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jacquesloyal

2007-11-12, 17:03:07
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#1
Europe / Le grand hold-up de l’Ukraine ...
Last post by JacquesL - Aujourd'hui à 11:21:53 PM
Le grand hold-up de l'Ukraine n'est pas encore terminé



par Ron Paul

«La guerre, c'est la paix». La dette est une bonne chose. La liberté, c'est l'esclavage. Nous vivons dans une société de contre-vérités où le joueur de flûte sera payé, et la dette effacée.

L'encre de la signature du président [Joe] Biden transférant 61 milliards de dollars supplémentaires au trou noir appelé Ukraine avait à peine séché que les médias grand public ont annoncé que cet accord n'était pas le dernier acte d'une politique américaine vouée à l'échec. Les élites n'ont aucunement l'intention de mettre fin à cette manne qui ponctionne les richesses de la classe moyenne et populaire pour les transférer vers la classe aisée et connectée.

Reuters a écrit juste après l'adoption du projet de loi sur l'aide que «la bouée de sauvetage de 61 milliards de dollars de l'Ukraine n'est pas suffisante». Le chef de la minorité du Sénat, Mitch McConnell, a déclaré dans les émissions du dimanche, après l'adoption du projet de loi, que 61 milliards de dollars ne représentent «pas beaucoup d'argent pour nous...». Après tout, il est toujours plus facile de dépenser l'argent des autres !

Le ministre ukrainien des Affaires étrangères, Dmytro Kuleba, est loin d'être reconnaissant pour les 170 milliards de dollars que nous avons envoyés jusqu'à présent à son pays. Dans une interview accordée au magazine Foreign Policy lors du vote du programme d'aide, Kuleba a eu le culot de reprocher aux États-Unis de ne pas produire d'armes assez rapidement.

«Si vous ne pouvez pas produire suffisamment d'intercepteurs pour aider l'Ukraine à gagner la guerre contre le pays qui veut détruire l'ordre mondial, comment voulez-vous gagner la guerre contre un ennemi peut-être plus fort que la Russie ?»

Que diriez-vous d'un «merci» ?

On peut comprendre la frustration des Ukrainiens. La majeure partie de cet argent ne les aidera pas à combattre la Russie. L'aide militaire américaine à l'Ukraine a épuisé nos propres stocks d'armes. L'argent servira donc à créer de nouvelles lignes de production pour remplacer les armes déjà envoyées à l'Ukraine. Tout tourne autour de l'industrie américaine de l'armement. Le président Biden l'a admis en déclarant :

«Nous aidons l'Ukraine tout en investissant dans notre propre industrie».

C'est pourquoi Washington cherche désespérément à s'assurer que si Donald Trump revient à la Maison-Blanche, le train de la sauce «Ukraine» ne pourra pas être interrompu par son administration – ou les suivantes. La semaine dernière, on a appris que le gouvernement ukrainien discutait avec l'administration Biden en vue de signer un accord de sécurité de dix ans qui bloquerait les fonds américains destinés à l'Ukraine pour les deux prochaines administrations américaines et demie à venir. Cet accord lierait inconstitutionnellement les mains des futurs présidents en matière de politique étrangère et placerait les Américains dans l'obligation de payer les milliards de dollars supplémentaires qui leur seraient arrachés et iraient à l'industrie de l'armement et à un gouvernement étranger corrompu.

L'industrie américaine de l'armement et ses majorettes à Washington DC sont déterminées à continuer à faire couler l'argent pour l'Ukraine... jusqu'à ce qu'elles trouvent un moyen de déclencher une guerre avec la Chine après avoir perdu la guerre actuelle avec la Russie. Tout dépend bien sûr de ce qui restera de nous lorsque la fumée se dissipera.

Lorsque le président Biden a signé le projet de loi de 95 milliards de dollars destiné à poursuivre les guerres en Ukraine et à Gaza et à provoquer une future guerre avec la Chine, il a déclaré que c'était «Un bon jour pour la paix dans le monde». Oui, et «La guerre, c'est la paix». La dette est une bonne chose. La liberté, c'est l'esclavage. Nous vivons dans une société de contre-vérités où les milliards dépensés pour des guerres inutiles ne représentent «pas beaucoup d'argent». Mais le joueur de flûte sera payé, et la dette effacée.

source : Libertarian Institute via Spirit of Free Speech

https://reseauinternational.net/le-grand-hold-up-de-lukraine-nest-pas-encore-termine/
#2
Europe / Poutine règle la boussole pou...
Last post by JacquesL - Aujourd'hui à 09:59:59 PM
Poutine règle la boussole pour le reste du voyage

Publié le mai 16, 2024 par Wayan
 




Par M.K. Bhadrakumar – Le 15 mai 2024 – Source Indian Punchline

Pour cette occasion historique, dans la salle Saint-André du palais du Grand Kremlin à Moscou, alors que la Russie se trouve à un moment tumultueux où elle sculpte et façonne son destin, le président Vladimir Poutine a prononcé un discours remarquablement bref lors de la cérémonie d'inauguration qui s'est tenue le 7 mai.

Il y avait tant à dire, compte tenu de l'importance de l'achèvement des deux décennies de pouvoir de Poutine et du début d'un nouveau mandat de six ans au Kremlin, jusqu'en 2030. La carrière politique d'un homme qui marque l'histoire, qui a chorégraphié la renaissance de son pays et le retour de la Russie sur le devant de la scène politique mondiale, a été tout à fait extraordinaire. En vérité, on s'attend à ce que le mandat de six ans de Poutine coïncide avec l'établissement de l'ordre mondial du 21e siècle. 

Poutine avait un seul message profond à transmettre au peuple russe, à savoir l'importance cruciale de l'unité nationale pour le passé récent et les temps à venir – sans unité, tout est perdu, alors qu'avec l'unité, tout est possible.

Le fait que Poutine qualifie le moment présent de "période charnière difficile" dans l'histoire de la Russie retient l'attention. De toute évidence, il ne nourrit pas d'espoirs irréalistes quant à la fin prochaine de la guerre en Ukraine. En fait, l'Occident n'est pas du tout prêt pour la paix. L'ancienne sous-secrétaire d'État Victoria Nuland l'a admis publiquement et sans détour dans une interview accordée à Politico le week-end dernier.

Poutine a procédé à deux nominations clés au sein de son nouveau gouvernement : la nomination de Mikhail Mishustin, brillant technocrate chargé de diriger l'économie russe dans un contexte de sanctions et de guerre, au poste de premier ministre, et le remplacement du ministre de la défense Sergei Shoigu par le premier vice-premier ministre Andrei Belousov. Chacun de ces changements témoigne des exigences professionnelles attendues, compte tenu de l'importance cruciale de la gestion de l'économie qu'une guerre de longue durée ne manquera pas d'entraîner.

Poutine s'est engagé à mettre en œuvre un programme social et économique extrêmement ambitieux au cours de son prochain mandat, dont la réussite exige des investissements publics à grande échelle. Il s'est également fixé comme objectif de hisser la Russie au rang de cinquième économie mondiale, derrière les États-Unis, la Chine, le Japon et l'Inde, ce qui constituerait un formidable exploit.

D'autre part, le budget de la défense de la Russie s'est envolé au cours des deux années de guerre en Ukraine pour atteindre 6,7 % du PIB, ce qui se rapproche des niveaux de l'ère soviétique. C'est là que Belousov entre en jeu. Économiste expérimenté, il a été pendant plus de dix ans le conseiller économique de confiance de Poutine. Belousov est un étatiste keynésien et un rare défenseur du contrôle de l'État dans l'économie "post-soviétique", qui a un passé irréprochable dans la vie publique et qui est aujourd'hui chargé de peaufiner le complexe militaro-industriel russe.

Le changement à la tête de la défense est particulièrement intéressant du point de vue du calendrier. Ces derniers mois, les troupes russes ont progressé dans l'est de l'Ukraine, mais le week-end dernier, elles ont lancé une nouvelle offensive dans la région de Kharkov, au nord-est du pays.

Le discours occidental veut que Moscou soit sur le point d'ordonner une offensive militaire majeure en Ukraine visant à écraser l'armée ukrainienne. Toutefois, il est clair que Poutine ressent le besoin d'adaptation et de développement tandis que les forces russes tentent de gagner autant de territoires que possible avant que le nouveau programme d'aide américain de 61 milliards de dollars ne soit débloqué.

Le secrétaire de presse du Kremlin, Dmitri Peskov, a expliqué que la nomination d'un ministre civil de la défense répondait à un besoin d'"innovation". Selon Tass, Peskov aurait déclaré : "Sur le champ de bataille actuel, le vainqueur est celui qui est le plus ouvert à l'innovation... C'est pourquoi, à ce stade, le président a pris la décision de nommer un civil à la tête du ministère de la défense".

La remarque de Peskov indique clairement que Poutine est en train de se préparer pour le long terme. Six ans, c'est long et il est fort probable que la guerre par procuration avec les États-Unis s'étende bien au-delà de l'Ukraine ou de l'Europe.

Ainsi, la situation complexe de la présence russe sur la base aérienne américaine de Niamey, au Niger, reflète les enjeux géopolitiques qui se développent en Afrique. Rien que la semaine dernière, la Russie a eu des contacts intensifs à haut niveau avec des pays d'Afrique de l'Ouest situés sur la côte atlantique.

L'idée semble être que la stratégie militaire proprement dite sera probablement élaborée par le général Valery Gerasimov, chef de l'état-major général, sous le contrôle strict de Poutine lui-même. Alexandra Prokopenko, ancienne conseillère à la banque centrale de Russie, a écrit sur X : "La priorité de Poutine est la guerre ; la guerre d'usure se gagne par l'économie". En clair, Poutine a l'intention de gagner la guerre en broyant l'Ukraine dans une course aux armements prolongée à l'échelle industrielle.

Parallèlement, la visite du secrétaire d'État américain Antony Blinken à Kiev mardi est hautement symbolique, car il s'agit d'un vote de confiance pour le président Vladimir Zelensky, dont le mandat présidentiel s'achève le 20 mai, ce qui remet évidemment en question la légitimité de son régime. La visite de Blinken est une réponse directe à la nouvelle offensive menée par les forces russes dans la région sensible de Kharkov depuis vendredi dernier, où les lignes de défense ukrainiennes sont en train de se fissurer.

Bloomberg a rapporté hier que l'administration américaine s'efforçait de fournir à l'Ukraine une batterie supplémentaire de défense aérienne Patriot ainsi que des radars pour aider le pays à repousser les attaques aériennes russes. Blinken a affirmé que le programme d'aide de 61 milliards de dollars en cours de préparation allait "faire une réelle différence" sur le champ de bataille. Il a souligné que "l'Ukraine peut compter sur ses partenaires pour un soutien durable et à long terme".

L'intention derrière la visite surprise de Blinken à Kiev est de montrer à Moscou que toute hypothèse selon laquelle les États-Unis abandonneront l'Ukraine tôt ou tard, en particulier si l'élection présidentielle américaine de cette année porte Donald Trump à la Maison Blanche, est profondément erronée.

L'argumentaire va-t-en-guerre qui s'efforce de naître au sein de la DC est le suivant : "Quels que soient les résultats de novembre, si le Congrès ne s'appuie pas sur le dernier programme d'aide en paroles et en actes, cela nuira au leadership et à la crédibilité des États-Unis dans le monde, ce qui enhardira nos ennemis", selon les termes de Liana Fix, experte en politique étrangère et de sécurité russe et européenne au Council on Foreign Relations à New York.

Dans le scénario ci-dessus, la Russie ne cherchera qu'à consolider ses liens avec la Chine, l'Iran, etc. La Russie considère que la corrélation des forces joue en sa faveur. La vision russe du monde est en harmonie avec celle du Sud. Le ministre indien des affaires étrangères, S. Jaishankar, a déclaré hier lors d'un forum public à New Delhi : "Aucun pays n'est aujourd'hui suffisamment dominant... Il s'agit d'une période de transition où l'ancien ordre est à bout de souffle, mais où le nouvel ordre n'est pas encore arrivé." Jaishankar a également souligné que la Russie est dotée de ressources naturelles telles que le pétrole, le charbon et des métaux de différentes sortes que l'Inde peut se procurer.

La trajectoire de la politique étrangère russe a non seulement survécu aux deux années de conflit en Ukraine, mais son raisonnement sous-jacent est en fait justifié. La confiance totale accordée par Poutine au ministre des affaires étrangères, Sergey Lavrov, qui est à la tête de son ministère depuis 20 ans déjà, en fait le diplomate le plus anciennement en poste sur la place Smolenskaya après Andrei Gromyko, en est la meilleure illustration.

M.K. Bhadrakumar

Traduit par Wayan, relu par Hervé, pour le Saker Francophone.

https://lesakerfrancophone.fr/poutine-regle-la-boussole-pour-le-reste-du-voyage
#3
Questions mondiales. / Avant tout, personne n’est en ...
Last post by JacquesL - Aujourd'hui à 07:58:36 PM
Avant tout, personne n'est en concurrence avec les États-Unis

Publié le mai 16, 2024 par Wayan



Par Anatol Lieven – 1er mai 2024 – Source Foreign Affairs





Les élites américaines sont, en matière de sécurité, obsédées par la menace que représentent la Chine et la Russie pour la primauté mondiale des États-Unis. Il s'agit d'une grave erreur de calcul stratégique. Le réseau mondial étasunien d'alliés puissants et de bases (alors que la Chine et la Russie n'en ont pratiquement pas), leur puissance maritime inégalée et la possession de la seule monnaie véritablement mondiale signifient qu'aucun autre pays ne peut défier Washington sur la scène mondiale en tant que leader.

Il n'existe d'ailleurs aucune preuve réelle que ces pays souhaitent le faire. Ce n'est pas seulement qu'une attaque non nucléaire contre l'OTAN dépasse de loin les capacités russes ; Jusqu'à son invasion à grande échelle de l'Ukraine, la Russie avait consacré de grands efforts à tenter de courtiser l'Allemagne et la France. La Russie n'a aucun intérêt à provoquer les États-Unis, risquant un blocus maritime qui dévasterait ses exportations énergétiques, ni la Chine à perturber le système commercial et financier mondial dont elle dépend pour la plupart de ses échanges. Aucun allié ou système d'alliance des États-Unis n'est menacé par une puissance rivale tant que les États-Unis et leurs alliés se limitent à leur propre défense. Washington contrôle fermement la grande puissance économique qu'est l'Europe occidentale et l'Asie maritime de l'Est, ainsi que son propre hémisphère.

Toutes choses étant égales par ailleurs, la primauté mondiale des États-Unis est déjà assurée pour très longtemps. Le problème est que toutes les autres choses ne sont pas égales.

Depuis la fin de la guerre froide, trop de stratèges américains ont oublié une règle fondamentale de la géopolitique et de la guerre : tout pouvoir réel est en fin de compte local et relatif. C'est-à-dire qu'il s'agit de la quantité de force, d'argent ou d'influence qu'un État est capable et désireux d'exercer sur un sujet ou un lieu particulier, par rapport à ce que peuvent apporter des États rivaux. Ainsi, ce qui est vrai pour le monde dans son ensemble peut être totalement faux pour l'est de l'Ukraine ou la mer de Chine méridionale.

Cette vérité est illustrée par l'expérience des guerres américaines en Irak et en Afghanistan. Personne ne peut sérieusement suggérer que l'Iran, et encore moins le Pakistan, ressemble le moins du monde à un rival sérieux des États-Unis sur la scène mondiale. Pourtant, en Irak et en Afghanistan respectivement, Téhéran et Islamabad se sont révélés plus puissants.

Cela s'explique par tout un ensemble de facteurs historiques, culturels et religieux locaux – mais aussi tout simplement parce que, contrairement à Washington, ils étaient, sont et seront toujours voisins de ces pays. En tant que tels, ils avaient la proximité, la capacité, la volonté et la patience d'exercer plus de pouvoir et de courir plus de risques que les États-Unis n'ont voulu ou pu le faire.

Comme l'a souligné le président américain Barack Obama en 2016, cela vaut également pour l'Ukraine. Ce pays représente un intérêt majeur pour la Russie, bien plus qu'il ne l'est pour les États-Unis. Le point d'Obama concernant l'engagement comparatif a été assez clairement renforcé par les nouvelles récentes selon lesquelles l'administration Biden a exhorté l'Ukraine à cesser ses attaques contre les raffineries de pétrole russes, essentielles au financement de la guerre de la Russie en Ukraine – la raison étant que l'administration craint que ces attaques puissent faire grimper les prix de l'essence aux États-Unis et coûter la réélection du président américain Joe Biden en novembre. Entre-temps, la Russie a reconfiguré son économie pour la guerre et a utilisé la vie de dizaines de milliers de ses soldats dans le but de dominer l'Ukraine.

Pourtant, les États-Unis se sont retrouvés à défier la Russie, la Chine et l'Iran sur des terrains où ils détiennent des avantages considérables et croissants. Washington reproduit une erreur militaire classique : risquer sa position principale en consacrant des ressources à la défense d'avant-postes finalement indéfendables et, ce faisant, risquer à la fois l'épuisement et tant de défaites locales en chaine qu'elles entraînent finalement une défaite complète.

Le problème immédiat est la guerre en Ukraine. En proposant l'adhésion à l'OTAN d'un pays qu'aucune administration américaine n'a jamais eu l'intention d'entrer en guerre pour défendre, Washington a exposé l'Ukraine à un probable désastre et les États-Unis et l'OTAN à une grave humiliation. Les armes américaines de haute technologie ont été importantes pour la défense ukrainienne, mais les industries des États-Unis et de l'Union européenne ne parviennent pas à fournir à l'Ukraine des quantités suffisantes de munitions de base. Bien entendu, les pays occidentaux ne peuvent pas non plus fournir à l'Ukraine de nouveaux soldats pour renforcer ses rangs gravement épuisés – à moins qu'ils n'entrent eux-mêmes en guerre et risquent l'anéantissement nucléaire pour des endroits que, jusqu'à très récemment, personne en Occident ne considérait comme vitaux. D'un autre côté, la capacité de la Russie à vaincre l'Ukraine dans l'est de ce pays – au prix d'un coût énorme en pertes humaines et en matériel – n'indique en aucun cas ni la capacité ni la volonté de lancer une attaque directe contre l'OTAN.

La sage ligne stratégique pour les États-Unis serait donc de rechercher une paix de compromis – semblable au traité d'État autrichien de 1955, négocié avec l'Union soviétique – dans lequel la grande majorité de l'Ukraine est indépendante mais neutre et la question des territoires occupés par la Russie est reporté pour de futures négociations (l'approche adoptée par Washington à l'égard de Chypre du Nord occupée par la Turquie au cours des 40 dernières années). Un tel accord ne doit pas être considéré comme une défaite américaine mais comme un retrait tactique vers des positions préparées à partir d'un saillant indéfendable. Cela devrait être combiné avec un réarmement européen et des mesures visant à renforcer les défenses des membres existants de l'OTAN qui bordent la Russie, notamment les États baltes.

La Chine représente le plus grand risque local et le problème local le plus compliqué : le plus grand risque parce que la Chine peut imposer une défaite locale qui pourrait ruiner les États-Unis en tant que superpuissance et le plus compliqué parce que la Chine considère Taiwan comme faisant partie de son territoire souverain. Et même si les États-Unis (contrairement aux alliés de l'OTAN) ne sont pas obligés par traité de défendre Taïwan, ils ont un engagement moral à essayer de sauver Taïwan d'une conquête par la Chine.

(Les États-Unis se sont également engagés à essayer d'empêcher que l'ensemble de l'Ukraine ne soit conquise par la Russie, mais cela ne devrait pas impliquer un engagement soit à accepter l'Ukraine dans l'OTAN, soit à préserver tout le territoire de l'Ukraine à l'intérieur de ses frontières soviétiques. )

Taiwan représente également le contraste le plus frappant entre la puissance navale américaine à l'échelle mondiale et sa faiblesse croissante dans le voisinage immédiat de la Chine (et peut-être de l'Iran). Sur les océans du monde, avec trois porte-avions chinois contre 11 pour les États-Unis (plus deux appartenant chacun à la Grande-Bretagne, au Japon et à l'Inde), sans alliés mondiaux significatifs et sans bases navales majeures, Pékin ne peut pas lancer un défi sérieux aux États-Unis au-delà de ses eaux littorales. Contre toute attente, il n'y a tout simplement aucune chance réaliste que la Chine puisse envahir l'Australie, Guam ou le Japon.

Dans ces eaux-là, la situation est totalement différente, et les leçons de la guerre russe en Ukraine sont bouleversantes pour les chances navales américaines dans une guerre avec la Chine à propos de Taiwan. La marine ukrainienne est insignifiante comparée à la flotte russe de la mer Noire, et avant la guerre, il était universellement admis que la Russie dominerait la mer Noire sans problème sérieux. Mais grâce à des missiles terrestres et à des essaims de drones aériens et maritimes, les Ukrainiens ont réussi à anéantir en grande partie la flotte russe et à la chasser de sa base dans le port de Sébastopol en Crimée. Les Houthis au Yémen ont réussi à perturber sérieusement le commerce via la mer Rouge avec seulement un nombre très limité de drones aéroportés.

L'industrie chinoise peut produire un nombre pratiquement illimité de drones bon marché – bien trop nombreux pour que les missiles de défense aérienne américains très coûteux puissent les abattre. (Cela pourrait également devenir vrai pour les drones iraniens dans le golfe Persique.) Les drones ukrainiens Magura V5 ne coûtent que 273 000 dollars, ont une portée d'environ 500 miles et peuvent parcourir de longues distances en pilote automatique, ne nécessitant qu'un opérateur humain lorsqu'ils s'approchent de leur cible. La Chine développe des sous-marins plus rapides et plus puissants, ainsi que des sous-marins sans pilote. S'ils neutralisaient suffisamment de navires d'escorte américains, les porte-avions américains seraient terriblement vulnérables aux missiles chinois.
Cela ne signifie pas que la Chine pourrait envahir Taïwan avec succès, car une force amphibie chinoise serait elle-même très vulnérable aux drones taïwanais et américains. Cela signifie que la Chine aura probablement à l'avenir la capacité d'imposer un blocus à Taiwan que Washington ne pourra pas briser sans subir des pertes catastrophiques – des pertes qui, à leur tour, saperaient la position mondiale des États-Unis. Il y a également très peu de chances que les États-Unis gagnent une guerre contre les îles occupées par la Chine en mer de Chine méridionale.

D'un autre côté, si cela se produisait, Washington pourrait bloquer la quasi-totalité du commerce maritime de la Chine, y compris les approvisionnements énergétiques en provenance du golfe Persique. Autrement, il n'existe aucun moyen imaginable pour la marine chinoise d'accéder avec succès à ces approvisionnements. L'initiative chinoise « les Nouvelles routes de la soie » et les accords énergétiques avec la Russie et les pays d'Asie centrale visent à réduire cette menace, mais ils ne le feront pas complètement dans un avenir proche.

Dans ces circonstances, les États-Unis sont fortement incités à faire tout ce qui est en leur pouvoir pour maintenir sous silence les sujets de Taiwan et de la mer de Chine méridionale. Taïwan ne doit pas être attaquée, mais la Chine doit être assurée à plusieurs reprises et publiquement de l'adhésion des États-Unis à la politique « d'une seule Chine ». Toute déclaration ou action provocatrice des États-Unis qui remettrait cela en question doit être évitée.

La souveraineté chinoise sur la mer de Chine méridionale ne doit pas être reconnue, mais elle ne doit pas non plus être contestée – tout comme les États-Unis ne reconnaissent pas, mais ne contestent pas non plus, la souveraineté indienne sur la majeure partie du Cachemire, par exemple. Washington pourrait également faire preuve de bonne volonté et d'un désir de compromis raisonnable sur le différend sur ces îles entre la Chine et les Philippines en proposant des solutions telles qu'une souveraineté commune sino-philippin.

Il n'y a aucune lâcheté ni honte à procéder à un retrait limité et ordonné. Tous les grands stratèges l'ont fait lorsque cela était nécessaire. Au contraire, avoir le courage moral de le faire est précisément l'une des qualités d'un véritable sens politique – surtout que l'objectif des États-Unis de maintenir leur primauté mondiale n'est même pas en cause.

Anatol Lieven

Note du Saker Francophone

Foreign Affairs est l'organe de presse semi-officiel du think-tank globaliste si-influent, le Council of Foreign Relations. Cet article est un subtil mélange de vérité et donc de dévoilement voire de messages subliminaux à la classe dirigeante mais aussi de mensonges, par omission notamment.

Traduit par Wayan, relu par Hervé, pour le Saker Francophone.

https://lesakerfrancophone.fr/avant-tout-personne-nest-en-concurrence-avec-les-etats-unis
#4
Microphysique / Re : Le calcul de la géométrie...
Last post by JacquesL - Aujourd'hui à 01:45:20 PM
Formulé différemment : existe-t-il une transformation qui change le récepteur infini à l'infini, en un absorbeur quasi-ponctuel à quelque distance, et qui conserve la perpendicularité des fronts d'onde avec le vecteur de Poynting ?
#5
Europe / Le tsar se rebiffe
Last post by JacquesL - Aujourd'hui à 11:55:07 AM
Le tsar se rebiffe



par Philippe Grasset

Il me faut revenir, peut-être un peu piteusement, – non, plutôt humblement et de bonne foi, – sur la journée du 7 mai, c'est-à-dire sur la conclusion publiée ce jour-là à partir des éléments recueillis le 6 mai. Je dis bien volontiers que je m'appuie pour ce faire essentiellement sur les excellentes chroniques de mes excellentissimes compagnons Christoforou et Mercouris, notamment leur rubrique spéciale (hier soir) «Russia's final warning to Macron and Camerin» ; ce duo me donne, avec une constante justesse, les premières interprétations de diverses nouvelles que je serais bien incapables de suivre, et ainsi m'offrant le moyen de faire avancer mon analyse générale.

Dans ce cas très particulier, il se trouve qu'entre le 6 et le 7, tout a basculé d'une façon extrêmement révélatrice. Le 6 mai, on faisait le constat de diverses mesures, folles comme d'habitude, prises ou envisagées par les américanistes-occidentalistes. Le 7 mai, Christoforou-Mercouris ont détaillé ce qui est apparu comme une riposte extrêmement dure des Russes qui a provoqué chez leurs adversaires une panique à peine dissimulée.

Au départ, il y a deux articles de Steven Bryant, (29 avril et 4 mai), auteur très réputé et très sûr publiant dans Asia Times. Bryant annonce notamment que les Français ont commencé à déployer des Légionnaires dans la région de Slaviansk, en Ukraine, plus d'autres gâteries du genre de l'annonce que des troupes US pourraient être assemblées dans la région pour une éventuelle action si Biden est réélu. Pendant ce temps, les Britanniques (déclaration de Cameron) annoncent qu'ils ne voient aucun inconvénient à ce que les Ukrainiens utilisent leurs armements contre le territoire russe.

«Steven Bryant est un journaliste extrêmement sérieux. Il est critique de la guerre en Ukraine mais il a d'excellents contacts à Washington dabs la communauté du renseignement. C'est quelqu'un qui doit être pris très au sérieux vu la qualité de ses sources». (Mercouris)

La première et principale riposte des Russes dans cette action de communication est l'annonce de manœuvre avec des armes nucléaires tactiques utilisables dans une guerre comme celle de l'Ukraine. L'annonce fait sensation, non pas à cause du nucléaire mais à cause du rapport direct avec la guerre en Ukraine, qui est souligné par les Russes lorsqu'ils rappellent que cette guerre est pour eux «existentielle». (Il y a déjà eu des manœuvres avec armes nucléaires tactiques durant la Guerre froide, il y a un demi-siècle et plus, mais c'était un autre monde, où la communication avait un tout autre effet...)

Le ministère de la Défense russe précise exactement ce rapport entre les armes nucléaires tactique et les «déclarations officielles provocantes» de diverses autorités (dont Cameron, bien entendu).

Aussitôt après, les ambassadeurs, France et UK, sont convoqués au ministère russe des affaires étrangères où ils reçoivent une très sévère et très précise mise en garde. Par exemple, face au silence complet de la presse londonienne d'habitude si diserte, l'ambassadeur russe à Londres annonce qu'il a été dit à l'ambassadeur britannique que l'utilisation de missiles anglais contre la Russie dans de telles conditions conduirait la Russie à se réserver le droit de riposte sur des installations militaire britanniques au Royaume-Uni même et dans le monde.

Réactions en chaîne penaudes

S'il n'y a pas de réactions britanniques officielles précises à ces divers épisodes, cela bien dans les habitudes britanniques dans cette sorte de «pris la main dans le sac», il y en a beaucoup en France. L'Élysée dément la présence de troupes françaises en Ukraine et, montant d'un cran, nous précise que la France n'est pas en guerre contre la Russie, qu'elle reconnaît que Poutine est le président de la Fédération de Russie (c'est le jour du début de son nouveau mandat), et que son ambassadeur assister ce jour même à la cérémonie marquant ce nouveau mandat. Parallèlement, les USA eux aussi reconnaissent le nouveau mandat de président de Poutine tandis que leur ambassadeur à Moscou fait un discret aller-retour avec Washington pour informer sa hiérarchie de l'humeur russe... Bref, tous les costumes ont été ajustés, les cravates remises en place et les sourires un peu contraints résolument affichés.

Les Polonais en profitent pour annoncer qu'ils n'ont aucune intention malveillante à l'encontre de la Russie et l'Italie se déchaine en dénonçant les prises de position de Macron qui est pendant ce temps face à l'énigmatique sourire, – peut-être narquois à la chinoise, qui sait ? – du président Xi ; c'est-à-dire, Macron en train d'encaisser cette humiliation russe (le Chinois est bien entendu informé) et déglutissant à mesure.

«Pour tous, et notamment pour les Britanniques, ce fut un langage extrêmement, incroyablement dur. Ce n'était pas un avertissement, c'était en ultimatum.... Et alors ? Radio-Silence à Londres, où l'on encaisse...» (Mercouris)

Ah, le silence britannique quand l'Angleterre essuie quelques mauvais coups de sabot, cela vaut toutes les explications du monde : on est pris, on n'a pas le temps de mentir, on se tait.

Dureté structurante

Mercouris remarque justement que cette dureté soudaine des Russes n'est pas due au hasard. Pour lui, c'est le produit d'une transformation de Poutine, qui a fini par entendre les critiques de ceux qui le jugeaient trop «mou» vis-à-vis de l'Ouest et qui est conduit à une attitude beaucoup plus ferme. C'est ainsi que l'avertissement donné aux Britanniques intervient comme un très réel durcissement. Jusqu'ici, les Ukrainiens ont utilisé des armes britanniques (et françaises, – 'Storm Shadow' et 'SCALP') contre ce qui est désormais un territoire russe (la Criblée) ; désormais, les Britanniques sont avertis qu'ils pourraient s'attirer une riposte russe sur leur propre territoire.

«D'une certaine façon, on peut dire que ceux qui demandaient une attitude plus ferme de Poutine se sentent vengés et récompensés. Après tout, il a été montré que la fermeté paie, elle se paie de l'humiliation de l'adversaire qui encaisse sans broncher ni riposter, mais au contraire en faisant patte blanche...» (Mercouris)

Cela signifie par conséquent que l'on peut d'attendre à un durcissement russe général dans les relations avec l'Ouest, ce qui peut largement influer sur la conduite des opérations et les exigences russes. On peut imaginer dans quel sens, le champ des hypothèses est ouvert, mais nous serions tentés de vous conseiller quelques pistes à cet égard...

Cette dernière remarque ouvre éventuellement la perspective d'une autre question : pourquoi les deux articles, avec tant de détails alarmistes, ont-ils été écrits ? Mercouris tient sur son jugement de Bryant, comme journaliste brillant et honnête. D'ailleurs, Bryant n'a rien publié de faux ou de fabriqué. Cela signifie que ses sources «les plus haut placées» (vu l'importance du propos) l'ont engagé à publier ces informations : alors, si tout est vrai, dans quel but ?

«Je suis convaincu que Bryant est un journaliste honnête et scrupuleux et s'il a publié ce qu'il a publié, c'est qu'il y a été autorisé, voire encouragé par une source de très haut niveau qui voulait qu'on testât la façon dont les Russes réagiraient, jusqu'où ils pouvaient accepter certaines initiatives... Et les Russes ont réagi avec une dureté impitoyable, à coups de marteau, et l'Ouest est pour l'instant pétrifié...»

On est donc fixés. Les Russes ont réagi très durement, le plus durement qu'il était possible, et en même temps ils ont réaffirmé quelques-uns de leurs buts de guerre, cette fois entourés de «lignes rouges» qu'on ne pourra franchir qu'au risque d'un conflit généralisé... (Par exemple pour revenir sur le cas, Poutine avait rappelé que des missiles anglais étaient tirés contre la Crimée et qu'il condamnait cette pratique ; aujourd'hui on en est à dire : il y aura une riposte chez les Anglais eux-mêmes.) La réaffirmation des buts de l'opération, c'est aussi la dénazification, la démilitarisation, c'est-à-dire un éventuel changement de régime, et s'il le faut aller très loin pour ça (en Ukraine même, prêts à dépasser ces limites si une résistance est organisée aux frontières de l'Ukraine). Il est aussi rappelé que les F16 sont des avions à double casquette (bombes conventionnelles et bombes nucléaires) et, par conséquent, si l'un d'eux intervient dans le ciel ukrainien, on tapera sur sa base où se trouvent les aménagements pour le nucléaire, qu'elle se trouve en Roumanie ou en Pologne.

La signature du diable

L'Occident-compulsif est donc aller voir de quel bois les Russes se chauffent. C'est brûlant. Pour autant, ont-ils appris quelque chose, les gens d'Occident ? Oui et non. Sur le fond, ils restent persuadés qu'ils sont les plus beaux, les plus moraux, les plus justes, et puis aussi, dirais-je un peu gênés, – les plus forts, – mais là, il y a comme un doute qui s'est infiltré dans la pensée dominante. Qu'importe : ils sont tellement ce qu'ils sont qu'à mon compte, je pense qu'ils oublieront une partie de la leçon et tiendront avant tout à ne pas perdre la face... Mais comment faire ? Comment reculer un peu sans reculer du tout en affirmant qu'on avance ?

Après tout, alors qu'hier on décrivait une situation notablement différente, on peut tout de même garder tel quel le dernier paragraphe sachant que le diable, comme dit Guénon...

«quand il veut, est fort bon théologien ; il est vrai, pourtant, qu'il ne peut s'empêcher de laisser échapper toujours quelque sottise quelque sottise, qui est comme sa signature...»

... Ce qui nous permet donc d'enchaîner à notre façon en jugeant que le diable, avec ses sottises cachées et diaboliques, peut très bien faire des choses qui nous sont favorables en poussant Macron dans la voie catastrophique qui est la sienne.

«Je vous ai parlé du Diable en vous parlent du petit télégraphiste (je veux dire Macron) des consignes diaboliques du patron. Je vous en reparle devant ce grand événement qu'aucune raison ne se risque à nous expliquer. Il y a, en marche, une dynamique d'une puissance déstructurante épouvantable, hors de notre portée et de notre compréhension, qui réserve à notre civilisation maudite un sort bien peu enviable. Qu'importe si ceux qui figurent dans cette immense tragédie-bouffe soient de si petit format ; d'ailleurs, c'est ce qui passe le mieux inaperçu».

Et ainsi, ceux qui ont choisi le diable à cause de ses bacchanales endiablées s'interrogent-ils : avons-nous fait le bon choix ? C'est-à-dire, le «bon choix» du méchant habité par le mal ?

source : Dedefensa via Strategika

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#6
Histoire / Stratégies de gouvernance brit...
Last post by JacquesL - 15 Mai 2024, 01:09:36 PM
Stratégies de gouvernance britanniques : sectes religieuses



par Leonid Savin

La Grande-Bretagne a une longue histoire de création de réseaux d'agents secrets, de subversion d'autres pays et de création de mouvements par procuration. La religion y joue un rôle non négligeable, car Londres doit tenir compte de l'identité religieuse des communautés et des peuples où elle mène ses opérations d'influence.

En Angleterre même, il existe de nombreuses sectes qui interprètent la Bible et les enseignements chrétiens à leur manière. C'est ainsi que sont apparus les Seekers (chercheurs), les Diggers (creuseurs), les Ranters (bavards), les Quakers (trembleurs), les Brownistes (d'après le nom du fondateur Robert Browne) qui se sont transformés en Indépendants, et d'autres encore. Certaines de ces sectes n'ont pas duré longtemps, d'autres se sont répandues sur le continent et aux États-Unis, donnant naissance à des courants encore plus étranges. Souvent en Angleterre même, elles ont provoqué des troubles sociaux, et, de même, plus tard, dans d'autres pays.

À cela s'ajoutent toutes sortes de sociétés secrètes et de fraternités, qui regroupent des représentants de l'aristocratie et de la bourgeoisie locales. Mais c'est une chose quand tout ce mélange ardent bout dans son propre jus, et c'en est une autre quand des idées similaires se répandent dans d'autres pays et d'autres cultures. Comme le montre l'histoire, la Grande-Bretagne a été directement impliquée dans la projection de ces concepts dans l'environnement extérieur, généralement avec des intérêts géopolitiques particuliers. Prenons les exemples les plus marquants et les plus connus.

L'empreinte britannique en Palestine

Au XVIe siècle est né en Grande-Bretagne l'israélisme britannique (ou l'anglo-israélisme), un ensemble de croyances pseudo-historiques et quasi religieuses selon lesquelles les Britanniques ne sont autres que les héritiers des dix tribus perdues de l'ancien Israël. Le roi Jacques VI de la dynastie des Stuart croyait lui-même qu'il était le roi d'Israël. L'avocat et député anglais John Sadler, qui était également le secrétaire privé d'Oliver Cromwell, avait des opinions similaires, bien qu'il les ait combinées avec les idées du millénarisme1. En 1649, il publie «The Rights of the Kingdom», où il justifie la généalogie israélite des Britanniques.2
Des théories similaires ont continué à être développées aux XVIIIe et XIXe siècles, où ont été introduits des éléments d'archéologie, de linguistique et divers courants occultes en vogue à l'époque (pyramides, numérologie liée à la Kabbale, etc.).

Il convient de noter que l'israélisme britannique a influencé la théorie raciale et a, en partie, servi de justification aux protestants des États-Unis pour l'idéologie de la «destinée manifeste» au XIXe siècle3. D'autre part, il a eu une influence significative sur les pentecôtistes et les mormons aux États-Unis dans la seconde moitié du XIXe siècle.4

En 1919, la Fédération mondiale britannico-israélienne a même été créée à Londres, et elle existe encore aujourd'hui. Il convient de rappeler que la Grande-Bretagne a été à l'origine de l'idée de créer un État-nation d'Israël – la déclaration Balfour (une lettre du ministre des Affaires étrangères Arthur Balfour à Lord Walter Rothschild) date de 1917, et plus tard, ce concept a été soutenu par la France, l'Italie et les États-Unis et a constitué la base du mandat britannique approuvé par la Société des Nations. C'est donc de la Grande-Bretagne que sont venues les impulsions qui ont finalement conduit au long conflit israélo-palestinien.

L'agitation dans la péninsule arabique

Le wahhabisme est né au milieu du XVIIIe siècle dans un village situé dans la région centrale de la péninsule arabique, le Nejd. Il porte le nom de son fondateur, Mohammad Ibn Abdul-Wahhab (1703-1792). Cependant, les Britanniques ont été directement impliqués dans l'émergence et l'épanouissement du wahhabisme à l'époque moderne.

Alors qu'il se trouvait à Bassorah, le jeune Ibn Abdul-Wahhab est tombé sous l'influence et le contrôle d'un espion britannique sous couverture, surnommé Hempher. Il fait partie des nombreux agents envoyés par Londres dans les pays musulmans pour déstabiliser l'Empire ottoman et créer des conflits entre les musulmans. Hempher, qui se fait passer pour un musulman, se fait aussi appeler «Mohammed» et noue une étroite amitié avec Ibn Abdul-Wahhab, lui offrant régulièrement de l'argent et des cadeaux. Il l'a convaincu que de nombreux musulmans devaient être tués parce qu'ils avaient violé les principes fondamentaux de l'islam en devenant des «hérétiques» et des «polythéistes». Lors de l'une des séances de lavage de cerveau, Hempher a déclaré avoir fait un rêve dans lequel le prophète Mahomet «embrassait» Ibn Abdul-Wahhab entre les deux yeux, lui disait qu'il était «le plus grand» et lui demandait de devenir son «adjoint» pour sauver l'islam des «hérésies» et des «superstitions». Croyant en sa vocation, Ibn Abdul-Wahhab commence à essayer de prêcher ces idées à Uyayn, mais il est expulsé. Il part alors prêcher dans d'autres villages et est rejoint par Hempher et d'autres espions britanniques infiltrés.5



Les agents britanniques parviennent à persuader le cheikh Diri, Mohammad al-Saud, de soutenir Abdul-Wahhab. En 1744, al-Saud unit ses forces à celles d'Ibn Abdul-Wahhab dans une alliance politique, religieuse et matrimoniale. Ensuite, une petite armée de Bédouins est créée, qui terrorise la péninsule arabique et fait des raids jusqu'à Damas et Kerbela (où ils profanent la tombe du martyr Hussein bin Ali). En 1818, l'armée égyptienne du calife Mahmoud II anéantit le clan wahhabite, mais ses partisans échafaudent des plans de vengeance et voient en la Grande-Bretagne un allié.

Au début du XXe siècle, l'Empire ottoman s'effondre et les Britanniques soutiennent le nouvel imam wahhabite Abdulaziz. Le clan régnant des Sharif, descendants directs du prophète Mahomet, est alors expulsé du Hedjaz et des expéditions punitives sont menées à La Mecque et à Médine. La guerre civile dans la péninsule arabique, qui a fait rage pendant trente ans, a coûté la vie à plus de 400 000 Arabes.

Expériences en Inde

Une autre secte a été fondée à Qadian (Pendjab), dans l'Inde occupée par les Britanniques, en 1889, par Mirza Ghulam Ahmad, qui prétendait être le Mahdi (personnage attendu par certains musulmans à la fin du monde), un messie chrétien, une incarnation du dieu hindou Krishna et le second avènement (buruz) de Mahomet. La doctrine de cette secte est assez éclectique : par exemple, les adeptes sont amenés à croire que le Christ s'est rendu en Inde, où il a vécu jusqu'à 120 ans.

Aucune information officielle n'indique que les Britanniques auraient été à l'origine de la création de cette communauté. Cependant, c'est tout à fait possible, étant donné leur modus operandi depuis le début de la conquête du sous-continent indien, lorsqu'ils ont monté les dirigeants locaux les uns contre les autres et soutenu ceux qu'ils considéraient comme des exécutants fiables de leurs desseins, quelles que soient leurs opinions religieuses6. Dans cette optique, les Britanniques sont au moins indirectement impliqués dans l'émergence de l'Ahmadiyya. Fait révélateur, la communauté musulmane Ahmadiyya s'est établie en Grande-Bretagne dès 1913 et a construit sa propre mosquée en 1926.7

Au Pakistan, leurs activités sont interdites car ils ne sont pas officiellement considérés comme des musulmans en raison de leurs enseignements étranges.

Dans l'ensemble, il convient de rappeler que la présence britannique a joué un rôle négatif dans le destin futur des peuples de l'Hindoustan. Elle a conduit à la partition en 1947 entre l'Inde et le Pakistan selon des critères religieux, avec tous les conflits qui en ont découlé, y compris le différend actuel sur le Cachemire.

Incitation à l'hostilité entre musulmans

Le mouvement sectaire le plus récent associé à Londres est le «chiisme britannique», dirigé par les chefs religieux Mujtaba Shirazi et Yasir al-Habbib (photos ci-dessous). Apparemment, ce mouvement a été créé pour discréditer le chiisme en tant que tel – avec un regard sur l'Iran, le Liban et l'Irak, puisque ce sont les pays où vivent la plupart des adeptes du chiisme et où se trouvent de nombreux sanctuaires.






Les «chiites» britanniques considèrent les non-chiites comme des «idolâtres» et insultent régulièrement divers prédicateurs musulmans. Shirazi a même émis une fatwa selon laquelle les sunnites devaient être tués.
Selon le guide suprême iranien, l'imam Ali Khamenei, «des individus comme Shirazi et al-Habbib sont à la disposition de l'agence de renseignement britannique MI6 et sont utilisés pour fomenter des guerres sectaires». En janvier 2015, le gouvernement iranien a fermé les bureaux de dix-sept «chaînes de télévision chiites» diffusant par satellite au motif qu'elles incitaient à la discorde entre musulmans sunnites et chiites. En outre, le 4 juin 2016, l'Iran a de nouveau prêché sur la nécessité de combattre le chiisme britannique».8

Bien entendu, les États-Unis utilisent également des techniques de gouvernance religieuse à des fins politiques. Outre les indices de liberté religieuse qui identifient les pays «autoritaires», le Conseil œcuménique des Églises a également un programme politique clair, et le lobby protestant influence les décisions du Congrès, du département d'État et de la Maison-Blanche. La scission de l'Église en Ukraine et la création d'un organisme appelé PCU avec l'aide du patriarche Bartholomée, qui est directement lié à des agents américains, est une autre confirmation des pratiques anglo-saxonnes du principe assez ancien de «diviser pour mieux régner».

source : Geopolitika vie Euro-Synergies

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#7
Histoire / Les Américains, en 1944, ne so...
Last post by JacquesL - 15 Mai 2024, 10:18:08 AM
Les Américains, en 1944, ne sont pas venus pour libérer les Français



par Marc Rousset

«Si nous voyons que l'Allemagne est en train de gagner, nous devons aider la Russie. Si nous voyons la Russie en train de gagner, nous devons aider l'Allemagne. Dans les deux cas, nous devons les laisser se tuer le plus possible».

Déclaration de Harry Truman, vice-président de Roosevelt, au New York Times, en 1941, après le déclenchement de l'Opération Barbarossa en Russie par l'Allemagne


Les États-Unis ont fait la guerre à l'Allemagne pour se débarrasser de deux rivaux menaçants (l'Allemagne et l'URSS) et non pas pour défendre la liberté des Européens

Les naïfs croient et les médias répètent continuellement que les États-Unis sont venus libérer les Européens le 6 juin 1944, de la même façon que Lafayette avait défendu l'indépendance des États-Unis à la fin du XVIIIe siècle. Tout cela est aussi faux que la propagande médiatique américaine du plan Marshall qui a été élaboré, selon les dires mêmes de mon professeur à Harvard, le professeur Lodge, non pas pour aider généreusement les Européens dans leurs efforts de reconstruction, mais tout simplement pour éviter que l'Europe devienne communiste et soviétique. George Marshall raisonnait moins en économiste et bon samaritain, qu'en diplomate et chef de guerre, soucieux avant tout de contenir l'Union soviétique.

«Nous ne sommes pas venus en Europe pour sauver les Français. Nous sommes venus parce que nous, les Américains, nous étions menacés par une puissance hostile, agressive et très dangereuse...».

C'est d'un opuscule que l'armée américaine distribua à ses soldats à la Libération que Philippe de Gaulle tire cette citation, publiée dans son livre «De Gaulle, mon père». Mon père le répétera, ajoute-t-il :

«Les Américains qui sont morts en libérant la France sont morts pour les États-Unis d'Amérique et pour personne d'autre. De même que tous les Français qui sont morts sur un champ de bataille, y compris pour l'indépendance des États-Unis d'Amérique, sont morts pour la France et le roi qui la personnifiait».

Le mythe de Lafayette, combattant désintéressé pour la liberté, et son discours au Congrès en 1824, c'est du folklore lyrique pour politiciens démagogues, oublieux des vérités historiques, de la géopolitique et de la «Real Politik». La France de Louis XVI a aidé les États-Unis dans leur guerre d'indépendance, non pas pour défendre leur liberté, mais par souci politique de revanche du calamiteux traité de Paris par lequel la France perdait en 1763 toutes ses colonies en Amérique et aux Indes. Le seul but recherché était donc de contrer et diminuer la puissance britannique.

Selon le politologue américain George Friedman, c'est la seule relation entre l'Allemagne et la Russie qui était au centre des deux grands conflits mondiaux, qui a motivé l'entrée en guerre des États-Unis : «Unis ces deux pays représentent la seule force qui pourrait nous menacer. Nous devons nous assurer que ça n'arrive pas».

Avec le temps, même les Allemands deviennent de moins en moins dupes et se demandent pourquoi ils devraient remercier les États-Unis d'avoir concouru à leur défaite ; tout au plus, peuvent-ils les remercier pour ne pas être devenus communistes. Selon le cinéaste Alain Godard «l'Allemagne a été le pays le plus proche des États-Unis. C'était leur concurrent dans beaucoup d'industries. Il fallait qu'ils la réduisent à leur merci».


Refus du général de Gaulle de se rendre au vingtième anniversaire du débarquement des Américains en Normandie, le 6 juin 1964

«Allons, allons Peyrefitte ! Il faut avoir plus de mémoire que ça ! Il faut commémorer la France, et non les Anglo-Saxons !»

«Vous croyez que les Américains et les Anglais ont débarqué en Normandie pour nous faire plaisir. (...) Ils ne se souciaient pas plus de libérer la France que les Russes de libérer la Pologne !»

«La France a été traitée comme un paillasson ! (...) Le débarquement du 6 juin, ç'a été l'affaire des Anglo-Saxons, d'où la France a été exclue. Ils étaient bien décidés à s'installer en France comme en territoire ennemi !»

«Et vous voudriez que j'aille commémorer ce débarquement qui était le prélude à une seconde occupation du pays ? Non, non, ne comptez pas sur moi !»


Franklin Delano Roosevelt : sa haine inimaginable envers la France, le général de Gaulle et son désir de diviser la France en trois !

«Ce n'est pas à Hitler que Roosevelt fait la guerre, c'est à moi». Cette boutade fut souvent entendue à Londres et à Alger dans la bouche de De Gaulle.

Extraits d'une conversation, le 20 novembre 1942, entre André Philip, envoyé par de Gaulle à Washington, et le président Roosevelt :

«Roosevelt – Quand nous entrerons en France, nous userons du droit de l'occupant... Les Américains resteront en France jusqu'à ce que des élections libres y soient organisées.

Philip – Si les Américains viennent pour occuper le pays, leur occupation ne sera pas davantage tolérée que l'occupation allemande.

Roosevelt – Je parlerai au peuple français à la radio et il fera ce que je voudrai».

Vers un démembrement de la France : «Pis, de Gaulle apprend à peu près au même moment par des indiscrétions britanniques et luxembourgeoises que Roosevelt envisage, en sus de tout cela, un redécoupage de l'Europe, dont la France serait la première victime, puisqu'elle perdrait non seulement l'Alsace et la Lorraine, rattachées à une nouvelle entité rhénane composée du royaume néerlandais (dont la famille de Roosevelt est originaire), du Luxembourg (qu'il agrandirait aux dépens de l'Allemagne), mais aussi, pourquoi pas, la rive gauche du Rhône, offerte à l'Italie pour la récompenser d'avoir changé de camp».

Quant au président tchèque Edvard Benes, de retour de Washington, il confie à René Massigli, commissaire aux Affaires étrangères du CFLN : «J'étais parti en croyant Roosevelt antigaulliste. Il était antifrançais». La vérité historique oblige de reconnaître cependant que Roosevelt était minoritaire dans son attitude démoniaque antifrançaise. Les Anglais, Churchill, Eisenhower, Patton (marié à une Française), Mac-Arthur et surtout la presse américaine étaient certes très patriotes, très réservés, égoïstes et souvent très sectaires, mais pas toujours hostiles à la France et à de Gaulle.


Le projet AMGOT de Roosevelt en 1944 : réoccuper et administrer militairement la France, pas la libérer

L'AMGOT signifie régime d'occupation : «Allied Military Government of Occupied Territories». Roosevelt souhaitait administrer militairement la France, tout comme l'Allemagne, l'Italie et le Japon, quand ces pays vaincus virent arriver l'armée américaine d'occupation sur leur sol national. Le commandant en chef des forces alliées devait avoir «tous les droits de l'occupation militaire» et cela supposait «qu'il n'y avait pas de gouvernement souverain en France».

Dans un entretien avec le magazine Marianne, Éric Branca résume ainsi les nombreuses pages consacrées à l'AMGOT de son ouvrage : «Dès la fin 1942, des écoles avaient été créées en Grande-Bretagne pour former le personnel civil de ce gouvernement militaire allié. On est allé jusqu'à imprimer une monnaie de singe, le «billet drapeau», dont le pouvoir d'achat aurait été encore plus défavorable que celui concédé au franc par les Allemands, vis-à-vis du Mark, entre 1940 et 1944. De Gaulle fera échouer cette manœuvre in extremis grâce à la Résistance et aux commissaires de la République choisis par Alexandre Parodi et Michel Debré, lesquels prendront la place des préfets de Vichy, avant que ne déboulent les administrateurs de l'AMGOT et leurs fourgons de billets dont l'encre était à peine sèche».


Roosevelt préférait Pétain, Darlan, Giraud et Laval à de Gaulle

Le choix de Roosevelt fut de soutenir Pétain jusqu'en 1942, puis successivement Darlan, Giraud et Laval, en s'opposant à de Gaulle. L'amiral Darlan assassiné par la Résistance, le 24 décembre 1942 à Alger, c'est le général Giraud, autre fidèle du maréchal Pétain que les Américains placèrent en orbite pour tenter d'éliminer de Gaulle. La tentative ayant échoué, Roosevelt ne désespérait pas encore, pendant l'été 1944, de faire de Laval, un homme de transition soumis à l'Amérique victorieuse, dans l'attente de la mise en place par ses soins d'un nouveau régime avec davantage de libertés publiques.

source : Riposte Laïque

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#8
Politique française / Où va s’arrêter la destruction...
Last post by JacquesL - 15 Mai 2024, 10:00:27 AM
Où va s'arrêter la destruction de notre économie et de ses atouts ?



Une récente enquête du Canard Enchaîné révèle les coulisses d'une possible offensive contre la France de notre excellent allié états-unien visant à briser l'alliance stratégique entre Framatome, entreprise française, et Rosatom, géant russe du nucléaire civil. Un potentiel changement de fournisseur redéfinirait les frontières de la souveraineté nucléaire européenne dans cette guerre économique déclarée par les États-Unis, au profit de l'américain Westinghouse.

Après la vente à la découpe aux USA de nos fleurons industriels, où va s'arrêter la destruction de notre économie  et de ses atouts, toujours au profit des néocons US et de leur finance apatride ?

Dominique Delawarde
*
Les États-Unis attaquent la coopération nucléaire Framatome-Rosatom

par Thomas Dereux

Potentielle offensive américaine contre l'alliance franco-russe 

Le 27 mars dernier, Le Canard Enchaîné (n°5394) a fait paraître un article révélant une potentielle offensive américaine contre l'alliance franco-russe dans le nucléaire civil. En effet, en 2021, l'entreprise française Framatome et le groupe russe Rosatom ont signé un «accord stratégique de coopération à long terme, visant à consolider les efforts des deux entreprises pour développer des technologies de fabrication de combustible et de systèmes de contrôle-commande».
L'ambassade de France aux États-Unis aurait été interrogée sur les liens existant entre Paris et le champion russe du nucléaire civil. Cette demande apparaît dans le contexte d'un projet de loi adopté en décembre dernier par la Chambre des représentants, interdisant les importations d'uranium en provenance de Russie. Les États-Unis, également en partie tributaires de l'uranium russe, chercheraient à s'affranchir de la dépendance russe. Le camp Républicains, qui sera peut-être au pouvoir à l'issue des prochaines élections, souhaite également «affranchir les pays occidentaux de tout lien avec la Russie dans le nucléaire civil».

Le JDD révèle que Katherine Earle, précédemment chargée de la commission des Affaires étrangères de la Chambre des représentants, aurait soulevé des préoccupations concernant une possible dépendance de l'industrie nucléaire française à l'égard du savoir-faire russe, notamment en ce qui concerne le volet du cycle du combustible.

Une menace crédible des États-Unis

Le Canard Enchaîné liste quelques exemples des potentielles répercussions américaines, dans le cas où le groupe français refuserait de mettre un terme à sa collaboration avec le géant russe du nucléaire. D'après le journal, des façons de sanctionner Framatome en cas de non-soumission à cette nouvelle législation américaine serait de l'empêcher d'encaisser l'argent versé par Rosatom dans le cadre de leur partenariat, de priver le groupe du personnel américain, ou de s'en prendre à la filiale américaine du groupe, Framatome Inc.

Ce ne serait pas la première fois que l'Oncle Sam sanctionnerait une entreprise française pour contournement de sanctions américaines. En effet, la situation actuelle fait écho à celle de la banque BNP Paribas. En 2015, la banque française est contrainte de verser une amende de 8.9 milliards de dollars pour avoir traité avec des pays sous sanction américaine tels que Cuba, l'Iran et le Soudan entre 2004 et 2012.

Le produit de la collaboration Framatome-Rosatom 

Dans le contexte de la guerre en Ukraine, les États européens restent encore très dépendants des approvisionnements russes pour les centrales nucléaires du continent. En effet, 19 réacteurs de conception russe sont encore en fonctionnement en Europe. L'alimentation de ces centrales se fait via un combustible, qui prend la forme de cylindres appelés pastilles. Pour les modèles russes dits «VVER», présents en Slovaquie, en Bulgarie, en Finlande, en République tchèque et en Hongrie, seul Rosatom maîtrise pleinement cette ultime étape de production des crayons de combustibles. Néanmoins, le conflit ukrainien pousse les gouvernements européens à s'affranchir de cette dépendance en encourageant l'émergence de nouveaux acteurs (pour les réacteurs VVER 440 et VVER 1000).

Lionel Gaiffe, Vice-Président de la Business unit combustible chez Framatomea récemment confié au journal Le Point que «cette situation de dépendance à la Russie préoccupe de nombreux pays depuis des années». Ainsi, après le rapprochement avec Rosatom en 2021, Framatome annonce que des combustibles pour VVER seront conçus à l'usine de Lingen, en Allemagne, sous licence russe. En parallèle, l'entreprise se lance dans le développement d'une solution indépendante basée sur un nouveau design. En effet, l'élaboration d'une nouvelle architecture de combustible propre à Framatome viendrait proposer une troisième voie d'approvisionnement, et permettrait ainsi d'éviter de passer d'une dépendance russe à un monopole américain. À court terme, l'exploitation de la licence permettrait donc de diluer la prééminence russe, en attendant le développement d'une solution européenne. Cependant, le combustible produit devra passer un processus d'autorisation conséquent, qui ne devrait pas permettre à l'entreprise de livrer ses clients avant 2030.

L'américain Westinghouse en pole position 

Plus pragmatique, l'américain Westinghouse se penche sur le sujet de la production de combustible pour les centrales VVER plus tôt. Après l'invasion de la Crimée en 2014, l'entreprise s'intéresse au sujet et produit en 2023 ses premiers combustibles susceptibles d'alimenter les réacteurs de conception russe. D'après Teva Meyer, spécialiste en géopolitique du nucléaire civil, les Américains ne partaient pas de zéro. En effet, après l'éclatement de l'URSS, Westinghouse avait pensé un plan de production capable d'alimenter les centrales VVER, mais faute de contrats de longues durées avec les anciens pays soviétiques, l'entreprise avait fini par faire marche arrière. Ainsi, en 2016, la firme américaine a pu réagir rapidement, et a agrandi son usine suédoise en vue de produire ce type de combustible. Westinghouse a déjà pris beaucoup d'avance dans le «match» face à Framatome. En effet, après ses premières livraisons à l'Ukraine, l'entreprise signe en 2022 des accords d'approvisionnement avec la République tchèque et la Bulgarie. De plus, les premières livraisons de Framatome ne devant pas intervenir avant 2030, Westinghouse dispose d'un boulevard pour signer de nouveaux accords.


Westinghouse, un pied en Europe 

En plus de son usine suédoise, Westinghouse renforce sa présence en Europe en passant des alliances avec des constructeurs européens tel que l'espagnol EnusaL'entreprise ibérique s'était auparavant lancée dans la production de combustible pour réacteur VVER 440, mais faute de commandes suffisantes, elle s'était retirée du marché. C'est début 2023, que Enusa et la firme américaine décident de partager leur expertise dans le domaine, encadré par la signature d'un accord de collaboration visant à proposer une alternative au carburant russe. Les deux sociétés s'engagent donc à produire ce combustible dans les usines de Juzbado (Salamanque) et de Västerås, en Suède. La collaboration entre ces deux entités a également permis à Westinghouse d'obtenir en 2015 2 millions d'euros de la part d'Euratom (organisme public européen chargé de la coordination les programmes de recherche dans le nucléaire civil), pour piloter le projet HORIZON 2020 d'approvisionnement européen en combustible nucléaire sûr (ESSANUF). La solution européenne semble donc avoir été choisie, au détriment de Framatome, et serait en partie pilotée par un acteur américain.


Tensions dans l'usine allemande 

De vives manifestations ont récemment eu lieu en Allemagne, où se situe l'usine de Lingen supposée produire le combustible nucléaire de la collaboration franco-russe. Les populations locales semblent farouchement opposées au maintien de cette usine de production, après que le pays ait fait le choix de sortir du nucléaire, comme en témoigne la fermeture de son dernier réacteur en 2023. Les opposants au projet évoquent également des risques de sabotage et d'espionnage de la part des russes. Toujours selon Lionel Gaiffre, les allégations seraient infondées puisqu'il assure que l'usine continuera de fonctionner uniquement avec du personnel issu de Framatome. Le ministère fédéral allemand de l'environnement doit faire connaître sa décision sur le maintien du site à la mi-mai. L'annonce d'une fermeture du site serait un coup dur pour le partenariat Framatome-Rosatom, et viendrait retarder le développement d'une solution européenne de production de combustible pour les réacteurs VVER, laissant Westinghouse comme seule alternative non-russe.

Ainsi, le risque de voir le partenariat entre Framatome et Rosatom voler en éclats semble réel, et laisserait Westinghouse comme seule alternative à la solution russe. Une solution russe qui ne sera peut-être bientôt plus envisageable si on se réfère à la volonté d'une partie de la classe politique américaine d'affranchir les Occidentaux (ce qui inclut les Européens) de tout lien avec l'industrie nucléaire russe. Le risque pour les Européens serait donc de passer d'un monopole russe à un monopole américain dans la production de combustible pour les réacteurs VVER.

source : Portail de l'IE

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#9
Europe / Terreur d’État contre populati...
Last post by JacquesL - 15 Mai 2024, 09:34:25 AM
Terreur d'État contre population (I) : L'attentat de la gare de Bologne du 2 août 1980




par Antoine Marcival

Les gouvernements occidentaux, France en tête, font désormais se succéder sans répit les épisodes de terreur contre leurs populations. Virus manipulé, fausse pandémie, attentats sous fausse bannière, affolement climatique, crises économiques provoquées, menaces de guerre : il s'agit véritablement de placer constamment sous tension les populations. Apeurées, celles-ci sont bien plus manipulables et beaucoup moins susceptibles de se révolter. Contrôler les peuples par la peur est évidemment une technique de pouvoir vieille comme le monde. Mais la stratégie de la tension généralisée à laquelle est soumis aujourd'hui l'Occident – où les États n'hésitent pas à user de méthodes terroristes contre leurs propres populations – trouve son modèle dans l'Italie des années 1970. Ce sont les fameuses «années de plomb», au cours desquelles l'OTAN – par l'intermédiaire de son réseau clandestin Gladio – va organiser d'innombrables attentats sous fausse bannière. À ce jour, la plupart de ces attentats n'ont pas été jugés et leurs commanditaires n'ont jamais été inquiétés. Quant aux États-Unis, ils continuent d'être considérés en Italie comme l'allié principal de la péninsule.

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Cet article reprend l'entrée no34 de l'essai Index obscurus : deux siècles et demi de complots 1788-2022, publié aux éditions JC Godefroy en janvier 2024. Ce livre s'attache à démontrer combien l'utilisation péjorative du terme «complotiste» n'a pas de sens : les complots, très souvent par le biais d'attentats sous fausse bannière, pullulent dans l'histoire humaine, et particulièrement dans l'histoire occidentale moderne.

C'est par le lancement de l'opération Husky, le 10 juillet 1943, que commence le débarquement des troupes alliées en Italie. L'URSS réclamait de longue date l'ouverture d'un second front pour soulager le front de l'Est où les troupes soviétiques affrontaient l'essentiel des forces nazies depuis le lancement de l'opération Barbarossa le 22 juin 1941. Le 2 février 1943, la capitulation des troupes du maréchal allemand Friedrich Paulus marque la fin de la bataille de Stalingrad. Sur tout le front de l'Est, la Wehrmacht – réputée invincible et à qui il n'avait pas fallu deux mois pour vaincre la France – est contrainte de reculer et ne connaîtra désormais, peu ou prou, que des défaites (la bataille de Koursk en particulier, qui commence en juillet 1943). C'est donc dans cette période de reflux généralisé des forces nazies sur le front de l'Est que les alliés occidentaux se décident enfin à lancer la campagne d'Italie : on ne saurait laisser aux Soviétiques tout le mérite de la libération de l'Europe... L'opération Husky est d'emblée facilitée par l'arrestation du Duce Benito Mussolini – réclamée par le Grand Conseil du fascisme lui-même au roi Victor-Emmanuelle II – et son remplacement à la tête du pouvoir par le maréchal Pietro Badoglio. Celui-ci signe l'armistice de Cassibile le 3 septembre 1943, moins de deux mois après le débarquement des alliés en Sicile. L'Italie se retrouve alors coupée en deux, tandis que la Wehrmacht intervient dans le nord de la péninsule, parvient à libérer Mussolini le 12 septembre et fonde la République sociale italienne ou «République de Salò». Malgré plusieurs tentatives pour percer la ligne Gothique – une ligne de fortifications située sur les Apennins et derrière laquelle les troupes allemandes se sont repliées –, la libération de l'Italie n'intervient que le 29 avril 1945, avec la capitulation des armées du général Heinrich von Vietinghoff.

Aussitôt, les États-Unis exercent une influence très forte dans la péninsule, considérée comme un État pivot stratégique au cœur de la Méditerranée. Il s'agit en particulier d'empêcher l'accès au pouvoir de toute force proche du communisme et de semer la division au sein du mouvement ouvrier. La CIA organise ainsi une scission au sein du puissant syndicat de la CGIL dont le secrétaire, Giuseppe Di Vittorio, est également député communiste. Les élections de 1948 sont en outre l'occasion d'un vaste effort de propagande américain pour favoriser le parti de la Démocratie chrétienne et pour empêcher le Parti communiste italien de prendre la tête du pouvoir. L'influence américaine ne se dément dès lors plus, jusqu'à prendre un virage criminel et terroriste à l'orée des années 1970 : ce sont les fameuses «anni di piombo» (les «années de plomb»).

L'événement qui lance cette période est l'attentat de la piazza Fontana à Milan, le 12 décembre 1969. Une explosion à la bombe se produit ce jour-là dans les locaux de la Banca Nazionale dell'Agricoltura, tuant 17 personnes et en blessant 88 autres. Trois bombes explosent au même moment à Rome, faisant 16 blessés. Enfin une bombe qui n'a pas explosé est retrouvée à Milan, piazza della Scala. Les soupçons de la police et des juges se portent immédiatement sur le milieu anarchiste. Giuseppe Pinelli, cheminot anarchiste, est arrêté, conduit à la préfecture de police, retenu illégalement en détention et interrogé avant d'être défenestré, l'enquête du juge d'instruction concluant au suicide...

Si un livre, «La Strage di stato» («le Massacre d'État»), indique très tôt la piste de l'extrême-droite, des documents – prétendument retrouvés par la police en 1974 dans un local des Brigades Rouges et présentant une supposée contre-enquête menée par l'organisation terroriste dite «révolutionnaire» – brouillent les pistes en confirmant la version policière d'un attentat anarchiste, commis avec des explosifs fournis par un groupe d'extrême-droite (comprenne qui pourra). Ces documents particulièrement opportuns permettent également d'expliquer le «suicide» de Giuseppe Pinelli, qui aurait été impliqué dans la livraison des explosifs et en aurait conçu des remords. Une manipulation policière grotesque. Il faudra attendre 2005 pour qu'une partie de la vérité soit enfin dévoilée : l'attentat de piazza Fontana a été commis par le groupe néofasciste Ordine Nuovo. Trois anciens militants sont mis en examen en 1997, au côté de David Carrett, officier de l'US Navy. Des enquêtes viseront également Sergio Minetto, lié à l'OTAN, et Carlo Digilio, soupçonné d'être un informateur de la CIA. D'abord condamnés à la prison à perpétuité, les trois militants néofascistes sont de façon surprenante et inattendue relaxés par la cour d'appel en mars 2004, acquittement que confirme la cour de cassation en 2005, condamnant en outre les parties civiles (les proches des victimes) à payer les frais du procès ! La cour de cassation confirme pourtant la responsabilité du mouvement Ordine Nuovo dans l'attentat et notamment des néofascistes Franco Freda et Giovanni Ventura, les deux hommes ne pouvant toutefois plus être condamnés puisqu'ils ont été acquittés en 1987 lors d'un procès concernant les explosifs utilisés piazza Fontana. En somme, aucun responsable ne sera condamné pour les attentats, sinon Giuseppe Pinelli, innocent exécuté par les policiers qui l'avaient arrêté.

D'autres attentats ont lieu par la suite, comme celui du 28 mai 1974 piazza della Logia à Brescia lors d'une manifestation antifasciste (il faudra attendre 2015 pour que Maurizio Tramonte, un militant néofasciste du Movimento sociale italiano (MSI) lié aux services secrets italiens, et Carlo Maria Maggi, dirigeant local d'Ordine Nuovo, soient condamnés) et, le 4 août 1974, l'attentat à la bombe contre le train de nuit Italicus Express qui fait 12 morts et 48 blessés (revendiqué par le mouvement néofasciste Ordine Nero, cet attentat ne donnera lieu à aucune condamnation judiciaire).

Mais le «point d'orgue» de cette politique de la terreur qui doit tout aux groupes néofascistes, aux services secrets italiens et à l'ingérence américaine survient en plein été, le 2 août 1980. Une bombe explose à 10 h 25 dans la salle d'attente de la gare de Bologne, d'une puissance telle qu'elle fait s'effondrer l'aile ouest du bâtiment (un train qui s'apprêtait à partir est également renversé par le souffle de l'explosion). C'est un carnage parmi les vacanciers et les touristes en nombre sur place : 85 morts et 200 blessés. Si la police, sur ordre du gouvernement et relayée par les médias, tente d'abord de laisser croire à l'explosion d'une chaudière, il devient rapidement impossible de cacher le caractère terroriste de l'événement. Des manifestations ont lieu sur la piazza Maggiore de Bologne et le gouvernement est conspué le jour des funérailles. L'hypothèse de la chaudière explosée aura en tout cas eu cet avantage : puisqu'on pense qu'il s'agit d'un accident, aucun barrage routier n'est mis en place par la police, laissant tout le temps aux terroristes de prendre la fuite. Une fausse revendication par les Brigades rouges intervient le lendemain, immédiatement démentie par l'organisation. Mais les efforts pour créer de fausses pistes vont aller beaucoup plus loin. Une valise contenant des explosifs est découverte dans un train reliant Taranto à Milan. Elle contient des effets personnels appartenant à deux militants d'extrême-droite étrangers, le Français Raphaël Legrand et l'Allemand Martin Dimitris. Il s'agit cependant d'une machination, visant à détourner l'enquête vers une piste étrangère : la valise a été déposée par un carabinier dans le cadre d'une opération appelée «Terrore sui treni» («Terreur dans les trains»), organisée par le Super-SISMI, une branche des services de renseignement italiens (Servizio per le Informazioni e la Sicurezza Militare ou SISMI). Le Super-SISMI est dirigé par le général Giuseppe Santovito, membre par ailleurs de Propaganda Due (P2), une loge maçonnique anti-communiste regroupant des dizaines d'officiers supérieurs du corps des carabiniers ou de la brigade financière, des haut-gradés de l'armée italienne, des députés et des ministres, des préfets, des banquiers et de riches industriels et, bien entendu, un grand nombre de hauts magistrats. Licio Gelli – maître vénérable responsable des recrutements de la loge P2, ex-chemise noire, ex-combattant aux côtés des franquistes, ex-officier de liaison entre le gouvernement fasciste italien durant la Seconde Guerre mondiale et le Troisième Reich, «faits d'arme» qui lui vaudront de faire partie des délégations italiennes invitées aux cérémonies d'investiture des présidents Ford, Carter et Reagan, au premier rang pour cette dernière – sera lui-même condamné pour avoir tenté de détourner l'enquête, en évoquant une explosion due à une fuite de gaz et provoquée par un mégot de cigarette.

Car c'est bien une bombe qui a explosé à la gare de Bologne ; placée dans une valise déposée contre le mur porteur de l'aile ouest de la gare. Il s'agissait donc de faire le maximum de dégâts et de victimes. La bombe est de fabrication «militaire», composée de 23 kg d'explosif, 5 kg d'un mélange de TNT et de T4 appelé «Compound B» complétés par 18 kg de nitroglycérine. À la fin du mois d'août 1980, plusieurs arrestations sont ordonnées par le juge, à l'encontre de militants néonazis du NAR (Nuclei armati rivoluzionari, «Noyaux armés révolutionnaires»). Il faudra quinze ans pour voir les premières condamnations tomber, notamment contre Valerio Fioravanti et son épouse Francesca Mambro, tout deux membres du NAR. Un membre du groupe néofasciste Avanguardia Nazionale va toutefois indiquer, en 1984, une autre piste, complémentaire à celle du terrorisme néofasciste : la piste «Gladio», un vaste réseau dit «stay-behind» (littéralement «reste-derrière») s'appuyant sur le principe de la «stratégie de la tension» et organisé de façon secrète par l'OTAN dans toute l'Europe de l'Ouest (sous d'autres noms) afin d'empêcher les partis communistes ou de gauche d'accéder au pouvoir. Le réseau implique un grand nombre de mouvements d'extrême-droite, les services secrets, les services de police et les gouvernements en place. Il dispose d'innombrables caches d'armes. En Italie, le réseau Gladio était couvert par les membres les plus haut placés de la Démocratie Chrétienne Italienne (Democrazia Cristiana Italiana, DCI), main dans la main avec la CIA (et son directeur pour tout l'hémisphère occidental Ted Shackley), le SISMI et les groupes terroristes néofascistes, ceux-ci jouant le rôle de «petites mains».

Outre les contacts qu'entretient la CIA avec la Mafia, viscéralement anticommuniste, les États-Unis n'hésitent en effet pas à recruter des fascistes ayant participé au gouvernement de Mussolini. C'est le cas du prince Junio Valerio Borghese, dit «le Prince noir», chargé de traquer et d'exécuter les résistants communistes italiens durant la Seconde Guerre mondiale. Dans les années 1960, le réseau Gladio avait entre autres planifié l'opération Piano Solo, celle-ci consistant à organiser un coup d'État à la suite d'une tentative d'assassinat sous fausse bannière menée contre le chef du gouvernement Aldo Moro et pour laquelle les communistes auraient été accusés. Un autre coup d'État (l'opération «Tora Tora»), organisé par Gladio et le prince Valerio Borghese, devait avoir lieu le 8 décembre 1970 mais fut annulé au dernier moment, certains participants à l'opération évoquant le fait que le KGB avait été mis au courant et que des bateaux soviétiques se trouvaient en Méditerranée, prêts à appuyer un contre-putsch communiste.

Suite à la démission de Nixon et à l'élection de Gerald Ford, Aldo Moro – alors ministre des Affaires étrangères – s'était rendu à Washington en 1974 afin de discuter de la possibilité d'incorporer des socialistes et des communistes au gouvernement compte tenu de leurs résultats aux élections. Il se vit opposer une fin de non-recevoir sans appel. Selon son épouse Eleonora Moro, le message des Américains fut le suivant : «Vous devez renoncer à votre politique consistant à collaborer directement avec chacune des forces politiques de votre pays. Faites-le maintenant ou vous le paierez très cher». Alors qu'il avait pris la tête du conseil national de la Démocratie chrétienne en octobre 1976, Aldo Moro s'apprêtait à désobéir, sur la base de l'accord appelé «compromesso storico» (le «compromis historique») passé avec le secrétaire du PCI Enrico Berlinguer, et à intégrer les communistes au gouvernement dit «Andreotti IV». Il n'en aura pas le temps, comme l'avaient prévenu les Américains. Le 16 mars 1978, précisément le jour où doit être votée la confiance au gouvernement entérinant ce «compromis historique», les Brigades Rouges – remarquablement informées et efficaces... – l'enlèvent à Rome tandis qu'il se rendait au parlement italien. Il sera retenu 55 jours avant que son corps soit retrouvé dans le coffre d'une voiture, criblé de balles.

Infiltré jusqu'à la moelle, le mouvement prétendument révolutionnaire des Brigades Rouges n'a jamais été lui-même qu'un instrument entre les mains des tenants de la «stratégie de la tension», l'OTAN, son réseau Gladio et la loge néofasciste P2. Le désir évident des dirigeants de la Démocratie Chrétienne de voir Aldo Moro assassiné conduira la famille de celui-ci à refuser que sa dépouille mortelle soit présente lors de la messe solennelle organisée en grandes pompes et présidée pourtant par le pape Paul VI lui-même. La commission sénatoriale qui sera chargée d'enquêter au début des années 90 sur le réseau Gladio découvrira avec stupeur que la plupart des documents relatifs à l'enlèvement et à l'assassinat d'Aldo Moro ont disparu des archives du ministère de l'Intérieur. Elle estimera en 1995 que l'assassinat d'Aldo Moro fut un projet criminel dans lequel les Brigades Rouges ne furent que des «instruments». À la suite d'investigations ultérieures portant notamment sur les trois principaux attentats commis à Milan, Brescia et Bologne, la commission sénatoriale Pellegrini conclura en 2000 : «Ces massacres, ces attentats et ces opérations militaires ont été organisés, encouragés ou soutenus par des hommes au sein même des institutions italiennes et, comme il a été découvert plus récemment, par des hommes liés aux structures du renseignement états-unien». Quant à la condamnation des responsables, les familles des victimes attendent toujours.

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#10
Europe / Irlande, la fin du grand conse...
Last post by JacquesL - 15 Mai 2024, 09:07:08 AM
Irlande, la fin du grand consensus



par Keith Woods


Lundi 6 mai dernier, les Irlandais se sont rassemblés à Dublin pour protester contre la politique d'immigration du gouvernement. C'était le deuxième lundi férié consécutif où un événement comme celui-ci se produisait, mais la foule n'avait jamais été aussi nombreuse jusqu'à présent, atteignant plusieurs milliers de personnes.

Il y a beaucoup de choses très impressionnantes dans le mouvement anti-immigration en Irlande. Cet événement a été organisé sans leadership central et promu principalement par des influenceurs nationalistes des médias sociaux. La foule était d'âges variés, avec de nombreuses familles et personnes âgées, un spectacle rarement vu lors des manifestations anti-immigration en Europe.

Une autre force majeure du populisme naissant irlandais réside dans le large consensus sur ce qu'est le nationalisme irlandais. En raison de l'histoire unique de l'Irlande, nos nationalistes ne s'enlisent pas dans des attachements sentimentaux envers des empires mourants et leurs conceptions civiques de l'identité empruntées aux administrateurs impériaux. L'idée selon laquelle nous devrions brandir un argument historique pour faire valoir notre cause, ou nous identifier aux mouvements nationalistes historiques d'autres pays, est évidemment ridicule. Tout le monde dans cette foule sait ce qu'est un Irlandais, adhère à la tradition nationaliste révolutionnaire de l'Irlande et est prêt à affirmer que «l'Irlande appartient aux Irlandais».

Bien sûr, cela n'empêche pas les luttes intestines et les divisions entre partis, et étant donné la force de ce «nouveau-nationalisme», il est en fait remarquable de voir combien de factions et de partis distincts existent au sein de la scène populiste, mais cela reflète davantage un désaccord stratégique (et beaucoup d'égos impliqués) que des différences idéologiques fondamentales.

La montée du mouvement populiste en Irlande est d'autant plus impressionnante que, jusqu'à une date récente, l'Irlande disposait d'un consensus pro-immigration très confortable. Les journalistes et les hommes politiques du régime étaient fiers de l'absence de mouvements «d'extrême droite» en Irlande. Les libéraux irlandais prenaient plaisir à se moquer du Brexit et de Donald Trump et à se féliciter mutuellement du fait que nous seuls montrions que l'expérience multiculturelle pouvait réussir si seulement tout le monde se débarrassait de son sectarisme.

C'en est fini : la nouvelle façon de montrer son statut de bon agent de l'Irlande officielle est de parler sur un ton solennel de «la menace croissante de l'extrême droite», de saluer pensivement les «experts en extrémisme» qui expliquent comment les médias sociaux alimentent cette menace, et faire des allusions aux «préoccupations légitimes» que l'extrême droite exploite, sans jamais vraiment nommer ni aborder ces préoccupations légitimes.

Cela devient très embarrassant pour l'establishment libéral irlandais qu'un mouvement populiste comme celui-ci puisse surgir, malgré l'absence de soutien institutionnel, de médias sympathisants ou de soutien financier important. C'est encore plus embarrassant pour la gauche, qui s'accroche désormais à des théories du complot de plus en plus élaborées selon lesquelles ce sont des forces britanniques obscures qui tirent les ficelles de l'extrême droite.

L'alternative – selon laquelle la classe ouvrière ne s'intéresse pas à leur message par ce qu'elle a construit sa propre «extrême droite», parce que sa principale préoccupation est l'immigration de remplacement – est impensable.


Le consensus post-violences de 1998

On pourrait pardonner à l'Irlande officielle de faire preuve de complaisance. La période allant de l'accord du Vendredi saint en 1998 à la crise du COVID et à la guerre en Ukraine a été le moment unipolaire officiel de l'Irlande : le grand consensus post-violences sanglantes.



Le conflit sectaire qui divisait l'île depuis la partition a été résolu d'une manière satisfaisante pour toutes les parties, puisque 94% de la République a effectivement voté pour l'accord lors d'un référendum. Dans le même temps, les politiques économiques libérales de l'Irlande officielle sont devenues un succès retentissant, donnant naissance au «Tigre celtique».

L'économie irlandaise a non seulement perdu son statut de retardataire en Europe, mais avec ses taux de croissance spectaculaires, elle est jalousée dans le monde entier. Les divisions gauche/droite sur l'économie ne pesaient plus guère, face à l'immense richesse générée par ces politiques – à la fois des allègements fiscaux généreux et des augmentations massives des dépenses publiques, et ceux qui se plaignaient de l'incapacité de l'Irlande à suivre plus systématiquement une voie socialiste ou au contraire celle du libre échange passaient pour des grincheux.




Évolution du PNB de l'Irlande en comparaison avec celui du Royaume Uni, 1820-2020

L'Irlande a bénéficié d'un consensus de longue date parmi les partis élus, qui étaient tous d'accord sur la voie de libéralisation économique suivie par l'Irlande depuis les années 1970. L'avenir de l'Irlande serait celui d'une économie de haute technologie et de compétences étroitement intégrée à l'Union européenne. Même le parti travailliste et les groupes trotskystes marginaux du Dáil Éireann considéraient l'impôt sur les sociétés de 12,5% – essentiel pour attirer les sociétés multinationales en Irlande – comme sacro-saint. L'adoption rapide du social-libéralisme par l'Irlande et un récit commun sur la «vieille Irlande» – antérieure aux années 1990 – où les Irlandais souffraient sous une orthodoxie catholique oppressive étaient également au cœur de ce consensus.

Les années 2000 et 2010 ont été riches en rituels publics d'autoflagellation au cours desquels nous remettions en question notre passé et les pires abus de l'ancien régime – les Couvents de la Madeleine, les abus sexuels sur les enfants dans l'Église, l'IRA, le climat de corruption politique au sein du parti  Fianna Fáil – historiquement dominant – étaient des sujets régulièrement débattus. Cette situation s'est accélérée après un krach économique désastreux en 2008, où l'optimisme du Tigre celtique a cédé la place à une colère et à un cynisme généralisés à l'égard de l'ensemble de l'establishment.

Il y a eu une certaine réaction populiste lors des élections de 2011, mais celle-ci était pour l'essentiel non idéologique, ce qui est typique de la politique irlandaise. Alors que le parti au pouvoir, le Fianna Fáil, subissait la pire défaite de son histoire, les principaux bénéficiaires ont été les partis qui avaient eux-mêmes soutenu les mêmes excès économiques de la période du Tigre celtique, ainsi qu'un large contingent de candidats indépendants non idéologiques ou de gauche. Dans la mesure où il y avait une opposition populiste au cours de cette période, elle s'inscrivait dans la lignée du populisme économique de gauche du début des années 2010, avec une énergie et un style similaires à ceux d'Occupy Wall Street, de Syriza en Grèce ou de Podemos en Espagne. Mais l'extrême gauche n'a jamais été suffisamment prise au sérieux en tant que véritable alternative, se réduisant à quelques voix bruyantes d'opposition.

Lorsque le bateau économique s'est stabilisé après des années d'austérité douloureuse, cela a semblé être un retour aux politiques de consensus prévisibles d'autrefois. Après les élections de 2020, le Fianna Fáil et le Fine Gael sont entrés dans un gouvernement de coalition pour la première fois de l'histoire. Cela était extrêmement significatif, car leur division aux origines de la guerre civile avait défini la politique pendant un siècle dans la République. S'il y avait eu une distinction idéologique historique entre les partis, elle aurait été totalement dissoute en 2020.



Il fut un temps où le Fianna Fáil était «le parti républicain», plus étroitement associé au nationalisme irlandais, au protectionnisme et au populisme économique, tandis que le Fine Gael était plutôt considéré comme un parti libéral traditionnel de centre-droit. Avec le grand consensus, ces distinctions sont devenues dénuées de sens. Après le Vendredi Saint, nous avons laissé derrière nous la question du Nord et toute démagogie sur l'identité des véritables héritiers de la tradition nationaliste. Après le succès de l'intégration européenne et du libéralisme économique, le protectionnisme et le nationalisme développementiste ont été laissés de côté.

L'unipartisme idéologique s'était désormais regroupé (aux côtés du Parti Vert) en un seul grand parti unique au pouvoir. La faction d'opposition dominante qui a émergé de cette période était le Sinn Féin, qui, tout en embrassant pleinement le consensus libéral, a défié le gouvernement avec un programme économiquement plus populiste. Le Sinn Féin est devenu le plus grand parti du pays. Leur montée en popularité semblait inexorable et le parti semblait en passe de diriger un gouvernement, jusqu'à l'émergence d'un populisme anti-immigration ces dernières années.

Comment cela a pu arriver? Comment un pays bénéficiant du plus grand soutien populaire à l'adhésion à l'UE, sans parti populaire de droite et avec un fort consensus au sein de l'élite et des médias aurait-il pu servir de terrain au développement d'un mouvement populaire anti-immigration ?

D'une certaine manière, le succès du régime libéral irlandais a causé sa perte.

J'ai déjà cité le livre «How Democracies Die» [Comment meurent les démocraties] de 2019 dans lequel les politologues Steven Levitsky et Daniel Ziblatt identifiaient un parti de centre-droit fort comme étant crucial pour le maintien de la démocratie. Bien entendu, Levitsky et Ziblatt partagent l'idée libérale de la démocratie en tant que pluralisme institutionnalisé et «valeurs démocratiques». Ce qu'ils analysent donc en réalité est la manière d'étouffer la montée du populisme, d'où leur identification de Trump et Orban comme des menaces pour la démocratie. Ils soutiennent que la principale raison de la montée d'Hitler était le manque de force de cohésion au centre-droit dans les années 1930 :

Avant les années 1940, l'Allemagne n'avait jamais eu de parti conservateur à la fois bien organisé et couronné de succès électoral, d'une part, et modéré et démocratique, de l'autre. Le conservatisme allemand était perpétuellement ravagé par les divisions internes et la faiblesse organisationnelle. En particulier, le fossé très marqué entre protestants conservateurs et catholiques a créé un vide politique au centre-droit que les forces extrémistes et autoritaires ont pu exploiter. Cette dynamique a atteint son paroxysme lors de la marche d'Hitler vers le pouvoir.

Remédiant à ce défaut, les partis conservateurs comme la CDU allemande sont devenus un pilier des démocraties européennes d'après-guerre. Le cas de l'Irlande est ici tout à fait unique. Alors que la plupart des démocraties européennes ont un grand parti de centre-droit et un autre de centre-gauche qui échangent le pouvoir, la scission bipartite de l'Irlande s'est faite selon des lignes tribales historiques plutôt que selon une distinction idéologique. Le Fine Gael et le Fianna Fáil représentaient les deux côtés de la tragique guerre civile irlandaise, et l'attachement tribal à l'un ou l'autre camp a duré bien au-delà du conflit lui-même. Il y a également une grande part de politique centré sur les personnalités en jeu, dans la mesure où les Irlandais ont tendance à voter pour les candidats parlementaires sur la base de ce qu'ils peuvent «faire» pour leur circonscription pendant leur mandat.

Mais comme l'Irlande était un pays socialement très conservateur et qu'il n'y avait pas de force politique de gauche majeure, les deux partis ont joué le genre de rôle que les partis conservateurs traditionnels de centre-droit ont joué dans le reste de l'Europe. Cependant, depuis les années 2000, au milieu du grand consensus, les partis ont abandonné toute trace de conservatisme social et de nationalisme pour devenir des partis libéraux banals.

Tous les partis ont soutenu le référendum sur le mariage homosexuel en 2015, qui a été adopté avec 62% des voix, et aucun ne s'est opposé à l'amendement de 2018 à la constitution visant à introduire l'avortement en Irlande, qui n'a été rejeté que par 33% des voix. Mais cela a laissé environ un tiers de la population irlandaise qui croyait toujours au mariage traditionnel et était fortement pro-vie sans aucune représentation.



Il est probable qu'un nombre similaire de citoyens, voire supérieur, s'opposait également aux politiques gouvernementales d'immigration de masse, mais l'Irlande officielle n'y voyait pas vraiment un problème. Les médias étaient suffisamment adultes pour s'entendre afin de protéger les «valeurs démocratiques», pour geler ces mauvaises opinions. Les hommes politiques eux aussi ont été suffisamment responsables pour ne pas jouer avec les forces dangereuses du populisme. Avec des milliards de dollars par an destinés au complexe pléthorique d'ONG irlandaises, les derniers résistants du passé arriéré de l'Irlande finiraient par mourir ou seraient socialement contraints à se conformer.

Le manque de représentation des désenchantés dans la nouvelle Irlande a accumulé un tas de bois sec, mais l'Irlande officielle était convaincue de pouvoir lui refuser l'oxygène. Après la crise du COVID, il y a eu une convergence de facteurs dont les étincelles ont allumé le feu qui menace désormais de faire exploser le grand consensus irlandais.


L'implosion

Le gouvernement irlandais a suivi une voie particulièrement draconienne face au COVID. À l'été 2021, un rapport de l'Université d'Oxford a qualifié le confinement irlandais de plus strict de l'UE et de «l'un des confinements les plus sévères au monde face au coronavirus». Pourtant, aucun parti politique ou publication populaire n'a osé s'opposer à la «sagesse» de cette voie, qui impliquait d'enfermer les gens dans un rayon de déplacement de 5 km strictement appliqué par les points de contrôle de la Garda.

Comme partout en Occident, la COVID a contribué à la mnée d'une sorte de sentiment populiste (ou du moins antigouvernemental), mais celui-ci était désorganisé, non dirigé et souvent enclin à tomber dans des théories du complot erronées ou discréditantes. Lorsque les confinements ont pris fin et que le pays a rouvert ses portes, les événements ont ramené l'attention sur l'immigration.



L'invasion russe de l'Ukraine en février 2022 a été le cygne noir qui a provoqué une crise des réfugiés et commencé à submerger la gestion gouvernementale du système migratoire. En décembre 2022, l'Irlande avait accueilli plus de 67 000 réfugiés ukrainiens. En 2023, le taux d'Ukrainiens arrivés en Irlande était 10 fois supérieur à la moyenne de l'UE, la moitié d'entre eux citant un logement fourni par l'État comme raison pour laquelle ils avaient choisi l'Irlande.

Dans le même temps, l'afflux de demandeurs d'asile en provenance de pays extra-européens a commencé à augmenter considérablement, la politique laxiste du gouvernement en matière d'expulsions et les généreuses allocations accordées aux demandeurs d'asile en faisant une cible attrayante pour les trafiquants d'êtres humains et les immigrants illégaux.

2022 a également été l'année du meurtre tragique d'Ashling Murphy, une enseignante du primaire massacrée en plein jour par un immigrant tzigane rom de Slovaquie qui vivait de l'aide sociale. À peine trois mois plus tard, les cadavres gravement mutilés de deux homosexuels ont été retrouvés dans leur propre domicile à Sligo, l'un d'entre eux ayant été décapité. L'agresseur était cette fois un immigrant irakien de 23 ans.

En raison du nombre de victimes et de la nature particulièrement brutale de ces meurtres, ils ont été très médiatisés et discutés. Les médias ont tenté de rejeter la responsabilité de ces meurtres sur la culture irlandaise de misogynie ou d'homophobie, mais une grande partie du public était désormais frustrée par le silence des médias sur la question de l'immigration.

En novembre de la même année, le sentiment populiste naissant a trouvé un point central avec le début d'un vaste mouvement populaire dans la communauté ouvrière d'East Wall, dans le centre-ville de Dublin, où d'anciens bureaux de la communauté ont été transformés en logements de style militaire pour des centaines de migrants masculins. Les habitants d'East Wall ont organisé un certain nombre de manifestations réussies, notamment le blocage du tunnel du port de Dublin.

Cela a non seulement placé la question de l'immigration au premier plan du débat politique, mais a également encouragé la propagation de mouvements de protestation similaires dans d'autres régions du pays accueillant des centres de migrants. Un an plus tard, lorsqu'un migrant algérien a poignardé trois jeunes enfants et un soignant devant une école de Dublin, le mécontentement qui s'était accumulé pendant des années s'est répandu dans les rues au cours d'une nuit de protestation et d'émeutes. C'est également à ce moment-là que le champion  en arts martiaux Conor McGregor a commencé à exprimer son soutien et à condamner haut et fort le gouvernement irlandais en matière de politique d'immigration.



L'esprit populiste montant semble avoir enfin trouvé son expression électorale avec le rejet du référendum gouvernemental en mars. Le gouvernement avait proposé d'amender la constitution, en supprimant les termes prétendument dépassés sur l'obligation de l'État de «s'efforcer de garantir que les mères ne soient pas obligées par nécessité économique de s'engager dans un travail au détriment de leurs devoirs à la maison» par un langage non genré à propos de «relations durables».

Bien que tous les grands partis aient soutenu ce changement, il a fini par être perçu de diverses manières comme relevant du wokisme, un élément du programme libéral du gouvernement servant de à détourner l'attention des problèmes plus urgents et, potentiellement, d'un changement qui faciliterait une «migration en chaîne» vers l'Irlande. Quelles que soient les raisons de l'opposition à l'amendement, elles étaient toutes de nature populiste. Et bien que l'amendement ait été largement soutenu par une population qui avait voté un «oui» retentissant aux référendums sur le mariage gay et l'avortement, ce référendum a été largement rejeté. Plus de 67% de l'électorat a voté non, seule la circonscription libérale et très aisée de Dún Laoghaire soutenant l'un des deux amendements proposés.



Craignant apparemment le pire après ce résultat, certains parlementaires de la majorité ont commencé à faire marche arrière sur «l'agenda woke», et beaucoup ont maintenant renoncé et commencé à exprimer des critiques à l'égard de la loi irlandaise controversée sur le discours de haine, qui était en voie d'adoption par voie législative sans opposition. Or soudainement, la question s'est retrouvée au cœur du débat public l'année dernière – déclenchée en partie par l'attention internationale suscitée par la réponse de Elon Musk sur les aspects les plus controversés du projet de loi contre la haine en ligne, et également par une campagne populaire énergique de rejet – et cela a révélé qu'il était profondément impopulaire.



À la grande honte de nos élites, l'Irlande avait tardé à adopter le libéralisme. Et ils ont compensé en faisant semblant de l'adopter avec tout l'empressement et l'enthousiasme dont ils pouvaient faire preuve. Mais ils ont commis une erreur en ne faisant pas bouillir la grenouille au ralenti. S'ils avaient juste maîtrisé l'immigration illégale et maîtrisé les chiffres, la réaction négative à l'immigration légale de masse serait probablement restée gérable. Non seulement ils n'ont pas réussi à lutter contre l'explosion du nombre d'immigrés illégaux, mais au cours de l'année la plus récente, ils ont fait augmenter la population de 3% grâce à l'immigration légale, important 141 600 personnes supplémentaires.

Aujourd'hui, alors que l'Irlande se dirige vers les élections locales et européennes de juin prochain, la question de l'immigration domine la politique. Selon un récent sondage, 41% des Irlandais considèrent désormais l'immigration comme la principale question politique, soit une hausse de 15% en un mois seulement. 54% des sondés classent le logement comme leur principal sujet de préoccupation, un problème évidemment fortement impacté par l'immigration de masse. Plus d'un tiers des Irlandais déclarent qu'ils envisageraient de voter pour un parti explicitement anti-immigration. Les candidats politiques font état d'une inquiétude généralisée dans leurs échanges avec les électeurs concernant l'immigration. Il semble qu'il y ait enfin un espace pour une percée nationale-populiste dans la politique irlandaise.
Est-ce que cela arrivera ? Ces élections sont une grande inconnue. Dans le passé, l'électorat irlandais a commencé à se sentir dupé, avec un penchant pour le populisme et une agitation croissante, ce qui ne s'est pas traduit par une percée électorale. Les raisons pour cela sont multiples. La politique est encore ici une affaire de classe moyenne : les quartiers ouvriers de Dublin semblent les plus mûrs pour les candidats anti-immigration, mais ils ont également des taux d'inscription sur les listes électorales parmi les plus bas. Les régions les plus libérales et les plus riches ont les taux d'inscription les plus élevés, car ce sont celles qui participent à la politique électorale.

Il existe également une grande part de tribalisme et de politique centrée sur les personnalités encore courante en Irlande, ce qui rend les électeurs plus réticents à prêter leur vote à de nouveaux partis et à des candidats étrangers. J'ai récemment interrogé des agriculteurs et des électeurs ruraux à Athenry, dans le comté de Galway. S'ils avaient été interrogés question par question, je suis convaincu qu'ils auraient proposé un programme semblable à celui du Parti national, et ils considéraient tous l'immigration comme une question urgente. Un accord largement répandu, mais lorsqu'il s'agissait de savoir comment ils voteraient, beaucoup se sont engagés en faveur d'un candidat indépendant dont ils ignoraient qu'il avait une position effrayante en matière d'immigration, mais qu'ils considéraient comme un représentant digne de confiance pour diverses autres raisons.

Plus frustrant encore est le fait que dans les sondages sur l'immigration, les partisans du Sinn Féin affichent systématiquement des taux d'opposition à l'immigration de masse parmi les plus élevés, apparemment déconnectés de son leadership de gauche et partisan de l'ouverture des frontières. Il se peut que de nombreuses années supplémentaires de trahison sur cette question obligent un jour les électeurs à soutenir un changement radical, mais ces élections devraient néanmoins constituer une modeste percée électorale qui contribuera grandement à légitimer le populisme anti-immigration en tant que force sérieuse en Irlande, avec des mandats concrets.

Quel que soit le sort de chaque parti, et nombreux sont ceux qui tentent aujourd'hui de saisir l'opportunité de représenter le vote nationaliste, les forces populistes irlandaises se retrouvent extrêmement consolidées ces dernières années : l'attraction qu'exercent les groupes sur Telegram et WhatsApp pour diffuser rapidement des informations et pour organiser des manifestations ; la domination du Twitter politique irlandais par les influenceurs nationalistes, évidente dans la domination persistante de hashtags comme #IrelandisFull et leur capacité à organiser de grandes manifestations comme celle dont nous avons été témoins récemment ; la montée en puissance des «journalistes citoyens» comme Philip Dwyer qui donnent aux gens un aperçu direct des problèmes causés par la crise de l'immigration ; l'émergence de médias en ligne indépendants comme Gript et Burkean, qui ont comblé le vide laissé par les médias grand public ; et l'alignement ferme des «youngfellas» de Dublin – des jeunes hommes de la classe ouvrière des quartiers défavorisés à l'origine d'une grande partie de la désobéissance civile – avec le mouvement nationaliste.



Tous ces facteurs ont contribué à faire du mouvement anti-immigration irlandais l'un des plus efficaces d'Europe, même sans représentants élus. Et ici, il n'existe pas de faux parti libéral de centre-droit capable d'engloutir les votes nationalistes avec une rhétorique de diversion axée uniquement sur l'immigration illégale ou d'autres questions secondaires. Si la force de l'establishment libéral irlandais a résidé pendant des années dans sa politique fondée sur le consensus et sur l'absence d'une force populiste de droite, cette cohésion s'est retournée contre lui.

Ceux qui se trouvent à l'extérieur ont été contraints de s'adapter et de constituer leur propre force à partir de zéro. C'est une force qui ne peut plus être ignorée ou écartée en marge de «l'extrême droite», et comme le gouvernement ne montre aucune tendance à vouloir céder sur ses politiques accélérationnistes pour une migration de remplacement, c'est une force destinée à émerger comme la seule capable de défier la vision de l'Irlande officielle, celle qui signifierait la mort définitive de la nation irlandaise.

source : The Unz Review via Entre la Plume et l'Enclume

https://reseauinternational.net/irlande-la-fin-du-grand-consensus/