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Guerre Inde-Pakistan : les gagnants et les perdants

Démarré par JacquesL, 21 Mai 2025, 05:51:45 PM

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JacquesL

Guerre Inde-Pakistan : les gagnants et les perdants




par Pepe Escobar

Le matériel militaire chinois a volé la vedette, celui de la France a perdu de sa valeur, l'influence de l'Inde a été mise à mal et les Pakistanais ont jubilé. Mais au final, cette guerre brève et intense entre l'Inde et le Pakistan n'a été une victoire que pour la stratégie de division et de domination du Nord sur le Sud.

Malgré le caractère alarmant d'un affrontement meurtrier entre deux puissances nucléaires sud-asiatiques, la guerre de 2025 entre l'Inde et le Pakistan ne pouvait que contenir les ingrédients chers à Bollywood.

En effet, ce fut une danse endiablée, susceptible de dégénérer rapidement. Mieux vaut oublier la médiation bancale et laborieuse de l'ONU ou toute enquête sérieuse sur cette attaque suspecte et inattendue contre des touristes dans la partie du Cachemire contrôlée par l'Inde.

D'emblée, le 7 mai, le gouvernement indien de Modi a lancé une opération spectaculaire contre le Pakistan, baptisée «Operation Sindoor», une frappe de missiles présentée comme une «opération antiterroriste». Le Pakistan a immédiatement riposté avec une contre-attaque baptisée «Operation Bunyan al-Marsus» contre «l'invasion indienne».

Tout est dans la culture. Sindoor est un classique de la culture hindoue, qui fait référence à la marque vermillon appliquée sur le front des femmes mariées. Pas étonnant que les Chinois l'aient immédiatement traduit par «Operation Vermillion».

Pourtant, ce que la planète entière a retenu de cette escalade inquiétante, indépendamment de toute tentative de contextualisation, sans parler des pratiques culturelles codées par couleur, c'est l'élément Top Gun revisité sauce Bollywood : dans la nuit du 7 mai, l'armée de l'air pakistanaise (PAF) et l'armée de l'air indienne (IAF) ont été directement impliquées dans la plus grande et la plus high-tech des batailles aériennes du jeune XXIe siècle, qui a duré une heure entière, et a vu s'affronter des dizaines d'avions de combat de 4ème et 4,5ème génération.

Contre toute attente, ce ne sont pas les Indiens, mais un internaute chinois, le célèbre blogueur Hao Gege, à avoir offert un spectacle hautement divertissant avec sa parodie hilarante et désormais virale intitulée «L'avion tout juste acheté a été abattu». Il faisait bien sûr référence aux Rafales français de l'IAF décimés par les chasseurs J-10C chinois, qui maîtrisent parfaitement la guerre électronique et sont équipés de missiles air-air PL-15 peu coûteux, précis et d'une efficacité redoutable.

Ajoutez à cela du matériel chinois tel que le système défensif antiaérien HQ-9 et l'AWACS ZDK-03. Le J-10C, soit dit en passant, ne coûte que 40 millions de dollars, soit environ six fois moins qu'un Rafale.

Inévitablement, toute cette affaire s'est muée en cauchemar médiatique, non seulement pour New Delhi, mais surtout pour le complexe militaro-industriel français, avec son lot de rumeurs et de démentis de toutes parts. Islamabad a affirmé avoir détruit six avions de combat indiens (dont trois Rafale, d'une valeur totale de 865 millions de dollars, ainsi qu'un Su-30 russe, un MiG-29 et un drone Heron israélien), paralysé 70% du réseau électrique indien et détruit le système de défense S-400 de fabrication russe. L'Inde, pour sa part, a nié avec véhémence toutes ces allégations à de nombreuses reprises.

Puis, après ce qui s'est apparenté à une véritable tempête dans un verre d'eau, le Pakistan a annoncé le 10 mai avoir remporté la guerre. Deux jours plus tard, l'Inde a fait de même.

Le bruit et la fureur ont toutefois persisté, allant du J-10C savourant son statut de superstar deTop Gun et de la flambée des actions chinoises dans un «moment DeepSeek» très prisé dans la guerre moderne, à la scène ridicule du président américain Donald Trump affirmant être à l'origine du cessez-le-feu entre l'Inde et le Pakistan, qui, dans l'état actuel des choses, ressemble davantage à une pause.


Un Rafale pour le prix de six J-10C

Le fait est qu'Islamabad et New Delhi ont déployé un arsenal fulgurant de missiles balistiques, de missiles de croisière, de bombes guidées et de drones suicides pour s'attaquer mutuellement dans une série de frappes transfrontalières, tout en étant confrontés à l'inefficacité surprenante d'une grande partie de leurs propres systèmes de défense aérienne et antimissiles. Pas étonnant que les deux parties aient eu besoin d'un «cessez-le-feu» rapide.

L'interprétation qui prévaut dans le monde entier repose sur des faits solides. Et ces faits changent profondément la donne : pour la première fois, des armes et des équipements fabriqués en Chine ont vaincu des armes et du matériel occidentaux de qualité similaire, non pas dans un scénario de guerre simulée, mais dans des conditions de combat aérien extrêmes. Aucune campagne de communication ni aucune publicité sur papier glacé ne peuvent rivaliser avec cette démonstration pratique du complexe militaro-industriel chinois.

Soit dit en passant, le J-10C n'est même pas un chasseur chinois de dernière génération. Ces derniers sont le J-20 et le J-35 (tous deux des chasseurs furtifs de 5è génération), le J-16 et le J-15 (chasseurs multirôles de 4,5è génération) et les chasseurs de 6e génération (J-36 et J-50) encore en phase de test.

L'une des meilleures explications du succès de la PAF et de la Chine a sans doute été donnée par l'ancien colonel de l'armée de l'air chinoise et stratège Wang Xiangsui. Il l'attribue à une triade : la maîtrise de la guerre des systèmes, comme dans les systèmes de combat aérien chinois hautement intégrés et synchronisés, la compétence des pilotes pakistanais, et la préparation à la guerre. Selon lui, la PAF a imité ce que fait la Chine : investir dans des avions de combat de 6è génération, des missiles DF-17, et des satellites quantiques.

D'autres analyses approfondies réalisées par les experts militaires Zhang Xuefeng et Bai Mengchen complètent en détail le cadre conceptuel de Wang.


Quand Hindutva rencontre le sionisme

Ce qui a motivé cette guerre éclair ? Il ne s'agissait pas que du problème insoluble du Cachemire hérité du Raj britannique. Même si les fanatiques hindouistes gravitant autour du Premier ministre indien Narendra Modi et la junte pakistanaise au pouvoir, qui a illégalement emprisonné le Premier ministre pakistanais Imran Khan, présentent de nombreux aspects déplaisants, une telle guerre ne peut profiter qu'aux suspects habituels, déterminés à déclencher plusieurs degrés de guerre hybride et à diviser pour mieux régner dans les pays du Sud Global.

L'Inde et le Pakistan sont tous deux membres permanents de l'Organisation de coopération de Shanghai (OCS). Leur différend aurait pu être réglé à la table de l'OCS, avec la présence de la Russie, de la Chine et de l'Iran en guise de médiateurs et pacificateurs. Mais Moscou et Téhéran ont préféré agir de manière indépendante et bilatérale, chacune essayant à sa manière de ramener les belligérants à la raison à titre de médiateurs. Le succès de leur démarche est discutable.

L'Inde est également – en théorie – un membre de premier plan des BRICS, l'un des fondateurs de cette puissance multipolaire. Elle se targue d'excellentes relations stratégiques avec la Russie et de relations géoéconomiques avec la nouvelle puissance des BRICS+ en Asie occidentale, l'Iran. Opposer l'Inde au Pakistan, c'est opposer New Delhi à Pékin, qui soutient pleinement Islamabad via son projet phare des Nouvelles Routes de la Soie, le CPEC (Corridor économique Chine-Pakistan). La guerre peut donc également être considérée comme une attaque contre les BRICS de l'intérieur.

Les soi-disants élites indiennes et pakistanaises ont été très faciles à piéger. Il suffit de manipuler la «fierté nationale», un argument facile, et les suspects habituels maîtrisent cet art à la perfection.

Le tableau d'ensemble s'assombrit d'autant plus quand on voit que New Delhi, toujours complexée parce que, contrairement aux Chinois, elle n'a pas toujours enterré son propre «siècle d'humiliation» face à la puissance anglo-saxonne, continue d'hésiter entre une intégration géo-économique plus profonde à la Russie – et à la Chine – tout en comptant sur l'axe Washington-Tel Aviv pour se défendre et assurer sa sécurité.

L'hindutva et le sionisme se rejoignent à plus d'un titre. L'Inde utilise des drones israéliens Heron et Searcher pour patrouiller ses frontières, ainsi que des missiles antichars Spike. Des conseillers israéliens ont formé les services du renseignement indiens. Des entreprises israéliennes de cybersécurité aident New Delhi à traquer les menaces d'espionnage et diverses «insurrections».

Junaid S. Ahmad, directeur du Centre d'études sur l'islam et la décolonisation (CSID) à Islamabad, va encore plus loin. Il pointe directement du doigt «Gaza dans l'Himalaya», le gouvernement Modi étant empêtré dans une «guerre fantasmée» au Cachemire.

Alors que l'Inde importe des quantités considérables d'équipements militaires, Ahmad affirme que «le sionisme et l'hindutva ne partagent pas seulement des stratégies, mais aussi cette même vision du monde : la croyance que la suprématie est sacrée et que la conquête est une forme de rédemption», les musulmans de Gaza étant qualifiés de «partisans du Hamas» et leurs homologues cachemiris de «terroristes».

Ahmad identifie à juste titre l'hindutva comme une «théologie suprémaciste», avec un État hindou «purifié de toute différence, qu'il s'agisse des musulmans, des chrétiens ou des dalits». Comment une telle idéologie pourrait-elle être acceptée par l'éthique des BRICS ?

La guerre de 2025 entre l'Inde et le Pakistan pourrait entrer dans l'histoire en raison de la célèbre bataille aérienne et des frasques de Bollywood – un cocktail postmoderniste chaotique alliant guerre technologique, opérations psychologiques, guerre de l'information et dissonance cognitive. Pendant quelques jours, elle a fait office de téléréalité mondiale et de spectacle divertissant plutôt que de véritable guerre. Et pourtant ce n'est pas sans inquiéter, car cela masque les troubles profonds qui agitent une Inde en proie à des problèmes systémiques.

Que signifie réellement le concept de Bharat, la nouvelle appellation officielle de l'Inde ? Bharat fait référence à l'empereur Bharata, considéré comme le premier conquérant de tout le sous-continent indien. Dans un style très israélien, une fresque représentant l'empire Bharata est exposée depuis 2023 au Parlement indien, intégrant ouvertement des territoires appartenant au Pakistan et au Bangladesh.

Qu'est-ce qu'on peut vraiment appeler «terrorisme» dans le contexte du Bharat ? Est-ce que tous les Cachemiris, Pakistanais et Bangladais vont être considérés comme des terroristes ? Le véritable dirigeant de l'organisation mère du Bharatiya Janata Party (BJP) [parti d'extrême droite nationaliste hindou], le Rashtrapati Bhagwat, affirme que «l'empire Bharata» verra inévitablement le jour. Et les médias indiens se livrent à une campagne tous azimuts pour promouvoir l'indépendance du Baloutchistan vis-à-vis du Pakistan.

Qui sortira vainqueur de tous ces conflits ? Certainement pas les Indiens eux-mêmes. Ni les BRICS. Plutôt les suspects de toujours, adeptes de la stratégie «diviser pour régner».

Pepe Escobar

source : The Cradle via Spirit of Free Speech

https://reseauinternational.net/guerre-inde-pakistan-les-gagnants-et-les-perdants/

Pepe Escobar
Pepe Escobar est l'auteur de Globalistan : How the Globalized World is Dissolving into Liquid War (Nimble Books, 2007), Red Zone Blues : a snapshot of Baghdad during the surge (Nimble Books, 2007), Obama does Globalistan (Nimble Books, 2009), Empire of Chaos (Nimble Books) et le petit dernier, 2030, traduit en français.