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Coups d’État de velours. Cible actuelle : le Venezuela

Démarré par JacquesL, 13 Juin 2007, 12:01:02 AM

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JacquesL

Coups d'État de velours

Action secrète : renversement de gouvernement, guerre psychologique...
Comment imposer un gouvernement pro-états-unien à un peuple ? Une technique plus efficace que les coups d'Etat militaires a été développée par la CIA : les coups d'Etat de velours ou révolutions colorées. S'appuyant sur des ONG et des mouvements de jeunesse, manipulant les sentiments de liberté et de résistance et structurant eux-mêmes la contestation, les Etats-Unis arrivent à imposer des gouvernements à leur service de manière relativement non-violente. De la Serbie à l'Ukraine en passant par le Liban, cette technique a été appliquée à travers le monde, souvent avec succès. A l'occasion de la récente fermeture d'une télévision au Venezuela, les stratèges états-uniens concentrent leurs efforts pour renverser le gouvernement d'Hugo Chavez. Afin d'identifier les mécanismes mis en œuvre et d'éviter à chacun d'être manipulé à son insu, le Réseau Voltaire propose ici plusieurs articles de référence sur ces techniques.

http://www.voltairenet.org/article8686.html



Stay-behind
Opération manquée au Venezuela
par Thierry Meyssan*
Les manifestations apparemment sauvagement réprimées par le pouvoir vénézuélien, la démission du président Chavez sous la pression de l'armée, puis la constitution d'un nouveau gouvernement civil auraient pu apparaître comme une succession chaotique d'événements tragiques. Pourtant, la fuite précipitée du nouveau pouvoir devant un soulèvement populaire a permis de mettre en lumière les dessous d'une opération en réalité planifiée par Washington. Une occasion rare d'analyser les méthodes d'ingérence du réseau « stay-behind ».
   


18 mai 2002
Pays
Venezuela

Thèmes
Coups d'État de velours
      
Le bolivarisme d'Hugo Chavez

Après deux tentatives de coup d'État (février et novembre 1992) et deux ans de prison, le lieutenant-colonel Hugo Chavez est élu démocratiquement président du Venezuela le 6 décembre 1998. Populiste de gauche, il est soutenu par une coalition extraparlementaire autour d'un programme de lutte contre la corruption et la pauvreté.

Dès son entrée en fonction, Hugo Chavez met en place un embryon de protection sociale pour les plus déshérités (" Plan Bolivar 2000 ") et parvient à scolariser 4 millions d'enfants. S'appuyant sur une Assemblée nationale constituante [1] dominée à 90 % par ses partisans, il propose à ratification une nouvelle constitution. Celle-ci est approuvée par référendum, à la majorité de 71,2 % des votants (15 décembre 1999). Le pays devient la " République bolivarienne du Venezuela ", le Sénat et la Chambre fusionnent en une Assemblée unique, les pouvoirs présidentiels sont renforcés.

En application de cette nouvelle constitution, des élections présidentielle, législatives et régionales sont convoquées. Présentant un programme de " révolution démocratique et pacifique ", Hugo Chavez est massivement réélu pour six ans, renouvelables une fois, le 30 juillet 2000. Son parti, le Mouvement pour la Vème République (MVR), obtient 98 sièges à l'Assemblée nationale sur 165 et 12 présidences d'États régionaux sur 23.

En politique étrangère, Hugo Chavez défie les États-Unis d'Amérique en rendant visite à Fidel Castro et en accordant des tarifs pétroliers préférentiels à Cuba (octobre 2000), puis en rendant visite à Saddam Hussein et à Mouhammar El-Khadafi. Il demande l'entrée du Venezuela dans le Mercosur (zone de libre-échange regroupant l'Argentine, le Brésil, le Paraguay et l'Uruguay). Il préside le " Groupe des 77 " (pays en voie de développement) et dénonce le " néo-libéralisme vénéneux ". Enfin, il qualifie les bombardements de civils en Afghanistan " d'assassinats ", provoquant la fureur de Washington qui rappelle son ambassadrice à Caracas (1er novembre 2001).

Surtout, Hugo Chavez ressuscite l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) [2] , dont l'Arabie saoudite et le Venezuela avaient été les principaux fondateurs, en 1960. Mettant à profit le réchauffement des relations entre l'Iran et l'Arabie saoudite et bénéficiant du soutien actif du Mexique, il parvient à convaincre ses partenaires d'instaurer un mécanisme d'ajustement des prix du brut. La discipline qu'il impose à la société nationale Petroleos de Venezuela S.A. (PDVSA) [3] sert d'exemple et renforce l'efficacité du système. En dix-huit mois, le prix du brut est multiplié par trois, provoquant à l'été 2000 la fureur des automobilistes états-uniens et européens. En septembre 2000, le sommet du 40e anniversaire de l'OPEP, réuni à Caracas, consacre la " ligne Chavez " et désigne le ministre vénézuélien de l'énergie, Ali Rodriguez, comme nouveau secrétaire général de l'organisation. Une situation difficilement tolérable pour les USA dont le Venezuela est le 3e fournisseur énergétique.

Sur le plan économique intérieur, Hugo Chavez relève le salaire minimum et les traitements des fonctionnaires de 20 % lors de son premier mandat (28 avril 2000). Après la guerre d'Afghanistan et la baisse du prix du brut, il décrète une réforme agraire et une reprise en main de Petroleos de Venezuela S.A. (PDVSA) : d'une part il attribue l'usufruit des terres improductives aux sans-abri au grand dam des grands propriétaires et, d'autre part, il révoque sept dirigeants de PDVSA et en met douze autres à la retraite anticipée (13 novembre 2001).
Sauvetage de la concorde nationale

Aux USA, la " Matrice de l'attaque mondiale " [4] , adoptée par le président George W. Bush, intègre le Venezuela parmi les quatre-vingts pays cibles des prochaines actions secrètes de la CIA dans le cadre de la prétendue " Guerre au terrorisme " (15 septembre 2001). Après les critiques des bombardements sur l'Afghanistan et la reprise en main de PDVSA, les chancelleries bruissent d'une rumeur selon laquelle la CIA aurait reçu ordre d'éliminer Chavez et de renverser son régime.

Le 10 décembre 2001, la Confédération des travailleurs du Venezuela (CTV) du social-démocrate Carlos Ortega (liée à l'Action démocratique, parti de l'ancien président Carlos Andres Perez), appelle à la grève générale avec le soutien de la Fedecamaras [5] , principale fédération patronale. Elle paralyse la production et le raffinage du pétrole, provoquant d'importantes baisses des recettes de l'État.

Le 7 février 2002, un officier de l'armée de l'air peu connu, le colonel Pedro Vincente Soto, prononce un discours à l'occasion d'une manifestation de 10 000 opposants. Il qualifie le régime de " totalitaire " et Hugo Chavez de " fasciste ". Il exige la démission du président pour " sauver la démocratie ". Le colonel Soto est bientôt rejoint par un capitaine de la Garde nationale, Pedro José Flores, et par quatre autres officiers [6].

Face au déficit, Hugo Chavez annonce un plan d'austérité et laisse chuter le bolivar de 19,7 %, le 12 février. L'opposition mobilise 200 000 manifestants quand le président Chavez fait descendre 1 500 000 partisans dans les rues.

Le 9 avril 2002, la CTV et la Fedecamaras appellent à une nouvelle grève générale. Annoncée pour une journée, elle est reconduite pour une période illimitée et s'accompagne de manifestations de rue. 50 000 personnes défilent à Caracas avec la bannière étoilée des USA. Les grévistes ne se contentent plus de demander l'abrogation des réformes, ils brocardent le " communiste " Hugo Chavez. Les chaînes de télévision privées, qui retransmettent un message du président à la nation, coupent verticalement leurs images pour diffuser en parallèle les déclarations présidentielles et la manifestation de l'opposition.

Le 11 avril, Carlos Ortega, président de la CTV, demande la démission de Chavez et annonce que la manifestation, partie des quartiers chics vers le centre ville, montera à l'assaut de Miraflores (le palais présidentiel). En réponse, les chavistes mobilisent des partisans pour protéger la présidence. Dans la confusion, quinze personnes sont tuées par balles, dont un journaliste, et trois cent cinquante sont blessées [7]. Les chaînes de télévision privées affirment que les chavistes ont tiré sur leurs opposants et relaient des déclarations d'une dizaine d'officiers supérieurs qui accusent Hugo Chavez d'avoir semé la haine et exigent sa démission. Réalisant que son gouvernement est menacé, le président Chavez fait couper les émissions de Televen, Globovision, Meridiano, Vale TV et CMT qui appellent plus ou moins explicitement à le renverser. Dans une conférence de presse, le général de la Garde nationale et vice-ministre de la sécurité intérieure, Luis Camacho Kairuz, annonce sa démission du gouvernement, confirme que les chavistes ont tiré sur la foule, se joint à l'initiative du groupe d'officiers supérieurs, et exige le départ du gouvernement. Le soir, le commandant général de l'Armée de terre, le général Efrain Vasquez, se joint à la rébellion. Il est suivi par le ministre des Finances, le général Francisco Uson.

Le 12 avril, les chaînes de télévision privées reprennent leurs émissions. Elles retransmettent un message du chef des Forces armées, le général Lucas Rincon : " Nous, membres de l'état-major militaire, déplorons les lamentables événements survenus dans la capitale hier. Face à de tels faits, nous avons demandé au président de la République de démissionner, ce qu'il a accepté [8] (...) Nous mettons à partir de maintenant nos postes à disposition (...) J'ai foi dans les Forces armées nationales ". Hugo Chavez est immédiatement incarcéré au fort Tiuna. Quarante minutes plus tard, alors que l'article 233 de la Constitution confie en principe l'intérim au vice-président Diosdado Cabello, c'est le président du patronat Pedro Carmona qui annonce : " Il a été décidé de former immédiatement un gouvernement de transition qu'il m'a été demandé de diriger, suite à un consensus de forces tant dans la société civile vénézuélienne que dans le commandement des Forces armées (...) La responsabilité qui m'a été confiée est historique : je l'assume devant la nation ".

Dans leurs comptes rendus des événements, Associated Press et Reuters présentent Chavez comme un ex-putschiste et omettent d'évoquer son élection démocratique.
À Washington, le porte-parole de la Maison-Blanche, Ari Fleischer, déclare avec une évidente satisfaction : « Ce que nous savons, c'est que les actions encouragées par le gouvernement Chavez ont provoqué la crise (...) Les États-Unis sont attristés en raison des victimes. Nous souhaitons exprimer notre solidarité avec le peuple vénézuélien et nous œuvrons avec toutes les forces démocratiques du Venezuela pour restaurer les éléments essentiels de la démocratie » [9]. À Madrid, la présidence espagnole de l'Union européenne apporte son soutien au coup d'État dans le sillage des USA : « [L'Union européenne] fait confiance au gouvernement de transition pour respecter les valeurs et les institutions démocratiques afin de régler la crise actuelle dans le cadre de la concorde nationale et dans le respect des droits et libertés fondamentales ». Et Josep Piqué, ministre des Affaires étrangères espagnol, d'ajouter : « Il n'y a pas de solution en dehors de la volonté populaire et du système démocratique (...) [Hugo Chavez] comptait chaque jour moins de soutien institutionnel et populaire ». Dans un communiqué commun publié à Washington, l'Espagne et les États-Unis d'Amérique indiquent suivre les événements avec « beaucoup d'intérêt et de préoccupation. [Ils] déclarent condamner les actes de violence mortelle et transmettent leurs condoléances aux familles ; ils appellent à l'arrêt de la violence et au retour au calme ; ils expriment leur souhait de voir la situation exceptionnelle que traverse le Venezuela conduire le plus rapidement possible à une normalisation démocratique complète ». [10]. Toujours à Washington, le Fonds monétaire international - qui avait limité au minimum ses relations avec le gouvernement Chavez - " espère que les discussions continueront avec la nouvelle administration et se tient prêt à assister la nouvelle administration de la manière dont elle le souhaite " [11].

Au contraire, la Russie et la France s'indignent. À Paris, le porte-parole du Quai d'Orsay, François Rivasseau, dénonce " l'atteinte à l'ordre constitutionnel " [12].

Les dix-neuf États d'Amérique du Sud et des Caraïbes formant le "Groupe de Rio" dénoncent le coup d'État. Les plus indépendants s'étonnent que les États-Unis aient pu se féliciter du renversement d'un régime démocratique alors que, le 11 septembre 2001 (au matin des attentats sur le sol US), le général Colin Powell signait en grande pompe la Charte démocratique interaméricaine de l'Organisation des États américains (OEA) [13].

À New York, où il vit en exil, l'ancien président Carlos Andres Perez (79 ans) annonce son retour à Caracas pour garantir le " retour de la démocratie ".

Un gouvernement de transition

À Miraflores, le palais présidentiel, le nouveau président n'est pas investi par les militaires putschistes, mais par un groupe de huit personnalités influentes qui sortent de l'ombre. Il est composé de :
- S. Exc. Mgr Ignacio Cardenal (Opus Dei)
- Luis Enrique Ball (entreprises)
- José Curiel (partis politiques)
- Rocio Jigarro (associations)
- Miguel Angel Martinez (médias)
- Gouverneur Manuel Rosales (gouvernements régionaux)
- Alfredo Ramos (syndicats)
- Carlos Fernandez (patronat)

Ce groupe de conspirateurs promulgue un "Acte constitutif" en onze points :
- Article 1 : désigne Pedro Carmona comme président ;
- Article 2 : substitue le nom de République du Venezuela à celui de République bolivarienne du Venezuela ;
- Article 3 : dissout l'Assemblée nationale et convoque des élections législatives constituantes avant décembre 2002 [pour réformer la constitution de 1999, adoptée sous la présidence d'Hugo Chavez] ;
- Article 4 : crée un Conseil d'État consultatif de 35 membres ;
- Article 5 : autorise le président à coordonner la politique durant la transition ;
- Article 6 : convoque une élection présidentielle avant un an ;
- Article 7 : autorise le président à dissoudre tous les pouvoirs publics nationaux, provinciaux et municipaux ;
- Article 8 : destitue le président et les membres du Tribunal Suprême de Justice ;
- Article 9 : révoque les 49 décrets-lois de novembre 2001 [relatifs à la réforme agraire et à la reprise en main de PDVSA] ;
- Article 10 : maintient les accords internationaux signés par le Venezuela ;
- Article 11 : exige du gouvernement de transition de rendre compte au prochain gouvernement élu.

Le nouveau gouvernement est composé de neuf ministres :
- Intérieur : général Raphaël Damiani
- Relations extérieures : José Rodriguez Iturbe (un double national états-unien/vénézuélien, membre numéraire de l'Opus Dei)
- Finances : Leopoldo Martinez
- Agriculture : Raul de Armas
- Travail : César Augusto Carvallo
- Plan : Leon Arismendi
- Défense : vice-amiral Hector Ramirez Perez
- Santé : Rafael Arreaza
- Secrétariat à la présidence : vice-amiral Jesus-Enrique Briceno-Garcia
Dans son éditorial du soir, le New York Times commente : " La démocratie vénézuélienne n'est plus menacée par une graine de dictateur [parce que] les militaires sont intervenus et ont remis le pouvoir entre les mains d'un chef d'entreprise respecté " [14].
Renversement de situation

Le nouveau pouvoir n'aura pas le temps de mettre quoi que ce soit en œuvre. Alors que la police est en train d'arrêter les principaux leaders chavistes, les sans-abri descendent des bidonvilles et convergent vers le centre ville. Tandis que la révolution gronde, les télévisions privées continuent à diffuser des programmes favorables aux putschistes et s'abstiennent d'informer leurs téléspectateurs du renversement de situation. La foule exige de voir la lettre de démission d'Hugo Chavez à laquelle elle refuse de croire. Elle scande " Chavez ! Liberté ! ". Sur les ondes d'Union Radio, le ministre du Secrétariat à la présidence tente de la calmer en assurant que l'on ne peut montrer de lettre de Chavez car celui-ci a démissionné verbalement. Le chef d'état-major de l'Armée de terre, le général Efrain Vasquez refuse de faire tirer sur la foule. Il consulte ses officiers et adresse un ultimatum en douze points à Pedro Carmona. L'Armée de terre ne défendra le nouveau gouvernement que si celui-ci rétablit immédiatement les institutions démocratiquement élues. Pedro Carmona comprend que la participation de quelques officiers supérieurs au coup d'État n'a pas entaché le soutien des armées à Hugo Chavez. Il abandonne la partie et fuit Miraflores pour se réfugier au fort Tiuna, tandis que les chavistes - conduits par l'ex-président de l'Assemblée nationale et divers ex-ministres - investissent le palais présidentiel. La Garde nationale se rallie au Peuple et à ses élus. Le chaos règne dans la capitale où se multiplie scènes d'émeutes et de pillages. Le vice-président Diosdado Cabello réapparaît et rétablit la légalité constitutionnelle. Il réunit un Conseil des ministres. Le président Hugo Chavez, incarcéré à l'île d'Orchila, est libéré et rentre triomphalement en hélicoptère à Caracas.

Une foule assiège fort Tiuna pour empêcher Pedro Carmona de s'échapper. Dans la capitale, des émeutiers attaquent les studios de Radio Caracas Televisi, accusée d'avoir fait le jeu des fascistes, tandis que la foule massée devant Miraflores accueille Hugo Chavez au cri de " Nous t'aimons ".

Le lendemain, 14 avril, le président Hugo Chavez Frias s'adresse à la nation dans une longue intervention télévisée sous le portrait de Simon Bolivar, libérateur de l'Amérique latine. Le leader populiste assure qu'il n'y aura pas de " chasse aux sorcières " et appelle à l'unité nationale. Il convoque une " table ronde pour le dialogue national ". Des télégrammes de félicitations affluent des chancelleries, d'Irak, du Brésil, d'Iran, du Qatar, de Cuba etc. À Washington, où l'administration Bush est mauvaise joueuse, Condoleezza Rice déclare : " J'espère qu'Hugo Chavez comprendra le message que son peuple lui a envoyé, que sa politique ne marche pas pour le peuple vénézuélien (...) Il doit respecter les processus constitutionnels (...) J'espère que M. Chavez est conscient que le monde entier le regarde et que c'est l'occasion pour lui de redresser son bateau, qui allait vraiment dans la mauvaise direction depuis un certain temps " [15]. Ainsi, les USA qui n'ont pas bronché lorsqu'un coup d'État venait de renverser Hugo Chavez - pourtant démocratiquement élu - lui font la leçon lorsqu'il est rétabli dans ses fonctions pour qu'il " respecte les processus constitutionnels " !
Révélations sur un complot

Lorsque Pedro Carmona annonce à la radio qu'il se retire et prend sur lui toute la responsabilité de ces folles journées, il assure avoir agi " sans préméditation, ni conspiration ". Pourtant, lors du retour d'Hugo Chavez, le vice-président Disdado Cabello montre à la presse une écharpe de cérémonie présidentielle laissée sur place par les putschistes. Elle porte la marque d'un fabricant madrilène. Selon les chavistes, elle attesterait que le coup d'État n'était pas une réponse aux débordements du 11 avril, mais avait été prémédité. Cette seconde version des événements ne tarda pas à être confirmée par les révélations de la presse internationale.

On sait aujourd'hui que la décision de renverser Hugo Chavez était incluse dans la " Matrice de l'attaque mondiale " élaborée par George Tenet (directeur de la CIA) et avalisée par le président George W. Bush le 15 septembre 2001. Les modalités de cette opération n'avaient été fixées que plus tard. La CIA avait envisagé aussi bien un coup d'État qu'un assassinat politique. Quoi qu'il en soit, le passage à l'acte aurait été brusquement avancé après que l'Iran et l'Irak eurent appelé l'OPEP à imposer un embargo pétrolier à tous les pays soutenant l'action du gouvernement Sharon dans les territoires occupés (Opération Remparts). En organisant un coup d'État à Caracas, les USA faisaient d'une pierre deux coups : ils liquidaient Hugo Chavez et ils paralysaient l'OPEP, dont le Venezuela assure le secrétariat général [16].

La planification des opérations a été supervisée au Conseil national de sécurité de la Maison-Blanche par Elliott Abrams [17] (photographie ci-contre).Proche du Dr Henry Kissinger et ancien sous-secrétaire d'État sous les administrations Nixon et Reagan, M. Abrams avait été interdit d'accès au Congrès des États-Unis, en 1987, après qu'il eut menti devant une commission d'enquête parlementaire pour masquer son rôle essentiel dans l'Irangate et la perpétration de massacres au Salvador [18]. Elliot Abrams a également été impliqué dans les trafics de drogues organisés par l'État américain pour financer les Contras nicaraguayens [19]. Au cours des dernières années, en sa qualité de président du Centre d'éthique et de politique public [20] (sic) Elliott Abrams avait été recasé à la présidence de la Commission pour la liberté religieuse dans le monde (USCIRF [21]) où il avait coordonné les attaques dans les institutions internationales contre la laïcité française [22]. Parallèlement, il a animé le Media Center Research [23] dont l'objectif est de nettoyer les médias de tout ce qui offense sa conception des valeurs américaines. Cet intégriste, spécialiste des " coups tordus ", a été discrètement intégré à la nouvelle administration avec le titre de directeur pour la Démocratie, les Droits de l'homme et les Opérations internationales (sic) au Conseil national de sécurité [24].

Elliott Abrams s'est appuyé sur Otto Reich, sous-secrétaire d'État pour l'hémisphère occidental [25] (photographie ci-contre). Personnage très controversé [26], Otto Reich fut le lobbyiste grassement payé de la famille Bacardi [27], l'inspirateur permanent de la politique états-unienne anti-castriste et l'artisan de la loi Helms-Burton définissant l'embargo. Impliqué comme Elliott Abrams et Colin Powell dans l'Irangate, Otto Reich était à l'époque responsable du service de propagande du département d'État et obéissait, lui aussi, directement au colonel Oliver North. En violation des lois américaines, il utilisa les fonds alloués par le Congrès à la propagande US à l'étranger pour corrompre des journalistes états-uniens et intoxiquer ses concitoyens [28]. Reich fut également ambassadeur au Venezuela, puis expert auprès d'un think tank conservateur, le Centre des études internationales et stratégiques (CSIS) [29].

Pour financer les mouvements de protestation, Abrams et Reich ont eu recours à divers faux nez de la CIA, principalement le National Endowment for Democracy (NED) [30]. Crée en 1983 par Ronald Reagan, le NED était alors administré par le Dr Henry Kissinger et le président du syndicat AFL-CIO Lane Kirkland. Il est aujourd'hui présidé par Carl Gersham, et notamment administré par le général Wesley Clark (ex-suprême commandeur de l'OTAN durant la guerre du Kosovo) et par l'inévitable Frank Carlucci (ancien directeur adjoint de la CIA, actuel président du Carlyle Group et gestionnaire du portefeuille de la famille Ben Laden [31]) (photographie ci-contre).

Pour mener à bien cette opération, le NED a dépensé près de deux millions de dollars au Venezuela [32]. Il a mobilisé ses quatre filiales, l'International Republican Institute (IRI [33]), le National Democratic Institute for International Affairs (NDIIA), un troisième organisme créé avec les Chambres de commerce US : le Center for International Private Entreprise (CIPE [34]), et sur un quatrième organisme, créé en commun avec le syndicat états-unien AFL-CIO, l'American Center for International Labor Solidarity (ACILS [35] dit " Solidarity Center " [36])

Abrams et Reich ont reçu ensemble de nombreuses personnalités vénézuéliennes à Washington dans les semaines qui précédèrent le coup d'État, notamment Elias Santana (Queremos Eligir) et le syndicaliste Carlos Ortega (CTV). Les déplacements ont été financés par l'IRI. Des fonds ont été versés par l'ACILS-Solidarity Center au syndicat ouvrier vénézuélien CTV, tandis que le CIPEfinançait le syndicat patronalFedecamaras.

Le choix de Pedro Carmona comme président du gouvernement de transition aété opéré en concertation avec la famille de l'ex-président Rafael Caldera (Opus Dei) [37] et le magnat latino-américaine, Gustavo Cisneros (56ème fortune du monde, selon le classement Forbes 2002, avec 5 milliardsde dollars).Ce dernier est un ami personnel de Felipe Gonzales (ancien Premier ministre socialiste espagnol) et de George Bushpère (ancien patron de la CIA, puis président des USA), qu'il aime inviter à des parties de pêches. Cisneros est aussi le concessionnaire de Coca-Cola en Amérique du Sud, une couverture souvent utilisée par les agents du stay-behind [38]. Le profil sans grand caractère de Carmona devait permettre à Cisneros de gouverner tout en restant dans l'ombre.

Une opération de manipulation des médias a été montée par Abrams et Reich et facilitée par Cisneros qui possède notamment AOL Latin America, DIRECT TV Latin America (trois cents chaînes de radio et télévision dans vingt-huit pays) et Univision (la chaîne hispanophone des USA). Pendant le coup d'État, les médias ont diffusé des informations mensongères selon lesquelles Hugo Chavez aurait donné l'ordre de tirer sur ses opposants. En réalité, les victimes ont été assassinées par des policiers de la ville de Caracas, formés aux États-Unis par une unité du FBI. Otto Reich a reconnu avoir été en contact fréquent avec Gustavo Cisneros pendant les événements [39].

Au sujet de la manipulation des médias internationaux, la lettre spécialisée Intelligence remarque que les deux agences anglo-saxonnes Reuters et Associated Press ont diffusé chacune des dépêches contradictoires et des éléments invérifiables éloignés de la réalité [40].

Le choix des officiers putschistes a été opéré par Otto Reich, qui se trouve être administrateur [41] du Western Hemisphere Institute for Security Cooperation (WHISC [42]) de Fort Benning, précédemment connu sous le nom d'École des Amériques. Cette école offre une formation aux militaires latino-américains et sert au recrutement des agents stay-behind [43] dans cette région. Elle a été partiellement réformée par le président Clinton, bien après que l'opinion publique ait pris conscience qu'elle avait formé pendant des décennies les juntes latino-américaines et qu'elle avait prodigué des cours de torture [44].

Pour préparer l'opinion publique autant que pour ouvrir la possibilité d'une intervention militaire directe des États-Unis, 200 000 $ ont été versés sur des comptes bancaires à Miami à l'amiral Carlos Molina et au colonel Pedro Soto. Les deux hommes ont exigé la démission du président Chavez et l'ont accusé de soutenir la guérilla des FARC en Colombie [45] ; une accusation qui permettait d'inclure le renversement de Chavez dans les objectifs de la " Guerre au terrorisme ".

Le 16 avril, le porte-parole de la Maison-Blanche, Ari Fleischer, déclarait lui-même que " Les États-Unis ont eu des contacts avec un large éventail de Vénézuéliens ces derniers mois, y compris des représentants des organisations patronales (...) et notre message a toujours été le même. C'est aux Vénézuéliens qu'il appartient de résoudre la situation au Venezuela pacifiquement, démocratiquement et constitutionnellement, et nous avons explicitement dit aux dirigeants de l'opposition que les États-Unis n'apporteraient pas leur soutien à un coup d'État ".

De son côté, la porte-parole du Pentagone, Victoria Clarke, a déclaré " Je peux dire catégoriquement que nous avons quelqu'un de notre département politique [le sous-secrétaire adjoint à la Défense, Roger Pardo-Maurer [46] ] qui a rencontré récemment [le 18 décembre 2001] le chef d'état major [le général Lucas Romero Rincon], et qu'il a dit très, très clairement que les États-Unis avaient l'intention de soutenir la démocratie, les Droits de l'homme, et que nous ne soutenons d'aucune façon quelque coup d'État ou activité inconstitutionnelle que ce soit ".

En réalité, loin de dissuader les putschistes, les autorités américaines leur ont apporté un soutien opérationnel. Sur place, ils ont été conseillés par l'attaché militaire de l'ambassade états-unienne à Caracas, le lieutenant-colonel James Rogers [47]. Ils disposaient en outre de l'appui logistique des services de renseignement de l'US Navy [48] .

Des conseils furent prodigués par téléphone par Otto Reich et sur place par l'ambassadeur Shapiro à Pedro Carmona, au fur et à mesure des événements autant que pour les premières décisions du gouvernement de transition [49].
Les putschistes auraient également bénéficié des conseils d'un cabinet privé, le Phoenix Consulting Group [50], employant d'anciens agents de la CIA.

Après l'échec du coup d'État, les services états-uniens ont organisé la fuite des putschistes. Plusieurs d'entre eux ont été accueillis à Miami par le marchand d'armes Isaac Pérez Recao [51].

Il est peu probable que l'administration Bush accepte sa défaite et une nouvelle tentative de pronunciamento pourrait avoir lieu ce week-end [52].
   Thierry Meyssan
Journaliste et écrivain, président du Réseau Voltaire.
Les articles de cet auteur



[1] Archives de l'Assemblée nationale constituante : http://www.analitica.com/constituye....

[2] Site officiel de l'OPEP : http://www.opec.org.

[3] Site officiel de PDV SA : http://www.pdvsa.pdv.com.

[4] Cf. 11 septembre, L'Effroyable imposture par Thierry Meyssan (éd. Carnot, 2002) pp. 149-153.

[5] Site officiel de Fedecamaras : http://www.fedecamaras.org.ve.

[6] Le capitaine Luis Garcia Morales, le colonel Sivino Bustillos, le colonel Hugo Sanchez et le contre-amiral Carlos Molina Tamayo (ex-directeur de l'Armement). Par la suite, ce groupe des six est renforcé par le général Roman Gomez Ruiz (ex-directeur général du Transport aérien).

[7] Voir « Hugo Chavez sauvé par le peuple, analyse et témoignage de Maurice Lemoine, in Le Monde diplomatique de mai 2002.

[8] Texte du décret de démission :
República Bolivariana de Venezuela
Despacho del Presidente
Decreto
De conformidad con lo establecido en el artículo 236 numeral, tercero de la Constitución, remuevo al ciudadano vicepresidente ejecutivo de la República, Diosdado Cabello, y a todos los ministros que conforman el gabinete ejecutivo.
Asimismo, con fundamento en el artículo 233 de la Constitución, presento ante el país mi renuncia irrevocable al cargo de presidente de la República que hasta el día de hoy, 12 de abril del 2002, he detentado.
Dado y firmado en la ciudad de Caracas a los doce días del mes de abril de 2002, año 191 de la Independencia y 142 de la Federación.
(LS)
Hugo Rafael Chávez Frías

[9] « Aucun regret à Washington après la chute d'Hugo Chavez », dépêche AFP du 12 avril 2002.

[10] US-Spain Joint Statement on the Situation in Venezuela, Washington, 12 avril 2002.

[11] Press Briefing par Thomas C. Dawson, Fonds monétaire international, 12 avril 2002.

[12] Crise politique au Venezuela (déclarations du ministère français des Affaires étrangères) http://www.diplomatie.gouv.fr/actu/....

[13] Site officiel de l'OEA : http://www.oas.org/default_fr.htm.

[14] Hugo Chavez Departs, in The New York Times du 13 avril 2002.

[15] Meet the Press, NBC News, 14 avril 2002.

[16] Voir les articles de Kayhan (Téhéran) et L'Iran condamne implicitement le renversement d'Hugo Chavez, dépêche AFP du 13 avril 2002.

[17] "Venezuela Coup Linked to Bush Team", par Ed Vulliamy, in The Observer du 21 avril 2002.

[18] United States Versus Elliott Abrams, in Final Report of the Independent Consel for Iran/Contras Matters (" Walsh Report "), United States Court of Appeals for District of Columbia, 4 août 1993 http://www.fas.org/irp/offdocs/wals....

[19] On trouvera une abondante documentation déclassifiée sur ce sujet, ainsi que les célèbres articles de Gary Webb, sur le serveur des National Security Archives de l'université de Washington : http://www.hfni.gsehd.gwu.edu/~nsar....

[20] Site officiel du Ethics and Public Policy Center : http://www.eppc.org.

[21] Site officiel de l'US Commision on International Religious Freedom : http://www.uscirf.gov/index.php3?sc....

[22] Les États-Unis contre la liberté de conscience, in Note d'information du Réseau Voltaire n° 204-205 du 1er octobre 1999.

[23] Site officiel : http://www.mrc.org.

[24] Elliott Abrams : It's Back par David Corn, in The Nation du 2 juillet 2001 http://www.thenation.com/doc.mhtml?....

[25] Anti-Castro Figure Named to State Department par Karen DeYoung, Washington Post du 15 avril 2001 http://www.washingtonpost.com/ac2/....

[26] Otto Reich's Dirty Laundry par Alec Dubro, in Foreign Policy in Focus http://www.foreignpolicy-infocus.or....

[27] Rhum Bacardi, CIA, Cuba et mondialisation par Hernando Calvo Ospina (EPO éd., 2000).

[28] On trouvera une abondante documentation déclassifiée sur les crimes d'Otto Reich sur le serveur des National Security Archives de l'université de Washington http://www.gwu.edu/~nsarchiv/NSAEBB....

[29] Site officiel du CSIS : http://www.csis.org.

[30] Site officiel du National Endowment for Democracy : http://www.ned.org/ Pour une critique du NED, cf. Reforming the NED par Kristofer J. Doucette, Council of Hemipheric Affairs http://www.coha.org/opeds/ned.kris.htm ; Pour un soutien à la NED, cf. The NED, A Prudent Investment in the Future par James Philip, Heritage Foundation, 13 septembre 1996 http://www.heritage.org/library/cat....

[31] A qui profite le crime ? Les liens financiers occultes des Bush et des Ben Laden, in Notes d'information du Réseau Voltaire n° 237 du 16 octobre 2001.

[32] US Agency, IRI, Boasts We Were the Bridge in Venezuela Coup par Jared Israel, in Emperor Clothes du 18 avril 2002 http://emperors-clothes.com/analysi....

[33] Site officiel de l'International Republican Institute http://www.iri.org.

[34] Site officiel du Center for International Private Entreprise : http://www.cipe.org.

[35] L'ACILS était précédemment dénommé American Institute for Free Labor Development (AIFLD).

[36] The CIO without the CIA par Simon Rodberg, in American Prospect Magazine, été 2001 http://www.prospect.org/print/V12/1....

[37] Venezuela : Rumored US Involvment Could Hurt Bush Administration, in Stratfor du 14 avril 2002http://www.stratfor.com.

[38] Par exemple Vincente Fox au Mexique ou François Durand de Grossouvre en France.

[39] Hugo's Close Call par Joseph Contreras et Michael Isikoff, in Newsweek du 29 avril 2002.

[40] Venezuela - Info Age Ends 'Textbook Example' Coups, in Intelligence n° 402 du 29 avril 2002.

[41] The Coup Master : Otto Reich Named to Board for US Army's School of the Americas, in CounterPunch Wire du 3 mai 2002 http://www.counterpunch.com/reich05....

[42] Site officiel du WHISC http://www.benning.army.mil/whisc.

[43] Venezuelan Generals Backing Interim President are SOA Grads, SOAW du 12 avril 2002 http://www.soaw.org/Articles/curren....

[44] Campagne pour la fermeture de l'École des Amériques http://www.soaw.org.

[45] Chavez Regained Power While Plotters Bickered par Scott Wilson, in Washington Post du 18 avril 2002.

[46] Le nom des protagonistes et la date de la réunion au Pentagone, placés ici entre accolades, ont été révélés dans : U.S. Details Talks With Opposition par Karen DeYoung, in Washington Post du 17 avril 2002.

[47] US Military Attache Implicate in Venezuela Coup (article non signé), in The Irish Times du 18 avril 2002.

[48] American Navy Helped Venezuelan Coup par Duncan Campbell, in The Guardian du 29 avril 2002.

[49] U.S. Cautioned Leader of Plot Against Chavez par Christopher Marquis, in The New York Times du 17 avril 2002.

[50] Site professionnel du Phoenix Consulting Group : http://www.intellpros.com Contrairement à ce qu'indique Intelligence Online du 16 mai 2002, le nom de ce cabinet ne provient pas du programme Phoenix durant la guerre du Vietnam, mais de la ville de Phoenix (Arizona) où il a été fondé.

[51] Venezuelan Coup Plotter 'in Miami' par David Adams, in The Times du 24 avril 2002

[52] Venezuela : Second Coup in Making ?, in Stratfor du 16 mai 2002 http://www.stratfor.com.


   

JacquesL

Venezuela : assassinat médiatique avant l'assassinat physique.

http://mondialisation.ca/index.php?context=va&aid=16021

CiterVenezuela : le flot de mensonges

par Tim Anderson

Mondialisation.ca, Le 10 novembre 2009


Comme le montre Eva Golinger dans ses livres, le flot  permanent de mensonges sur le Venezuela et son président, le populaire Hugo Chavez  doit se voir comme le fer de lance d'une stratégie intégrée de déstabilisation et de « changement de régime pour la nation pétrolière orientée vers le socialisme.

Ces mensonges insistants et répétés ont leurs précédents. En 1960, le Sénateur Chilien Salvador Allende, a raconté au Sénat Chilien qu'il avait été témoin de la « propagande brutale et délibérée...Jour après jours et minute après minute, ils défigurent ce qui s'est passé à Cuba ». Naturellement, les chaînes médiatiques dirigées par des grosses compagnies privées ne pouvaient pas envisager la moindre vue sympathique de la révolution socialiste cubaine.

Toutefois, le grand danger de ces mensonges constants a propos de Cuba, démontré par Allende, était qu'ils reproduisaient les préparatifs du renversement antérieur par les Etats-Unis du gouvernement démocratique et réformiste de Jacobo Arbenz au Guatemala. Ce coup d'Etat de 1954 a été suivi par des décennies de dictatures soutenues par les Etats-Unis et l'assassinat de plus de 100 000 personnes dans ce pays d'Amérique centrale. Allende avait raison. En  1961, les Etats-Unis ont lancé une invasion à Cuba, mais ont échoué à la soutenir avec des troupes terrestres étasuniennes, et l'intervention a échoué. Plus tard, Allende lui-même, en tant que président massivement élu du Chili, a fait face aux mêmes attaques médiatiques féroces, avant d'être assassiné lors du coup d'Etat militaire soutenu par les Etats-Unis de  1973.



Dans le cas du Venezuela, nous n'avons pas du tout besoin de regarder plus loin que The Economist, basé à Londres, pour voir de bons exemples de malhonnêteté calculée. The Economist privilégie les intérêts d'investisseurs Britanniques, Européens et (de plus en plus) asiatiques, que ceux des grandes compagnies étasuniennes. Néanmoins, sur la question de s'opposer à un gouvernement socialiste au Venezuela, il y a un terrain d'entente et le niveau d'éthique journalistique est similaire.

Regardons leur article récent , « La politique étrangère du Venezuela : rêves d'un monde différent », délicatement sous-titré : « Les Armes et les Tyrans » (The Economist, 19 Septembre 2009, p.52). Dans un court article, ils se débrouillent pour fourrer au moins quatre mensonges importants, à côté de quelques mensonges anecdotiques.

D'abord, il est dit que le Président Chavez, dans un tour du monde qui incluait des achats d'armes à la Russie, « a obtenu ce qu'il semblait chercher depuis le début : l'attention des Etats-Unis ». La Secrétaire d'Etat étasunienne Hillary Clinton, rapporte-t-on, est « inquiète » que els achats d'armes du Venezuela « puissent déclencher une course aux armements » et sont un « sérieux défi lancé à la stabilité ».

L'avantage de cette vision du monde américanocentrée (« obtenir l'attention des Etats-Unis » comme but premier) est qu'elle dispense du besoin d'expliquer les motivations réelles. L'article ne fait aucune mention du déploiement de la Quatrième flotte étasunienne au large des côtes du Venezuela, et minimise l'importance de la construction par l'Administration Obama de bases militaires dans la Colombie voisine en la renvoyant à un paragraphe beaucoup plus tardif. Aucune mention du fait que les Etats-Unis, en dépit de leur soutien au coup d'Etat contre Chavez en 2002, pourraient être une menace pour la démocratie vénézuélienne. Par des artifices, The Economist, présente la recherche d'armes pour l'autodéfense du Venezuela comme la seule menace identifiée contre la stabilité régionale. La menace posée par l'intrusion du pouvoir impérial étasunien à l'intérieur du continent Sud Américain n'est pas mentionnée.

Deuxièmement, le tour du monde des « armes et des tyrans » de Chavez est présenté comme « la formation d'une alliance politique anti-américaine avec l'Iran, la Syrie, la Biélorussie et la Russie ». Son but principal serait de « faire éclater des problèmes pour les Etats-Unis en plusieurs endroits à la fois ». Plus loin, il est dit que certains achats d'armes par Chavez « semblent être une réponse hâtive à un accord du mois dernier par lequel la Colombie a donné aux Etats-Unis des installations dans sept bases pour des opérations anti-drogues ».

Toutefois, aucun observateur censé ne croit que sept bases militaires étasuniennes en Colombie ont quoi que ce soit à voir avec des « opérations anti-drogues ». Au contraire, la culture et le trafic de masse à travers le monde- du Vietnam à l'Afghanistan et à la Colombie- se sont toujours accrus avec la présence de militaires étasuniens. De même, il est absurde d'appeler « hâtive » la réponse vénézuélienne aux menaces militaires étasuniennes, étant donné que durant le siècle dernier, les Etats-Unis sont intervenus dans chaque pays d'Amérique latine (plusieurs fois dans certains), y compris le Venezuela sous chavez.

Le besoin pour Chavez et son gouvernement de construire des relations alternatives de financement et d'investissement est évident au regard de l'histoire indéniable et incessante des agressions étasuniennes contre des gouvernements indépendants en Amérique Latin et, plus récemment, de l'effondrement financier américanocentré. Ses récentes visites incluaient des pays autres que ceux mentionnés, y compris la Chine.

LA « première priorité » de la politique étrangère du Venezuela est loin d'être « anti-américaine. Il s'agissait de construire une alliance de pays souverains dans les Amériques appelée ALBA. Trente-cinq pays composent les Amériques- seules les vues américanocentrées assimilent « américain » avec les USA. Le principal aéroport de la ville de Mexico illustre ce point et indique la salle d'embarquement pour les vols vers les « Etats6unis d'Amérique du Nord »'.

Le troisième mensonge majeur de l'article concerne l'Unasur, l'Union  des Nations Sud Américaines récemment créée, dont le Venezuela est un membre. The Economist affirme que « [Chavez] a encore échoué à obtenir une condamnation » explicite par l'Unasur de l'accord pour les baes militaires de la Colombie avec les Etats-Unis. » Il est vrai qu'il n'y avait pas unanilmité à l'Unasur. La Colombie a affirmé son droit de développer de nouvelles bases militaires et refusé de fournir des informations à leur sujet à l'Unasur. Il est également vrai qu'Hillary Clinton a utilisé les achats d'armes imminents du Venezuela à la Russie (notez que les Etats-Unis eux-mêmes ont refusé de réapprovisionner en pièces l'armée vénézuélienne) pour détourner l'attention des nouvelles bases étasuniennes.

Néanmoins, les pays Sud Américains- y compris les pays extérieurs à l'ALBA que sont le Brésil, l'Argentine et le Chili- se sont exprimés fermement contre les constructions étasuniennes en Colombie. Les neufs membres du groupe de l'ALBA ont ajouté qu'ils rejettent « l'installation de bases militaires des Etats-Unis en Amérique Latine et dans la Caraïbe....[parce qu'elles] mettent la paix en danger, menacent la démocratie et facilitent l'interférence hégémonique » des Etats-Unis dans les affaires de la région. Chavez est loin d' »échouer » dans sa diplomatie. C'est le régime colombien d'Alvaro Uribe qui s'est trouvé progressivement isolé parmi ses voisins.

Quelques autres mensonges anecdotiques ornent l'article de The Economist. Le magazine critique Chavez pour avoir reconnu l'Abkhazie et l'Ossétie du Sud, prétendant que ces deux Etats « avaient été arrachés à la Georgie l'année dernière par les troupes Russes ». En fait, après la fragmentation de l'Union Soviétique, l'Abkhazie et l'Ossétie n'ont jamais été effectivement incorporées à la Georgie. C'est la tentative (encouragée par les Etats-Unis) de les incorporer de force à la Georgie (et par conséquent à l'OTAN) qui fut franchement vaincue en 2008, avec l'assistance Russe.

L'article prétend aussi que la générosité du Venezuela, fournissant du gaz et du pétrole à bas prix à des pays en développement, intervient alors que « les raffineries vénézuéliennes luttent pour fournir le marché local ». C'est faux et absurde. Le Venezuela a une capacité massive de raffinage et l'essence au Venezuela demeure la moins chère des Amériques.

L'article garde le quatrième gros mensonge pour la fin, et suit la tradition des plus prompts à violer les droits de l'homme qui accusent les autres pour détourner l'attention de leur cas. Il dit de Chavez qu'il « cultive des liens » avec des régimes qui sont caractérisés par « des élections truquées, la censure des médias, la criminalisation des dissidents et des dirigeants çà vie ». Pas une once d'ironie, alors que les escadrons de la mort en Colombie assassinent les syndicalistes et les dirigeants de la société civile de manière incontrôlée, alors que l'administration Obama tergiverse autour du régime du coup d'Etat au Honduras (qui a déposé l'allié de Chavez), alors que la fraude électorale et une guerre sanglante font rage en Afghanistan et alors que les Etats-Unis lancent des attaques au missile contre le Pakistan.

Il peut être fastidieux de répondre de façon documentée à de tels mensonges. Ils sont si communs et à peine a-t-on fait une partie du travail que les mensonges du jour suivant apparaissent- si ce n'est dans The Economist, alors c'est dans le Washington Post, l'Australian ou le Times. Ces monopoles tablent sur les plus vulnérables, qui n'ont pas de sources alternatives d'information, qui ne lisent pas l'histoire et qui sont susceptibles de subir fortement l'influence d'une agitation grossière et souvent raciste.

Avec du recul, cela apparaît comme un processus de légitimation, organisé par les monopoles médiatiques privés, dans leur haine pour la sorte de démocratie populaire conduite par Chavez (comme également dans le passé par Allende), préparent le terrain pour des coups d'Etat, des guerres d'intervention et de conquête. Cela a été fait avant- tandis que ces monopoles demeurent hors de tout contrôle et cela sera fait à nouveau.


Article original : http://www.venezuelanalysis.com/, 20 Octobre 2009.

Traduit de l'anglais par Marc Harpon pour Changement de Société

JacquesL

http://www.legrandsoir.info/Journal-de-bord-d-un-certain-Hugo-Chavez.html

Citer"NOUS DEVONS ENTRER AU COEUR, AU PLUS PROFOND DE NOTRE RÉALITÉ."
Journal de bord d'un certain Hugo Chavez
Thierry DERONNE
En 2010 le Venezuela a remporté de nombreuses victoires dans sa transformation structurelle : la démocratie participative vient d'être renforcée par de nouvelles lois qui multiplient le pouvoir des conseils communaux et des communes dans l'État ; la loi sur l'université, autre exemple, resserre ses liens avec ces organisations citoyennes. La CEPAL, organisme de l'ONU qui mesure les progrès économiques et sociaux en Amérique Latine, a fait l'éloge en novembre du Venezuela "en tête, avec l'Argentine, le Brésil et la Bolivie, de la réduction de l'inégalité et de la pauvreté pour les dix dernières années".



Ces derniers mois le gouvernement bolivarien a récupéré des entreprises immobilières aux mains de mafias qui escroquaient la classe moyenne, indemnisé leurs victimes, nationalisé au bénéfice des travailleurs et des usagers des entreprises ou des banques pratiquant la fraude. Les récentes inondations qui ont privé de toit des dizaines de milliers de familles donnent un coup de fouet à la politique du logement et à la réforme agraire (24000 hectares remis aux petits producteurs du Zulia en décembre) tandis que Hugo Chavez demande aux révolutionnaires de se "radicaliser à gauche et de travailler au sein du peuple, dans la rue, dans les quartiers, main dans la main".

Les grands groupes médiatiques (les propriétaires de El Pais, du Monde, de Libération, etc..) ont occulté cette transformation, pour ne parler que d'un article de la Constitution qui permet de décréter des mesures d'urgence en matière économique et sociale ...preuve de la "dictature". Déjà, en 2007, lorsque le président Hugo Chavez avait usé du même article, le choeur médiatique avait martelé la même interprétation. Un simple suivi montre pourtant que les décrets de cette époque ne visaient qu'à accélérer le développement économique et social (nationalisations de l'électricité, sidérurgie, cimenterie, etc..). * Comptons sur les mêmes journalistes pour éviter tout suivi sur les mesures à venir... Nous offrons par contraste quelques pages du "journal de bord" d'um certain Hugo Chavez.

Thierry Deronne
De l'extrême inégalité dans la distribution de la terre
par Hugo Chavez, 20 décembre 2010



Le Ministre Loyo vient de m'informer qu'il est sur place avec le Commandant Général de l'Armée, avec les institutions, l'Institut des Terres, les organismes de sécurité de l'État Bolivarien. A midi selon ce rapport il restait encore sept grands domaines (latifundios) auxquels ils n'avaient pu arriver à cause des inondations, de l'état des voies d'accès, nous avons mis des hélicoptères, toute une armée civique et militaire en action, parce que là-bas les grands propriétaires se vantent d'être armés et d'avoir l'appui des paramilitaires, et j'ai dit aux généraux, qu'ils les dégainent leurs armes, s'ils le font nous nous défendrons, sur un pied d'égalité, non ? Ils menacent de mort les fonctionnaires de l'Institut des Terres, c'est une zone d'extrême pauvreté, et ce qui abonde au sud du Lac de Maracaibo dans ces planatations de bananes, aujourd'hui inondées pour la plupart, c'est l'esclavage, même pas le capitalisme, non, l'esclavage.

S'il y a un point pour lequel on peut remercier les pluies et les inondations, c'est qu'elles font affleurer le réel. Comme les eaux en crue des rivières du llano, comme le chante "El Cubiro", Adàn connaît cette chanson, comment dit-elle encore ? Voguant, voguant sur le fleuve.. Comme dit "El Cubiro", lorsqu'il entre en crue le fleuve réveille des paysages endormis, l'eau qui monte réveille les oiseaux guacharacas, les serpents fuient leurs cavités, même le caïman doit se secouer quand le fleuve Arauca déborde ; Les crues nous ont permis d'observer ce que parfois nous ne voyons plus, ce à côté de quoi nous passons sans le voir, soit parce que nous ne voulons pas nous rendre compte, soit parce que cela nous est difficile. En survolant en hélicoptère les grandes inondations de Tucacas, de Chichiriviche par exemple, on se rend compte très vite, que ce qui est inondé ce sont les quartiers pauvres ; les riches ont érigé leurs talus, ont élevé le niveau des terres avec des machines, ils ont fait de l'urbanisme, n'est-ce pas ce que disent les ingénieurs ? De l'urbanisme.

Mais les pauvres ont dressé leurs baraques sans urbanisme, là, au niveau de la terre, parfois sous le niveau de la mer comme à Higuerote, où la mer surpasse le niveau des quartiers. Nous avons parcouru la côte jusqu'au cap Codera, cela faisait des années que je ne volais pas là-bas, depuis la tragédie de Vargas.

Onze ans que je ne faisais pas ce parcours en hélicoptère, pour voir tous les villages de la côte, Cabo Codera, c'est la limite de Miranda avec Vargas, n'est-ce pas ? Les zones pauvres inondées, au coeur du village, c'est là où vivent les travailleurs qui servent dans les hôtels de luxe, les femmes et les hommes avec l'eau jusqu'à la poitrine, les femmes portent les enfants, les hôtels de luxe restés intacts.

Au sud du Lac de Maracaibo quelque chose d'étrange s'est produit, j'ai dit "le peuple a marqué un point". En fait il a tout perdu parce que le fleuve a inondé tous les pauvres, mais le latifundio d'un riche, a été inondé aussi. J'ai demandé au maire "dis donc, c'est bizarre que ce grand domaine soit inondé aussi". Il m'a dit : "non, c'est parce que nous avons ouvert un canal pour y évacuer l'eau , parce que les riches creusent des canaux pour que l'eau se déverse chez les pauvres". Tu vois ?

Je fais ces commentaires sur la situation que nous vivons, parce que nous devons faire un effort suprême et nous rendre compte à travers ces petits détails, qui sont gigantesques, de l'extrême inégalité de la distribution de la terre. Quel est le premier des moyens de production ? Le plus important après l'humain, après celui des travailleurs ? La terre. La mère, la pacha mama, la mama pacha, la terre.

Je me rappelle que là-bas dans l'État d'Apure, pendant la saison sèche les latifundistes utilisaient des machines qui ne leur appartenaient pas, les machines du peuple, des machines publiques, comme un payloader appartenant à un conseil municipal ou au gouvernement régional, c'étaient les riches qui les utilisaient.



Ils emportaient un payloader, je me souviens d'avoir fait arrêter l'un d'eux, et cela m'a causé un problème terrible : j'avais dit aux soldats, ramenez cette machine, ramenez-la à la garnison. C'est qu'ils bouchaient les rivières, le Caño Caribe, ils le bouchaient pour que les indigènes ne puissent naviguer, pour que personne ne puisse naviguer, mais surtout les indigènes, les yaruros, les cuibas. Ils faisaient des bouchons de terre, et je me chargeais de les détruire, j'ai même usé de la dynamite pour en défaire un très dur, "faites-le sauter !".

De même un jour j'ai fait tirer sur des cadenas épais qu'ils installaient sur les chemins communaux au milieu des terres : "passage interdit". Comment osent-ils barrer un chemin comunal ? Ah, on ne trouvait plus la clef ? Poum ! Le juge m'a convoqué au tribunal, ils me dénonçaient, ils m'ont surnommé le casse-cadenas, "là-bas il y a un capitaine casse-cadenas". Mais cette réalité reste vivante, cruellement, dans une grande partie de notre campagne, je parle de l'échelle nationale, pour les paysans, les zones rurales dans les villes, partout.

C'est pourquoi je demande de faire un effort suprême, comme lorsqu'on marche de nuit dans la plaine et qu'il faut aiguiser le regard ou emporter des jumelles spéciales. Comme dans un blindé, lorsqu'il faut ajuster le périscope, à la moindre fumerole, au moindre bruit, même le plus imperceptible.

Nous devons aiguiser à fond notre capacité de percevoir la réalité, ne pas tomber dans l'indifférence, ce qui est un autre extrême : chercher la ligne de moindre résistance pour éviter les conflits, pour ne pas entrer dans le vif du sujet. Non. Nous devons entrer au coeur, au plus profond de notre réalité.

Donc nous avons pris la mesure de récupérer ces grands domaines en application de la Constitution et de la Loi des Terres, trop retardée sur le terrain, vraiment. Une des causes de ce retard est que les mafieux de cette région ont fait assassiner plus de 200 dirigeants paysans. C'est le règne des sicaires, ils en tuent un pour en menacer cent. Ils ont menacé de mort des fonctionnaires civils et des militaires aussi.



Donc sous la pression d'une situation aussi dure, aussi dramatique, je me suis renseigné et me suis rendu compte que tous les dossiers étaient prêts pour ces premiers 47 latifundios. J'ai envoyé le chef de l'armée, le deuxième chef de l'armée, le troisième chef de l'armée et je leur ai dit : s'il vous faut déménager le Commandement Général sur place, au sud du Lac, hé bien que toute l'armée vénézuélienne se mette en mouvement, avec ses blindés et ses hélicoptères, et les milices paysannes, mais pas sans défense, armées.

Ces mafieux ne peuvent détenir, nous ne pouvons permettre qu'ils détiennent, plus de pouvoir qu'une Révolution.

Si nous permettions que la contre-révolution détienne plus de pouvoir que la révolution, ce jour-là serait notre perte. Le Pouvoir Moral, est le plus grand pouvoir que doit posséder une Révolution.

Eux se sont étiolés, ils n'ont pas de force morale.

Classe inaugurale prononcée à l'Institut Supérieur d'Études Politiques du Parti Socialiste Unifié du Venezuela, Le 17 décembre 2010.

Traduction : Thierry Deronne pour La revolución vive

Source : Blog de Hugo Chavez

* Voir "Chavez déraperait-il ?", dans l'Huma Dimanche, 1-7 mars 2007 : http://membres.multimania.fr/resoarchives/2007/doc%202007/fevr-mars/HD50_p90.pdf
URL de cet article 12319
http://www.legrandsoir.info/Journal-de-bord-d-un-certain-Hugo-Chavez.html

JacquesL

http://michelcollon.info/Venezuela-Obama-cherche-un.html

CiterVenezuela : Obama cherche un candidat pour les élections de 2012
3 mars 2011

Le gouvernement états-unien se prépare pour l'élection présidentielle vénézuélienne de 2012 en demandant des fonds pour soutenir les organisations anti-chavistes et pour aider à lancer un « candidat » qui se présentera contre Chávez. Les républicains, quant à eux, demandent un « embargo » contre le Venezuela.

Le président Barack Obama a présenté au Congrès un budget de 3 700 milliards pour 2012, le plus élevé de l'histoire des États-Unis. Il prévoit d'importantes baisses dans les programmes sociaux et dans les emplois publics fédéraux partout dans le pays, mais il prévoit une ligne budgétaire pour le financement des organisations anti-chavistes du Venezuela.

Sur ces 3 700 milliards :

670 milliards iront au Pentagone, dont le budget continue de croître ;

75 milliards aux différents services d'intelligence ;

55,7 milliards au département d'État et à l'Agence états-unienne pour le développement international (USAID).

Pour la première fois dans l'histoire récente, le Foreign Operation Budget, qui relève du département d'État, détaille ouvertement le financement des organisations anti-chavistes à hauteur de 5 millions de dollars.


Les justifications du budget sont ainsi détaillées :

« Ces fonds aideront à renforcer et soutenir la société civile vénézuélienne qui protégera l'espace démocratique et qui cherchera à servir les intérêts et les besoins du peuple vénézuélien. Ces financements renforceront les possibilités d'accès à une information objective pour les citoyens, faciliteront le débat pacifique sur des questions clés, apporteront un soutien aux institutions démocratiques et aux processus démocratiques, promouvront la participation citoyenne et encourageront les leaderships démocratiques. »


Ce langage pourrait sembler « joli » pour justifier la dépense de millions de dollars du contribuable états-unien pour des organisations politiques dans un pays étranger. Mais ces financements ont été à l'origine de la subversion et de la déstabilisation du Venezuela subie ces huit dernières années par le gouvernement démocratique d'Hugo Chávez.


Selon certains documents, aujourd'hui disponibles, rien qu'entre 2008 et 2011 le département d'État des États-Unis a envoyé plus de 40 millions de dollars à l'opposition vénézuélienne, ces fonds étant principalement destinés à la propagande, notamment à l'encontre du président Chávez lors des campagnes électorales.


Les fonds demandés par Obama dans le budget 2012 pour les organisations anti-chavistes au Venezuela appartiennent à un budget du département d'État appelé Economic Support Fund [Fonds pour le soutien économique] (ESF), lequel, selon le porte-parole du département d'État Philip Crowley, sert à financer des ONG et différentes organisations dans « des pays stratégiques clés très importants » pour les États-Unis. En plus des financements de l'ESF pour l'opposition vénézuélienne, des millions de dollars pour les campagnes politiques, pour la propagande médiatique et d'autres activités déstabilisatrices en Amérique du Sud sont envoyés.


Financements illégaux

Le département d'État états-unien fait connaître les financements de l'opposition vénézuélienne pour 2012 alors que l'assemblée nationale vénézuélienne a voté une loi, en décembre 2010, qui interdit tout financement étranger pour les activités politiques. La Loi de défense de la souveraineté politique et pour l'autodétermination rend clairement illégal tout financement de campagne politique, de parti, d'organisation, y compris les ONG, qui s'implique dans la vie politique.


Comment les États-Unis vont-ils faire exactement pour envoyer cet argent, alors qu'il s'agit d'une claire violation de la loi vénézuélienne ?

Ces dernières années le Foreign Operations Budget [budget pour les opérations extérieures] ne stipulait jamais clairement le financement d'organisations politiques vénézuéliennes. Depuis 2002 Washington a utilisé un département de l'USAID, l'Office for Transition Initiatives [Bureau pour les opérations de transition] (OTI), pour faire parvenir ses millions de dollars à ses partenaires vénézuéliens. Le bureau de l'OTI, qui fonctionnait de façon clandestine à Caracas et qui n'a donc jamais reçu d'autorisation du gouvernement vénézuélien pour s'installer dans le pays, a brutalement fermé ses portes fin 2010 pour poursuivre ses activités depuis Washington et Miami. Ce fut l'opération la plus longue de l'histoire de l'OTI.


Il est clair que le financement et le soutien politique à l'opposition vénézuélienne représentent maintenant une priorité qui sera gérée directement par le département d'État. Les fonds demandés pour le budget du département d'État pour 2012 seront très probablement orientés vers des campagnes politiques, puisque au Venezuela cette année-là, décisive, se dérouleront des élections locales et l'élection présidentielle. Le département d'État demande par ailleurs 20 millions de dollars pour financer les organisations anti-castristes, à Miami et ailleurs, pour fragiliser la Révolution cubaine.


Est-ce que les contribuables états-uniens savent que leurs dollars durement gagnés vont financer des activités politiques dans d'autres pays au lieu d'être investis pour la création d'emplois, pour la santé et pour des programmes sociaux dans leur propre pays ?


L'embargo contre le Venezuela

Le chef du sous-comité des Affaires étrangères pour l'Hémisphère occidental de la Chambre des représentants, le républicain Connie Mack, a demandé au gouvernemenet Obama d'imposer un embargo économique contre le Venezuela, arguant de ses liens supposés avec des organisations terroristes. Connie Mack, un néo-conservateur représentant le sud de la Floride, a également demandé que les États-Unis incluent le Venezuela cette année dans la liste des « États qui sponsorisent le terrorisme », une demande qu'il a déjà formulée en vain ces trois dernières années.


Lors d'un discours à la Conservative Political Action Conference [Conférence pour l'action politique conservatrice] (CPAC), Connie Mack a parlé du président élu du Venezuela comme d'un « voyoucrate » qui utilise des « armes », telles que « l'oppression, l'agression, le terrorisme et la drogue » pour « détruire la liberté et la démocratie en Amérique latine ». Connie Mack n'a pas présenté la moindre preuve pour étayer ses scandaleuses accusations. Le républicain de la Floride est allé jusqu'à déclarer que le président Hugo Chávez « est devenu le Oussama ben Laden et le Ahmadinejad de l'hémisphère occidental ».


Ces dernières années, les secteurs droitiers à Washington ont lancé des appels de plus en plus osés à agresser directement le Venezuela et à intervenir dans ce pays. Leurs déclarations ont été accompagnées d'une augmentation des financements pour les organisations anti-chavistes afin de provoquer déstabilisation et désordre au Venezuela, tout en essayant, sur le plan international, d'« isoler » le gouvernement vénézuélien et de diaboliser le président Chávez. Cependant le chef d'État vénézuélien conserve une popularité de 60% dans son pays et reste l'un des leaders les plus admirés dans le monde.


Traduction : Numancia Martínez Poggi legrandsoir.info

JacquesL

Retour au Venezuela (Annick MAZIERS)

http://www.legrandsoir.info/retour-au-venezuela.html

CiterTreize ans après une première immersion au Venezuela, alors gouverné par Rafael Caldera, Annick Maziers est retournée sur place en mai dernier. Impressions sur la République bolivarienne d'Hugo Chavez, sous la forme d'un carnet de route.

L'absence temporaire du président Chavez a été l'occasion, pour une bonne partie de la presse mondiale de titrer sur le Venezuela... renforçant l'impression d'un régime dictatorial pour certains, éveillant, pour d'autres, respect et curiosité pour un leader adulé par une bonne partie de la population... Au total, des centaines d'articles, mais pour combien d'enquêtes sur le terrain ?

Pour entendre un peuple, c'est peut-être un peu comme pour observer les étoiles... les grandes lumières de la ville peuvent parasiter un peu la tâche. Il ne faut pas hésiter à rentrer dans les terres, quitter la capitale. Cela faisait treize ans que je n'étais pas retournée au Venezuela. Je suis retournée dans mon Llano incandescent, à l'intérieur du pays.

Les mises en garde de quelques amis non chavistes, les e-mails alarmants sur la « dictature » de Chavez, ainsi que la presse avaient fini de me convaincre : il valait mieux ne pas prendre mon fils de sept ans avec moi pour retourner au Venezuela. Je suis donc partie seule pour retrouver les gens avec qui, treize ans auparavant, j'avais vécu. Je ne connaissais rien du Venezuela socialiste. Quand je suis partie, le pays était encore sous le mandat du président Caldera. Hasard des dates, mon départ avait coïncidé avec les derniers mois de la présidence Caldera.
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Mai 2011, j'arrive à Zaraza, à l'intérieur du pays. Je renoue avec mes amis comme si je les avais quittés hier ; tous de milieux différents, de sensibilités politiques différentes. Il y a treize ans, je travaillais dans le cadre d'une action sociale bénévole au cœur du pays avec des enfants, des malades. Aucune prise de position politique n'était souhaitable, neutralité totale, je travaillais avec des gens de tous bords.

Enregistrant, notant, photographiant tout ce que je n'avais plus vu depuis treize ans, j'avais treize années à comprendre. Du balayeur de rues au chauffeur de taxi, de la guichetière au cadre supérieur de la compagnie d'électricité, du collégien au propriétaire terrien exploitant, je les ai tous harcelés de questions. J'ai découvert un nombre incroyable de programmes, il m'était difficile de tout capter tant il y a avait de sujets à développer.
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L'un des programmes les plus impressionnants m'a semblé être les réseaux mercal. Ce sont des magasins du commerce équitable vendant à prix régulés les denrées de base produites localement. Ils sont implantés partout dans le pays. Je me suis rendue dans l'un d'eux. Le bruit courait qu'il n'y avait plus moyen de se procurer de l'huile. Je voulais vérifier. Alors que nous entrions dans le mercal, ils déchargeaient des palettes de bouteilles d'huile.

J'ai vu les comedores, ces cantines publiques gratuites pour les plus de 60 ans, les écoles de musique gratuites pour tous, les formations professionnelles gratuites, les transports publics très bon marché et gratuits pour les personnes âgées.
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L'un des grands points du Venezuela est la mobilité des gens. Compte tenu du prix du carburant, des prix des transports publics (métro, liaisons bus entre les villes...), les Vénézuéliens ont vraiment la possibilité de se déplacer. Ce qui n'est pas un détail quand on sait, en France notamment, l'élimination « naturelle » que représentent pour les étudiants les déplacements à la capitale. Les parallèles me venaient souvent à l'esprit, et de penser à nos retraités européens, français, grecs, anglais, ceux dont la retraite ne permet même pas le paiement d'un loyer ou les couples avec double salaire qui ne peuvent plus payer le gasoil pour se chauffer l'hiver.
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Les maisons que j'avais connues ont été aménagées, les réservoirs d'eau potable ont été changés, le téléphone est accessible à tous et, d'ailleurs, tout le monde a son téléphone portable. La compagnie nationale de téléphone Cantv a été nationalisée en 2006 et elle propose des tarifs sociaux extrêmement accessibles, très encadrés. Tous peuvent être connectés à Internet, le prix est modique et des cours gratuits d'initiation sont offerts partout dans le pays. D'ailleurs, les premiers ordinateurs 100% vénézuéliens voient le jour.

Toute personne qui souhaite étudier peut étudier, les universités sont partout présentes. De très nombreuses femmes reprennent des études tout en gardant leur travail, les horaires ont été aménagés. Dans la ville où j'étais, Zaraza, le nombre d'universités est passé de deux à quatre. Le Venezuela est le pays au monde comptant le plus d'étudiants, 36% de la population étudie. Les bourses sont largement distribuées. Ainsi, l'une de mes amies vit seule avec quatre enfants à charge, ses quatre enfants étudient, aucun n'a besoin de travailler pendant son cursus.
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Il y a des médecins à tous les coins de rue, grâce au programme d'échange de médecins avec Cuba. J'ai pu rencontrer certains de ces Cubains, comprendre comment ils vivaient cette expérience et comment ce « prêt » de médecins était perçu par la population bénéficiaire : une expérience enrichissante pour les premiers car beaucoup de maladies présentes au Venezuela sont maintenant éradiquées à Cuba et, pour les seconds, une aubaine.

J'ai pu voir au fin fond de la campagne des gens opérés, des gens avec des attèles, des lunettes... Les parallèles avec la tendance actuelle en France me viennent en permanence en tête : alors que la France applique un numerus clausus et renvoie des médecins étrangers bien que la population subisse une pénurie criante, que le taux de cancer explose et que la population vieillit ; le Venezuela fait venir 20.000 médecins cubains. C'est l'asymétrie parfaite.

Les familles les plus aisées que je connais sont certes très critiques au premier abord envers le pouvoir... Le vocabulaire est dur et ils ne manquent pas de relever tous les problèmes que connaît encore le Venezuela. Cependant, ils ont quand même tous reconnu ne rien avoir perdu. Ils ont gardé leur bateau, leurs fermes, les multiples voitures... Et, au fil des discussions, eux-mêmes reconnaissent que leur Venezuela est un charme et qu'ils n'ont pas envie de le quitter. Ils sont impliqués dans l'opposition, pour certains, et animent des émissions radio, occupent des postes à responsabilité.
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Le plus déstabilisant pour un esprit européen est peut-être de constater l'incroyable tendresse qu'exprime, avec une grande spontanéité, la population envers le président Chavez. Il est vu tantôt comme un fils, tantôt comme un frère.

Transposer un tel comportement dans notre contexte politique actuel serait tout à fait surréaliste. Il n'est plus question dans notre paysage politique de fracture entre la classe dirigeante, en ce compris les hauts fonctionnaires, et la population ; il est juste question d'univers différents.
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En passant au-dessus de la rivière la plus sale de Caracas, un véritable égout à ciel ouvert, mon amie me dit que « ce fou de Chavez a promis qu'il nagerait dedans ». Cette remarque me fait alors penser à l'un des textes du grand « Gabo ». Il parlait de ce général qui, pour son agrément, avait inversé le cours d'une rivière... Gabriel Garcia Marquez nous plongeait alors dans le réalisme magique ; mais ce que Chavez rend abordable pour une partie de la population, c'est en fait une réalité magique. Il ne cherche pas à inverser le cours des rivières mais bien le cours des choses. Depuis de nombreuses années, personne n'avait autant orienté le développement du pays vers les classes les plus défavorisées, personne n'avait osé.

A l'image de ce métro de Caracas qu'il a fait sortir de terre pour rejoindre les banlieues à flanc de montagne, il a défié et renversé ce que beaucoup pensaient être la fatalité, les lois irréversibles du marché. Ainsi, fou pour certains, leader humaniste pour d'autres, cet homme a su réveiller l'optimise et la fibre politique d'un grand nombre de Vénézuéliens.

Annick Maziers

SOURCE : http://www.lecourrier.ch/retour_au_venezuela

Texte rédigé le 8 août 2011. Annick Maziers a cosigné, avec la photographe Eve Dufaud, le recueil Montagnes d'Hommes - Bergers, Bergères d'exception, 2010, ed. « Lieux Dits », Lyon. http://montagnes-d-hommes.com

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