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"Ils se fermèrent à eux-mêmes la voie de la résipiscence"

Démarré par JacquesL, 07 Mai 2006, 01:16:14 AM

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JacquesL

"Ils se fermèrent à eux-mêmes la voie de la résipiscence"

Au printemps 1934, Charles de Gaulle faisait paraître « Vers l'armée de métier ». Il faudrait une sacrée dose de mauvaise foi pour me taxer de gaullisme. Toutefois, depuis les neuf ans que j'ai acheté les Mémoires de guerre chez un bouquiniste de Montélimar, le paragraphe qui suit, extrait de la page 21, me reste dans la tête, et me contraint à réfléchir :

    Citation :
Citation de: Charles de Gaulle"    ...
    Cependant, les organismes officiels et leurs soutiens officieux, plutôt que de reconnaître d'évidentes nécessités et d'accepter le changement, quitte à en aménager la formule et les modalités, s'accrochèrent au système en vigueur. Malheureusement, ils le firent d'une manière si catégorique qu'ils se fermèrent à eux-mêmes la voie de la résipiscence. Pour combattre la conception de l'armée mécanique, ils s'appliquèrent à la défigurer. Pour contredire l'évolution technique, ils s'employèrent à la contester. Pour résister aux événements, ils affectèrent de les ignorer. Je vérifiai, à cette occasion, que la confrontation des idées, dès lors qu'elle met en cause les errements accoutumés et les hommes en place, revêt le tour intransigeant des querelles théologiques.

    Le général Debeney, glorieux commandant d'armée de la grande guerre, qui, en 1927, en sa qualité de Chef d'état-major général, avait élaboré les lois d'organisation militaire, condamnait formellement le projet. Dans la Revue des Deux Mondes, il exposait avec autorité que tout conflit européen serait tranché, en définitive, sur notre frontière du nord-est que le problème consistait à tenir solidement celle-ci. Il ne voyait donc rien à changer aux lois, ni à la pratique,
    ... Le général Weygand ...
    Le maréchal Pétain
... "
Soit le gratin du commandement militaire de l'époque.

Ecrivain exigeant avec lui-même, Charles de Gaulle avait le don de ramener sur le devant de la scène des mots rares, parfois désuets, tous parfaitement justes (à la « chienlit » près... et le « Volapück » non plus, n'était pas des plus heureux), et qui obligeaient le gros des français à ouvrir un dictionnaire pour déchiffrer chaque discours télévisé du général. Nous voici donc avec « résipiscence » dans la mâchoire. A nous de le digérer, car c'est justement un concept-clé pour notre action. O.W. Wilson lorsqu'il reprit en main la police de Chicago en 1960 fut bien contraint de ne sanctionner qu'une minorité de policiers, les irrécupérables, et amener à la compétence et à la résipiscence le plus grand nombre. Nous sommes devant la même contrainte stratégique.

Celui qui a le mieux compris cette contrainte, fut Gandhi. Et les résultats obtenus par ceux qui l'ont compris, j'ai nommé le pasteur Martin Luther King et l'avocat Nelson Mandela, sont parmi les résultats les plus remarquables du 20e siècle. Nous devons obtenir la prise de conscience de leurs erreurs et leur amendement, soit la résipiscence, du plus grand nombre, c'est indispensable pour isoler les brebis les plus galeuses. Tel doit être le guide de notre action au long des années qu'il y faudra.

JacquesL

C'est quand même un sacré phénomène, que cette question centrale de la résipiscence, et du non-accès à la résipiscence, ainsi exprimée par Charles de Gaulle, soit un concept informulé et inexprimé par le restant du monde. Alors que c'est est un concept central dans l'évaluation de bien des gens pour tel poste, pour telle tâche, pour telle responsabilité.

C'est le non-accès à la résipiscence qui fait de la vanité la voie royale vers l'imposture (vanité plus incompétence inavouée suffisent), puis de l'imposture vers la paranoïa, de peur d'être démasqué(e). Feu Donald Winnicott nous rappellerait que ce non-accès à la résipiscence est une aggravation directe, une conséquence directe du non-accès durable à la position de désillusion de soi-même. Ce qu'il appelait, de façon malheureuse et trompeuse, la "position dépressive".

Les pervers, qu'ils soient narcissiques ou histrioniques, ou en intergrade, sont tous sans accès à la résipiscence, tous enfermés dans leur escalade vers toujours plus d'imposture et d'abus de son prochain, pour mieux le contrôler.

Alors qu'en culture fémino-féminine, toujours essentialiste et nominaliste, les pervers narcissiques sont des entités en soi (voir par exemple la discussion commencée à http://forum.doctissimo.fr/psychologie/couples-relations/Femmes-perverses-manipulatrices-sujet-171420-1.htm et se poursuivant jusque http://forum.doctissimo.fr/psychologie/couples-relations/Femmes-perverses-manipulatrices-sujet-171420-37.htm au moins), l'étude du non-accès à la résipiscence nous permet d'étudier l'évolution vers la perversité comme un processus, dont la dialectique nous est désormais accessible et pensable.

JacquesL

#2
http://www.paternet.net/salon/forum/viewtopic.php?t=1065
CiterSous-Chapitre 8.2 : L'effet simplificateur des modifications d'ordre supérieur.
. . . . .
Exemple: 0. W. Wilson, superintendant de la police de Chicago depuis 1960 (et comme McNamara ancien professeur d'université) prit son poste après un important scandale dans la police : une patrouille avait fait le guet pour le compte de criminels et transporté des marchandises volées dans des voitures de police. Il trouva des moyens criblés de corruption, ballottés par les influences et les protections politiques et dépourvus des plus élémentaires rudiments d'un fonctionnement efficace. Il y avait fréquemment de véritables barrières le long des frontières d'un arrondissement politique, et son chef y dictait sa justice ; certains policiers devaient acheter eux-mêmes leur papier carbone pour rédiger leurs rapports.
Comme McNamara, dans la réorganisation des moyens, Wilson prit ses distances pour travailler et obtint ainsi la direction effective. Sans doute s'adressa-t-il occasionnellement à la presse pour gagner la confiance du public dans ses activités, mais il évitait en général les contacts avec le public et les personnalités politiques se bornant à poser des questions à ses forces.
Il s'aperçut, par exemple, qu'il n'existait aucune méthode de compte rendu organisé pour évaluer les résultats des officiers et des policiers. Les comptes-rendus de crimes étaient fréquemment perdus ou non enregistrés, et rarement exploitables quand ils existaient. De plus, il n'y avait pas d'ordre de priorité : les réceptions tapageuses étaient traitées avec autant d'attention que les meurtres en cours d'exécution.
Wilson définit son système en créant les rapports et les communications nécessaires pour fournir aux hommes des mesures pratiques d'efficacité.
Tous les délits signalés par les citoyens étaient enregistrés, codés pour être stockés sur ordinateur, et diffusés en fonction de l'ordre de priorité depuis un centre de contrôle, sur un réseau de communication à 12 canaux, aux voitures radios. Pour rapporter les circonstances du délit, l'homme de la patrouille ne devait plus utiliser sa radio tant que le cas n'était pas résolu ; il avait alors un rapport écrit à remplir et à classer, et ce rapport était confronté au rapport d'origine enregistré par l'ordinateur. Cette action découragea les inexactitudes, les corruptions et le traitement de faveur des délinquants. Elle permit également l'analyse statistique des taux de criminalité, des localisations et des modes opératoires des criminels.
Wilson améliora de façon spectaculaire le fonctionnement de ses moyens en combinant des mesures de redéfinition du système et l'introduction de nouveaux équipements de communication, davantage de voitures radios et une logistique adaptée. Mais l'élément le plus puissant de cette amélioration fut la redéfinition du système, qui apporta des mesures d'efficacité permettant à Wilson de diriger le système sans être sujet à son désordre, aux rivalités politiques et aux intrigues criminelles (8).


8 Beaucoup d'auteurs ont écrit sur la réorganisation de la police de Chicago. Le plus récent est J. Starr, « Chicago Shows Way to Police Reform, Look », 19 octobre 1965, pp. 43 à 49. Voir aussi 0. W. Wilson, Police Administration, 2e éd., McGraw-Hill, New York, 1963.


Extrait pages 222 et 223 de Van Court Hare, Jr. L'analyse des systèmes, outil moderne de gestion. Paris Dunod 1972. 1967 en américain chez Harcourt, Brace and World, Inc.



"des moyens criblés de corruption, ballottés par les influences et les protections politiques et dépourvus des plus élémentaires rudiments d'un fonctionnement efficace." Look familiar ?


http://en.wikipedia.org/wiki/Orlando_Winfield_Wilson
http://www.encyclopedia.chicagohistory.org/pages/983.html

CiterScandal over police involvement in a burglary ring prompted Mayor Richard J. Daley to appoint Orlando W. Wilson as superintendent of police in 1960. The nation's foremost expert on police administration, Wilson implemented an ambitious program of reorganization, emphasizing efficiency rather than ward politics. Wilson moved the superintendent's office from City Hall to Police Headquarters and closed police districts and redrew their boundaries without regard to politics. Hiring standards were raised, graft curbed, and discipline tightened, with a new Police Board overseeing it. Wilson updated the communications system, adopted computers and improved record-keeping, bought new squad cars, and eliminated most foot patrols. Police boasted of quicker response times to citizen calls. Police morale, and the public image of the police, rose.

Wilson also improved police relations with the black community. He recruited more African American officers, promoted black sergeants, and insisted on police restraint in racially charged conflicts. Wilson's retirement in 1967 came both as racial tensions intensified and disputes over policing grew more heated, and the example of his forceful leadership was not followed.

L'évolution sanglante depuis le départ de Wilson jusqu'à la conclusion de la guerre du Vietnam commence par :
CiterMayor Daley signaled a change with his comment in April 1968 that police should "shoot to kill" rioters.

Il faut donc fouiller d'une part l'évolution des contre-pouvoirs citoyens et du contre-pouvoir de la presse, d'autre part les actions fédérales (judiciaire notamment), pour pouvoir comprendre la réalité locale.