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ZFE : l’écologie pour les nuls

Démarré par JacquesL, 07 Janvier 2025, 12:12:24 PM

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JacquesL

ZFE : l'écologie pour les nuls



par Patricia Cerinsek

Le gouvernement met la dernière touche pour plomber un peu plus l'économie française. Bienvenue en zone à pas si faibles émissions mais à fortes exclusions.

Avec les zones à faibles émissions (ZFE), prévues pour se multiplier au motif de lutte contre, au choix ou ensemble, les émissions de gaz à effet de serre ou de gaz polluants, il semble bien que l'on va droit dans le mur.

De prime abord, l'intention est louable. Qui s'élèverait contre l'idée de respirer un air plus sain et de contribuer à un moindre réchauffement de l'atmosphère ? Il est toutefois fort à parier que ce sont des raisons bien plus prosaïques – en l'occurrence les 30 millions d'euros d'amende infligés par le Conseil d'État à l'État français pour ne pas respecter les seuils limite de pollution de l'air sans parler du courroux de Bruxelles – qui ont préfiguré ces zones d'où seront exclus progressivement de plus en plus de véhicules, diesel puis essence.

Y a-t-on seulement réfléchi à deux fois avant de foncer tête baissée dans un dispositif qui semble davantage avoir été conçu comme expédient pour donner des gages plus que pour régler le problème de la pollution ? Et qui, traduit dans une loi mal préparée et mal ficelée, risque fort d'être éteint par son propre souffle.

Car tout l'édifice est en train de se déconstruire, brique par brique. L'interdiction par le parlement européen de la vente de véhicules thermiques, diesel puis essence en 2035, qui, au final, donnait le La au concert des mesures prises en Europe ? Une clause de revoyure est d'ores et déjà prévue en 2026 afin d'étudier les nouvelles technologies disponibles. On sent d'ores et déjà le mythe de l'électrique finir en court-circuit.

Une bombe sociale et environnementale

L'Italie, on s'en souvient, avait ouvert une brèche avec son amendement Ferrari, qui permet d'affranchir les voitures de luxe produites à moins de 1000 exemplaires par an.

Depuis, le pli est pris. En France, 11 métropoles ont depuis le 1er janvier 2023 mis en place une ZFE après moults concertations et dérogations pour tenter de faire passer la pilule d'un dispositif aussi peu social que réellement écologique – depuis le 1er janvier 2025, toutes les communes de plus de 150 000 habitants peuvent instaurer une ZFE. Chacune à sa façon. À Lyon et Grenoble, les métropoles ont tenté de baliser le terrain en testant, au préalable, la ZFE à destination des véhicules professionnels. C'est peu dire que la pilule a été, et est toujours, difficile à faire passer, certaines entreprises préférant tout simplement déménager...

Politiquement, ça ne passe pas non plus. Les Républicains sont sceptiques quant à son application – en Isère, le département a demandé un report de trois ans -, le RN n'en veut pas et dans certains territoires comme au Mans (métropole PS dirigée par le socialiste Stéphane Le Fol), on entend y réfléchir à deux fois avant de se lancer.

Sur le terrain, le dispositif prend l'eau de toutes parts. Déjà, les autoroutes et routes nationales n'ont jamais intégré le dispositif. Ensuite, le nombre de métropoles (normalement de plus de 150 000 habitants) qui doivent appliquer ces ZFE est particulièrement volatile et indéterminé. On en était à 43 quand est sorti le 24 décembre un décret qui permet de possibles dérogations. Soit en cas de concentrations moyennes annuelles en dioxyde d'azote inférieures ou égales à 10 μg/m3, soit en cas de mesures alternatives qui auraient un effet équivalent. Sur la base donc de modélisations.

Des dérogations dont la liste ne finit pas de s'allonger du côté des véhicules visés, chaque territoire étant plus ou moins maitre de son calendrier comme de potentiels passe-droits. Ce qui promet une joyeuse pagaille quand bien même le gouvernement tente de remettre tout ça en ordre de marche. Il a en effet nommé un coordinateur national en la personne d'Edouard Manini, ancien conseiller à l'Eurométropole de Strasbourg en charge des ZFE.

Véhicules de police et de secours, transports d'animaux ou de certaines marchandises, véhicules pour handicapés ou de bienfaisance, voitures de collection sont la plupart du temps affranchis ... Plus, plein d'autres, fonction des territoires. À Paris, les interdictions sont levées passé 20 heures. À Montpellier, les petits rouleurs ne sont pas concernés.

À Grenoble, les agriculteurs sont exemptés, de même que les forains, les entreprises en difficulté ou les entreprises de travaux publics. À Strasbourg, ce sont les véhicules chargés de la distribution des denrées alimentaires en circuit court et les véhicules de déménagement qui ont le droit de rester dans le circuit.

Et si vous ne cochez pas ces cases, il y en a d'autres. La Métropole grenobloise a en effet décidé de permettre à tous de bénéficier de 12 jours de dérogation par an. Quel que soit son véhicule et quelle que soit son utilisation. Strasbourg, elle, propose 24 jours.

Problème et non des moindres, à force de répéter qu'il faut faire preuve de pédagogie et de souplesse, on ne sait plus trop ce qui reste du dispositif. Et si ce dispositif de plus en plus réduit sera un tant soit peu efficace pour juguler les émissions de gaz à effet de serre et les gaz polluants. À supposer qu'il ait pu l'être originellement...

Car la base des ZFE est pour le moins chancelante. Les zones faibles émissions sont en effet assises sur les vignettes Crit'air. Lesquelles n'ont jamais concrètement prouvé leur efficacité.

Vignettes Crit'air : un dispositif qui n'a rien prouvé

Bref retour en arrière... Les agglomérations lyonnaise et grenobloise ont été les premières à tester les vignettes lors des épisodes de pollution de l'air. Et ? Le dispositif n'a quasiment pas été évalué. Une seule fois en sept ans en fait. Depuis l'hiver 2016-2017 et la première mise en œuvre des restrictions de circulation, Atmo n'y a plus mis son nez. L'expérience n'a-t-elle pas été concluante ? La baisse des émissions de dioxyde d'azote (essentiellement émis par le trafic routier) et de particules fines PM10 (en partie le trafic routier, mais essentiellement issu de la combustion de bois de chauffage) a été estimée entre 6 et 9%.

Théoriquement, si le dispositif avait été contrôlé et donc un minimum respecté, on aurait dû obtenir plus, rétorque Atmo.

C'est là tout le problème. La Cour des comptes ne disait pas autre chose en juillet 2020. Dans leur rapport, les magistrats financiers pointaient un système théorique trop éloigné de la réalité, et surtout privilégiant les modèles de véhicules... plus polluants.

«Plus de huit ans après la mise en œuvre des normes Euro 5 et quatre ans après celle des normes Euro 6, force est toutefois de constater que ces règlementations ont échoué à réduire les émissions de certains polluants des moteurs diesels : en effet, si les normes Euro 5 ont permis la généralisation des filtres à particules, leur impact sur les émissions de dioxyde d'azote a, en revanche, été très limité. Comme la Cour l'avait déjà relevé en 2016, les limites fixées par les normes Euro ne sont pas respectées en conditions réelles de conduite pour les particules fines et moins encore pour les oxydes d'azote depuis de nombreuses années».



Et comme on n'est plus à une contradiction/compromis près, on a ainsi vu les véhicules roulant au B100 se voir décerner la pastille Crit'air 1, lui ouvrant grand les portes des ZFE. L'annonce a été faite par Emmanuel Macron lui-même, en pleine campagne présidentielle, lors du Congrès de la FNSEA. Et tant pis si le B100, carburant 100% colza, émet 64% d'oxydes d'azote de plus que le diesel et s'il grignote des surfaces agricoles que l'on verrait mieux servir à autre chose...

*




Qualité de l'air : de quelle pollution parle-t-on ?

26 janvier 2023

Bref, c'est toute la classification des vignettes Crit'air qui est à revoir, pour notamment, plaident de plus en plus, y inclure un malus au poids. C'était une des propositions d'une mission flash de l'Assemblée nationale.

Reste qu'à se focaliser sur ces ZFE, et donc parier sur le renouvellement du parc automobile – ce qui fait bien les affaires des constructeurs automobiles, les vrais gagnants au final – on en oublierait presque le reste. À Grenoble, le plan de déplacements urbains, qui planifie les mobilités à l'horizon 2030, a laissé de côté les transports en commun, exception faite d'un transport par câble mal emmanché (le projet a depuis été abandonné).

Et dans le 3e plan de protection de l'atmosphère (PPA) de l'agglomération, sorti il y a peu, nulle trace d'une augmentation du nombre ou de la taille des parking-relais, qui auraient pu préfigurer un développement des transports en commun...

Lors de l'enquête publique sur le PPA de l'agglomération grenobloise, le commissaire enquêteur s'étonnait que «le choix des constructeurs automobiles s'oriente à 100% vers la motorisation électrique sans explorer par ailleurs la piste d'une réduction drastique du poids des véhicules et celle des petits véhicules légers adaptés à des déplacements pendulaires pour une ou deux personnes».

Les voitures électriques émettent presque autant de poussières que les thermiques (étude Ademe)

Demain une voiture plus économe et plus écologique ? On n'en prend pour l'instant pas le chemin. Alors que du côté des constructeurs automobiles, on s'est lancé à fond dans l'électrification des gammes avec comme corollaire des véhicules souvent plus gros, plus puissants et surtout plus onéreux, soutenus par une politique de subventions massives et de prêts à aux zéro (l'endettement comme solution), il apparait désormais de plus en plus clairement qu'il manque comme une réflexion d'ensemble.

Un plan assorti d'une étude d'impact.

Les ZFE, et derrière les véhicules électriques, solutions pour faire baisser les émissions de dioxyde de carbone ? À condition de ne pas regarder la pollution à la construction, à la fabrication de l'électricité ou au recyclage (des batteries par exemple). À condition de ne pas regarder ce qu'il en est du côté des particules fines dont on connaît la nocivité, les poussières s'infiltrant au plus profond des poumons.

Car les véhicules électriques émettent presque autant de particules fines que les véhicules thermiques récents désormais équipés de pots catalytiques performants, pointe une étude de l'Ademe sortie en avril 2022. Jusqu'au prochain progrès technologique...

«Alors que les émissions de particules à l'échappement ont très nettement baissé avec la généralisation des filtres à particules, celles hors échappement provenant de l'abrasion des freins, des pneumatiques et des chaussées deviennent prépondérantes et représentent en France 59% des PM10 et PM2,5», souligne l'agence.

Des poussières issues non pas en majorité du trafic routier mais de la combustion du bois de chauffage. C'est l'autre dada des pouvoirs publics qui depuis quelques années se sont mis en devoir de soutenir massivement la filière, et de l'industrialiser, via le développement de centrales biomasse un peu facilement labellisées vert... Mais ça c'est un autre sujet.

source : L'Éclaireur – La Lettre des Alpes

https://reseauinternational.net/zfe-lecologie-pour-les-nuls/