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Méfiez-vous du syndrome de l’Inde

Démarré par JacquesL, 28 Octobre 2007, 09:29:33 PM

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JacquesL

http://www.psychologies.com/article.cfm/article/12/Mefiez-vous-du-syndrome-de-l-Inde.htm?id=12&page=all&print

Méfiez-vous du syndrome de l'Inde
Angoisse et tristesse inexplicables, crises de panique et de sidération, hallucinations... L'Inde peut faire chavirer dans la folie certains vacanciers.

Ç'a été comme un cataclysme dans ma vie. Depuis, je sépare les gens en deux catégories : ceux qui y sont allés – et vraiment allés, c'est-à-dire qu'ils y ont laissé des plumes – et les autres. " En 1980, Véronique a 19 ans. Quand elle arrive en Inde, c'est une étudiante " libérée " qui réalise un rêve : rejoindre " l'Inde mythique des mille et un dieux " dont parlent tous ses copains routards. Elle pense trouver un océan de sagesse apaisant. " En guise de rêve, j'ai d'abord aperçu les eaux boueuses de la mousson, qui dévalaient dans les bidonvilles près de l'aéroport de Bombay, et des centaines de gens au regard fiévreux, avec de l'eau jusqu'aux genoux. " Dans l'aérogare, un sentiment d'oppression l'envahit. " Trop de monde, trop de bruit. " Deux jours plus tard, prostrée dans une chambre d'hôtel, elle pleure en continu. " Tout ce que j'avais vécu et obtenu jusque-là, ma carte d'identité, mes diplômes, mes frimes d'adolescente sûre d'elle, n'avaient plus aucune importance. Je me suis sentie très loin de tout ce qui donnait sens à ma vie. " Une expérience éprouvante, qu'elle résume comme " une claque très forte au niveau de l'ego ".
Un choc dès l'arrivée
Pour Régis Airault, psychiatre, il s'agit du " choc de l'Inde ". Longtemps en poste au consulat de France à Bombay, il a rencontré des centaines d'Occidentaux qui, comme Véronique, ont sombré dans l'angoisse, la panique ou la sidération peu de temps après avoir atterri. Aussi a-t-il voulu analyser ce " syndrome indien " (In "Fous de l'Inde", Payot 2000.)

Dès l'arrivée dans le pays, il se manifeste sous forme d'angoisse ou de tristesse inexplicable. Quelques semaines plus tard, des symptômes plus alarmants, hallucinations ou délires psychotiques, peuvent apparaître chez certains voyageurs. " Ils vivent alors une véritable dépersonnalisation, que j'appelle "l'épreuve de l'Inde" ", affirme le psychiatre. Ces voyageurs commencent par égarer leur argent, leurs affaires, avant d'oublier leur nom, leur identité ; ils entrent dans une forme d'errance, ou éprouvent des sentiments d'extase sauvage... Car l'Inde, terre des mille et un temples et ashrams, réveille l'élan mystique des plus rationalistes. " C'est seulement lorsqu'ils renouent avec un symbole fort de leur culture, en consultant un médecin français par exemple, qu'ils reprennent peu à peu pied dans la réalité. " La plupart des rapatriés sanitaires retrouvent leur équilibre psychologique dès le retour dans leur pays d'origine. Hormis quelques cas sévères – toxicomanes ou marginaux aux antécédents psychiatriques, qui " disjonctent " parce qu'ils n'ont plus de limites –, la plupart des victimes sont, selon Régis Airault, des personnalités plutôt équilibrées et structurées. C'est véritablement l'immersion dans le pays qui a déclenché chez eux une décompensation, un effondrement de leurs défenses habituelles.

Le même type de mécanisme joue dans le " syndrome de Florence " : Stendhal a éprouvé une telle exaltation devant des œuvres d'art florentines qu'il en a frôlé la folie. De même, à Jérusalem. Europ Assistance a rapatrié des touristes qui, lors de crises mystiques ou de délires hallucinatoires, chantaient des chants liturgiques ou montaient les marches de leur hôtel à genoux. Mais Arnaud de Courcy, directeur du service médical d'Europ Assistance, confirme la spécificité de l'Inde. C'est d'ailleurs le seul pays où le consulat de France s'est doté d'un service psychiatrique pour faire face aux troubles manifestés par les ressortissants français.
Le "pays des anomalies"
" J'avais sous les yeux des scènes incroyables, raconte Véronique : un type allongé sur le trottoir, une pierre sous la tête en guise d'oreiller, et la foule qui passe autour de lui, les vaches qui manquent de l'écraser, et lui qui dort profondément ; un mendiant qui porte des chaussettes au bout de ses moignons de bras et qui sourit à pleines dents, joyeux... " Ces flashs quasi surréalistes provoquent souvent des émotions violentes de dégoût ou d'exaltation chez celui qui débarque.

" C'est le pays des anomalies à chaque coin de rue ", disait un autre amoureux de l'Inde, le cinéaste Louis Malle, qui lui consacra son magnifique documentaire, "L'Inde fantôme". Nos repères de temps, de classes sociales, de langage y sont comme pulvérisés. " On est en plein Moyen Age, mais on entend sonner des portables dans la foule ", résume Régis Airault. " Je bredouillais quelques mots d'anglais, et le "rickshaw"(Vélos-taxis) me regardait en ricanant, confie Alain, qui a voyagé trois mois au Cachemire. Lequel des soixante dialectes utilisés dans le pays parlait-il ? Et d'ailleurs, comment tous ces Indiens faisaient-ils pour se comprendre entre eux ? "
" Plongés sans repères dans un tourbillon de misère, de surpopulation, d'images et de dieux inconnus, on n'y comprend plus rien ", écrit Régis Airault. La dépersonnalisation est en route.
Une plongée dans le refoulé
Plus que d'autres, cette terre oblige l'Occidental bardé de certitudes à plonger dans l'irrationnel, le refoulé, l'ombre. Tout ce que nous avons tenté de maîtriser dans nos civilisations techniciennes semble ici en roue libre. De plus, qui va en Inde questionne forcément son rapport au sacré et à la mort. Les visages chatoyants des dieux peints sur les bus font de l'œil toute la journée au piéton désorienté, les gestes d'offrandes se multiplient autour de lui sans qu'il en saisisse le sens. En même temps, les Indiens défèquent sur le trottoir, se mouchent sur votre épaule, raclent leur gorge à grand bruit pour leurs ablutions matinales. " C'est comme si tout ce que j'avais refoulé jusque-là me sautait à la gueule, confie Véronique. Mon rapport à l'invisible, mon dégoût du corps, de l'organique... et surtout, mon angoisse de mourir. "

La mort, honteuse et cachée en Occident, a en effet une place d'honneur en Inde. Les cadavres sont transportés dans les marchés, ou laissés à même le sol. Etre confronté si violemment à ce qu'on cache chez nous ne se fait pas sans heurts, on se retrouve vulnérable. Et comme à chaque fois qu'on laisse s'exprimer l'inconscient, la perception de la vie en est exacerbée. " L'Inde, c'est la vie puissance 1000, explique Marie, une amoureuse du pays. Couleurs, sons, odeurs, tout est intensifié, et tu te prends ça dans la tête à chaque seconde. "
Dans les bras de "mother India"
" En Inde, on vit nu ou quasiment. On a l'impression d'être dans une espèce de bulle, de poche humide et chaude, atemporelle, où même la communication est censée se faire par "vibrations". " Pour Régis Airault, l'Inde n'est pas sans rappeler une sorte de " grande mère " archaïque qui dans le même temps attire et avale le voyageur en quête du " grand tout ", mais le rejette à force d'étrangeté, et de différence, car " l'Inde, c'est le pays de l'altérité ".

De là à penser que le processus de séparation avec la mère est au centre des problématiques rencontrées par certains voyageurs, il n'y a qu'un pas. Pour Régis Airault, " voyager, c'est avant tout fuir la figure paternelle pour ne pas l'affronter, sans pour autant abandonner l'espoir de la dépasser et de réaliser quelque chose d'œdipien en parcourant le monde ". C'est fuir le deuil de la toute-puissance infantile, tout en se donnant les moyens de faire effectivement ce deuil. Dans nos sociétés, où les rites initiatiques n'existent plus, chacun se crée ses propres épreuves ; l'Inde, qui représente en Occident une sorte de " nirvana maternel ", est, pour cela, une destination privilégiée des jeunes adultes.

Mais sur cette route, certains butent sur un écueil majeur : ils " partent tout en restant ", fusionnels, adolescents, et pris dans leur désir d'immortalité. Ajoutez à cette tentative de séparation symbolique des conditions matérielles précaires, l'épreuve de la chaleur, de la dysenterie, qui font partie du processus initiatique, et vous ne pouvez éviter les incidents.

En 1993, Jean-Marc a voyagé seul en Inde pendant un an. Il avait 29 ans. " J'avais arrêté de travailler, réglé tous mes comptes. J'étais dans un tel état d'esprit que si j'avais pu être rayé de l'état civil, je l'aurais fait ! " C'est donc une véritable volonté de renaître, de recréation, qui l'a entraîné là-bas. " Sauf que ça peut vous tuer ", précise-t-il. C'est au moment où il décide de rentrer en France, après s'être laissé absorber pendant de longs mois par le pays, qu'il tombe malade, " tétanisé, sans appétit, avec des douleurs partout pendant six jours ! " Il présentait tous les symptômes du paludisme... alors qu'il n'était pas allé en zone tropicale !
Le passage par l'Inde
Pour de nombreuses personnes, le passage par l'Inde joue donc comme une épreuve initiatique, qui passe nécessairement par une forme de mort à soi pour revenir différent. Cela ne signifie pas que les chemins de la sagesse mènent forcément à la folie. Olivier Germain-Thomas, producteur à France Culture et auteur de "La Tentation des Indes" (Albin Michel, 1993), confirme que les Occidentaux vont chercher là-bas " ce qui est moribond chez nous, l'élan spirituel. Mais il y a dans l'Occident actuel une hâte. Or le besoin de spiritualité n'appelle pas une réponse rapide, comme on prendrait un ticket pour Disneyland. C'est long, c'est lent. Il faut être prêt. " Telle est sans doute la leçon majeure de l'Inde.
Prévenir le syndrome indien
Préparez bien votre départ : informez-vous sur le pays, mais aussi sur les services mis en place par le consulat. Aujourd'hui, il y a deux psychiatres en Inde, au consulat de Pondichéry (00.91.413.33.40.54 ou 41.74), et à celui de New Delhi (00.91.116.11.87.90).

Suivez les conseils d'un habitué du pays : pour une première immersion, commencez par la région de Kerala plutôt que par les grandes villes comme New Delhi ou Bombay, car le sud est une contrée plus douce.

Si le malaise s'installe, partez loin des villes, à la campagne où l'on est plus au calme ; ou offrez-vous un hôtel plus chic.

Gardez des liens avec votre culture d'origine. Parler à un compatriote peut s'avérer d'une grande aide.
Le blues des Japonais à Paris
" Chaque culture désigne à ses membres une destination où ils peuvent vaciller ", affirme Régis Airault. Pour les Japonais, c'est Paris. Le docteur Ota, psychiatre à l'hôpital Sainte-Anne, à Paris, en a traité plus de 1 000, dont un pourcentage important souffrait de ce que ce médecin appelle le " syndrome de Paris ". Ses patients, après quelques semaines de séjour dans la capitale, présentent des troubles allant d'états dépressifs à des tentatives de suicide, en passant par des délires de persécution. Selon le docteur Ota, " ils pensent trouver en France un idéal de raffinement et imaginent Paris comme un paradis civilisé. Mais les codes de communication français sont très différents des leurs. Par exemple, la structure de la langue japonaise est telle qu'il faut attendre la fin de la phrase pour en comprendre le sens. Cela amène les Japonais à être très patients, alors qu'un français n'hésitera pas à couper la parole de son interlocuteur. De même, il existe au Japon une communication non verbale intense, où l'on s'efforce de lire dans l'attitude de l'autre. Trop parler est perçu là-bas comme vulgaire. En France, pour se faire comprendre, les Japonais sont donc constamment obligés de se faire violence. "