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Le prix de la course à la bombe atomique

Démarré par JacquesL, 19 Mars 2007, 12:34:14 AM

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JacquesL

"La mouette", blogueur du Monde, a résumé ce film bien mieux que je ne pourrais le faire, d'autant que je suis entré dedans après le début :
http://lamouette.blog.lemonde.fr/2007/03/17/le-prix-de-la-course-a-la-bombe-nucleaire-francaise/



Citer
17 mars 2007
Le prix de la course à la bombe nucléaire française


Vendredi 16 mars en début de soirée, Arte a brisé un tabou. En diffusant à une heure de grande écoute le téléfilm "La course à la bombe", la chaîne franco-allemande a levé un coin du voile sur le secret défense et les raisons d'Etat au nom desquels on a longtemps caché aux français le coût humain et environnemental payé pour rentrer dans le club des puissances nucléaires. Sans participer à un faux esprit de repentance, il convient d'affronter notre histoire nationale sans jugement péremptoire mais avec objectivité.

En 1956, la France prend la décision de se doter de l'arme atomique et confie cette mission au CEA sous le contrôle des militaires. Dès 1957, se pose la question du choix d'un site d'accueil des essais nucléaires. La Polynésie et les îles Kerguelen sont un moment évoquées mais le choix s'arrête dans un premier temps sur un espace désertique, le centre du Sahara, alors sous souveraineté française.

Le premier site d'essais est créé à 700 km au Sud de Colomb-Béchar, à côté de Reggane dans le Tanezrouf. Une importante base dotée de toute la logistique nécessaire est constituée, le CSEM (Centre Saharien d'Expérimentations Militaires). Les premiers essais, atmosphériques, se déroulent dans ce secteur, à Hamoudia du 13 février 1960 au 25 avril 1961. Ils sont très vite suivis d'essais en galeries plus au Sud et à l'Est à proximité d'In Ecker, à 150 km au Nord de Tamanrasset, au CEMO (Centre d'Expérimentations Militaires des Oasis).

Officiellement la population saharienne vivant dans un rayon de 100 km autour d'In Ecker ne dépassait pas deux mille personnes alors que dans le même temps les effectifs des personnels civils et militaires affectés aux essais comptaient environ 10 000 personnes au CSEM à Reggane et deux mille logées en base-vie au CEMO à In Ecker.

Les quatre premier essais sont des tirs aériens dénommés « Gerboise ». Afin de répondre aux critiques relatives aux retombées, la technique des essais souterrains est appliquée dès 1961.

Les implantations du CEMO (Centre d'Expérimentations Militaires des Oasis) étaient situées dans le Hoggar et les expérimentations avaient lieu plus particulièrement dans le massif granitique du Tan Afella près d'In-Ecker, à 150 km au Nord de Tamanrasset.

Le massif lui-même a un pourtour de 40 km environ et se situe entre 1500 et 2000 m d'altitude, le plateau environnant étant à 1000 m d'altitude. Les tirs avaient lieu au fond de galeries creusées horizontalement dans la montagne et dont la longueur totale était d'un kilomètre approximativement. La galerie de tir proprement dite se terminait en colimaçon de telle manière que l'effet mécanique du tir sur la roche provoque la fermeture de la galerie. Un bouchon de béton fermait l'entrée de la galerie à la sortie. Sur les côtés de la galerie étaient aménagées des recoupes où de nombreux appareils de mesures et d'enregistrement étaient placés.

L'essentiel, sinon la totalité des produits et éléments radioactifs restait ainsi confiné dans la cavité créée par le tir. Entre le 3 novembre 1961 et le 16 février 1966, il fut ainsi procédé à treize tirs. Des tirs conçus de façon comparable aux techniques mises en oeuvre à l'époque par les Américains au Nevada. Leur mise en oeuvre pourtant a donné lieu a de multiples incidents.

Quatre essais souterrains sur treize n'ont pas été totalement contenus ou confinés : Béryl, Améthyste, Rubis et Jade. Les deux premiers se sont traduits par une sortie de laves radioactives. Dans les deux autres cas, des sorties limitées à des radioéléments gazeux ou volatils ont été observées officiellement sans expositions significatives au plan de la santé du personnel et des populations...

Le 1er mai 1962, le tir Béryl frise la catastrophe. Pour assurer le confinement de la radioactivité, le colimaçon était calculé pour que l'onde de choc le ferme avant l'arrivée des laves. Or, lors de l'essai l'obturation de la galerie a été trop tardive. Une fraction égale à 5 à 10 % de la radioactivité est sortie par la galerie, sous forme de laves et de scories projetées qui se sont solidifiées sur le carreau de la galerie, d'aérosols et de produits gazeux formant un nuage qui a culminé jusqu'aux environs de 2600 m d'altitude à l'origine d'une radioactivité détectable jusqu'à quelques centaines de kilomètres.

La trajectoire du nuage mortifére passe au-dessus du poste de commandement où étaient regroupées les personnalités et le personnel opérationnel. C'est la panique. Les deux ministres présents MM. Pierre Messmer et Gaston Palewski s'enfuient en voiture mais sont contaminés par la climatisation demeurée ouverte. De nombreuses personnes sont irradiées. 15 seulement selon les sources "autorisées" sur les 2000 personnes participant à l'essai. Elles sont prises en charge à la base et décontaminées par lavage à l'eau, rincements gastriques et coupe des cheveux. Les autorités reconnaissent toutefois que neuf personnes situées dans un poste isolé ont traversé la zone contaminée après avoir, au moins temporairement, ôté leur masque.

C'est leur péripétie qui est évoquée dans le téléfilm diffusé par Arte. Dès leur retour à la base vie, elles ont fait l'objet d'une surveillance clinique, hématologique et radiologique, avant d'être transportées à l'hôpital militaire Percy à Clamart pour surveillance et examens complémentaires. Leur suivi n'aurait pas révélé de pathologie spécifique. Quant aux populations nomades exposées, les doses reçues auraient été de l'ordre de grandeur d'une année de radioactivité naturelle (!).

Lors de l'essai Amethyste,le 30 mars 1963, un nouvel incident se reproduit avec la sortie d'un panache contenant des aérosols et des produits gazeux, en quantité beaucoup plus faible que dans le cas de Béryl. Lors de l'expérience Rubis, le 20 octobre 1963, une sortie de gaz rares et d'iodes s'est produite dans l'heure suivant la réalisation de l'essai, avec formation d'un panache. Celui-ci s'est d'abord dirigé vers le nord, puis il est revenu vers le sud, en direction de Oasis 2 où les retombées, favorisées par des pluies importantes, ont conduit à l'évacuation de 500 personnes. La contamination est détectée jusqu'à Tamanrasset, à 150 km au sud. Dans le cas de l'expérimentation Jade, le 30 mai 1965, il est observé une sortie de gaz rares et d'iode par la galerie.

Parallèlement aux expérimentations nucléaires, des expériences complémentaires sont menées au sol sur les sites du CSEM et du CEMO sur la physique des aérosols de plutonium (sans dégagement d'énergie nucléaire). Au cours d'une expérience sur pastille, le 19 avril 1962 au CSEM, une détonation prématurée de l'explosif chimique a eu lieu en fin de préparation de l'expérimentation. Les opérations étaient effectuées par une équipe militaire. Dix personnes qui se trouvaient dans un rayon de 50 m ont été affectées par l'explosion dont un blessé grave.

Conformément aux accords d'Evian, les sites du CSEM et du CEMO ont été remis aux autorités algériennes dans le courant de l'année 1967, après qu'il ait été procédé au démontage de l'ensemble des installations techniques, au nettoyage et à l'obturation des galeries.

A coté de la vérité officielle, circulent des chiffres et des informations totalement contradictoires qui remettent en cause l'absence de conséquences de l'aventure scientifique de la création de la bombe nucléaire française. A la suite du tir Béryl, certains évoquent 17 victimes qui ont fini par mourir de leucémie.

Pourtant, les autorités française continuent à réfuter tout lien de cause à effet entre les victimes de cancer ayant travaillé en Algérie et les expériences nucléaires. Les quatre essais atmosphériques effectués en Algérie ont contaminé 240 personnes. Au total les tirs souterrains auraient engendrer chez 581 personnes des doses supérieures à 5 mSv, dont près de la moitié imputable au seul tir Béryl. Dans l'ensemble, 24000 personnes ont travaillé à Reggane durant 5 ans dont 8000 soldats qui participèrent aux tirs, faisant exploser 16 bombes nucléaires d'une puissance de 1 à 127 kT.

Sans parler des populations civiles exposées, qu'il s'agisse du sahara ou de Mururora, de multiples témoignages indiquent qu'aucune précaution n'était prise pour veiller à la sécurité des militaires, officiers et hommes du rang, contrairement aux précautions adoptées pour les civils du CEA. Un véritable scandale d'Etat.
Vidéo :
http://www.dailymotion.com/video/x19mhz_nucleaire-francais-en-algerie

Ma réflexion personnelle sur ce téléfilm porte sur un autre point : l'attitude générale du lieutenant ou sous-lieutenant oublié sur site avec ses hommes, en oubliant de lui donner l'ordre de repli.
Par de nombreux points, et par ses paroles coléreuses envers ses supérieurs, comme dans le soin qu'il prenait de ses hommes et des Saharoui du Djébel, ce jeune homme montrait à tout instant une forte demande en loyautés, et une démonstration de ce que loyauté veut dire.
Il se trouve que ce n'est pas anecdotique, mais que c'est extrêmement fréquent dans les motivations de militaires. Le danger partagé appelle des solidarités très fiables.

Voir également le désarroi et la colère des militaires engagés dans des guerres coloniales politiquement et militairement intenables, qui se sont estimés trahis par un pouvoir politique incapable de les prévenir clairement et à l'avance du sort de la guerre qu'il leur a fait livrer.

Voilà donc une nouvelle confirmation du point crucial mis au jour par Yvan Böszörmenyi-Nagy : dans l'espèce humaine, on est équipés pour tenir à jour un grand livre des loyautés dues, notamment transgénérationnelles. Le psychothérapeute peut agir efficacement dans la mesure où il prouve être plus fiable et plus loyal que tout ce qu'on a rencontré auparavant.