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Le canal de Panama et les traités maltraités

Démarré par JacquesL, 30 Décembre 2024, 12:37:34 PM

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JacquesL

Le canal de Panama et les traités maltraités



par Jorge Majfud

Le 18 novembre 1903, sous le gouvernement du premier Roosevelt (et en suivant les ordres du président démocrate) a été signé à Washington le traité Hay-Bunau-Varilla par lequel «les États-Unis garantissent la liberté du Panama» en échange de la session par le Panama aux États-Unis de tous les droits sur le canal et les zones contiguës, sans aucun impôt. Le 22 décembre 2024, le président élu des États-Unis, Donald Trump a annoncé qu'il exigeait du Panama «qu'il rende le canal». L'impérialisme est une maladie qui non seulement tue ceux qui lui résistent, mais ne laisse même pas vivre ceux qui en sont porteurs.

Washington DC. 22 janvier 1903 – Le secrétaire d'État John Hay représentant commercial de la Colombie aux États-Unis, Tomás Herrán, signent le traité qui allait donner aux États-Unis, le droit de reprendre la construction du canal de Panama, que les Français avaient abandonnée environ à la moitié. Par ce traité, la Colombie s'engageait à céder aux États-Unis pour 100 ans, une bande dans son appendice nord en échange de 10 000 000 en un seul paiement et 250 000 $ par an. À quelques kilomètres des côtes du Panama, le bateau de guerre Wisconsin est bloqué pour soutenir le moral des négociations.

À Washington, le congrès approuve immédiatement le traité, mais il est rejeté à Bogotá. Il y a des doutes sur les conséquences sur la souveraineté du pays et sur les bénéfices qui découleraient de cet accord. Comme si cela ne suffisait pas, les mathématiques qui se pratiquent aussi dans ce pays, disent que le peuple colombien mettrait 120 ans pour recevoir la même compensation qu'il avait été proposé de payer en une seule fois à la New Panama Canal Company.

Mais le congrès colombien n'est pas le seul obstacle. Le 15 avril, l'envoyé des États-Unis, Arthur Beaupré, envoie un télégramme au secrétaire d'État à propos du sentiment de suspicion croissant parmi le peuple colombien : «il y a au moins une chose qui est claire, écrit Beaupré, si le traité était soumis à la libre considération du peuple, il ne serait pas approuvé». Considérant la forte opposition de l'opinion publique au traité Hay-Herrán, le Sénat colombien vote à l'unanimité contre sa ratification.

Sans avoir jamais mis un pied hors de son pays, le 27 août, Roosevelt écrit trois lettres qui décrivent les Colombiens comme «ignorants, avares, petits hommes méprisables, corrompus, idiots et homicides». Son mépris pour les peuples de race inférieure n'est pas nouveau et ne sera jamais surmonté. «Je ne pourrai jamais respecter un pays plein de ce genre de personnes», écrit Roosevelt. «Tenter d'avoir des relations avec la Colombie, comme s'il s'agissait de la Suisse, de la Belgique ou de la Hollande est simplement une stupidité».

Déjà en 1849, un an avant la fin de la guerre au Mexique et probablement informé des plans de la France pour un nouveau canal à Suez, le président Zachary Taylor était déjà du même avis. Devant le congrès, il avait insisté sur la nécessité de construire un canal, peut-être Nicaragua, et avait prévenu que «une œuvre de cette envergure doit être réalisée sous la supervision et la protection de toutes les nations pour un bénéfice équitable».

Alors, en pleine hégémonie navale de la race anglo-saxonne sur les tropiques, il n'y a aucun accord et le président Théodore Rouvel n'a aucun doute : une république d'Amérique du Sud ne va pas interférer avec ses plans. Immédiatement, il envoie des paquets de dollars pour organiser une révolte qui s'appellera Révolution. Le problème dure, moins que pluie de printemps. Le 18 novembre, est signé à Washington le traité Hay-Bunau-Varilla par lequel «les États-Unis garantissent la liberté du Panama» en échange de la session par le Panama aux États-Unis du monopole de l'autorité et des droits sur le canal et les zones contiguës, sans aucun impôt. Comme d'habitude, les Panaméens ne sont pas invités à la signature de ce nouveau traité.

Ce traité établit que les 250 000 $ par an offerts auparavant à la Colombie ne seraient plus payés maintenant mais 10 ans après l'ouverture du canal. Il n'y a rien de tel que d'avoir une armée puissante pour faire de bonnes affaires. Cela viole aussi le précédent traité de paix et de commerce connu sous le nom de traité Bidlack, signé par la Colombie et les États-Unis en 1846 par lequel la Colombie garantissait aux États-Unis le droit de passage par l'isthme contre la protection de la province de Panama contre toute révolte ou tentative de séparation.

Comme à Cuba, comme à Porto Rico, à présent, l'article 136 du traité de 1903 assurant Washington, la possibilité d'intervenir et de résoudre de faire ce qui lui paraît le mieux face à toute situation gênante. Lorsque des Panaméens protestent, Roosevelt les menace de les traduire devant la justice colombienne. Cette pratique n'est pas nouvelle : les lois sont faites par les puissants pour que les faibles les respectent. Si un pays plus faible viole un accord, le pouvoir impérial de service l'envahit, si le pays le plus faible réclame que les traités signés soient respectés, il est envahi pour qu'on en signe un meilleur.

Quelques temps avant la signature du nouveau traité, au congrès des États-Unis, des voix s'élèvent contre ce que certains membres du congrès appellent «malhonnêteté» et «impérialisme». Le sénateur Edward Carmak proteste : «L''idée d'une révolution au Panama est un mensonge grossier, le seul homme qui s'est levé en armes a été notre président». Le sénateur George Frisbie Hoar, membre de la commission qui enquête sur les crimes de guerre restés impunis aux Philippines, rejette les versions concernant la révolution au Panama et ajoute : «J'espère ne pas vivre assez longtemps pour voir le jour où les intérêts de mon pays seront mis au-dessus de son honneur».

Bien sûr, pour l'honneur, il y a une solution. Le président fait appel à la vieille formule «on a été attaqué en premier». Comme James Polk pour justifier l'invasion du Mexique en 1846 ou McKinley pour occuper Cuba en 1898, Roosevelt invente une histoire sur certaines menaces à la sécurité de citoyens étasuniens dans la région. Comme le fera Henry Kissinger quand il niera devant les caméras de télévision toute intervention dans le coup d'État militaire de 1973, au Chili, Roosevelt affirme devant le congrès et devant l'opinion publique que, de toute façon, Washington n'a pas du tout participé à la révolution au Panama. Ce qui n'enlève rien au fait que c'est une bonne idée.

Le 6 décembre 1904, Roosevelt fera son discours annuel devant le congrès sur la nécessité d'étendre, une fois de plus, la doctrine Monroe de 1823 «pour voir nos voisins stables, ordonnés et prospères». Autrement, «l'intervention d'une nation civilisée sera nécessaire... Dans ce cas, les États-Unis devront, bien qu'ils ne le veuillent pas, intervenir pour résoudre tout problème grave en exerçant le pouvoir de police internationale». Si nous le faisons, que ce soit de façon légale.

En 1906, Roosevelt ira voir les Travaux Open Ama. Ce sera le premier président des États-Unis dans toute leur histoire qui se risque à sortir de son pays. Les rébellions sont plutôt anodines car Washington a décrété que les citoyens de ce pays ne peuvent pas acquérir d'armes, ce qui affecte également la police panaméenne qui doit faire appel aux Marines lorsque la situation lui échappe. À bord de l'USS Louisiana, Roosevelt écrit à son fils Kermit le 20 novembre : «Avec une énergie admirable, des hommes et des machines travaillent ensemble, les Blanc supervisent les travaux et les machines opèrent tandis que des dizaines de milliers de Noirs font le dur travail dans lequel il ne vaut pas la peine d'user des machines».

Malgré le dur travail des Panaméens, pour une raison quelconque, il faut les représenter comme des fainéants. Le journaliste Richard Harding Davis, comme tout journaliste raisonnable et correct, se fait l'écho du sentiment de l'époque : «Le [Panama] a des terres fertiles, du fer et de l'or, mais il a été maudit par Dieu avec des gens fainéants et des hommes corrompus qui le gouvernent... Ces gens sont une menace et une insulte à la civilisation».

Le 26 janvier 1909, le comité du Sénat des États-Unis pour les affaires internationales, sur la base des déclarations prétentieuses de Roosevelt devant une classe pleine d'étudiants d'une université de Californie, enquêtera «sur la décision unilatérale d'un ancien président de prendre le Panama à la république de Colombie sans consulter le congrès». Considérant les réclamations insistantes de la Colombie devant le tribunal de La Haye, la commission interrogera différents acteurs de l'époque. Selon leurs déclarations, le 6 novembre 1903, trois jours après la révolution d'indépendance du Panama, le département d'État avait envoyé un câble au consul des États-Unis en Colombie l'informant que «le peuple du Panama, apparemment à l'unanimité, avait résolu de dissoudre ses liens avec la république de Colombie...»

Le parlementaire Henry Thomas Rainey lit devant le parlement, un câble de Washington : «le peuple du Panama, apparemment à l'unanimité, avait résolu de dissoudre ses liens avec la république de Colombie en reprenant son indépendance...» Et le même Rainey déclare : «Je ne pense pas que quoi que ce soit de cela soit vrai. Le peuple du Panama n'a rien réussi par lui-même... Quand la révolution a eu lieu, à peine 10 ou 12 rebelles en plus des gérants de la Panama Railroad and Steamship Co, connaissaient les plans».

Il faudra attendre jusqu'à 1977, pour que le gouvernement de Jimmy Carter signe un accord selon lequel les États-Unis rendraient le canal au Panama le dernier jour de 1999, 3 ans avant l'échéance de la location obligatoire. Un an auparavant, lors d'un évènement au Texas, l'ancien gouverneur de Californie et futur candidat à la présidence, Ronald Reagan, affirmait : «Peu importe quel dictateur sanguinaire est au pouvoir au Panama. Nous l'avons construit ! Nous payons pour le canal ! Il est à nous et nous allons le garder».

Le dictateur auquel Regan faisait allusion était Omar Torrijos. Torrijos allait réclamer la souveraineté sur le canal et mourir par hasard, comme d'autres dirigeants rebelles du Sud, dans un accident d'avion.

L'impérialisme est une maladie qui non seulement tue ceux qui lui résistent, mais ne laisse même pas vivre ceux qui en sont porteurs.

Extraits du livre, «La frontière sauvage : 200 ans de fanatisme anglo-saxon en Amérique latine» de Jorge Majfud.

source : Resumen Latinoamericano via Bolivar Infos

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