Minuscules aperçus sur la difficulté d'enseigner, par Jacques Salomé.
Note de lecture à :
http://www.pedagopsy.eu/livre_enseigner_salome.htm
CiterMinuscules aperçus sur la difficulté d'enseigner
Jacques Salomé
Editions Albin Michel. (2004) ISBN: 2-226-15337-3 (12€)
Dernière de couverture
Aujourd'hui, la plupart des enseignants sont en souffrance face à des enfants « téflon » sur lesquels rien n'accroche, ni gratifications ni sanctions. Ils se sentent démunis face à des élèves pour lesquels l'acquisition de savoirs et de savoir-faire semble le dernier des soucis, tant leur disponibilité, leur écoute et leur attention sont au minimum. Des enfants et des adolescents, dont les centres d'intérêt sont extra-scolaires et dont l'essentiel des connaissances est acquis, dans le désordre et la confusion, hors de l'école. Jacques Salomé nous propose des jalons concrets pour faire se rencontrer le peuple de l'école : parents, enfants, enseignants. Il nous invite à nous mobiliser pour introduire dans le cursus scolaire, dès la maternelle, un enseignement de la communication créatrice et non violente. Une vraie initiation à la communication relationnelle considérée comme une matière à part entière au même titre que le calcul, l'histoire, la géographie, la biologie ou les lettres.
Table des matières
Pour une éducation à la conscientisation .
Le peuple de l'école
Enseigner quoi ? Comment ? A qui ?
Qu'il est difficile aujourd'hui d'enseigner!
Protégeons l'école
Violence à l'école et école de la violence
Quelques interrogations sur les sources banales de la violence
Les enfants aussi veulent apprendre à communiquer autrement!
Sanctions et punitions
A l'écoute possible de la souffrance psychique chez l'enfant
Apprendre à communiquer est possible
Réformes scolaires et changements possibles
Pourquoi enseigner la communication à l'école ?
Un apprentissage nécessaire et urgent
Les besoins de l'élève au cœur de l'école
Supplique d'un enfant à ses enseignants
Adresse d'un enseignant à ses futurs élèves
Bibliographie
Un passage
<< Prendre le risque de changer nos habitudes relationnelles...
La prédominance du système question-réponse dans la plupart des relations pédagogiques. Dans ce système structuré par de solides habitudes, celui qui pose une question attend une réponse qui aille dans le sens de ses attentes, de ce qu'il sait, de ce qu'il veut. Ce qui fait que beaucoup de demandes faites par des adultes sont vécues par beaucoup d'enfants comme des exigences déguisées.
Quand un enseignant pose une question, il attend que l'élève donne la bonne réponse, celle du livre, ou du savoir « officiel » qu'il possède, lui, et dont il veut vérifier l'acquisition ou l'assimilation chez l'enfant. L'évaluation de l'élève se fera sur l'adéquation de la réponse à la question.
Certains pédagogues, cependant, savent l'importance d'accueillir et de s'appuyer sur la la réponse attendue, ou des connaissances à acquérir, pour permettre à l'élève de la relier à ses connaissances et d'intégrer un savoir nouveau, qui devra se différencier des acquis antérieurs.
Le dépassement d'un système de type « question-réponse », trop fermé, quand il est remplacé par une invitation à partager, échanger, témoigner va renforcer la communication relationnelle qui est à la base d'une participation plus ouverte de tous les membres d'une classe.
• La persistance des rapports de dévalorisation. Nous voyons plus facilement dans le comportement des enfants ce qui nous blesse, nous dérange, ou nous irrite plutôt que le positif de leur conduite ou l'aspect novateur de leur comportement.
Dans ma propre scolarité, j'aurais souhaité rencontrer un enseignant qui puisse me confirmer que dans une dictée de quatrevingts mots, j'en avais écrit soixante-quinze justes ! La confiance en soi se construit sur la confirmation des ressources et des réussites, et non sur la mise en évidence des manques et des insuffisances, sur la dévalorisation trop fréquente de l'image de soi. La persistance de rapports de dévalorisation constitue certainement une des violences endémiques parmi les plus fréquentes du système scolaire, une des plus tenaces et des plus permanentes. Ce qui laissera des traces durables dans la relation au monde d'un enfant.
• Le refus ou l'absence d'implication personnelle. Arrêter de parler sur l'autre, pour accepter de parler à l'autre, supposerait de prendre le risque d'apprendre à parler de soi, de pouvoir dire son ressenti, sa perception, ou sa position, et donc de se signifier, de se définir devant les élèves, plutôt que de les définir. Cela permet de faire sentir à chacun des protagonistes d'un échange qu'il y a vraiment quelqu'un à chaque bout de la relation.
Au lieu d'accuser un enfant de n'avoir pas fait, il serait plus important de dire sa déception ou de confirmer son attente, de renouveler sa demande, de confirmer sa position, pour solliciter, remobiliser, bousculer la passivité, le refus ou le blocage dans lequel un élève peut s'enfermer.
Quand nous parlons sur l'autre, quand nous le définissons, nous n'existons pas comme une personne de référence pour lui et ce dernier, enfermé dans notre discours, n'a pas non plus le sentiment d'exister, d'être reconnu pour ce qu'il est>> p.63-65