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Guerre au Liban, les tueries de masse se poursuivent

Démarré par JacquesL, 29 Octobre 2024, 09:27:26 PM

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JacquesL

Guerre au Liban, les tueries de masse se poursuivent



par François Meylan à Beyrouth

Dans le même temps, les autorités libanaises s'activent pour mettre à l'abri l'aéroport international Rafic Hariri pendant qu'il en est encore temps.

Au Liban, les jours se suivent et se ressemblent. Ils sont suspendus aux bombardements incessants de l'aviation israélienne (aéronefs et drones inclus). Rien que sur les 24 heures à cheval sur le samedi 26 et le dimanche 27 octobre 2024, Tsahal a reconnu avoir frappé 120 cibles ! Cela va de l'immeuble entier à l'appartement résidentiel, en passant par une Radio locale et un véhicule sur l'autoroute. Par ailleurs, on se demande comment les objectifs sont choisis. Parce que souvent cela ressemble plus à du tir à la trappe qu'à quelque chose de réfléchi. Tout le monde y passe. Des cadres du Hezbollah aux secouristes, en passant par les journalistes et le personnel paramédical. L'intention de tuer est omni présente. Le principe de la proportionnalité et la priorité à l'innocent ne font pas partie du lexique des militaires de l'État hébreu. Un exemple : pour supprimer un hypothétique membre de la sécurité du Hezbollah, Tsahal n'hésite pas à pulvériser un appartement résidentiel, tuant ainsi huit personnes et faisant vingt-cinq blessés.

Ce n'est pas que le sud du pays qui est continuellement frappé ni la banlieue sud de Beyrouth mais bien tout le pays du Cèdre. De Tyr où des infirmières viennent de perdre la vie à Nabatieh, en passant par Hasbaya, au centre du pays, où trois journalistes viennent d'être assassinés. Jusqu'à la plaine de la Bekaa, Baalbeck et bien entendu le fief du Hezbollah, à Beyrouth, le quartier Haret Hreik. Cette zone qui vit dans les décombres et la fumée des bombardements est à moins de dix minutes de voiture de l'aéroport international et du centre-ville.

Si la plaine de la Bekaa et Haret Hreik sont connus pour être sous l'influence du Hezbollah il n'en serait être de même pour les nombreux autres lieux attaqués par Tsahal. Le bilan humain est grave. Au soir du dimanche 27 octobre 2024, à 19 :00, heure de Beyrouth, le ministère libanais de la Santé recensait 2653 tués pour 12 363 blessés, depuis le 8 octobre 2023.1

Au moment où votre serviteur écrit ces lignes, les macabres statistiques ne sont déjà plus à jour puisque qu'il y a eu les massacres du lundi 28 octobre 2024. Tsahal se comporte au Liban comme à Gaza. Avec une attitude barbare et dans le fascisme de l'application totalitaire d'un dogme. Celui de la terreur. En témoigne le village d'Adaysseh où une quantité de maisons estimées trop proches de la frontière ont été rayées de la carte. Au point que l'armée israélienne a fait état de «l'explosion d'une importante quantité d'explosifs au Liban», si forte que les signaux d'alerte au séisme ont été activés dans une grande partie du territoire israélien.2

De surcroit, le journaliste Bassam Abou Zeid se demande pourquoi plusieurs attaques israéliennes ont été menées contre des unités de l'armée régulière libanaise qui pourtant se tient à l'écart des hostilités entre le Hezbollah et l'armée israélienne : «Il n'en demeure pas moins que des unités militaires au Liban-Sud ont été ciblées par une série d'attaques. À Taybeh, un soldat a été tué alors qu'il accompagnait une équipe de la Croix-Rouge libanaise qui voulait secourir un blessé. À Kafra, deux militaires ont perdu la vie dans une attaque israélienne contre leur poste de contrôle. À Aïn Ebel, trois soldats ont été tués lors d'une attaque contre leur véhicule. À Yater, trois autres militaires, dont un officier, ont été tués en tentant d'évacuer des blessés.

Cette situation a poussé le commandement de l'armée à intensifier ses contacts avec les États-Unis et la force intérimaire des Nations unies (FINUL) afin qu'ils exercent des pressions sur Israël pour qu'il mette un terme aux attaques visant les militaires libanais. D'autant que leurs positions sont bien connues et sont facilement identifiables par rapport aux autres groupes armés dans la région.

L'armée, comme on le sait, avertit la FINUL de tous ses déplacements dans la zone frontalière, et celle-ci avertit à son tour les Israéliens de ses mouvements.

Selon des observateurs, l'évolution de la situation sur le terrain oblige parfois les soldats à agir rapidement, surtout lorsqu'ils reçoivent des appels d'urgence pour évacuer des blessés vers les hôpitaux. Cela s'est notamment produit à Taybeh, où un soldat a été tué, ainsi qu'à Yater. Il semble toutefois que l'armée israélienne s'oppose aux opérations de secours dans certaines zones où elle opère et cible ainsi toute personne qui s'y trouve».3

Le constat est que la montée en puissance dans l'horreur ne semble pas vouloir s'arrêter. Les bombardements israéliens touchent aussi le centre-ville. La crainte des autorités libanaises est de perdre également l'aéroport international Rafic Hariri que Tsahal accuse d'être, comme le port de Beyrouth, sous l'emprise du Hezbollah. Pour parer à une potentielle attaque de Tsahal à l'encontre de l'aéroport – ce qui finirait d'isoler le pays du Cèdre qui est déjà à genoux économiquement parlant – le ministre sortant de l'Information, Ziad Makary, ne cesse de clamer que la sécurité de l'aéroport est désormais sous contrôle de l'armée libanaise. Dans le but de dissuader Tsahal d'attaquer.4

Pourtant, la situation économique de ses membres est tragique. Avec la dévaluation record de la livre libanaise, Fathi, officier supérieur au sein des Forces de sécurité intérieures (FSI), qui a pris un nom d'emprunt et avec qui je me suis largement entretenu m'apprend que son revenu mensuel est passé de plus de 1500 dollars à seulement 200 ! Il a des enfants aux études et son épouse n'a pas de travail. Le foyer n'est pas gérable. C'est valable aussi bien pour les 80 000 militaires de l'armée régulière que pour les 25 000 policiers des FSI5. Dans cette constellation, comment s'assurer durablement la loyauté et l'engagement des forces de l'ordre étatiques, y compris sur le site de l'aéroport ? Les partisans du Hezbollah eux reçoivent entre 600 et 1000 dollars tous les mois !6

Opinions du soussigné

Israël ne viendra pas à bout du Hezbollah, de cette manière. On ne tue pas une idée avec des bombes. Aujourd'hui, pour l'ensemble de la population libanaise, l'agresseur qui assassine à tour de bras c'est Tsahal. Le Hezbollah est celui qui repousse les assauts de l'agresseur. Il viendra un temps pour négocier et cela se fera avec la mouvance chiite. Le pays du Cèdre ne devrait, toutefois, pas vivre une nouvelle guerre civile. Personne n'en a envie. Depuis la crise de 2019 qui a plongé plus de 80% des habitants dans la pauvreté et fait fondre les salaires, l'énergie de la collectivité au sens large n'est dédiée ni à l'acquisition du pouvoir ni à la défense d'idées mais trivialement à survivre. Les attaques israéliennes – dont la stratégie est illisible – cesseront quand les États-Unis arrêteront d'armer si abondamment l'État hébreu. Jusqu'à lui fournir des munitions au phosphore qui sont actuellement employées sur la population libanaise. Le Liban comme Gaza ressemblent à des terrains d'entraînements à l'échelle 1/1 et avec des cibles humaines pour les hauts gradés et les vendeurs d'armes israélo-américains. Bref, ces conflits qui terrassent essentiellement des civils et des innocents sont, une fois de plus, des guerres sales.


  • «Journal de guerre», Jour 387, Paul Guillet, ICI Beyrouth, 27.10.2024
  • Keystone – ATS
  • «Les attaques israéliennes contre l'armée libanaise suscitent des interrogations», Bassam Abou Zeid, ICI Beyrouth, 24.10.2024
  • «Makary : L'aéroport de Beyrouth est sous contrôle de l'armée libanaise», NNA, 09.10.2024
  • «Au Liban, soldats et policiers cumulent les emplois pour survivre», 12.05.2023, L'Orient-Le Jour
  • «A Nabatieh, les dollars du Hezbollah adoucissent la crise», Sophie Woeldgen, Le Temps, 22.05.2023

https://reseauinternational.net/guerre-au-liban-les-tueries-de-masse-se-poursuivent/