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Apparence qu'un aimant repousse une bille d'acier...

Démarré par JacquesL, 10 Février 2013, 07:46:55 AM

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JacquesL

On nous a signalé un phénomène intriguant à la minute 28 de cette vidéo :
http://www.youtube.com/watch?v=9EPlyiW-xGI

J'ignore comment François G. a pu avoir la patience de regarder un tel délire jusqu'à la minute 28, mais là, ponctuellement, il faut regarder, puis mieux regarder : l'opérateur semble bien repousser à distance une bille d'acier avec un aimant permanent. Celui-ci a la forme d'un coquetier dont le petit bout est percé.

Votre mission, si vous l'acceptez, est d'expliquer ce phénomène de poussée à distance. Il n'y a pas de trucage matériel.

Pour ma part, je me suis servi des symétries du champ magnétique dans l'aimant, donc du courant magnétisant qui l'a produit. Mais on m'objecte que l'analogie électrostatique, couramment enseignée depuis Faraday et surtout Heaviside, aurait produit les mêmes résultats dans l'air ; oui mais à condition d'avoir intuité la répartition de charges électriques dans la matière, qui donnerait la bonne simulation externe. Je préfère m'en tenir à la physique, et suis donc minoritaire pour la peine.
Faites à votre idée, vous.

JacquesL

#1
Une semaine plus tard, je vais donner la solution.

Contrairement à ce que croit le populaire, le champ magnétique n'attire pas. C'est le gradient de champ qui attire la limaille ou la ferraille. Et la géométrie du champ fait que généralement le maximum de gradient de champ est aux pièces pôlaires. D'où la confusion standard.

Or là nous sommes devant une exception à cette règle de répartition géométrique.
D'abord regardez mieux : Il y a oscillation lente autour d'une position stable, peu raide, à une distance définie du coquetier. Durant cette partie de la vidéo, le manipulateur se garde bien d'approcher davantage, ce qui ferait rentrer la bille dans une zone de gradient normal, à attirer.

Pour la suite, certains objecteront qu'on aurait fait aussi bien en électrostatique, si le coquetier était un électret. Voire ! Il faudrait déjà commencer par pifométrer quelle est la répartition de charges électriques qui mimerait les spins et les domaines magnétiques dans la ferrite, puis s'assurer d'un corps d'épreuve strictement non chargé. Hahem !

Donc voilà le truc. C'est le type de symétrie du champ magnétique qui gouverne tout, et le fameux théorème des hérissons (Il est impossible de peigner intégralement une sphère ; il demeure inévitablement un ou deux points singuliers ou zones singulières). Mais vous vous en ferez une idée correcte en appliquant le schéma d'André-Marie Ampère et son hypothèse des "courants moléculaires".

Il faut faire un choix arbitraire quant au sens de magnétisation du coquetier. Plouf, plouf, je choisis que tout se passe comme si, vu du petit bout, le courant magnétisant tourne dans le sens horaire à l'extérieur, dans le sens direct à l'intérieur. Donc ce petit bout est vu de près de chaque paroi comme un pôle Sud. Sauf qu'à l'extérieur, il y a deux façons de boucler les tubes de champ vers le pôle Nord, l'une en passant par l'intérieur du coquetier, l'autre par l'extérieur. Il y a donc devant chaque extrémité du tube, la mince comme la large, une zone de champ nul. C'est elle qui "repousse" la bille d'acier dans la vidéo.




Si, près des parois du coquetier l'aimant est vu comme un pôle Sud avec l'orientation arbitraire choisie, le centre du trou est vu comme un pôle Nord. Grâce à cette géométrie inusuelle, on a bien recréé localement la complexité de champ d'un assemblage composite.
Voir vidéo : http://www.youtube.com/watch?v=LyvfDzRLsiU


P.S. Retour sur le "théorème des hérissons" :
En électrostatique, aucun problème, une sphère peut être intégralement une charge + ou -, avec un champ sortant radialement. Le peignage ne la concerne pas.

En électromagnétisme et en magnétisme, tarataboum !
Il n'y a QUE du peignage à plat en magnétisme, et la symétrie sphérique y est définitivement impossible. Donc les monopôles aussi sont impossibles.
En électromagnétisme, la loi symétrique du rayonnement sphérique de Lambert n'est possible qu'en statistique, toutes polarisations moyennées dans le temps. Alors que chaque photon est totalement directionnel (Einstein 1917), et chacun transfère à l'absorbeur une polarité définie. La symétrie globalement sphérique de la macrophysique n'a aucun correspondant microphysique.
En magnétostatique, là il n'y même plus de symétrie sphérique macroscopique. Le champ [tex]\vec{A}[/tex], qui lui est vectoriel et que tu peux traiter avec ton formalisme standard, est toujours peigné tangentiellement à la matière, et il ressort pleinement du théorème des hérissons. Les schémas d'Ampère demeurent valides en [tex]\vec{A}[/tex], si microphysiquement les "courants moléculaires" n'existent pas, et que leur rôle hypothétique est tenu en vrai par les spins électroniques en coopération dans le cristal.
Et le champ [tex]\breve{B}[/tex], rotationnel de [tex]\vec{A}[/tex], persiste dans la géométrie plane tangentielle. C'est connu et publié depuis au moins 1894, article de Pierre Curie. Sauf qu'en 1894 le formalisme correct et définitif, celui de Gregorio Ricci-Curbastro, n'avait pas encore percolé jusqu'à Pierre Curie. Il faudra attendre 1921 et Albert Einstein (1ère conférence de Princeton).