annonce que ceci ou cela doit obligatoirement se faire dans le pays ! Cette approche infantilise les institutions et le peuple maliens. Leur sort est décidé à Paris et annoncé sur France 2. A l'évidence, la différence avec un certain passé regrettable est mince. Le fait que la France veuille retirer ses soldats est à la limite compréhensible. Mais cela ne veut pas dire que ce soit une bonne idée car, de toute évidence, le pays est loin d'avoir été pacifié... Contrairement à ce qu'en pense François Hollande, selon lequel "tous les objectifs sont atteints".

Mais on comprend qu'englué dans une spirale de baisse de sa popularité le numéro un français veuille jouer sur toutes les cordes pour essayer de remonter cette pente particulièrement raide. Par ailleurs, si l'Afrique elle-même veut continuer à se percevoir comme souveraine, il faut qu'elle arrête d'implorer l'aide des autres, même quand il s'agit de défendre l'intégrité territoriale de ses propres Etats. Mais ce qui est totalement inadmissible, c'est bien le fait que François Hollande estime que l'intervention de ses troupes dans la crise malienne lui donne le droit de traiter le Mali comme s'il s'agissait d'une province française. Or, c'est bien ce que le président français a fait hier lors de son intervention télévisée. Il ne s'est pas contenté de donner son avis sur la tenue de la présidentielle. Il a aussi déclaré que cette dernière devait impérativement se tenir au mois de juillet ! Que le Mali et le peuple malien soient prêts ou non, là n'est pas, pour lui, la question. Peu importe les conséquences. Il veut les élections d'ici à la fin juillet, et c'est tout ce qui importe pour lui.

En s'exprimant ainsi, il ne parle pas en tant que président d'un pays ami. Il prend plutôt la place de Dioncounda Traoré [président du Mali par intérim], de toute l'élite politique et de la société civile. Aussi, qu'il ne se fatigue pas à nier le choix que la France fera sur l'un des candidats. Parce que, quand on est capable d'imposer au peuple d'un pays – a priori – souverain sa propre volonté, on ne s'empêche en principe pas de choisir celui qui occupera le fauteuil présidentiel. Fouler au sol la dignité de tout un peuple est autrement plus grave que de s'immiscer dans un processus électoral qui, quoi qu'il arrive, est toujours sujet à une certaine manipulation. Or le point de vue de François Hollande n'est pas du tout isolé. Il s'agit d'une approche murie, dans la mesure où précédemment le ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian, avait donné des injonctions semblables. Les adieux à la Françafrique ressemblent à des vœux pieux.

    Guinée Conakry Info |
    Boubacar Sanso Barry

Ces maladresses auraient pourtant été faciles à éviter.

JacquesL

Le Sahel peut attendre...

Désolé d'avoir un mois de retard pour le mentionner :
La qualité d'analyse toujours, de Michel Goya :
http://lavoiedelepee.blogspot.fr/2013/04/le-sahel-peut-attendre.html

Redresser l'état malien, lui donner une administration intègre, avec une efficacité économique qui ne repose plus sur les trafics illicites, sera une oeuvre de longue haleine.

La stabilité sur le long terme des victoires militaires actuelles est loin d'être acquise.

M. Goya n'aborde pas la question de la viabilité économique de ce pays.
Il n'y a pas d'armée solide sans un système fiscal solide, et pas de système fiscal efficace sans une économie robuste. Agriculture soumise à de grands aléas climatiques, rente minière insuffisante, industrialisation faible, le Mali demeure mal parti, cinquante ans après.


JacquesL

Le colonel Heluin établit un constat sans concession sur l'état de l'armée malienne

http://www.opex360.com/2013/04/22/le-colonel-heluin-etablit-un-constat-sans-concession-sur-letat-de-larmee-malienne/

Citer
Le colonel Heluin établit un constat sans concession sur l'état de l'armée malienne
22 avril 2013 – 18:43

Ancien chef de corps du 2e Régiment d'Infanterie de Marine (RIMa) désormais affecté à la 9e BIMa, le colonel Bruno Heluin n'y est pas allé par quatre chemins pour décrire, dans un entretien accordé au quotidien Le Monde, l'état de décrépitude des forces armées maliennes.

Et la mission européenne de formation de l'armée malienne (EUTM Mali), dont cet officier commande le détachement de liaison, aura fort à faire pour mener à bien la tâche qui lui a été donnée.

Et pour cause, lance le colonel Heluin, "c'est une armée qui vit au jour le jour", qui ne dispose pas d'écoles militaires d'application, de moyens nécessaires pour s'entraîner et d'équipements. Elle dépend "des dons depuis trois ans", souligne l'officier. "Autrement dit, le monde entier venait se débarrasser ici de son vieux matériel. Au niveau des transmissions, des systèmes russe, chinois, américain et français cohabitent. Sous couvert de bonne volonté, nous avons donc aggravé les dysfonctionnements", explique-t-il.

A cela, il s'ajoute la corruption et le clientélisme comme mode de promotion. Le colonel Heluin raconte ainsi que sur les 800 pick-up commandés par l'armée malienne en 2006, il n'en reste "quasiment aucun". Si un partie a été volée, un autre a été mises hors d'état de fonctionner car les cadres avaient récupéré les moteurs... En outre, et avant le coup d'Etat de mars 2012 commis par le capitaine Sanogo, il y avait 104 généraux pour un effectif de 20.000 soldats.

Pourtant, les Etats-Unis avaient bien lancé un programme de formation de l'armée malienne, lequel s'est révélé totalement inefficace étant donné que cette dernière n'a pas fait un pli, en 2012, lors de l'offensive des rebelles touareg et des groupes islamistes au Nord-Mali. D'ailleurs, le général Carter Ham, l'ancien chef de l'US AFRICOM, a admis, en janvier dernier, que des erreurs avaient été commises.

"Les Américains ont surtout formé des bataillons dans le Nord, en majorité des Touareg. Quand l'armée malienne a explosé, ce sont ces unités-là qui ont disparu. Les Américains avaient axé leur mission de formation sur le contreterrorisme. En visant les Touareg, c'était une façon de faire du renseignement. Nous voulons éviter cet écueil en travaillant avec tous les bataillons", a fait valoir le colonel Heluin.

Par ailleurs, l'officier n'a pas souhaité faire de commentaires sur le Comité de réforme de l'armée malienne dirigé par le capitaine putschiste Amadou Sanogo, lequel reste influent à Bamako. "Je suis un militaire, j'obéis aux politiques. J'ai reçu un ordre (ndlr, de l'Union européenne) : pas de contact avec le capitaine Sanogo ni avec le Comité de réforme", a-t-il affirmé.

Enfin, le colonel Heluin a égratigné la communauté internationale, laquelle insiste pour reconstruire l'armée malienne mais, qui, dans le même temps, ne donne pas les moyens nécessaires pour cela. "Rien n'a été donné, alors que 8 millions d'euros ont été promis le 29 janvier à la conférence des donateurs d'Addis-Abeba", souligne-t-il. Or, les forces maliennes en ont besoin, parce qu'elle " doit retrouver, vite, les moyens de défendre son territoire national et de faire face à la menace", conclut-il.