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Les dieux ont été inventés au cours du Néolithique : politique et guerres...

Démarré par JacquesL, 25 Avril 2010, 11:41:13 AM

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JacquesL

Les dieux ont été inventés au cours du Néolithique, pour répondre aux besoins politiques inédits posés par la croissance démographique sans précédent.

On considère que l'efficacité des chasseurs paléolithiques a été améliorée par les inventions soit de l'arc, soit du propulseur à harpon, en sorte que la population humaine, jusqu'alors fort restreinte, a pu faire un bond, environ dix fois plus. Les populations de gibier n'étant pas indéfiniment extensibles, de proche en proche, cela a amené à inventer des corrals où rabattre le gibier, puis la domestication. Cette évolution a pris quelques vingt mille ans (très difficile d'être précis). La domestication du cheval fut avant tout pour la viande. Il a fallu attendre le chalcolithique, pour qu'apparaisse la domestication pour la traction des chars de guerre, attestée dans les sépultures des chefs Kourganes.

Entre temps, cette métallurgie fut l'élaboration de peuples sédentaires et qui ont mis au moins cinq mille ans à inventer l'agriculture. Nouveau bond démographique, au moins dix fois plus. Les anciennes structures chamaniques n'étaient plus adaptées à ce nouvel âge, qui inventait aussi la guerre. Ce sont donc des inventions corrélées et entremêlées : agriculture, politique, dieux, céramique, métallurgie.
Puis sont apparues de nouvelles civilisations, des empires : les empires hydrauliques, où un pouvoir central très fort réglait tout, à commencer par l'irrigation, en passant par le stockage et la distribution des grains, en continuant par les rites et croyances religieux, et par l'armée royale et l'impôt.
En Egypte, l'empire hydraulique a aussi élaboré un art chimique inédit (poisons, médicaments, fards, liants hydrauliques, colorants, émaux, fondants et frittes, plâtre), et lui a même donné son nom : la khimie vient du pays de Kham... Et c'était encore l'âge chalcolithique, pierre et cuivre.

Dans ces empires, l'imbrication des religions et croyances avec le pouvoir politique, avec la technologie et avec la guerre, était totale. Il n'y avait presque plus d'individus, mais des sujets du roi et des fonctionnaires fonctionnant. Il n'y a pas eu non plus de libre pensée dans ces systèmes totalitaires.
Une pensée libre n'a pu apparaître fugitivement que dans quelques lieux privilégiés, et il est rare qu'elle ait pu laisser des traces qui nous soient parvenues. L'Athènes classique est l'exception culturelle et politique dont nous héritons en premier. Quelques penseurs libres à Rome dans la République triomphante et sous l'Empire. Dans les deux cas, c'étaient des sociétés esclavagistes.

A l'apogée des empires, quand les impôts pouvaient financer des savants et des intellectuels, il y a eu quelques penseurs libres, probablement en Inde, et bien sûr à Sarmacande, au Caire, et en Andalousie arabe.
Et en Occident ? Presque rien avant la Renaissance, sinon des clandestins qui n'ont guère laissé de traces (L'exception reste la musique des gauliards, dont une partie nous est parvenue). Il y aura fallu quelques défaites retentissantes du clergé, notamment la découverte du Nouveau Monde par Cristobal Colon, prouvant que les livres de géographie étaient faux. Et si d'autres livres étaient faux ? Cette fois, malgré tous ses moyens répressifs et terroristes, le clergé ne pouvait plus tenir les intellectuels : ils accédaient aux auteurs et textes grecs, ils accédaient à l'imprimerie, un prince allemand désireux d'échapper au rackett papal soutenait Martin Luther, et en plus les princes avaient besoin de savants et d'ingénieurs pour perfectionner leurs fortifications, leurs canons, leurs navires, et les instruments de navigation...

La lutte a encore été longue et sanglante pour que nos ancêtres conquièrent la liberté de penser dont nous héritons à présent. Il y aura fallu quelques révolutions, notamment...

Ah oui, comme la liberté de la presse, la liberté de penser ne s'use que si l'on ne s'en sert pas...

JacquesL

Les prochaines sources qu'il nous faudra explorer pour la suite, pour mettre au clair cette longue dialectique entre individu et discipline de guerre :
L'art de la guerre. Sun Tzu, 4e siècle A.C.
Les innovations miliaires et politiques de Muhammad.
Son apologie par Abdelghani Megherbi, idéologue islamique chéri du pouvoir militaire algérien (en 1978).
La fin de l'Exode, et Les Rois, histoire des génocides chantés par les juifs.

Les difficultés majeures de l'URSS à suivre la révolution de la micro-informatique, si décentralisante, si troublante pour elle...

Et bien sûr, le théorème de la variété nécessaire, d'Ashby.

JacquesL

Citation de: peter_pan
Citation de: JacquesLes difficultés majeures de l'URSS à suivre la révolution de la micro-informatique, si décentralisante, si troublante pour elle...

Intéressant. Pourriez-vous développez votre raisonnement sur ce point, si vous voulez?

Tu as pointé pile poil le point où ma documentation est la plus faible. A part le "Bâtisseurs d'empires par accident", de Kringely, toute ma documentation d'époque a disparu.
De mémoire, c'était ce que je lisais dans les périodiques de l'époque septante-octante, l'époque du bouillonnement micro-informatique.
La micro-informatique a été inventée par des amateurs qui cherchaient à s'épater les uns les autres.
Ce contexte est typiquement américain.
Non que les russes soient moins inventifs, mais il fallait aussi que de larges pans de l'économie et de l'industrie soient individualistes et opportunistes.
Puis il aurait fallu que l'information circule, par pleins "bulletin boards".
Or c'était un empire qui consacrait plus de cent agents du KGB (se prononce KaGuéBé) à surveiller, et brimer Andreï Sakharov et Elena Bonner, à voler les manuscrits de Sakharov...

La jeune génération ne soupçonne pas le boxon qu'a été l'époque CP/M / Apple II /TRS 1... Un lecteur de disquettes double face coûtait 7800 F...
Un prof d'anglais du Mans, François Bayard, a fait paraître dans l'Ordividuel (j'abrège le titre réel) trois pages de "Mots secrets de la micro" dont voici des extraits, de mémoire :
RS 232 : norme comportant 232 variantes. Le jeu consiste à deviner laquelle est utilisée à gauche et laquelle à droite.
Câble d'imprimante : Les anciens du village racontent que selon une très vieille légende, celui qui réussira à bancher l'extrémité de gauche sur l'ordinateur, et l'extrémité de droite sur l'imprimante, celui-là sera le maître du Monde.

...

Cela ne ressemble plus en rien au monde dans lequel vous vivez à présent. Il s'est drastiquement industrialisé.
En prospectant le marché et les éditeurs de logiciels, les fondateurs de Compaq ont vite dû comprendre qu'un nouveau standard, au moins pour les logiciels, était en train de naître : l'IBM PC.
En y adhérant, ils en ont fait un standard de fait.
La suite est due à la montée en puissance de l'industrie Taïwanaise, qui a chûté les prix pour faire du compatIBMle un marché de masse. Mon premier comptatIBMle n'avait encore que des disquettes. Mon premier disque dur, un 20 Mo, coûtait plus de 2500 F. L'amateur pouvait encore souder ou dessouder des composants, des mémoires sur la carte-mère.
Maintenant pour un petit problème de rien du tout, on doit changer toute la carte-mère, qui en fait des milliers de fois davantage.

A l'époque bouillonnante, notre Thomson National a multiplié les erreurs stratégiques majeures (MO5, TO7), aidé en cela par les gouvernements français de l'époque, assez interventionnistes. Et en URSS, les µ-ordis disponibles étaient aussi mauvais, pour un prix prohibitif. Mais je n'ai plus la moindre doc à ce sujet.

Une revanche de l'Individualisme derrière le Rideau de Fer contre le système étatique d'oppression, on la devrait à des programmeurs bulgares, dont les talents étaient au chômage technique : ils auraient inventé la seconde génération de virus qui ont été dangereux à travers le monde. J'ignore si cette rumeur a été confirmée.

JacquesL

" Le monde musulman de la naissance a la renaissance ", d'Abdelghani Megherbi.
Je l'avais acheté à Alger, en 1978.
Je ne le citerai que de mémoire.
Megherbi exhortait à ce que les pays musulmans reprennent leur domination sur le monde, comme au Moyen-âge.
Son argument principal était la supériorité à la guerre : les guerriers musulmans prennent plus de risques, et meurent volontiers au combat.
Il dit cela : "La supériorité de l'idée".

Pacifiste total, Georges Brassens avait répondu d'avance :
Mourir pour des idées. L'idée est excellente !
Moi j'ai bien cru mourir de ne l'avoir pas eue.


Durant ces mêmes deux voyages à Alger, j'avais aussi acheté quelques exemplaires de la presse locale en langue française, tel que El Moudjahid.
Et là, même phénomène que dans "Le Temps de Paris" : si les éditoriaux et les grands articles sont plutôt bien tenus, propres, c'est à la critique cinématographique qu'il faut lire la ligne éditoriale réelle du journal, celle de la guerre sous idéologie de guerre de religion. Guerre civile pour Le Temps de Paris (Nous les Chouans contre eux les incroyants !), guerre de conquête extérieure pour El Moudjahid, dénigrant "l'Occident décadent aux moeurs dépravées"...

Autres sources à consulter :
L'art de la guerre, tome 1, du général Emile Wanty, éditions Marabout.
Mahomet. par maxime Rodinson.

"Abtar", c'est à dire n'engendrant pas de garçons, soit presque un impuissant dans la culture arabe de l'époque, et marié à une femme vieille, Khadidja, Muhammad, caravanier d'origine modeste, n'en avait pas assez pour son ambition. Il fait alors comme les autres prophètes de sa région, il va jeûner quarante jours dans le désert jusqu'à avoir des visions. Il se désigne alors par sa Voix : "Tu es l'envoyé d'Allah". Celui-ci n'était encore qu'un dieu parmi les autres dans la Mecque. Muhammad va en faire la promotion, pour en faire le dieu unique, nettement plus pratique pour les projets politiques et militaires de Muhammad. Les arabes du désert étaient des guerriers nés, endurants, sachant se dissimuler... mais individualistes. Muhammad les optimise alors pour les guerres modernes de ce temps là, en les disciplinant totalement, il organise leur soumission aux ordres d'Allah, et donc de son prophète. Soumission, en arabe cela se dit "islam", et "soumis", cela se dit "muslim".

Alors que la plupart des autres religions ont leurs origines dans le lointain du néolithique, et leur histoire est impossible à retracer précisément, l'islam offre un cas chimiquement pur, d'un système politico-religieux entièrement optimisé, dès le début, pour la guerre de conquête.

En 627, la bataille du fossé illustre bien la distance culturelle qui séparait alors les arabes, des techniques militaires ailleurs courantes. Les mecquois étaient excédés de voir leurs caravanes attaquées et pillées par cet honnête brigand de grand désert, qu'était devenu Muhammad, et ses guerriers auxquels le paradis était promis. Ils lancèrent une expédition sur Yathrib (Médine actuellement). Muhammad en fut averti à temps, et sur les conseils du persan salmān al-fārisīy, fit creuser un fossé autour du camp des soumis. Cela suffit à désorienter les assaillants, qui ne pouvaient plus lancer leurs charges de cavalerie. Le siège dura plus d'un mois, sans aucune action militaire sérieuse. Les mecquois traitèrent Muhammad de lâche... Mais leur expédition demeura vaine.

Cette transition de la guerre comme moyen de briller par son courage et sa force, pour se qualifier sur le plan de la compétition sexuelle, à la guerre par armées disciplinées, était achevée en Chine au 4e siècle AC, au temps des Royaumes Combattants. Sun Tzu fit décapiter le cavalier qui était allé seul faire une démonstration victorieuse dans les rangs ennemis : "Il est brave, mais indiscipliné".

Dans les grands empires hydrauliques d'Egypte et de Mésopotamie, la transition était accomplie encore plus tôt. En Grèce et en Macédoine également. Voir la formation de la phalange macédonienne. Voir aussi la précision nécessaire aux rameurs d'une trière.

Chez les amérindiens des plaines d'Amérique du Nord, cette transition n'était pas du tout commencée, quand ils eurent à faire face à l'invasion par les blancs. Leur société était certes fondée sur la guerre, et les prises de butin comme qualification à la maturité sexuelle, mais cela ne fit pas le poids devant les technologies et les techniques de guerre des blancs.

Le summum du disciplinage de soldats et de mépris de chaque vie humaine, fut atteint durant la guerre de Corée : les chinois lançaient les attaques nocturnes sur les postes américains par vagues humaines. Leurs rangs d'assaillants se faisaient massacrer par les mitrailleuses, jusqu'à ce que les défenseurs aient épuisé leurs munitions, ou que les armes surchauffées s'enrayent. De nombreux soldats étaient ainsi lancés sans armes. A charge pour eux de récupérer les fusils des morts.

Pouvons-nous leurs donner des leçons d"humanisme ? Durant la guerre de 14-18, le commandement programmait ainsi : "Nous allons lancer une petite offensive là. Nous perdrons mille hommes de part et d'autre, et tout le monde sera content."

Le point clé, est que depuis la naissance et les perfectionnements de la guerre au cours du Néolithique, la guerre est le premier facteur de sélection entre les sociétés et civilisations. Les civilisations demeurées individuelles et chamaniques, tels les Nénetz de Sibérie, les Sami dans le Nord de l'Europe, ne purent faire face aux civilisations guerrières, et furent refoulées vers les terres les plus ingrates quant aux survivantes, et nous ignorerons tout de celles qui furent exterminées.

Le commerce inégal, l'esclavagisme et les épidémies firent le reste.

JacquesL

Ebauche de la suite :

Au sommet d'une société inégalitaire et militairement redoutable, les classes dirigeantes ont adapté leurs idéologies propres à la perpétuation de leur domination et de leur parasitisme. La haute bourgeoisie française dresse ses enfants à pratiquer la violence discrète et le cynisme, pour être toujours dominants en toutes circonstances. Le catholicisme ne marche plus ? Bôf, ils savent trouver d'autres moyens pour tenir les masses dans l'impuissance et l'incapacité à exister politiquement.

JacquesL

Michel Foucault et Annie Kriegel ont détaillé (1) comment ne pouvant plus comme aux 17e et 18e siècle compter sur les curés pour disqualifier les pauvres diables accablés sous les injustices (2), le ministre de la justice de Louis Philippe a négocié avec les aliénistes débutants comment produire des discours pédants qui fassent illusion dans le nouveau contexte. Maintenir l'illusion, changer d'illusion et de mythe, telle était leur mission, avec la corruption qui allait avec.

De nos jours, les princes qui nous gouvernent ont toujours besoin d'illusions et de mythes pour camoufler leurs fautes, leurs incompétences, et leur corruption par les puissances d'argent, et obtenir notre soumission aveugle. Un truc qui marche assez fort ces temps-ci, est le slogan "Sauvons la planète !", et le mythe du RCA, ou "Réchauffement Climatique Anthropique".

Vous en connaissez d'autres, des mensonges bien assez bons pour le peuple.






(1) Michel Foucault, Annie Kriegel : "Moi Pierre Rivière...". Flammarion.

(2) Denis Diderot. Les deux amis de Bourbonne.
http://www.bmlisieux.com/archives/didero01.htm