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Résistance aux insecticides, et génôme

Démarré par JacquesL, 15 Février 2007, 01:36:47 PM

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JacquesL

Vu la qualité de ce débat biologique, je le reproduis ici, avec l'accord des participants.
Posté le 10/10/2006 14:14:07

Evolution des moustiques au paludisme
Question par Gallad, fr.sci.paleontologie, 28/09/2006 13:18
CiterLa lutte contre le paludisme consiste aujourd'hui à lutter contre les moustiques qui en sont les vecteurs. Or ces derniers deviennent rapidement résistant à un insecticide donné. Dans certaines régions, on a du ainsi passer du DDT au Malathion, du Malathion au Fenitrothion, etc.

Question: les nouvelles souches résistantes au Fenitrothion ont-elles également conservé leur aptitude à résister au DDT  ?  Ou bien existe-t'il une "place limitée" sur l'ADN, qui ne permettrait de résister qu'à un nombre limité  d'insecticides ?


______________

(Pour mémoire:)

"Studies in Sri Lanka over the 1990s on An. culicifacies* and a range of potential secondary vectors such as An. subpictus* and An. vagus* have shown high level of resistance to either organochlorines, organophosphates or to both groups of insecticides [4,26-28].

DDT and Malathion are no longer recommended since An. culicifacies* and An. subpictus* has been found resistant.

Currently, synthetic pyrethroids such as Cyfluthrin, Deltamethrin, Etofenprox, and Lambda-cyhalothrin are being used in the country.

At present, Fenitrothion is the only organophosphate used for vector control."

http://www.malariajournal.com/content/4/1/8

(* variétés de moustiques)

--
Gallad

Réponse de Gilles Escarguel :
Citer>> Question: les nouvelles souches résistantes au Fenitrothion ont-elles également
>> conservé leur aptitude à résister au DTT  ?  Ou bien existe-t'il une "place
>> limitée" sur l'ADN, qui ne permettrait de résister qu'à un nombre limité
>> d'insecticides ?


Bonjour,

Pour le cas précis de l'exemple cité (résistance simultanée au
Fenitrothion et au DDT), je ne sais pas répondre à cette question
simplement, par OUI ou par NON. De fait, je vais prendre le problème
d'un peu plus loin, car il y a derrière cette question très technique
(ce qui n'a rien de péjoratif) une fabuleuse question d'Evolution.

Il existe forcément une place limitée sur l'ADN, vu que l'ADN est elle
même une molécule de taille finie. Elle ne peut donc pas porter une
information infinie...

Ceci dit, tout porte à penser que dans la plupart des espèces, seule une
(toute) petite partie de l'ADN porte de l'information, cad, est codante.
Ainsi, chez les mammifères (que je connais mieux que les moustiques), en
moyenne, 98% de l'ADN est non-codant, cad ne correspond pas à des
séquences de codage de protéine. C'est très certainement exactement la
même chose chez les insectes, car on retrouve en fait cette
caractéristique dans tout le monde vivant. On ignore encore tout (ou
presque) de l'utilité fonctionnelle de ces 98% -- si ils sont là, et si
ils sont ultra-majoritaires dans toutes les espèces, c'est surement
qu'ils servent à "quelque chôse"... Mais quoi ?

Le plus intriguant est que lorsqu'on enlève artificiellement (par génie
génétique) de grandes portions d'ADN non-codant, les individus mutants
qui en résultent sont dans la quasi-totalité des cas tout à fait
"normaux" et parfaitement viables... Entre autre, ces délétions massives
n'ont que très peu, ou pas d'incidence sur le fonctionnement des gènes
situés à leur périphérie. Ainsi par exemple, en 2004, des généticiens de
Berkeley ont publié dans Nature des exemples de souris sur lesquelles on
avait enlevé 2 gros segments d'ADN non-codant, un de 1,5 millions de
paire de bases, l'autre de 0,8 millions de paire de bases, et ces souris
vivaient parfaitement normalement. Et ces deux segments (qui ne servent
donc manifestement à rien...) existent quasiment à l'identique chez
l'Homme, ce qui indique qu'ils ont été hérité d'un ancêtre commun à
l'Homme et à la souris, ancêtre commun qui a existé, selon les données
paléontologiques et moléculaires, il y a 70 à 90 millions d'années. Pour
que des séquences aussi longues restent inchangées (ou presque) durant
autant de temps, c'est qu'il y a une énorme pression de sélection sur
elles, et *donc* qu'elles servent à quelques chôse... Mais quoi ?

2 grands types d'hypothèses ont été avancés, d'ailleurs pas
incompatibles. 1) Ces séquences non-codante ont une fonction
stabilisatrice des séquences codantes. C'est, pour de simples raisons
thermodynamiques et statistiques, certainement vrai. 2) Ces séquences
sont des "réservoirs à futurs gènes". L'examen attentif du code de
certaines (mais pas toutes) de ces séquences non-codantes suggère en
effet que ce sont des "poubelles à gènes" : on y trouve de nombreux
fragments non-fonctionnels de gènes, ou bien des gènes quasi-complet,
mais non-fonctionnels car leurs amorces et/ou extrémités sont dégradées.
Et l'ADN fonctionnerait alors comme un système en auto-recyclage
permanent, où des gènes qui ont un jour fonctionné sont "stockés" dans
d'immenses séquences non-codantes, en attendant, peut être, un jour, de
resservir, y compris à tout autre chose que ce à quoi ils servaient avant.

Tout ça pour dire quoi ??? Tout ça pour dire que si l'ADN est
effectivement limité en taille, ce qui est utilisé par un individu tout
au long de sa vie est une toute petite partie de cet ADN. De fait, rien
***de ce point de vue*** n'interdit que les nouvelles souches
résistantes au Fenitrothion aient également conservé leur aptitude à
résister au DDT -- de la place, il y en a !!! En fait, la seule chose
qui l'interdirait serait que l'activation du ou des gènes de résistance
au Fenitrothion (cad, la traduction, et donc la présence dans les
cellules, de la ou des protéines causant cette résistance) implique de
facto une sensibilité au DDT (ou inversement). Par exemple parceque ce
sont 2 allèles différents du même gène, présent en une seule copie dans
le génome, qui code pour la résistance au Fenitrothion (allèle A) et au
DDT (allèle B). Et donc si un individu est résistant à l'un il ne peut
l'être à l'autre. Mais de fait, l'incompatibilité n'est pas génétique
mais fonctionnelle, protéinique. Vu les restrictions préalables, celà
semble extrêmement peu probable.

A+

Gilles.

Réponse de Gallad (29/09/2006 10:10) :

CiterMerci pour cette réponse détaillée.
L'ADN non codant a au moins une utilité: caractériser l'individu de façon presque unique. Les fichiers d'empreintes génétiques qui commencent à fleurir ici et là recueillent uniquement des séquences ADN non codant, à l'exception de celle qui caractérise le sexe. (c'est expliqué ici:
( http://www.lexinter.net/PROCPEN/fichier_national_automatise_des_empreintes_genetiques.htm )
Donc si l'ADN non codant n'a aucune utilité sur le plan fonctionnel, il sert au moins à enregistrer l'historique de l'individu, sa généalogie.


Pour en revenir au sujet initial et à la lumière de votre explication: l'ADN non codant pourrait être une sorte d'immense magasin dans lequel le "fonctionnel", viendrait puiser des allèles utiles.

En clair, si une population de moustiques est résistante au DDT mais pas au Fenitrothion, 99,99% des individus meurent lorsqu'on les expose au Fenitrothion. Mais quelques individus ont hérité auparavant d'une mutation les rendant résistant au DDT et non pas au Fenitrothion, par un échange "au magasin".

Ce que je veux dire, c'est que quelle que soit la taille du magasin ADN non codant, la place sur l'ADN fonctionnel est, elle, toujours limitée: elle ne pourra donc permettre que quelques résistances à la fois : au DDT OU au Fenitrothion, pas aux 2 à la fois (pour simplifier, en ramenant la situation à 2 insecticides possibles).
Plausible ?

--
Gallad


Et Gilles Escarguel :

Citer>> L'ADN non codant a au moins une utilité: caractériser l'individu de façon
>> presque unique. Les fichiers d'empreintes génétiques qui commencent à fleurir
>> ici et là recueuillent uniquement des séquences ADN non codant, à l'exception
>> de celle qui caractérise le sexe. (c'est expliqué ici:
>> (
>> http://www.lexinter.net/PROCPEN/fichier_national_automatise_des_empreintes_genetiques.htm
>> )
>> Donc si l'ADN non codant n'a aucune utilité sur le plan fonctionnel, il sert au
>> moins à enregistrer l'historique de l'individu, sa généalogie.


En effet. Mais il s'agit bien sûr d'une utilisation post hoc qui
n'explique en rien l'existence de cet ADN non-codant !!! (oui, oui,
j'enfonce une porte ouverte, je sais...).


>>
>> Pour en revenir au sujet initial et à la lumière de votre explication: l'ADN
>> non codant pourrait être une sorte d'immense magasin dans lequel le
>> "fonctionnel", viendrait puiser des allèles utiles.
>>
>> En clair, si une population de moustiques est résistante au DDT mais pas au
>> Fenitrothion, 99,99% des individus meurent lorsqu'on les expose au
>> Fenitrothion. Mais quelques individus ont hérité auparavant d'une mutation les
>> rendant résistant au DDT et non pas au Fenitrothion, par un échange "au
>> magasin".


Non. Il ne s'agit pas nécessairement et obligatoirement d'un échange
"donnant-donnant". Il n'y a aucune nécessité a priori pour que
l'acquisition, par mutation, de la résistance au DDT implique de fait la
perte de la résistance au Fenitrothion. Cela est possible (v. ma réponse
précédente) mais en aucun cas obligatoire.


>>
>> Ce que je veux dire, c'est que quelque soit la taille du magasin ADN non
>> codant, la place sur l'ADN fonctionnel est, elle, toujours limitée:


Certe. Mais elle représente quand même qq dizaines à centaines de
milliers de gènes (ne pas oublier qu'un même fragment d'ADN codant peut
coder pour plusieurs gènes différents...)


>> elle ne
>> pourra donc permettre que quelques résistances à la fois :


Oui, mais ce "quelques" peut très bien se compter en dizaines,
centaines, sinon milliers ! Rien ici ne permet de prédire quoi que ce
soit dans ce domaine.

au DDT OU au

>> Fenitrothion, pas aux 2 à la fois (pour simplifier, en ramenant la situation à
>> 2 insecticides possibles).
>> Plausible ?


De fait, pas vraiment...

A+

Gilles.

JacquesL

#1
Aedes albopictus, principal vecteur du chikungunya

  Posté le 11/03/2006 08:19:31   

http://www.gwadaweb.com/article30.html : article en Guadeloupe.

Aussi un lien suivant trouvé sur un site
de l'OMS :

- Entomologie du paludisme et contrôle des vecteurs -
http://www.who.int/malaria/docs/evc_lg2003_fr.pdf


Autres données par Thierry M (thry.martin.PASDEPUB@wanadoo.fr)

Aedes Albopictus

quelques données entomo

l'Albopictus, vecteur du Chik, mais aussi de la Dengue, est présent un peu partout dans le monde, dont évidemment les Mascareignes, mais le nord de l'Italie et le sud de la France.

La diapause est le phénomene qui rend un oeuf résistant (au froid, comme a la secheresse). c'est grace (ou a cause) d'elle que même sans moustiques l'hiver, les oeufs sont préservés pour éclore au printemps (dans les régions tempérées)

elle dure de quelques mois:
que ce soit en métropole: les conditions arrivent toujours au printemps, en Avril Mai, ou a la Réunion: des qu'il pleut.
mais peut aller de 3 à 5 ans.
Le moustique ne pond pas forcement dans l'eau. la femelle sait fort bien repérer des corps creux, a l'ombre, susceptible de se remplir d'eau a la moindre averse.
L'activité, in vitro, de l'Albopictus est très fortement influencé par la température : plus il fait chaud, plus les cycles se raccourcissent: plus ça pique (on s'en doutait déjà)
Sur l'infection au Chik :
l'Aedes vit jusqu'a 10 semaines, moins les 2 de développement du virus, cela en fait 8 soit jusqu'a deux mois pour être contaminant (si elle a été infectée des sa naissance)

ref:
sur la diapause
ici.cegep-ste-foy.qc.ca/profs/ gbourbonnais/entomo/moustique.ppt
sur les températures
www.medvet.umontreal.ca/etudes/EnseignementLigne/ ptm4411/travaux_etudiants/Rechauffement_global_ptm_4411.pdf
et pour les supports sec :
www.sfmu.org/documents/consensus/cclin_ectop.pdf

Il me semble que la connaissance parfaite et exacte du moustique et de son comportement est extremement important ! par exemple, savoir qu'il peut être contaminant jusqu'a deux mois, pourrait peut être faire réfléchir ceux qui sont opposés a une démoustication des adultes !

--
Thierry
http://ardf.free.fr/