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"Valérie Pécresse se moque du monde", écrit "éconoclaste".

Démarré par JacquesL, 11 Août 2011, 11:39:20 AM

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JacquesL

http://econoclaste.org.free.fr/dotclear/index.php/?2011/07/14/1807-valerie-pecresse-se-moque-du-monde

CiterValérie Pécresse se moque du monde
Alexandre Delaigue jeudi 14 juillet 2011 00:48

Chacun connaît le prix Busiris, qui récompense l'usage abusif du droit dans les discours politiques. Rappelons que pour mériter ce prix, une personnalité politique doit énoncer "un propos juridiquement aberrant, si possible contradictoire, proféré de mauvaise foi, et mû par l'opportunité politique plus que par le respect du droit".

Le prix Busiris est cantonné au droit. Mais les propos aberrants, contradictoires, opportunistes et de mauvaise foi, ne se limitent pas à ce domaine. La preuve, ce matin, par Valérie Pécresse, qui invitée sur Itélé, a gratifié les spectateurs de cette magnifique perle (à 3'30 dans la vidéo) :

La règle d'or, c'est une petite révolution. C'est la règle du bon sens. c'est demander enfin - parce que ca fait 35 ans qu'on vote le budget, les comptes publics, en déficit - donc, c'est demander à l'Etat de s'appliquer à lui même la règle que tous les français s'appliquent tous les jours, c'est à dire j'ai un euro à dépenser, je ne dépense pas plus d'un euro.

Bien, bien. Commençons :

Propos aberrant : la règle du bon sens, c'est que l'Etat s'applique la règle que tous les français s'appliquent.

Le "bon sens" permet pourtant de constater qu'un Etat est bien différent (en matière financière) d'un ménage. Première différence : un Etat a une durée de vie indéfinie, contrairement à un particulier ou un ménage. Ce qui lui permet, pendant beaucoup plus longtemps, de rester endetté : il lui suffit pour cela de payer indéfiniment les intérêts de sa dette, puis lorsque celle-ci arrive à échéance (si elle y arrive: il fut un temps ou existaient des rentes perpétuelles et transmissibles), de la payer en ré-empruntant.

Seconde différence : un Etat disposant du monopole de la violence légitime, lorsque ses recettes sont insuffisantes, il a la possibilité d'exercer la contrainte auprès des citoyens pour prélever plus d'impôts, augmentant ses recettes. Bien évidemment, comme le montre l'actuel exemple grec, ce pouvoir n'est pas infini. Mais je ne connais aucun citoyen qui peut aller voir son employeur, lui dire "je n'arrive pas à boucler mes fins de mois, j'exige donc une augmentation" et obtenir satisfaction. Par ailleurs, ce n'est souvent même pas nécessaire, puisque spontanément, les recettes fiscales augmentent sous l'effet de la croissance économique. Mieux, même: une partie significative des dépenses de l'Etat (infrastructures, dépenses régaliennes, éducation, etc) ont pour effet d'accroître ladite croissance économique. Il n'est pas aussi fréquent que les particuliers s'endettent pour accroître leurs revenus futurs.

Troisième différence : un Etat est souverain. Lorsqu'un particulier, ou une entreprise, ne peut pas payer ses dettes, on (les services de l'Etat, d'ailleurs) saisit leurs actifs. Rien de tel pour les gouvernements. Il fut un temps où l'on déclarait des guerres à des potentats orientaux impécunieux pour se payer sur la bête, mais cette époque est terminée depuis longtemps. Un Etat peut faire souverainement défaut sur tout ou partie de sa dette, en alléger le poids par le biais de son pouvoir sur l'inflation (par l'intermédiaire de la banque centrale). Ces solutions ont, bien évidemment, des coûts : les prêteurs sanctionnent les Etats qui ont fait autrefois défaut, en exigeant des taux d'intérêt plus élevés, pendant des périodes très longues. L'inflation trop élevée désorganise, parfois gravement, le fonctionnement du pays. Mais ces possibilités distinguent considérablement l'Etat du simple particulier surendetté qui voit l'huissier saisir ses biens.

Bref donc, il n'y a strictement rien de commun entre un particulier et un gouvernement en matière financière. Cette fausse analogie ne permet en aucun cas de comprendre les finances publiques.

Contradiction : j'ai un euro à dépenser, je dépense un euro

Quand bien même on accepterait l'analogie Etat-particulier, en quoi cela implique-t-il de ne dépenser un euro "que quand on a un euro à dépenser"? Moi, par exemple, aujourd'hui, j'ai dépensé un euro que je n'avais pas à l'aide d'un instrument fort pratique qui s'appelle une "carte de crédit". Et des tas de gens font pareil, tous les jours. Les gens s'endettent pour acheter des séjours en vacances, des voitures, de l'électro-ménager, des logements. Ils dépensent des euros qu'ils n'ont pas, parfois en quantités très importantes : il n'est pas rare de voir des ménages s'endetter à hauteur de 5 fois leur revenu annuel (ce qui les conduit à être plus endettés que l'essentiel des gouvernements, à l'exception du Japon et de la Grèce).

Quasiment personne ne dépense autant qu'il ne gagne. Certains dépensent plus et s'endettent, d'autres dépensent moins et épargnent. En moyenne d'ailleurs, les gens ont tendance non pas à dépenser un euro "quand ils ont un euro à dépenser", mais à épargner. Un gouvernement qui se comporterait "comme les français", donc, aurait des moments d'extrême endettement, mais dans l'ensemble, dépenserait moins qu'il ne gagne. En langage clair, cela signifierait prélever plus d'impôts que l'on ne reverse sous forme de dépenses publiques. Outre que cela serait parfaitement intenable politiquement, je doute que l'on trouve une seule personne pour recommander aux gouvernements, sur le long terme, de prélever plus d'impôts qu'ils ne dépensent. Non seulement l'analogie Etat-ménage n'a aucun sens, mais elle est utilisée par la ministre de manière totalement illogique.

Mauvaise foi et opportunisme : Cette analogie vaseuse ne sert en fait qu'à justifier la proposition d'adoption d'une bien mal nommée "règle d'or" (ça fait sérieux...) qui vise à inscrire dans la constitution l'obligation d'une limite des déficits publics, permettant au conseil constitutionnel de censurer un budget voté par le parlement et présentant des dépenses en excédent, non financées par des recettes équivalentes. Cette idée me semble nuisible et inefficace. Nuisible parce qu'elle supprime une flexibilité qui peut devenir nécessaire, par exemple en période de récession où un déficit important et temporaire peut être utile. Inefficace parce que le constitutionnalisme budgétaire, on a déjà donné avec le traité de Maastricht, et que cela a surtout conduit les gouvernements à tricher avec les règles, où à adopter des politiques contre-productives. La sincérité des comptes publics, déjà bien malmenée, risque d'être la première victime de l'adoption de ce genre de règle, pour des bénéfices particulièrement douteux. Ne parlons même pas des USA, et du délire auquel aboutit la règle du plafonnement de la dette. Mais je reconnais bien volontiers qu'il y a là matière à discussion raisonnable.

Sauf qu'une discussion raisonnable devrait commencer par reconnaître les faits. Et il y a une invraisemblable hypocrisie dans ce gouvernement qui se découvre une vertu budgétaire, censée ne s'appliquer qu'après une élection pas gagnée d'avance. Le graphique illustrant cet article rappelle que le point bas de dépenses publiques sur PIB au cours des 15 dernières années était 1998-2001, et leur hausse spectaculaire commencée dès 2007, avant la crise. Que c'est en 2005 que le ratio de dépenses publique français a dépassé celui de la très socialiste Suède (qui donc était ministre des finances en 2004?). Ce graphique rappelle que les déficits publics les plus importants ont été constatés en 94-95 (qui donc était ministre du budget, déjà?) puis de 2008 à 2011. Le budget 2008 et le "paquet fiscal" creusaient déjà le déficit public, avant même la crise économique.

Ce n'est ni nouveau, ni surprenant : pour l'essentiel, dans les pays développés (France y compris), les déficits publics tendent à être moins élevés sous les gouvernements socio-démocrates que sous les conservateurs. Il n'y a pas de raison de conclure a priori que les socio-démocrates sont meilleurs gestionnaires publics que les conservateurs : les déficits sont lourdement déterminés par la conjoncture, tout comme les élections. Il est tout à fait possible que cela crée des cycles coordonnés dans lesquels les conservateurs sont élus en période de faible croissance (et donc de forts déficits) et les socio-démocrates en période de forte croissance.

Mais il y a une autre explication possible, que rappelaient Thesmar et Landier dans cet article de 2007 qui semble aujourd'hui, étonnamment prophétique. Le paquet fiscal et le budget mis en oeuvre à partir de 2007, dans cette perspective, relevait d'un calcul rationnel visant à lier les mains des successeurs en leur laissant des finances publiques lourdement plombées par l'endettement. Cet article rappelle opportunément que la réduction des déficits n'était pas du tout la priorité du candidat Sarkozy à l'élection présidentielle : il annonçait au contraire l'intention de réduire de 4 points le taux de prélèvements obligatoires en 5 ans, performance qu'aucun gouvernement (même M. Thatcher) n'avait atteinte.

Creuser les déficits, pour ensuite déplorer que "les caisses sont vides", puis vouloir limiter les capacités d'action des successeurs n'est pas faire preuve d'une quelconque vertu, mais d'un calcul cynique que l'on pouvait anticiper dès 2007. La "règle d'or", qui ne passera pas le congrès puisque l'actuelle majorité n'y détient pas les trois cinquièmes des votes, ne servira qu'un calcul électoral, en faisant passer l'opposition pour d'indécrottables dépensiers irresponsables. Mauvaise foi et opportunisme sont donc largement vérifiés. Cette campagne électorale promet.

JacquesL

Et voici la même Valérie Pécresse, ex-scinistre de la Mience, présentement binistre du mudget, qui poursuit sa carrière scientifique, toute de rigueur :
http://www.youtube.com/watch?feature=player_embedded&v=uXTFk6GHYb4

Citer"Le département a augmenté ses impôts de 30 %, la région elle c'est 58 %.
Pof ! 88 % d'augmentation d'impôts en cinq ans !
"

Pas mal aussi, ce récapitulatif :
http://www.youtube.com/watch?v=18t15VB4oh0