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« Les souffre-douleurs sont des masochistes qui recherchent les coups»

Démarré par JacquesL, 25 Octobre 2006, 05:26:15 PM

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JacquesL

« Les souffre-douleurs sont des masochistes qui recherchent les coups... »
Déjà publié le Mer 26 nov 2003 14:20, sur le groupe Usenet fr.sci.sociologie.

Quoique sans doute décédé depuis, il est un psy que je verrais avec joie se balancer au bout d'une corde, au moins en effigie, c'est celui-ci. Je n'ai pas pu encore en retrouver le nom : il faudrait accéder aux archives de l'Express des années 1955-56 environ, ou de son concurrent à l'époque « France-Observateur », devenu depuis le Nobs – certains disent le Snobs. J'avais donc onze ou douze ans et étais en cinquième, voire début de quatrième, quand j'ai lu l'interview de ce psy, dans l'un ou l'autre de ces deux hebdomadaires progressistes pour l'époque, car ils étaient opposés aux guerres coloniales, et en particulier à la guerre en Algérie. Il déclarait qu'il ne fallait en aucun cas interrompre les rossées que les caïds de cours de récréation infligeaient aux souffre-douleurs, à quatre ou cinq contre un. D'une part parce que cela pourrait traumatiser les petits tortionnaires, d'autre part parce que, je le cite avec précision : « Ces souffre-douleurs que vous voulez défendre, sont en réalité des masochistes qui recherchent inconsciemment les coups... »

Il ne devait pas en être à son coup d'essai, et ce ne fut pas non plus son dernier coup. Six ans plus tard, vers mars 1961, la professeure de philosophie nous fit part de son ébahissement en lisant une thèse très similaire qu'elle venait de lire, aussi dans un magazine.

Il ne devait pas en être à son coup d'essai, à en juger par les réactions d'institutrices de maternelle-CP (c'était comme cela à l'époque rue Jean Bocq, actuellement annexe du Rectorat), et l'idéologie qui les sous-tend. « Ah non non non, on n'a jamais vu de harcèlement ni de persécution des nouveaux dans la cour de notre école. Non non non ! Il ne serait pas paranoïaque ce petit ? Vous savez, c'est fréquent à cinq ans ! Il n'y aurait pas des paranoïaques dans votre famille ? »

Dans la littérature savante, je n'ai trouvé que deux auteurs savants qui mentionnent le sujet tabou des pratiques persécutrices dans les cours des petites écoles. Il ne faut point s'ébahir si aucun des deux n'est freudien – loin s'en faut.

L'un est Paul Donald MacLean. Dans l'ouvrage en français co-écrit avec Roland Guyot « Les trois cerveaux de l'homme » (Robert Laffont, 1990 PARIS), il donne la liste des vingt-cinq compétences que nous héritons de nos ancêtres pélycosaures, et que nous partageons avec tous leurs descendants, dont les lézards.
Il remarque que la compétence « assister le lézard dominant à chasser un intrus » est active dans les bagarres et persécutions qu'on voit pratiquer dans les cours des écoles maternelles.

L'autre est Boris Cyrulnik. Alors que dans la lignée de leur exigence standard « M'enfin ! Qu'attendez-vous pour me présenter un bon oedipe papa-maman, sinon je vais devenir très méchant ! » les psychanalystes revendiquent que pour devenir schizophrène, il faut que le problème soit 100% familial, Cyrulnik objecte que quand on veut bien écouter les schizophrènes, eux disent en priorité la cruauté qu'ils ont rencontrée de la part des autres enfants, à l'école.

La cruauté régnant à l'école n'exclut nullement, du reste, un encouragement familial à l'exercice de la cruauté et des sévices sur ses contemporains les plus faciles à torturer. Ceci pour les familles des tortionnaires. Ni dans les familles des souffre-douleurs, une certaine complaisance des parents à voir leur fils ou leur fille maltraité(e) dès que les enfants sont assez loin pour qu'on puisse aisément fermer les yeux. Mais on va encore pousser des hourvaris, que l'auteur est forcément disqualifié, et ne saurait être « objectif », puisqu'il y était, et qu'il est un témoin direct des faits. Voyons ! La jalousie du parent de même sexe, cela ne saurait être que de l'imaginature d'un malade enfiévré !

Concernant les conditionnements culturels à la férocité dans les familles françaises riches, on trouve le témoignage suivant, dans « Courrier International » :

Les tares psychiques des élites françaises.

Dès l'âge de 2 ans, les enfants des beaux quartiers apprennent à marcher sur les autres. Plus tard, ils seront incapables de travailler en équipe.

INDEPENDENT ON SUNDAY Londres

La scène se passe dans un petit square du XVIe arrondissement. Ce quartier jadis le plus bourgeois et le plus recherché de Paris, a moins la cote aujourd'hui, mais c'est toujours le fief des conservateurs, des gens de bonne famille, des nantis et des m'as tu-vu. Autour de l'aire de jeux, de mères et des nurses, assises sur de bancs, lisent des magazines à scandale ou des hebdomadaires d'actualité. Elles ne prêtent pas attention aux enfants joliment habillés qui, comme d'habitude, se donnent des coups, se volent leurs jouets et essaient de repousser les plus petits de l'échelle du toboggan : l'horreur de faire la queue se manifeste très tôt en France.

Un petit garçon de 3 ans se fâche contre un autre enfant de son âge et le frappe sauvagement sur le bras. La victime hurle. La maman du fautif ne lève même pas les yeux de son magazine. L'enfant qui vient d'être frappé se plaint à sa mère. Au début, celle-ci ne veut pas s'en mêler, puis elle se met à crier, non pas contre l'agresseur mais contre son propre fils, qui ne s'est pas bien défendu. La seule chose intelligente à faire, lui dit-elle, est de rendre les coups. Et elle se replonge dans L'Express. Les enfants français en particulier ceux qui sont issus de la haute bourgeoisie, ne savent pas jouer avec leurs camarades. On ne les encourage pas à se conduire de façon civilisée, mais, au contraire, on les pousse à s'affirmer et à se montrer farouchement indépendants, sauf bien sûr à la maison.

La seconde scène a pour cadre le siège de l'OTAN, à Bruxelles. Durant la guerre du Kosovo, l'un de mes amis, diplomate d'un des pays membres de l'Organisation, a été temporairement détaché dans ce curieux bâtiment, où il a été amené à travailler en étroite collaboration avec des fonctionnaires de tous les pays de l'OTAN. Francophile comme moi, il a été surpris de constater, parmi ses collègues, un sentiment unanime de méfiance, voire de crainte, vis-à-vis des Français. Sur un plan politique, cela peut se comprendre. La France, en tant que membre relativement autonome de l'OTAN, n'œuvre pas toujours à ce que les autres pays considèrent comme l'intérêt général de l'Alliance. Toutefois, durant la guerre du Kosovo, son attitude n'a pas posé de problème.

"OCCUPEZ-VOUS DE VOUS, L'ÉTAT S'OCCUPERA DU RESTE".

Si les fonctionnaires français de l'OTAN étaient regardés avec méfiance, c'était parce qu'ils agissaient toujours secrètement et en dessous. Ils cherchaient à faire trébucher leurs collègues pour se mettre eux-mêmes en valeur, plaçaient leur bien-être et leur intérêt avant ceux de l'équipe, et n'étaient serviables que s'ils pouvaient en attendre un profit pour eux-mêmes ou pour leur département.

Il faut bien sûr se garder de généraliser. En travaillant en France, il m'est souvent arrivé de rencontrer des gens qui se donnaient du mal pour me venir en aide alors qu'ils n'avaient rien à espérer en retour. Il est vrai que, presque invariablement, c'étaient des personnes qui vivaient en province ou en étaient originaires. Mais il est vain d'attendre la même gentillesse de la classe des décideurs, cette élite restreinte qui ne pense qu'à se perpétuer et à défendre ses intérêts, et qui occupe les couches supérieures de l'administration, du monde politique et, jusqu'à une date récente, des milieux d'affaires. Dès l'âge de 2 ans, ses membres sont formés aux règles de l'avancement, de l'affirmation de soi et de la compétitivité. Les grandes écoles, d'où ils sortent et où ils ambitionnent d'envoyer leurs enfants, rendent public le classement de leurs diplômés. Une de mes connaissances qui a travaillé à l'ENA s'est aperçue, à sa grande surprise, que les étudiants jugeaient tout à fait normal - comme une sorte de principe d'éducation - d'imaginer des coups tordus pour faire perdre des places à leurs camarades et s'assurer ainsi un meilleur rang.

Les deux scènes mentionnées plus haut sont caractéristiques du grand paradoxe français, qui exaspère et fascine en même temps les étrangers.
La France est un pays farouchement attaché à la fraternité, à la solidarité, et souvent plus enclin à défendre les droits de l'Etat que ceux de l'individu. Mais c'est aussi un pays où abondent les comportements antisociaux et les incorrections, telle l'habitude de brûler les feux rouges ou de laisser les chiens souiller les trottoirs.

André Midol, un Parisien qui se bat pour développer l'esprit civique et qui conseille des entreprises et des collectivités locales sur les comportements à adopter en groupe, estime qu'il n'y a peut-être pas de paradoxe : c'est précisément parce que la France est une société relativement autoritaire et possessive (au niveau de l'Etat, de l'école, de l'Eglise et de la famille) que les gens sont moins portés à assumer la responsabilité de leurs actes. C'est comme s'il y avait une règle tacite disant: "Occupez-vous de vous et de votre proche entourage ; l'État s'occupera du reste." M. Midol admet que les enfants français ne savent pas jouer avec leurs petits camarades. On leur apprend, dit-il, à essayer de sortir du lot, à rivaliser, à dénigrer les autres plutôt qu'à les apprécier. Cela rend les Français moins aptes à répondre aux demandes du monde postmoderne en ligne : un monde non hiérarchisé, un monde qui privilégie l'ouverture, la coopération et le travail en équipe.

John Lichfield

Le syndrome du chef

Analysant la culture d'entreprise en France, la Süddeutsche Zeitung écrit: "La vénération aveugle de l'autorité, inculquée dès l'école, se retrouve dans les structures des entreprises, strictement hiérarchiques. On ne délègue que très rarement les prises de décision."

Parus dans Courrier International n° 471, du 10 novembre 1999, page 12,
avec un dessin de Riddell, paru dans The Observer, Londres.

Fin de citation.
--
Le contrat social du scientifique inclut le mandat de se piloter en exactitude : le système de production des connaissances, il est présumé le piloter en exactitude et non en traditions, ni en stratégies de pouvoir, ni en narcissisme, ni en corruption.

Catherine

Quel bol d'air de lire ça !

Je n'en crois pas mes yeux. C'est la première fois que je lis des choses intelligentes sur la maltraitance des enfants dans les écoles. Sur la manière dont on traite les victimes.

Merci.

Je sens que je vais envoyer le lien de ce site à mes amis (tous des gens biens évidemment ;-).

JacquesL

#2
Du danger d'être différent des autres...

Voici un caneton attaqué et noyé car il est d'une couleur différente des autres.



Poster:       psilo 
Date:    Wed Jun 8, 2005
Filesize:    79.0k
Dimensions:    650 x 419
Descrïption:    Today at Martinmere I watched as two groups of mallard ducklings came together. One of the ducklings was yellow and all the other ducklings were brown. One of the females saw it and attacked it viciously, trying to drown it. Everytime the duckling got away, only for the female to attack again and again. In the end the duckling disappeared and I have no idea what happened to it but I watched the brood from which he came swim away without him Sad I guess that is one of the pitfalls of being different!
Keywords:    mallard ducklings
Scientific Name:    Anas platyrhnchos
Equipment:    canon eos 350d, 70-300mm usm
Location:    Martinmere
Habitat:    Lake
Date Taken:    08/06/05

JacquesL

Comment ? Des bourreaux, les petits bourges ? Ah oui, mes plaintes et mon témoignage n'étaient pas recevables : j'avais de cinq à dix ans. Certainement que je fabulais...

Dans Le Monde de ce jour, à http://www.lemonde.fr/web/imprimer_element/0,40-0@2-3226,50-731925,0.html

Une étude décrit l'insidieuse violence sociale dans les collèges bourgeois

CiterLa violence scolaire n'est pas l'apanage des établissements des quartiers populaires. Pendant trois ans, Johanna Dagorn, chercheuse au laboratoire d'analyses et de recherches sociales en éducation et en formation (Larsef) de l'université de Bordeaux-II, s'est immergée dans trois collèges socialement favorisés de la région bordelaise. Situés en centre-ville, ces établissements se caractérisent par des taux de réussite au brevet des collèges supérieurs à 90 % et une faible proportion d'élèves issus de milieu populaire : à peine 10 % en moyenne.

A partir d'observations in situ, de documents comme les feuilles de punition, les bulletins scolaires ou encore les fiches individuelles des élèves, mais aussi d'entretiens avec des collégiens et des adultes, elle a mis en lumière une violence insidieuse qui permet à "l'élite" de se défouler et d'effectuer un tri social.

Cette violence se manifeste par des brimades psychologiques et physiques imposées par les élèves de milieu bourgeois. Les élèves issus de milieu populaire connaissent parfois une deuxième victimation, à l'intérieur de leur catégorie sociale d'origine. "Ce n'est pas une violence à la Robin des bois, mais une violence de proximité. Des enfants eux-mêmes rejetés s'en prennent à d'autres élèves également exclus mais encore plus isolés et plus vulnérables", explique la chercheuse.

Johanna Dagorn cite l'exemple d'Alain, scolarisé en classe de cinquième. Issu d'une famille monoparentale démunie, il vient d'arriver d'une zone rurale. Isolé, raillé et brimé, il fait office de bouc émissaire. Livres volés, cartable jeté dans l'eau ou encore faux lieu de rendez-vous, les brimades le conduisent à être fréquemment puni, à rater des cours. Ces résultats scolaires sont médiocres, et Alain est réorienté vers une filière technologique. Le collège dans lequel il est scolarisé n'en dispense pas, et il est donc certain de devoir le quitter à la rentrée 2006.

La situation a dégénéré dans l'indifférence des membres de l'équipe éducative. "En dépit des inquiétudes de sa mère, qui a alerté sans succès son professeur principal, Alain se retrouve comme la plupart des victimes : ignorées par l'institution scolaire, car les brimades dont elles sont la cible ne troublent en rien le bon fonctionnement de ces établissements scolaires, raconte Mme Dagorn. Bien au contraire, grâce à elles, la tradition perdure et l'ascèse exigée lors des cours académiques peut continuer grâce à ces moments d'exaltation."

"SPECTRE DU MAUVAIS PROFESSEUR"

Ce laisser-faire concerne également les enseignants, jeunes stagiaires ou professeurs des disciplines considérées comme "secondaires", ainsi que les personnes statutairement précaires, comme les surveillants. ...

Une stagiaire à F..r..l, lycée huppé à Saint-Etienne, recueillait le témoignage suivant : "Les élèves en difficulté ? On les évince. Il n'en reste jamais ici." Donc F..r..l viole systématiquement les lois scolaires, conformément aux stratégies sociales de sa clientèle, les bourgeois de la ville.

Quand j'avais cinq ans, la tactique de déni de réalité avait été d'insinuer que je devais être paranoïaque, pour oser me plaindre ainsi des persécutions systématiques. Et cette fois, quelle tactique de déni va-t-on employer contre Johanna Dagorn ?