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La guerre des eaux du Nil ?

Démarré par JacquesL, 19 Mai 2010, 10:33:43 AM

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JacquesL

http://www.lefigaro.fr/international/2010/05/16/01003-20100516ARTFIG00169-l-egypte-menace-de-faire-la-guerre-pour-les-eaux-du-nil.php

Voir aussi :
http://www.lefigaro.fr/international/2009/09/08/01003-20090908ARTFIG00385-l-egypte-et-israel-menent-la-bataille-du-nil-.php



CiterL'Égypte et Israël mènent la bataille du Nil
Au Caire, Tangi Salaün
08/09/2009 |

L'entreprise de séduction des pays africains engagée par Tel-Aviv inquiète Le Caire, qui ne veut pas voir remis en cause le partage des eaux du fleuve.

La tournée africaine qu'effectue en ce moment Avigdor Lieberman ne passe pas inaperçue au Caire ; qui voit dans cette montée en puissance de l'État hébreu une «atteinte à la stabilité de l'Égypte», une «menace pour la sécurité nationale» ou encore un «développement dangereux». Le chef de la diplomatie israélienne sillonne notamment l'Éthiopie, le Kenya et l'Ouganda, trois pays du bassin du Nil. Pour l'Égypte, cette initiative - la première du genre depuis vingt-cinq ans - est une nouvelle escarmouche dans la guerre de l'eau qui couve au Proche-Orient, et dont l'une des batailles clés pourrait se jouer au cœur de l'Afrique.

Cette tournée intervient en effet alors que les pays riverains du Sud, Éthiopie et Kenya en tête, réclament un nouveau partage des eaux du Nil. Le traité actuel, élaboré en 1929 par la puissance coloniale britannique, puis amendé trente ans plus tard, attribue des quotas très favorables à l'Égypte (55 milliards de m3) et au Soudan (18 mds), soit près de 90 % du volume annuel du fleuve. Il octroie en outre au Caire un droit de veto sur tous les travaux susceptibles d'affecter le débit du fleuve. Entamées il y a dix ans, les négociations sont au point mort. Pour l'Égypte, c'est une question de survie : 95 % de ses ressources en eau proviennent du Nil. À l'inverse, fait-on valoir au Caire, les pays d'Afrique centrale bénéficient de pluies abondantes, dont une grande partie se perd dans les marécages inexploités. Avant de demander à l'Égypte de faire des efforts, ajoute-t-on, il faudrait commencer par rationaliser l'utilisation de l'eau. C'est donc l'impasse. Le mois dernier, les dix pays du bassin du Nil, réunis à Alexandrie, se sont encore donné six mois pour parvenir à un accord.

Côté égyptien, la paranoïa guette. «Israël n'hésitera pas à conseiller à l'Éthiopie de construire des barrages sur le Nil», vient de mettre en garde le ministre de l'Irrigation, Mohamed Nasr Allam, rappelant que 80 % de l'eau qui coule au Caire proviennent du Nil Bleu, dont la source est en Éthiopie. L'Égypte prend l'affaire très au sérieux : en 1978, le président el-Sadate avait même menacé de déclarer la guerre à Addis-Abeba s'il ne renonçait pas à un projet de barrage sur le lac Tana.

Lutte d'influence

Le Caire s'inquiète aussi d'une possible sécession du Sud-Soudan, où un référendum d'autodétermination est prévu en 2011. «Nous ne voulons pas laisser le champ libre aux forces étrangères qui encouragent l'indépendance du Sud-Soudan, comme les États-Unis et Israël», confie un officiel égyptien. L'an dernier, Hosni Moubarak, qui effectuait à Juba la première visite d'un chef d'État égyptien depuis 1962, a promis d'y développer les investissements égyptiens.

Entre l'Égypte et Israël, la lutte d'influence bat son plein. Pendant que Le Caire finance le creusement de puits au Kenya ou le nettoyage des lacs ougandais envahis par les jacinthes d'eau, Tel-Aviv participe à la construction de barrages en Éthiopie et vient de s'engager à financer trois autres ouvrages en Ouganda. Cette entreprise de séduction des pays africains dépasse de loin une simple rivalité diplomatique. Pour Israël, c'est l'accès aux eaux du Nil qui est en jeu. Un trésor que le canal al-Salam («la paix»), creusé par l'Égypte pour irriguer le Nord-Sinaï, amène déjà à sa porte.

L'idée n'est pas nouvelle, puisqu'elle avait déjà été envisagée par le théoricien du sionisme Théodore Hertzel. En 1974, un projet envisageant la restitution de Jérusalem-Est aux Palestiniens en échange du transfert annuel de 840 millions de m³ - suffisants pour couvrir les besoins en eau d'Israël à l'époque - s'est encore heurté à l'hostilité de l'Éthiopie et du Soudan et au veto du premier ministre israélien Menahem Begin. Cinq ans plus tard, Israël a retenté sa chance après la signature du traité de paix de Camp David. Mais l'Égypte s'y est opposée, arguant qu'une telle décision requiert l'accord de tous les pays riverains. Israël a retenu la leçon. Et prépare peut-être la prochaine offensive.

CiterL'Égypte menace de faire la guerre pour les eaux du Nil 

Pierre Prier
16/05/2010 |

Quatre pays africains, riverains du fleuve, ont décidé de revoir le partage de ses ressources hydrauliques.

L'Égypte le redoutait. C'est arrivé. Au bout de dix ans de négociations, quatre pays africains riverains du Nil ont conclu seuls un accord pour se partager les eaux du fleuve nourricier, sans lequel l'Égypte ne serait qu'un vaste désert. Réunis à Entebbe, en Ouganda, l'Éthiopie, le Rwanda, la Tanzanie et l'Ouganda, qui demandaient en vain à l'Égypte de participer aux négociations, ont signé vendredi un texte créant une commission chargée de gérer les projets d'irrigation, canaux ou barrages, sur la totalité des 6 700 km du Nil. Le Kenya devrait prochainement les rejoindre.

La commission, qui aura droit de veto sur toute infrastructure concernant le Nil, devrait être basée à Addis-Abeba, la capitale de l'Éthiopie, puissance régionale. Une injure supplémentaire pour Le Caire, qui a aussitôt rejeté l'accord, avec des intonations martiales. «Les droits historiques de notre pays restent une ligne rouge», a déclaré le ministre des Affaires étrangères, Ahmed Aboul Gheit. Le ministre de l'Eau, Mohammed Allam, assure que l'Égypte «se réserve le droit de prendre toutes les mesures», évoquant ainsi la perspec­tive d'une guerre de l'eau.

Pour Le Caire, il s'agit d'une question vitale. Les 80 millions d'Égyptiens reçoivent du Nil 90 % de leurs ressources en eau. Un rapport officiel prévoit néanmoins un déficit pour 2017. Le gouvernement égyptien s'appuie sur le droit international. Un texte de 1959 réserve la part du lion à l'Égypte, avec 55 milliards de mètres cubes, et au Soudan, le pays où se rejoignent le Nil Blanc et le Nil Bleu, avec 18,5 milliards de mètres cubes. À eux deux, l'Égypte et le Soudan, qui a lui aussi rejeté l'accord d'Entebbe, trustent 87 % de l'eau du Nil.

C'est cet arrangement que les quatre pays riverains veulent réformer. «L'eau du Nil appartient à tous les pays, pas à un petit nombre» , a déclaré le ministre des Ressources hydrologiques éthiopien. L'Éthiopie, 85 millions d'habitants, abrite la source du Nil Bleu (85 % du débit) dans le lac Tana, et l'Ouganda, 31 millions d'âmes, celle du Nil Blanc dans le lac Victoria. Ces deux pays cherchent à se développer. L'Éthiopie a décidé de devenir le principal exportateur d'électricité en Afrique de l'Est. L'Initiative du bassin du Nil (IBN), jusqu'ici compétente, gère 22 projets de canaux ou de barrages.

Les dirigeants égyptiens essaient de se rassurer en espérant que les États dissidents auront du mal à trouver des capitaux. C'est compter sans la Chine, qui finance déjà de nombreux chantiers et agira selon ses intérêts.

Facteur d'inquiétude supplémentaire pour Le Caire, l'accord con­troversé a été signé à huit mois du référendum de janvier 2011, qui risque d'entériner la sécession de la partie sud du Soudan, où transite le Nil Blanc. Or l'Éthiopie et l'Ouganda figurent parmi les alliés historiques de l'ancienne guérilla du Sud, futur gouvernement de l'éventuel nouvel État. Ce n'est pas une bonne nouvelle, entre autres, pour le chantier du canal de Jonglei, situé au Sud-Soudan et toujours en panne malgré la fin de la guerre civile Nord-Sud en 2005. L'Égypte compte beaucoup sur ce projet, qui devrait améliorer le débit du Nil Blanc.

Le Caire peut-il pour autant mettre ses menaces à exécution ? En réalité, on voit mal l'armée égyptienne se lancer dans des expéditions contre des pays lointains et disposant de forces aguerries. La guerre de l'eau n'aura sans doute pas lieu. «L'Égypte devra probablement négocier et perdre au passage une partie de son prestige et de son influence dans la région», estime Sophie Pommier, consultante spécialiste de l'Égypte.